Suisse – UE : la science économique au service de la peur

Le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) s’est toujours référé à des travaux plus ou moins académiques pour défendre le libre accès des Européens au marché suisse du travail. Et les Accords bilatéraux I qui lui sont juridiquement liés (1). Il en a lui-même commandés à l’occasion. Ebauche d’évaluation critique.

Ce fut le cas après le vote populaire du 9 février 2014 contre la libre circulation des personnes. Il s’agissait surtout de convaincre les parlementaires de ne pas appliquer la décision “fautive” du corps électoral. Et sans doute de fournir une caution scientifique à la négation politique ultérieure du scrutin. Un procédé de bonne guerre, qui n’a suscité aucune critique substantielle de la part de la communauté économique. En dehors de ce microcosme, il semble d’ailleurs assez normal que l’on s’abstienne de critiquer la science sans être soi-même un scientifique.

Les instituts BAK Economics à Bâle et Ecoplan à Berne ont donc été mandatés pour réaliser deux recherches en allemand, auxquelles le Secrétariat d’Etat à l’économie a lui-même collaboré (avec Ecoplan surtout). Le Seco a ensuite rédigé un rapport de synthèse (avec version française). Tous ces documents sont accessibles sur le site de la Confédération (2).

Les résultats ont atteint un tel degré d’extravagance dans le catastrophisme qu’ils ont suscité une certaine indifférence gênée lors de leur communication. Ils prévoyaient qu’en cas de résiliation des Accords bilatéraux I, la croissance du PIB sur vingt ans serait de 16% à 18%, au lieu de 23%. Soit un manque à gagner cumulé de 430 à 630 milliards de franc pour l’économie nationale.  

Les deux études n’ont guère été non plus instrumentalisées par la suite*. La conseillère fédérale Keller-Sutter y a vaguement fait allusion en début d’année, mais sans les nommer. La Fédération des entreprises suisses (economiesuisse) a quand même laissé une infographie en forme de gourdin sur son site. Avec une référence énigmatique à BAK Economics, et des chiffres anxiogènes complètement décontextualisés sur « La valeur des accords bilatéraux ».

* Note d’actualisation: Le Conseil fédéral a reconnu par la suite que ce genre d’étude n’était pas fiable. Voir sa réponse du 11.08.2021 à l’interpellation du conseiller national Fabian Molina: “Il n’est pas non plus possible d’évaluer avec précision les coûts liés à la non-signature de l’accord institutionnel. Les répercussions telles que la détérioration de l’accès au marché du fait de l’absence d’actualisation des accords existants dépendent fortement de la réaction de l’UE, mais également d’éventuelles mesures d’atténuation de la Suisse. Il n’est donc pas possible de les quantifier de manière fiable (cf. également la réponse du Conseil fédéral du 15 mai 2019 au postulat 19.3279 Regazzi ” Signature ou non-signature de l’accord-cadre avec l’UE. Estimation des coûts pour la place économique suisse “).”

“BAK et Ecoplan tournent sur des modèles d’une sophistication hors de portée.

Mais les données de base sont aussi simples qu’invraisemblables.”

Ces deux recherches existent néanmoins. Même si ce sont des œuvres de commande, elles sont susceptibles de servir d’attestation d’autorité et de dernier recours, indépendamment de leur contenu. Elles méritent donc que l’on y prête attention. D’autant plus que leurs prémisses et présupposés, fixés par le briefing du Seco, reflètent assez bien la rhétorique politique et économique des défenseurs du lien juridique unissant les Accords bilatéraux I, et de la voie bilatérale vers l’intégration. Avec une emphase évoluant sur un mode de type TINA, rendu célèbre par Margaret Thatcher dans les années 1980: There is no alternative. Il n’est pas nécessaire dans cette optique que les arguments soient vraisemblables sur le plan économique pour être valables sous l’angle politique.

