Polices du futur

En marge de mes interventions en milieux policiers, nombreuses sont les interrogations concernant l’avenir de la profession.

Plus précisément, l’avenir des 120 spécialisations (ou métiers) exercées au sein des 330 corporations de polices suisses (dont 80 principales environ) comme autant d’orientations et de mutations sous-jacentes.

(3 minutes de lecture – le féminin est compris)

Prévision météo des polices

Cinq orientations *

Police numérique

Composée de techniciens en navigation virtuelle, eux-mêmes accompagnés d’informaticiens et de spécialistes en Droit numérique, cette police est active sur les réseaux sociaux et le darknet.

Police environnementale

Garante de la protection des milieux naturels, de la faune et de la flore, cette police veille, selon les cantons, au respect du patrimoine et des aménagements territoriaux. Exemple : Police cantonale bernoise.

Police comportementale

Très active dans les pays anglo-saxons, s’émancipe à Zurich (Ville et canton) et en France avec de nouvelles prestations comme l’attention portée aux LGBT. Exemple français : l’association FLAG.

Police de résolution

Appelée police de proximité en Suisse latine ou communautaire dans les pays nordiques, tantôt valorisée, tantôt jugulée par certains gouvernements, cette orientation se restaure peu à peu en une police de maillage socioculturel et de prévention, notamment des radicalisations religieuses ou ultra-politisées.

Police investigatrice

Relais des polices judiciaires (ou de sûreté – les dénominations varient), cette police (en civil et non uniformée) est déjà multifonctionnelle et composée de diverses brigades (finances, mœurs, mineurs, scientifique & laborantine, etc.). Elle ouvre ses portes aux compétences extérieures et se prédestine à une forte pluridisciplinarité. C’est déjà le cas en Europe de l’Ouest et dans les pays scandinaves où experts-comptables, travailleurs sociaux et psychologues comportementalistes, entre autres, sont intégrés à part entière dans les effectifs. Ces spécialistes disposent de pouvoirs de police sans être ressortissants d’écoles ou d’académies policières classiques.

Une constance et cinq mutations *

Cette constance est singulièrement helvétique. Les cinq mutations sous-tendent et influencent les orientations précitées.

Constance fédéraliste

Le système fédéral est plutôt plébiscité dans les milieux policiers suisses que je fréquente. Sous le regard “policier-prati-quotidien” notre fédéralisme présente néanmoins quelques lourdeurs dans la coordination intercantonale et les subdivisions régionales ou municipales mais offre l’avantage d’une grande diversité linguistique et socioculturelle ainsi que d’une certaine marge de manoeuvre dans l’application des règlements communaux. Ce fédéralisme, tel que nous le pratiquons, renforce l’employabilité des agents brevetés et favorise des politiques managériales différentes, plus ou moins audacieuses, d’une région à l’autre, d’une direction politique à l’autre, d’un commandement exécutif à l’autre.

Ne pas oublier, ici, l’apport essentiel du Réseau national de sécurité qui réunit la Confédération et les cantons.

Mutations technologiques…

L’évolution est tellement rapide, les moyens financiers des groupes économiques tellement puissants que les polices ont peine à combler le retard du point de vue technologique, expertises et effectifs.

… prédictives…

C’est la nouvelle tendance nord-américaine qui se développe en tous sens.

Dans cette vaste mutation impliquant les nouvelles technologies, les limites provoquent de grands débats démocratiques comme tout récemment à San Francisco au sujet de la reconnaissance faciale.

Voir aussi Temps Présent RTS du 29 mars 2018.

… de force compensée…

L’arrivée des exosquelettes (photo) dans plusieurs unités d’interventions en Asie du Sud-Est ou aux USA représente sans doute la facette la plus spectaculaire. Mais l’usage des body-caméras et autres outils de reconnaissance ou de localisation confèrent également au pouvoir policier de nouvelles étendues pratiques. Les confusions sont nombreuses entre les outils dits d’extension et ceux dits de substitution (j’ai déjà abordé cette ambivalence dans de précédents blogs).

