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Covid-19 : les Suisses moins bons que les Français et les Allemands

Ayant échappé à plusieurs des calamités du XXe siècle et, bénéficiant d’un secteur médical de référence, nous crûmes être préservés à jamais des malheurs qui sont le lot des autres peuples.

Havre de paix et de santé

Les graphiques inédits ci-dessous montrent de manière claire que notre havre de santé n’en est plus un, sauf à nous mobiliser collectivement de façon rapide et très rigoureuse pour limiter les dégâts. Le défi est assez excitant puisqu’il répond quelque part à un désir de communion populaire, au besoin de faire front ensemble contre un péril commun et d’y réussir. Mais d’après les discussions de comptoir de ces derniers quinze jours sur les comportements à adopter, le prise de conscience des efforts à concéder paraît bien lente.

A première vue, le graphique ci-dessous laisserait entendre que, jusqu’ici, en comparaison de nos voisins, la contagion est bien gérée.

Source des données primaires : European Centre for Disease Prevention and Control

La France a connu son premier cas de coronavirus le 25 janvier, l’Allemagne le 28 et l’Italie le 31 janvier. La Suisse n’identifie son premier cas que le 26 février, soit 33 jours après la France et 26 jours après l’Italie. Effet de perspective, la progression du covid-19 semble contenue en Autriche et en Suisse, mais il s’agit d’une illusion, ce que le graphique suivant montre clairement pour ce qui concerne la Suisse.

Source des données primaires : European Centre for Disease Prevention and Control

Le graphique ci-dessus montre que les dynamiques de diffusion du virus sont pratiquement les mêmes dans les quatre pays. Le graphique prend pour référence le jour où la Suisse et ses voisins immédiats ont dépassé les 800 cas enregistrés. Ce seuil a été dépassé à des dates différentes dans chaque pays. Autrement dit, le graphique illustre l’évolution du nombre de cas sur quatorze jours, jusqu’au dépassement du seuil de 800 cas, en renonçant à synchroniser les données par date. Cette façon de présenter les données à l’avantage de montrer les dynamiques à l’œuvre. L’Autriche n’est pas représentée car elle n’a pas encore franchi ce seuil. La Suisse, la France, l’Allemagne et l’Italie ont un profil similaire en ceci que la croissance du nombre de cas y est exponentielle. Le profil un peu différent de la Suisse n’appelle pas de commentaire particulier.

La Suisse est mal placée

Au jour d’aujourd’hui, il n’est pas certain que la Suisse ferait mieux que l’Italie. Ce dernier pays a eu son premier cas vingt-six jours avant son voisin du nord. Le nombre de cas confirmés par l’Office fédéral de la santé est de 1’009 personnes en Suisse (13 mars à midi). Ce chiffre atteindra-t-il les quelques 15’000 cas de l’Italie d’ici vingt-six jours ? Persévérer dans la négligence des deux dernières semaines y mènera très probablement. Pour bien mesurer le besoin de sortir de nos certitudes d’habitant du « petit pays le plus sûr du monde », rappelons que, pour une population de 8,7 millions d’habitants, franchir les 2’200 cas reviendrait à faire moins bien que l’Italie ce jour. Pour l’heure, le 0.0099% de la population suisse touchée représente déjà une proportion plus élevée de ce qu’elle est en Allemagne (0.0028%), en France (0.0044%) et en Autriche (0.0040%). Ces comparaisons sont théoriques, mais suivre leur évolution pour se motiver à faire mieux devrait être profitable.

Les comparaisons ci-dessus ne visent pas à entretenir un esprit de concurrence et je ne les entends pas ainsi. Elles visent à stimuler une émulation, à piquer au vif le sentiment de fierté qui, bien accompagné, permet d’agir avec résolution contre la diffusion de la pandémie. La Suisse doit faire sa part et même un peu plus dans la lutte contre le covid-19.

Prenez soin de vous

La santé de la communauté et celle des individus vont de pair. Et en tant qu’individu, il est légitime de penser autrement qu’en terme d’appartenance à un groupe à risque. Un jugement statistique général peut toujours être démenti par les faits quand on en vient au particulier. La santé du groupe est le corollaire de l’état de santé de l’individu et réciproquement. Vu cette interdépendance, voici un précieux conseil dont je me fais volontiers l’écho : prenez soin de vous, de votre communauté politique et de ses membres.

Le respirateur naturel qui a fait ses preuves

Est-ce trop de faire preuve de rigueur et d’un certain enthousiasme pour un défi hors du commun dans les mois qui viennent ? La pandémie n’est-elle pas l’occasion de cultiver les vertus civiques qui nous lient au pays ? Ne constitue-t-elle pas une opportunité pour nous préparer ensuite à relever l’autre grand défi à l’agenda, vivre en harmonie avec la biosphère, cet organisme singulier qui remplit notamment la fonction de respirateur naturel pour chaque individu. Sauf lorsque celui-ci se trouve aux soins intensifs.

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