Les études de BAK et Ecoplan tournent sur des modèles mathématiques et macro-économiques hors de portée (3). Il n’est pas difficile toutefois d’en faire une évaluation fondamentale et méthodologique de sens commun. Ces travaux reposent sur des hypothèses et postulats de base très orientés et complètement irréalistes. Il s’avère assez vite qu’ils n’ont de ce fait aucune signification autre qu’académique. On peut même dire sans grand risque de se tromper qu’il s’agit de fictions économiques, ou d’exercices de style sur le thème de la peur.

Leutemann: L’Oracle de Delphes

1- Une projection n’est pas une prévision

Sans que l’on en comprenne bien la raison, le briefing du Seco demande à BAK Economics et à Ecoplan une projection de long terme à… vingt ans (2035). Où en serions-nous dans une génération si les Accords bilatéraux I étaient résiliés aujourd’hui ? Par rapport au scénario contraire (ils ne seraient pas résiliés) ? Les modèles mathématiques vont donc mouliner sur l’objectif 2035, puis rétro-projeter les effets cumulés sur vingt ans par interpolation linéaire.

Dans le domaine macro-économique, on estime pourtant qu’aucune prévision n’a de sens au-delà de deux ans. Et même les prévisions à deux ans s’avèrent le plus souvent erronées, parfois même radicalement : il n’est pas nécessaire qu’une panique immobilière, bancaire ou sanitaire surgisse pour tout remettre en cause. Un grain de sable ou un battement d’aile suffit. L’amplitude des écarts peut alors très vite produire des changements structurels et directionnels notoirement imprévisibles.  

2 – Croissance économique en laboratoire

Pour rendre néanmoins « possible » l’opération, BAK et Ecoplan admettent que toutes choses seraient égales par ailleurs. Il ne se passerait rien d’exogène à la disparition des Accords bilatéraux I pendant une génération. En particulier :

La Suisse et l’Union Européenne ne remplaceraient pas ces sept accords bilatéraux, liés juridiquement, par d’autres accords individuels plus ou moins équivalents. On postule que l’UE n’y verrait aucun intérêt. Ou alors, en plus crédible,  qu’elle s’y opposerait pour des raisons d’Etat éloignées de toute rationalité. Bruxelles adopterait avec la Suisse une politique un peu comparable à celle de la Chine avec Taïwan : la non-reconnaissance de voisinage et de commerce, basée sur les rapports de force.

Compréhensible dans l’immédiat en cas de déconvenue politique humiliante (si les Suisses résiliaient l’Accord de libre circulation des personnes), cette posture d’intimidation et d’assiègement de l’UE serait toutefois poursuivie pendant au moins vingt ans. Sachant encore une fois que cinq de ces accords bilatéraux I bénéficient à l’Union davantage qu’à la Suisse, et dans des proportions importantes (voir les articles précédents). Et connaissant le climat normalisé des relations commerciales que l’UE entretient par ailleurs avec les Etats non candidats à l’adhésion, situés dans sa périphérie, dans le cadre de la Politique européenne de voisinage (PEV).

L’économie suisse, de son côté, n’entreprendrait rien pour s’adapter à la nouvelle situation et en sortir par le haut. C’est pourtant ce qu’elle avait brillamment réalisé après le vote populaire de décembre 1992 contre l’adhésion à l’Espace économique européen (EEE). Alors que le pays était en pleine crise économique depuis plus de deux ans (et pour quatre ans encore).

“Tout se passe comme si ces prévisions à vingt ans reposaient sur l’hypothèse

d’un effondrement psychologique et moral de la population suisse,

de ses élus et de ses dirigeants d’entreprises.”

Cette configuration a priori défavorable dans les années 1990 n’a pas empêché la Suisse de figurer parmi les grands vainqueurs de la mondialisation (bien avant l’application progressive des Accords bilatéraux I dès 2002, et le décollage de l’immigration européenne dès 2007) (4).