… de coopération (policière) internationale…

Les acquis de Schengen, l’accord et la convention offrent depuis quelques années des opportunités de collaboration étroite sur un vaste espace réunissant 26 États membres. Pour la Suisse, l’entrée en vigueur date du 1er mars 2008. 

… de transversalité et d’interchangeabilité.

Il s’agit, ici, pour cette cinquième mutation, de considérer toutes les polices dites “d’ordre thématique”. La police (fédérale) des transports, les polices pénitentiaires (les agents ou surveillants pénitentiaires ne sont pas considérés comme policiers à part entière et pourtant leurs prérogatives territoriales, coercitives et discrétionnaires sont pleinement policières), les techniciens de prévention et lutte contre les incendies ou inondations (services du feu / pompiers), les sanitaires urgentistes, ambulanciers secouristes (exemple : Ville de Berne) et autres interventionnistes “feux bleus” sont aujourd’hui inscrits dans des filières professionnelles supérieures dont les contours et les matières sont très proches du statut policier.

Par incidence, et on l’a vu plus haut dans l’orientation Police investigatrice, les complexités sociétales obligent les polices à coopérer avec des professionnels aux compétences de plus en plus éclatées. Est-il fini le temps où le policier cuisinait, réparait son véhicule en plus de remettre de main à main les courriers judiciaires au sein de sa commune ? En Ville de Fribourg, par exemple, c’est un policier local – un Sergent de Ville –, représentant les autorités, qui se déplace à domicile ou dans les homes pour prononcer un discours et remettre le cadeau officiel aux huitantenaires et autres citoyens jubilaires.

Autant d’orientations et de mutations qui influenceront mes prochains blogs.

* non exhaustives, sans ordre de priorité, telles que recensées chronologiquement aux côtés des cent vingts policiers, agents pénitentiaires, centralistes et urgentistes suisses romands et alémaniques avec lesquels je suis intervenu, au moins un jour entier, ces trois derniers mois de mars, avril et mai 2019. Ces orientations complètent les champs conventionnels des polices territoriales, mobiles et secours de Suisse. En France, d’autres polices conventionnelles ou “familles” sont à l’oeuvre.

Voir mon blog – police du XXIème siècle – du 6 janvier 2016

La police est une force de résolution

… et non d’opposition.

La police doit se voir comme une force de résolution – à notre service public – et non d’opposition.

La terminologie ne s’y trompe pas

La politia* nous vient des tréfonds de l’humanité et de son idée non négociable de vouloir et pouvoir vivre ensemble au cœur de la cité à une condition : que toute justice puisse franchir son temps de gestation.

Le temps de gestation

Les prémices de l’enquête jusqu’au procès équitable

Déléguer la protection de son bien-être à des tiers assermentés c’est croire à la distanciation nécessaire que réclame toute investigation, c’est plaider la séparation des pouvoirs et leur équité. Je ne saurais être juge et partie de toute affaire qui m’affecte au premier degré, encore moins si je suis victime d’un préjudice. Je charge donc les différentes entités de police d’enquêter, d’établir les faits et d’enregistrer les témoignages.

Cela correspond à une forme de gestation pouvant et devant donner naissance au procès le plus équitable possible.

Ce travail d’enquête – souvent long, les inspecteurs judiciaires les plus chevronnés vous le diront – requiert des qualités de persévérance et de minutie qui bien souvent s’opposent aux actions viriles, guerrières et d’opposition telles qu’elles s’observent, par exemple, dans le maintien d’ordre.

Des polices d’État en Recherche action & innovation

L’exemple fribourgeois

Développer les compétences de résolution civile à l’image de l’UGM (Unité de gestion des menaces ) créée par l’Etat de Fribourg et sa Police cantonale, c’est reporter l’opposition au dernier recours et privilégier l’anticipation et la détection. C’est faire preuve de politia*.

 

* Étymologie du mot police :

Le mot français police provient du mot latin politia, romanisation du mot grec πολιτεία (politeia), qui signifie « régime politique, citoyenneté, administration, partie civile » et du mot πόλις (polis), qui signifie « cité ».

