Compléments : uniforme et maintien de l’ordre

La période estivale est propice aux ajournements.

J’en profite pour revenir sur mon dernier blog daté du 13 juin 2022 et plus avant sur mon opinion traitant du maintien de l’ordre publiée le 7 juin 2022.

 

 

Un uniforme : ça sert à quoi ?

Le gendarme vaudois Christian Lovis, auteur du blog antimafia, me faisait remarquer, à juste titre, que j’aurais pu ajouter une cinquième raison de porter l’uniforme ; précisant que cette tenue vestimentaire “enlève” ou gomme la personnalité du policier. Qu’il soit, ici, remercié pour sa suggestion.

 

Voici donc en complément de mon précédent blog :

5. L’uniforme réduit la personnalité subjective de l’individu qui le porte au profit d’une plus grande objectivité morale. Il n’est pas question d’annihiler le caractère de la personne uniformée mais plutôt de contenir ses éventuels préjugés afin de renforcer l’intégrité et l’objectivité de la mission policière étatique.

J’approuve cette composante qualitative de l’uniforme.

 

 

Opinion du 7 juin 2022 publiée par Le temps.

Dans mon opinion publiée par le quotidien Le Temps et précédemment débattue dans Forum La 1ère RTS du 1er juin 2002, je faisais remarquer l’inadéquation de l’action des polices françaises dans leur maintien de l’ordre lors de la finale de la ligue des Champions au stade de France le 28 mai dernier (2022).

Et bien sachez que les sénateurs français ont rendu leur rapport sur le sujet le 13 juillet 2022. Probablement passé inaperçu, entre les gouttes de sueur de l’été, cette forme de jugement mérite qu’on s’y attarde un peu. Les conclusions de la chambre haute du Parlement français mentionnent «un enchaînement de dysfonctionnements» qui expliquerait les incidents ayant eu lieu lors de cette finale de foot. Le document relève surtout les «défaillances» aussi bien «dans l’exécution» que dans la «préparation» de la protection sécuritaire de l’évènement. Dysfonctionnements imputés à la préfecture de police de Paris qui était responsable de gérer le travail des forces de l’ordre. Et, contrairement à ce qu’avait affirmé le ministre de l’intérieur «… ce n’est pas parce qu’il y avait des supporteurs de Liverpool qui ont accompagné leur équipe que ça s’est mal passé» mais bien parce que la police n’a pas su appréhender les risques de la manifestation sportive.

«Cet échec tient aux décisions prises par la préfecture de police de Paris» précise le rapport. Par voie de conséquence, les hiérarchies policières n’ont pas su agir ni réagir dans la proportionnalité qui leur est pourtant assignée. À ce propos, les sénateurs demandent au ministère de l’Intérieur de «définir une doctrine d’emploi du gaz lacrymogène».

Dont acte.

Voir l’article du correspondant à Paris du quotidien Le Temps, Paul Ackermann, du 13 juillet 2022, intitulé : Le fiasco au Stade de France tient bien aux décisions prises par la police, selon le rapport sénatorial.

Fiasco au stade de France, sujet du 3 juin 2022.

Frédéric Maillard

Frédéric Maillard, socio-économiste, accompagne les nouvelles gouvernances d’une dizaine de corporations policières suisses. De 2005 à 2015, il a analysé les pratiques professionnelles de 5000 agent-e-s. Depuis, il partage publiquement son diagnostic, commente l’actualité et propose des innovations. fredericmaillard.com

2 réponses à “Compléments : uniforme et maintien de l’ordre

  1. Je me souviens qu’à l’âge de quinze ans, j’avais trouvé sur la table du salon un beau livre à fourre verte et blanche : « Les uniformes de la Police ». Chaque page portait une image en couleurs, certaines avec dorures, débutant de 1850 jusqu’à 1967, année d’édition du livre. Ce dernier uniforme était en fait un complet cravate plutôt classique dont la coupe avait été modifiée pour faciliter les mouvements, prévoir le port d’une ceinture de cuir et l’étui du pistolet, et des poches extérieures à boutons dorés. Le képi à visière vernie noire pouvait tomber facilement à terre lors d’interventions énergiques, et les élégantes chaussures de salon ne faisaient pas non plus le poids. J’oubliais les lignes rouges le long des coutures du pantalon gris clair… Que penser actuellement de cet uniforme, peu adapté à la confrontation physique ? À quinze ans, je voyais l’uniforme de la personne intervenant pour donner des ordres, calmant les fauteurs de troubles dès son arrivée, ou provoquant leur fuite… « Au nom de la loi, je vous arrête ! » Ce genre de déclaration n’était déjà plus d’actualité, et pourquoi fallait-il avertir ? S’agissait de droiture ?

    L’uniforme a changé, beaucoup changé, mais je pense que la personne qui le porte, cinquante ans après, n’a rien perdu de son honorabilité. À l’époque l’honorabilité était liée à l’image de la juste autorité pour le bien de tous. Aujourd’hui je dirais autrement, c’est très honorable d’assurer la sécurité dans un climat où le respect tient maintenant plus à un rapport de force qu’au souhait d’honnêteté et de bonne entente. Ce manque de reconnaissance qui va en diminuant, à mon avis assez généralisé, n’est pas du tout favorable à la police pour bien exercer sa profession. Il y a des personnes qui aiment leur activité pour la situation financière confortable, d’autres pour être en paix sans grandes responsabilités avec salaire « convenable », et pour ne pas allonger la liste d’autres cas de figure, je termine par le policier : un travail difficile pour lequel même un bon salaire ne peut compenser les inévitables répercussions sur la vie de famille. C’est assurément la motivation qui prend le dessus, et je trouve très dommage de ne pas mieux soutenir cette réelle motivation en cherchant une solution au « manque de respect généralisé », pas dû à l’absence d’un képi à médaillon doré, ni à des attributs qui devraient mieux afficher la force. Pas voyous en encore moins chevaliers, on dirait que beaucoup de gens protègent leur paix intérieure en absolue priorité, loin de tous problèmes existants, attendant d’avoir besoin de l’aide ou la protection de la police pour lui accorder plus de sympathie…

    1. Merci beaucoup pour votre commentaire Dominic,

      en effet, l’interaction entre les représentant.e.s de l’ordre et leurs bénéficiaires a beaucoup changé, “…pour le meilleur et le pire…”, comme toujours, me signalent les agent.e.s concerné.e.s. Le meilleur car les usagers, consommateurs, patients et bénéficiaires ne se laissent plus faire ou manipuler ou encore dominer injustement parfois comme il fut un temps en médecine, en églises et en polices…Le pire car comme tout progrès, il y a excès avant, je l’espère, un rééquilibre. Les effets de ces mutations sociétales se retrouvent dans les apparences et notamment les uniformes, vous avez raison. Aujourd’hui, ces habillements sont plus souples, plus adaptés au mouvement d’une société qui se presse et malheureusement, selon moi, équivoques… sont-ce des unités d’interventions ? Ou des patrouilleurs ? Des agent.e.s de libération ou de durcissement ? Quels messages implicites nous donnent à comprendre certains uniformes qui s’apparentent plus à des groupes paramilitaires de mauvaises et indignes réputations qu’à des gardiens de paix ? Probablement que la réponse est entre ces deux conceptions opposées : la salopette une pièce noire d’une part et le costard cravate, cou engoncé, d’autre part. Souple et léger mais classe au quotidien et des possibilités de se changer rapidement lorsque la situation l’exige. De beaux défis pour les fabricants de vêtements !

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