Tout se passe aujourd’hui comme si le Seco, les organisations économiques et les partis politique partaient au contraire de l’hypothèse générale d’un effondrement psychologique et moral de la population suisse, de ses élus et de ses dirigeants d’entreprises. Lors de la campagne politique de 1992, les militants de l’EEE avaient d’ailleurs tablé sur un même genre d’accablement et d’affaissement. Le scénario ne s’est que très partiellement vérifié. L’économie, en particulier, a démontré une étonnante capacité d’adaptation et de résilience.    

Delacroix: L’oracle de Delphes (Assemblée nationale)

3 – La réalité n’a pas d’importance

Les deux études prennent le parti de ne pas s’appuyer sur un historique des coûts et bénéfices des Accords bilatéraux I depuis leur application dans les années 2000 (pour en tirer ensuite des conclusions prospectives sur l’avenir). Précisées par le Seco, les caractéristiques des accords sont simplement introduites dans des modèles systémiques et mathématiques. Ces machines à algorithmes sont exclusivement orientées PIB, et inspirées de diverses théories macro-économiques. Elles ont aussi été construites à partir d’expériences agrégées de commerce international dans le monde.  

L’historique eût au contraire impliqué un travail considérable et constant de monitoring sur les données de ces vingt dernière années. Or ce programme n’a jamais été réalisé autrement que de manière très superficielle (sauf sur les effets migratoires).

A noter que dans un débat aux dimensions idéologiques et émotionnelles importantes, cette énorme lacune de suivi alimente forcément le soupçon de n’avoir pas voulu faire ressortir l’inconsistance des Accords bilatéraux I d’un point de vue économique. Les organisations faîtières, les partis et l’Etat semblant surtout s’y accrocher pour obtenir une illusoire stabilité dans la voie bilatérale vers une intégration par étapes, qui s’avère impossible en réalité. C’est peu dire que ces deux études ne dissipent pas le climat de confusion à ce sujet.  

Collier: Prêtresse de Delphes

4 – L’immigration nette arbitrairement réduite de 25%

Dans le même registre dépressif, les études de BAK Economics et d’Ecoplan tablent sur une réduction de l’immigration annuelle moyenne nette de 25% jusqu’en 2035 (5). Ce qui induirait mécaniquement des baisses et limitations importantes d’activité économique (PIB).

Certainement adopté avec l’accord du Seco, cet a priori arbitraire est à la base de toute l’argumentation défendant le droit d’accès des Européens à une activité économique en Suisse (libre circulation). Il n’a pourtant aucun sens :

– La Suisse n’a pas besoin d’un accord contraignant sur le libre accès au marché du travail pour accueillir toute la main d’œuvre et les compétences européennes dont elle a besoin pour son économie et ses services publics.

– L’initiative populaire de l’UDC en 2014 n’avait pas donné d’indication chiffrée de quotas d’immigration. Son but était simplement que la Suisse reprît le contrôle de l’immigration européenne à l’aide de contingents. L’établissement de plafonds migratoires selon les besoins évolutifs de l’économie aurait été du ressort du Conseil fédéral et du Parlement.

– Ces -25% des études économiques de 2015 ont été fixés comme si le Conseil fédéral et le Parlement allaient décider chaque année de contingents gravement insuffisants, destinés à assécher le marché du travail et à pénaliser lourdement l’économie, les services publics et la croissance.

“Ces projections font comme si les adeptes de la décroissance démographique

avaient la majorité absolue au gouvernement et au parlement.”

Ce présupposé fait aussi comme si l’UDC et la décroissance étaient politiquement majoritaires en Suisse, et déterminantes dans la politique migratoire. Et comme si l’UDC, elle-même supposée diriger le pays, était en plus majoritairement et durablement porteuse d’une idéologie de décroissance démographique et économique (ce qui serait d’ailleurs en contradiction avec l’étiquette d’ultralibéralisme dont ses adversaires l’affublent).  

A noter que les quotas et contingents en vigueur avant la libre circulation progressive des personnes à partir de 2002 étaient rarement atteints. Ils ne l’ont jamais été dans les années 1990 (et jusqu’en 2002), malgré la robuste reprise économique de la fin de la décennie (dès 1997).