Polices : instaurer un SAV

Le SAV – Service après-vente – des polices serait profitable à tous et permettrait de réduire les effets boomerang et les retours de balanciers.

Il manque un Service après-vente au sein de nos polices européennes.

Suite à une intervention houleuse ou agitée toute police trouverait un intérêt managérial et collectif à se soucier de la bonne réception et de la bonne compréhension de son action auprès des personnes témoins de la scène.

Imaginons : l’appel secours à la centrale et le signalement d’une probable violence domestique, l’intervention d’une première patrouille, dans un immeuble, 4ème étage, des cris, les lumières intermittentes dans la cage d’escalier, une deuxième patrouille, une troisième, des voisins sur les paliers, des portes qui claquent… des enfants qui pleurent… finalement, la police emmène untel, père de famille connu du voisinage et familièrement apprécié… Imaginons les incompréhensions, les questions… laissées sans réponses. La police se devrait de retourner sur les lieux, quelques heures ou quelques jours plus tard, offrir de l’information, naturellement sans dévoiler les détails de l’enquête en cours ni attenter à la sphère privée des personnes concernées.

Juste expliquer le processus

Un appel urgent, des patrouilles dépêchées sur les lieux, les précautions d’usage, deux mots sur la tactique, l’établissement des faits et ce service public offert indistinctement à chacune et chacun ; retour auprès des voisins, des témoins, distribution de cartes de visite ou de dépliants, des coordonnées et une disponibilité en guise de prévention.

Bénéfices communs

Avec cette offre de médiation bien des situations conflictuelles en des zones problématiques s’apaiseraient au lieu de renaître de plus belle après le départ de la police. De plus, avec un tel Service après-vente la police bénéficierait d’une occasion unique d’évaluer et de valider ses missions auprès du public et, bien entendu, d’améliorer encore et toujours ses procédures et ses méthodes de travail.

Nouvel an, mise au rang, pan pan pan

Une petite mise au rang pour le nouvel an ?

(2 minutes de lecture – le féminin est compris dans le texte)

Lorsqu’on m’interroge sur les causes qui entravent les évolutions de nos polices, celles qui persistent envers et contre tout, j’en évoque principalement deux.

  1. La mise au rang ou l’anesthésie des grades

J’ai constaté que bien des policiers civils* bradaient leur ambition originelle et annihilaient leurs initiatives dans une lente et rampante dilutions de leur responsabilité personnelle lorsque celle-ci était mise au rang.

C’est souvent comme ça dans les corporations détentrices d’armes, d’ordre et de sanction. L’appointé est mis au rang par l’appointé-chef qui est mis au rang par le caporal qui est mis au rang par le caporal-chef qui est mis au rang par le sergent qui est mis au rang par le sergent-chef qui est mis au rang par le sergent-major qui est mis au rang par l’adjudant qui est mis au rang par le lieutenant qui est mis au rang par le premier-lieutenant qui est mis au rang par le capitaine qui est mis au rang par le major qui est mis au rang par le lieutenant-colonel qui est mis au rang par le colonel qui ne sait plus pourquoi il est là.

 

C’est ainsi que voulant protéger son métier, notre policier le perd.

  1. Les sous-groupes informels

Ils constituent la deuxième entrave et sont encore plus sournois que la mise au rang décrite plus haut. Ces groupuscules opèrent leurs influences dans les coulisses, les carnotzets et les vestiaires. Ces sociétés, fraternités et autres clubs, plus ou moins secrets, de type mafieux, para-sportifs, pseudo-guerriers, agissent selon le principe de la redevabilité. Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette…

