In memoriam Luzius Wasescha

Luzius Wasescha nous a quittés. Ce fut l’un de nos meilleurs diplomates. Ce fut un homme de conviction.

Luzius Wasescha nous a quittés. Ce fut un ardent défenseur de l’Europe. Ce fut un homme profondément humain.

Luzius Wasescha nous a quittés. Ce fut un polyglotte hors pair. Ce fut un homme simple au service des causes les plus nobles.

Rédiger une nécrologie relève d’un art que l’on maîtrise ou pas. Alors reviennent en mémoire les mots de Georges Brassens pour qui « les morts sont tous des braves types ». Sauf que Luzius Wasescha n’était pas qu’ «un brave type ». C’était bien plus. C’était un homme pour les braves, pour celles et ceux chez qui le mot justice ne se conjugue pas seulement au futur, et pire encore, au conditionnel. Son sens de la justice était toujours présent en lui, car il ne pouvait pas s’en passer.

Ancien Ambassadeur de Suisse à l’OMC, apprécié comme nul autre par les diplomates autochtones et étrangers, il avait pour qualité première de ne pas être diplomate. Il disait les choses comme il les ressentait, comme il les pensait, « n’en déplaise », d’ailleurs, toujours pour citer Georges Brassens, « aux jeteurs de sort ». Et quitte à se faire traiter de « con », il se fichait bel et bien de la connerie des autres, tant sa sincérité d’aider celui qui avait en avait besoin ne relevait ni de la compassion, ni de la charité.

Luzius Wasescha aura fait honneur à la Suisse. Non pas à cette Suisse recluse sur elle-même, à ce modèle réduit d’une autosatisfaction intra-helvétique qu’il répudiait. Il faisait partie de ces hommes qui par leur intelligence rassemblent autour d’eux les gens de bel esprit. Et d’intelligence, Luzius n’en manquait pas. Il en avait à revendre et la revendait gracieusement à tous ceux qui désiraient en avoir, ne serait-ce qu’un petit bout, voire beaucoup plus.

Et même si, toujours Georges Brassens oblige, « … les brav's gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu'eux », Luzius Wasescha « ne faisait pourtant de tort à personne, en suivant les ch'mins qui n'mènent pas à Rome ». Ses routes se croisaient entre Genève, Berne, Montreux ou autre part à travers l’Europe et le monde. Mais d’abord, à Savognin dont il était originaire, et où « au village…sans prétention, il N’avait VRAIMENT PAS mauvaise réputation ». Luzius Wasescha fut quelque part à la diplomatie suisse, ce que Georges Brassens fut à la chanson française. Un autodidacte, un gars pas comme les autres, un emmerdeur chéri, un type bien. C’était l’histoire d’un mec. Mais là, c’est du Coluche. Et comme pour Brassens, on aimait bien Coluche. Comme on aimait Luzius Wasescha, parce qu’il vous aimait. C’n’est pas grand-chose, mais c’est énorme !

Gilbert Casasus

Gilbert Casasus est professeur émérite en Études européennes de l’Université de Fribourg. Politologue, diplômé de l’IEP de Lyon et docteur du Geschwister- Scholl-Institut de l’Université de Munich, il est spécialiste des processus historiques et politiques en Europe.