Michelangelo: La Sybille de Delphes

5 – De la cause aux effets (et retour)

Entre scénarios avec et sans libre accès des Européens au marché suisse du travail (libre circulation), ce postulat très restrictif des -25% implique en lui-même une différence de population de 350 000 personnes en 2035 (BAK) . Soit en gros l’équivalent des villes de Genève et Lausanne cumulées. La diminution de la population active entraînant mécaniquement celle du produit intérieur (PIB), on comprend que l’effet de décroissance paraisse considérable. Il ne semble même pas nécessaire d’y ajouter les effets supposés de la résiliation des autres accords bilatéraux I pour s’en convaincre.

Quittons néanmoins les présupposés, et penchons-nous sur les résultats de ces deux études BAK et Ecoplan de 2015. Elles portent pour rappel sur l’ensemble des Accords bilatéraux I. On se rend alors effectivement compte que ce sont les conséquences directes de la réduction postulée de 25% de l’immigration qui sont de loin les plus alarmantes. Cette différence de 25% représenterait 70% de l’ensemble de l’écart de croissance avec et sans accords (Ecoplan).

BAK Economics est toutefois parvenu à diluer cette part très dominante en ajoutant un effet systémique supplémentaire de 20%, venant en supplément de la somme des effets propres à chacun des sept accords (6). L’Accord très particulier sur la recherche a également été intégré par BAK, ce qui n’est pas le cas d’Ecoplan (7). Le poids de l’effet migratoire négatif peut ainsi être réduit à quelque 50% de l’ensemble des effets négatifs.

“Même Swiss, acquise par le groupe Lufthansa en 2005, redeviendrait

dans cette optique une compagnie suisse.”

La deuxième déconvenue dans l’ordre d’importance viendrait de l’extinction de l’Accord sur la reconnaissance mutuelle des normes techniques (ARM) : 8% environ de l’ensemble des effets négatifs selon BAK et Ecoplan (7a). Le troisième mécompte viendrait de la résiliation de l’Accord sur le transport aérien : 7% de l’ensemble selon BAK, 4 % selon Ecoplan. Mais là encore, les deux études présupposent que la résiliation équivaudrait à un retour à la situation des années 1990. Avec les accords de l’époque, Etat européen par Etat européen. Même Swiss, acquise par le groupe Lufthansa en 2005, redeviendrait dans cette optique une compagnie suisse (BAK) ! La connectivité des villes suisses baisserait de 1% à 3%, et la Suisse serait éjectée de l’Agence européenne de sécurité aérienne (AESA, créée en 2002 et basée à Cologne).

A noter à ce sujet qu’EasyJet Switzerland avait été créé en 1988 à Genève, douze ans avant la conclusion des Accords bilatéraux I. Le groupe britannique avait estimé à l’époque déjà que la Suisse était une plateforme optimale pour ses développements futurs sur le continent.

A noter également qu’aucune menace concrète venant de Bruxelles ou de Cologne n’a pesé sur cet Accord aérien après le vote populaire de février 2014 (ni sur aucun autre accord bilatéral I sauf la recherche). Ce qui laisse penser que les Européens n’ont vraiment aucun intérêt à pénaliser le secteur aérien en Suisse. On pense par exemple aux destinations qui alimentent à partir de Zurich, Genève et Bâle les hubs européens de longs courriers. Ou encore aux villes européennes très friandes de touristes suisses de courte durée, et à haut pouvoir d’achat, acheminés en continu par EasyJet (8).  

Selon BAK Economics et Ecoplan, les effets d’une éventuelle extinction des autres accords bilatéraux I paraissent dérisoires : transports terrestres, marchés publics, agriculture. Ce n’est d’ailleurs pas une surprise, compte tenu du fait que les milieux concernés (organisations de branche) se manifestent relativement peu pour les défendre.

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NOTES

(1) Le Seco tient à jour une liste de publications savantes sur l’importance pratique des Accords bilatéraux I: https://cutt.ly/5rUbcCZ (essentiellement en allemand). Voir aussi notre article précédent sur « Les dérisoires privilèges de l’ARM ».