La franc-maçonnerie, au demeurant honorable dans ses buts, est, entre autres confréries, régulièrement suspectée par certains policiers d’influencer le choix des promotions au sein d’institutions policières suisses. C’est aussi le cas à l’étranger comme nous le révèle cette nouvelle affaire qui secoue le Royaume-Uni. Le débat fait actuellement rage dans les rangs de la Police d’Angleterre et du Pays de Galles après le départ, fin décembre 2017, du chef de la Fédération nationale de ladite police. Celui-ci critique les liens occultes qui semblent favoriser les membres de la société franc-maçonne au sein de l’institution policière. Ces mêmes compromissions bloquent, toujours selon lui, plusieurs réformes à l’interne. À l’inverse, le responsable de la Grande Loge unie d’Angleterre s’est plaint publiquement et par voie de presse des pressions subies par ses membres, notamment ceux qui exercent une fonction de police. Ceux-ci sont souvent contraints de se réfugier dans l’anonymat. L’ex-chef de la Fédération de Police d’Angleterre et du Pays de Galles, quant à lui, rétorque et précise qu’appartenir à la fois à la franc-maçonnerie et à la police expose les agents concernés à des situations délicates et à des formes d’allégeance pour le moins ambivalentes. Enfin, toujours selon cet ancien représentant de police, il semblerait que les femmes et certains ressortissants des minorités en fassent les frais.

Pas de doute, c’est plus d’une nouvelle année et ses douze mois qu’il nous sera nécessaire d’arpenter, contre vents et marées, pour restaurer le management de nos polices civiles.

*Les grades sont par contre utiles, voire nécessaires, dans les structures militaires, celles prévues pour l’état de guerre, celles soumises au régime judiciaire d’exception et devant agir dans les situations de dégénérescence et de violence généralisées. Dans pareille déconfiture, les ordres ne sauraient être discutés. À contrario, les polices civiles s’activent dans des régimes de paix et interagissent avec des organes et des appareils de pouvoirs civils et pluridisciplinaires. Dans les temps de paix, les innovations et les résolutions naissent précisément en dehors des soumissions et des gradations, elles apparaissent dans le débat contradictoire et les remises en question.

Racial Profiling – l’évaluation zurichoise

La ville de Zurich et son Département de la sécurité ont présentés hier matin (lundi 20 novembre 2017) l’évaluation “Racial Profiling” de leur Police municipale. Cette étude a été réalisée par le Centre suisse de compétence pour les Droits humains (centre mandaté par la Confédération) et donne réponse au postulat 2015/107 du Conseil Municipal de la Ville. Il en ressort des constats importants mais connus et des propositions pour l’évolution de nos polices (pages 16 et 20, 21 du rapport d’évaluation en question). Le rapport se réfère également aux pratiques d’autres pays.

Voir sujet développé par Ariane Gigon, correspondante alémanique, et publié ce jour (21.11.2017) dans huit quotidiens romands dont La Liberté et répercuté ce matin en revue de presse RTS La Première par Valérie Droux.

Pour ma part, j’appuie et “fais miennes” les propositions énoncées et approuvées par la Ville de Zurich.

Résumé en cinq points

  1. Recrutement : encourager les diversités culturelles, augmenter le bassin des origines culturelles des candidats.
  2. Renforcer la transparence des chiffres à l’interne de la corporation, puis les publier à l’externe. Ne pas camoufler ou diluer la nature des problèmes sous les voies de service…
  3. Mêler l’enseignement en Droits humains aux apprentissages pratiques de terrain.
  4. Annoncer les risques et développer (ou améliorer ?) un système d’enregistrement des incidents racistes.
  5. Davantage coopérer avec les partenaires extérieurs comme les organisations non gouvernementales.

Les options prises par la Ville de Zurich et relayées par le Centre de formation des Polices de Zurich sont encourageantes.

Voir également l’article du 10 novembre 2017 paru dans le quotidien La Liberté. Ariane Gigon. La Police de la ville de Zurich ne communique plus la nationalité des prévenus.

iCop : police numérique

C’est lors du 9ème Congrès de la sécurité urbaine, le 8 septembre 2011 à Zurich, que la Police municipale zurichoise (la plus importante en effectif de Suisse) nous a présenté son projet et sa volonté de vouloir s’engager sur les réseaux sociaux par l’intermédiaire d’agents de police visibles.

(2 minutes de lecture – le féminin est compris dans le texte)

Je me souviens. J’étais enthousiasmé par cette idée, qui rejoignait mon postulat exprimé lors de ma conférence, le même jour, en faveur d’un meilleur usage des voies médiatiques et numériques par les polices suisses.

Aujourd’hui, six ans plus tard, après un test opéré dès 2014, le premier policier de proximité zurichois s’affiche et intervient sur la toile.

Voyez le reportage de Noémie Guignard sur RTS – TJ du 10 juin 2017

Une initiative encourageante

Je ne peux qu’encourager les autres institutions de police à suivre cet exemple. Certes, la Police cantonale vaudoise, la Police municipale lausannoise ou encore la Police municipale de Crans-Montana sont déjà présentes sur les réseaux sociaux et répercutent leurs campagnes de prévention ou des avis de recherche de personne disparue, mais la démarche zurichoise va plus loin. Dans le cas d’espèce, c’est un policier, fort de son statut public, qui interpelle, modère, prévient, renseigne, bref, interagit en direct. Au lieu d’arpenter la rue, il fréquente le monde virtuel usant de ses facultés professionnelles.

Non, la posture du policier ne change pas.

La configuration juridique oui.

Le flou juridique

Le cadre légal régissant les réseaux sociaux est encore flou.

Au constat d’une infraction, quels sont les moyens à disposition du policier pour intervenir ?

La juridiction est-il délimitée au territoire d’assermentation ?

Nous devrons répondre à ces questions. En attendant, le policier peut détecter des irrégularités sur le champ virtuel et transposer ensuite ses observations sur le champ physique puis enclencher une procédure comme il a l’habitude de le faire.

Trois avantages !

au moins…

  1. S’offrir le moyen policier d’une relation avec les personnes les plus vulnérables ou isolées, celles qui n’osent pas déranger ou se présenter au poste de quartier.
  2. Détecter par capillarité sociale diverses formes de radicalisme et les confronter au tissu de proximité policière physique (à l’exemple de l’îlotage anglo-saxon).
  3. Espérer que la présence officielle de policiers sur les réseaux sociaux contribuera à freiner les ardeurs et les rancœurs de leurs collègues qui, parfois et à titre personnel, se répandent dans des propos indignes tout en contrevenant à leur devoir de réserve.

Crans-Montana et sa police…

… au cœur du monde.

En haute saison, la cité alpine du Haut-Plateau (Crans-Montana est la résultante de quatre communes fusionnées au 1er janvier 2017; plus Lens et Icogne pour la couverture policière locale) devient la plus grande ville du canton du Valais avec ses 50’000 résidents dont plus de 15’000 habitants.

(2 minutes de lecture – Le féminin est compris dans le texte)

Un véritable défi pour sa Police municipale !

Lieu de prédilection pour les écoles internationales et autres établissements privés ou publics, la station accueille de nombreux visiteurs du monde entier. En totalité, on dénombre plus d’une centaine de nationalités qui se côtoient jour et nuit lors de séjours de courte ou longue durée. C’est pourquoi la Police municipale de Crans-Montana s’est fixé comme prestations prioritaires la proximité et la sensibilisation sur le terrain physique mais aussi sur les réseaux sociaux.

Exemple d’une prestation de proximité originale :

“Cafés avec un policier”

Deux fois par mois en moyenne, le commandant Yves Sauvain en personne, accompagné d’un ou plusieurs de ses collègues, consacre de son temps pour rencontrer la population. “Ce sont autant d’occasions pour être à l’écoute, mieux comprendre notre tissu social et appréhender les préoccupations de chacun. De petites difficultés peuvent se dégrader très vite et devenir extrêmement dommageables si nous perdons le lien et la confiance avec les habitants et les résidents. Elles peuvent contaminer le canton dans son entier et bien au-delà.” précise le commandant Sauvain.

Exemple d’une action de sensibilisation internationale

L’appointé Alain Boschung, quant à lui, fréquente l’école hôtelière Les Roches pour expliquer aux étudiants, ressortissants de 91 pays, que la police est d’abord là pour les protéger. M. Boschung leur décrit les raisons éventuelles qui obligeraient la police d’intervenir jusqu’à eux, ainsi que les contours d’une telle interpellation. Il précise en outre, non sans humour, les conséquences pour chacun. “ J’ai face à moi des personnes qui proviennent de pays où la police est corrompue, violente et pas fiable du tout. Je me dois de les rassurer et de leur présenter les valeurs de notre État de Droit. Je leur confie, enfin, que personne ne nous dérange jamais. ” conclut l’appointé Boschung.