(2) Ecoplan (2015): Volkswirtschaftliche Auswirkungen eines Wegfalls der Bilateralen I – Analyse mit einem Mehrländergleichgewichtsmodell.

BAK Basel Economics (2015): Die mittel- und langfristigen Auswirkungen eines Wegfalls der Bilateralen I auf die Schweizerische Volkswirtschaft.

Le liens figurent dans la synthèse du Seco (en français) des recherches de BAK Economics et d’Ecoplan : https://cutt.ly/VyQAOeP

(3) Ecoplan mentionne que les deux « répondants » de ses modèles mathématiques sont basés à l’Ecole des mines du Colorado et à l’Univserité d’Oldenbourg (D). Le modèle économique semble inspiré quant à lui du prix Nobel Paul Krugman et de la « nouvelle théorie du commerce international ».

(4) Les chiffres concernant les effets de croissance de ces trente dernières années, avec mise en perspective selon l’avancement de la voie bilatérale, seront publiés prochainement sur ce blog pour clarifier certains malentendus. Aucune occurrence n’est toutefois comparable à la situation actuelle.

(5) Cette hypothèse de départ à -25% se réfère à celle d’une étude du KOF (Ecole polytehnique fédérale de Zurich), focalisée sur l’Accord de libre circulation des personnes : KOF Konjunkturforschungsstelle der ETH Zürich (2015): Der bilaterale Weg – eine ökonomische Bestandsaufnahme. KOF Studien Nr. 58

https://cutt.ly/prY2b0O  

(6) L’effet systémique ajouté par BAK (par rapport à Ecoplan) comprend l’insécurité juridique en général, et la perte d’attractivité de la place économique suisse en cas de résiliation sans alternative des Accords bilatéraux I. Là encore, l’approche unilatérale et biaisée montre très vite ses limites. L’insécurité juridique passagère provoquée par l’acceptation redoutée de l’initiative de l’UDC est traitée comme une substance isolée. Elle n’est à aucun moment évaluée par rapport à l’insécurité juridique permanente de la voie bilatérale vers l’intégration, depuis vingt ans, comprenant les exigences successives de l’UE et les tensions continuelles entre Bruxelles et Berne. Elle ne tient pas compte non plus de l’insécurité structurelle de la législation européenne, vers l’intégration de laquelle la voie bilatérale est censée conduire par paliers. Quant à l’attractivité de la place économique suisse, industrielle en particulier, elle ferait  certainement l’objet de redistributions secteur par secteur. En diminuant dans certains cas, et en augmentant dans d’autres. Les prévisions sont réputées particulièrement difficiles dans ce domaine.

(7) Lire l’article d’évaluation précédemment consacré à l’Accord sur la recherche : https://cutt.ly/zyQPG7z

(7a) La probabilité et l’exagération des conséquences d’une telle résiliation ont fait l’objet d’un précédent article de ma part: Les dérisoires privilèges de l’ARM https://cutt.ly/5yQaYT0

(8) A noter enfin que l’argument d’intimidation, très tendance actuellement, consistant à rappeler que le dépôt de bilan de Swissair en octobre 2001 a été dû à l’absence d’accord aérien avec l’Union Européenne dans les années 1990, est complètement fantaisiste. Cette raison n’a jamais été évoquée à l’époque, et l’espace aérien européen n’existe que depuis 2002 avec la création de l’AESA.                