Un Corps de police qui se perfectionne en continu

Pour optimiser ses missions à caractère international, le Police municipale de Crans-Montana propose une formation facultative d’anglais à son personnel (11 personnes sur 22 sont inscrites à ces cours de langue).

Faciliter la relation, l’information et la compréhension inter et multi-culturelles comme autant d’outils pratiques contribuant à prévenir les propagations criminelles, toutes petites et locales jusqu’aux plus grandes et universelles !

 

 

2017 : quelle retraite pour nos policiers ?

Fin 2016, une nouvelle résolution m’est apparue, comme une évidence, lors de l’une de mes dernières interventions de clôture d’exercice d’un Corps de police :

comment mieux bénéficier des compétences de nos policiers seniors !

Pour deux raisons :

  • D’une part, les adversités toujours plus complexes nécessitent maturité et distanciation de la part de nos agents policiers afin qu’ils optimisent leur métier.
  • D’autre part, les savoirs policiers ont considérablement augmenté ces quinze dernières années, mais, se dissolvent au départ à la retraite de leurs détenteurs. Il n’est pas coutume au sein des corporations de polices d’ouvrir des médiathèques, de produire des recherches ou d’autres travaux scientifiques afin de les partager aux nouvelles générations.

Alors que penser des mises à la retraite dès l’âge de 53 ou 56 ans ?

Ces retraites sont méritées et viennent compenser les permanences nocturnes et les mobilisations sur congés. Néanmoins, j’aimerais questionner un tel système qui, finalement, se sépare bien trop tôt, comparativement aux autres métiers de tous secteurs, de policiers au sommet de leur art. D’autant qu’ils sont nombreux ces mêmes policiers qui, une fois pensionnés, du haut de leur flamboyante santé, reconvertissent la somme de leurs savoirs au profit d’intérêts privés… aux buts divergents parfois même contraires à ceux du service public auquel ils ont appartenu… (hic !).

Qu’on ne puisse et ne sache pas cultiver de telles expériences me désole. Quel gâchis humain et financier !

Il suffirait d’élargir les conditions d’âge d’entrée, comme a su le faire, avec succès, la Police cantonale bernoise pour mieux et plus longtemps bénéficier des compétences de nos policiers et offrir à nombre d’entre eux des conditions aussi bonnes que le système actuel, sans surplus d’années de service.

 

 

Détecter les signes avant-coureurs du crime

Les polices cantonales de Soleure puis de Zurich, suivies de Lucerne, de Thurgovie et de Bâle-Campagne misent sur l’organisation de réseaux interprofessionnels de détection et de prévention des dégénérescences des incidents pouvant conduire jusqu’au crime.

Ces modèles d’analyse des risques et de gestion des menaces prédéfinissent l’avenir policier.

La procédure est simple mais pas évidente à instaurer. Pas évident car les milieux policiers traditionnels peinent à accueillir d’autres disciplines et d’autres pratiques. Pourtant, les cantons alémaniques précités l’ont fait et s’en réjouissent.

La méthode ?

Simple et concrète :

les professionnels de tous milieux, témoins d’agissements équivoques ou alarmants, déposent leurs signalements dans un cercle d’analyse, de détection, d’alerte opérationnelle et d’intérêt public.

Réunir les employés des administrations communales, les enseignants, les travailleurs sociaux, les spécialistes de la protection des enfants, les psychologues, etc. autour de la police dans une plateforme d’échanges et de signalements : tel est le but de ce cercle ou réseau d’analyse. Que l’ensemble des partenaires puisse se tenir en alerte autour des risques de dérive que peuvent engendrer, par exemple, les absences scolaires d’un élève turbulent ou des violences domestiques répétées ou encore des plaintes de voisinage.

Comme précisé dans le sujet d’Ariane Gigon, correspondante de plusieurs quotidiens romands à Zurich, « Le partage des compétences (des professionnels de tels réseaux ndlr.) repose sur des bases légales réglant notamment la question du secret professionnel et de la protection des données. »

J’approuve, j’encourage et j’accompagne la mise en place de ces systèmes d’analyse pour autant que les responsabilités soient clairement définies et réparties. Pour les partenaires de la police, il ne s’agit pas de dénoncer mais de partager une inquiétude qui est déposée en un lieu de régulation. Contrairement à la délation qui est une démarche bilatérale, ce système de mise en réseau est animé par une dynamique multilatérale d’autocontrôle démocratique.

J’invite les cantons romands et leurs polices à s’y mettre sans plus tarder.

Libérons les policiers de tout maintien d’ordre !

(3 minutes de lecture)

(Le féminin est compris dans le texte)

Une activité chronophage

Le maintien d’ordre engloutit des milliers d’heures d’entraînement et de présence, fort onéreuses. Ce, au détriment des urgentes et complexes investigations des milieux et réseaux pédophiles, terroristes et extrémistes de tous bords.

Le maintien d’ordre éloigne le policier de ses missions essentielles que sont la prévention, la protection des personnes, l’accueil des plaintes, l’enquête, l’interpellation et la garde à vue (appelée aussi arrestation provisoire ou de courte durée). Voir Habilité du policier suisse.

Le maintien d’ordre n’est pas une nécessité policière

A l’examen des principales compétences de police, notamment celles nécessitant un solide secret de fonction, le maintien de l’ordre est bel et bien une des tâches que l’on pourrait soustraire sans conséquences néfastes. La prestation du maintien d’ordre est étrangère à l’intrinsèque vocation des polices de bien public. Elle se réfère à des tactiques militaires et fait appel, dans les situations extrêmes, à des modes opératoires qui s’apparentent à une forme de guérilla urbaine.

Qui pourrait s’en charger alors ?

Des agents d’Etat assermentés, autres que policiers, pourraient se charger des opérations de maintien d’ordre, accompagnés qu’ils seraient de quelques policiers judiciaires ou tacticiens.

Par exemple, en Suisse, les Assistants de Sécurité Publique Niveau 3. (ASP3), moyennant un complément de formation, seraient tout à fait aptes au maintien d’ordre lors de manifestations publiques ou sportives. Ils seraient encadrés par des policiers expérimentés qui, le cas échéant, procéderaient aux contrôles, fouilles ou interpellations. Ces ASP3 sont des auxiliaires de police aux compétences variées (voir l’exemple genevois). Il sont uniformés et armés.

Quatre avantages d’intérêt public

Je vois quatre avantages à libérer nos policiers de terrain de tout maintien d’ordre lors des manifestations publiques.

  1. Soulager les ressources humaines et les dépenses publiques. Transférer le maintien d’ordre préserverait les forces policières judiciaires, d’enquête, de proximité, de prévention des violences et déprédations, de sensibilisation et de protection de l’environnement.
  2. Encourager et faciliter l’entraide intercantonale. Les différentes directions et corporations de polices pourraient plus facilement mettre à la disposition de leurs pairs et voisins le personnel non policier affecté au maintien de l’ordre sans obliger les policiers en exercice à interrompre le fil des enquêtes et des procédures en cours.
  3. Élargir le rayon dissuasif. Confier le maintien de l’ordre à des agents professionnels (exemple : les ASP3 – voir plus haut) et/ou à des miliciens de sécurité publique formés et assermentés permettrait encore de diversifier l’identité des interlocuteurs de sanction et par là même de renforcer la dissuasion.
  4. Maintenir l’autorité de l’État de Droit. Ces agents d’État s’investiraient, en dehors des mobilisations de maintien d’ordre, dans diverses tâches de surveillance, de protection et de rétention. Les Assistants de Sécurité Publique le font déjà dans plusieurs cantons. Ainsi, la parenté policière d’une commune ou d’un canton s’en trouverait enrichie.