 

François Schaller

Ancien de la Presse et de L’Hebdo à Lausanne. Rédacteur en chef de PME Magazine à Genève dans les années 2000 (groupe Axel Springer), et de L’Agefi dans les années 2010 (Quotidien de l’Agence économique et financière). Pratique depuis 1992 un journalisme engagé sur la politique européenne de la Suisse. Ne pas céder au continuel chantage à l'isolement des soumissionnistes en Suisse: la part "privilégiée" de l'accès au marché européen par voie dite "bilatérale" est dérisoire. C'est tout à fait démontrable avec un peu d'investigation. Des accords commerciaux et de partenariat sur pied d'égalité? Oui. Une subordination générale au droit économique, social et environnemental européen? Non. Les textes fondamentaux: Généalogie de la libre circulation des personnes https://cutt.ly/1eR17bI Généalogie de la voie bilatérale https://cutt.ly/LeR1KgK

3 réponses à “Suisse – UE : la science économique au service de la peur

  1. Il faut rappeler que la science économique n’est pas une science exacte, d’ailleurs est-ce vraiment une science? Nombre d’économistes n’ont pour seul argument à faire valoir que des équations toujours plus absconses et comprises d’eux seuls!
    Pour revenir à la réalité tangible: quelle était la probabilité d’un autochtone de plus de 45 ans de retrouver un emploi avant les bilatérales (et en particulier en zone frontalière)? Quelle est cette probabilité aujourd’hui? Comment explique-t-on l’écart, si écart (probable) il y a ?

  2. Article brillant et analyse très fouillée.

    Il faudrait en faire une version abrégée, plus facilement accessible à l’homme de la rue, et la publier dans toute la grande presse. Ainsi on contrebalancerait un peu les mensonges massifs de la propagande officielle. Malheureusement les grands médias sont verrouillés.

    Un point cependant où je ne suis pas tout à fait sur votre longueur d’onde: vous contestez la prévision faite par ces deux études officielles que l’immigration baisserait de 25% en cas de rejet de l’accord cadre. Vous semblez d’ailleurs être d’avis qu’une telle réduction de l’immigration serait dommageable à notre pays. Ce n’est pas la première fois que je note chez vous un biais immigrationiste. Mais peu importe, “we can agree to disagree”.

    Sur çe point, il faut voir que du point de vue de l’opinion publique suisse, si les gens pensent que le refus de l’accord cadre entraînerait une baisse de 25% de l’immigration, cela pourrait avoir pour conséquence le rejet en votations de l’accord cadre. Car les gens veulent qu’on stoppe l’immigration. Laissons donc les experts propager cette fake news là.

    1. A propos de mon “biais immigrationniste”:
      La finalité de la politique, c’est le social. Un système social performant a besoin d’être financé grâce une économie forte. L’économie a besoin d’immigration actuellement, mais mieux adaptée.
      Il y a trois objectifs à mes yeux:
      1) Se redonner les moyens politiques de restreindre rapidement et durablement l’immigration européenne en cas de nécessité (le marché du travail n’étant pas toujours capable de s’autoréguler). L’Accord de libre circulation ne le permet plus.
      2) En finir avec la préférence européenne sur le marché suisse du travail, que l’accord impose par rapport aux ressortissants du reste du monde. A niveau d’immigration globale égal, nous devons pouvoir restreindre l’immigration européenne pour augmenter celle des non-Européens (ou restreindre les deux en faveur des Suisses). La part des exportations dans le reste du monde est aujourd’hui prépondérante, et les entreprises ont de plus en plus besoin de diversifier les nationalités et les cultures du travail de leurs équipes. Il faut que les cadres, spécialistes ou même employés de maison non européens cessent d’être discriminés pour des raisons de nationalité lorsqu’ils sont en concurrence avec des candidats européens sur le marché suisse du travail.
      3) En finir avec cette quatrième liberté, principe européen fondamental, qui met le travail sur le même plan que le capital, les biens et les services. Cette erreur a été commise sous pression européenne à une époque où la Suisse anticipait sur sa future adhésion à l’UE. Elle a entre-temps renoncé (2005), puis retiré sa demande d’adhésion (2016). Le libre accès des Européens au marché du travail n’a donc plus aucun sens. Cette libre circulation ne crée que des malentendus avec l’UE, qui continue de traiter la Suisse comme une candidate à l’intégration progressive. Avec beaucoup d’instabilité politique néfaste à l’économie. La Suisse n’a d’ailleurs nullement besoin d’accord contraignant pour accueillir tous les Européens dont son économie et ses services publics ont besoin.

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