…étaient de divine origine….

En ce jour où les chrétiens fêtent la naissance de leur Dieu, …et si les abeilles… se penche avec tendresse sur la nativité des avettes, sur leurs origines et sur l’importance que les humains leur accordent depuis les temps les plus reculés. En effet, au plus loin que nos connaissances remontent, l’abeille occupe une place unique dans la vie des hommes. Elle jouait même un rôle central dans de nombreuses civilisations aujourd’hui disparues.

Préhistoire: Cette relation commence avec la récolte du précieux nectar par les “chasseurs de miel” dont la représentation la plus ancienne remonte à la célèbre peinture rupestre de la grotte de l’araignée dans la province de Valence (Espagne; figure de droite). Son âge est estimé à quelques 8’000 ans. Elle représente une figure humaine récoltant du miel dans une falaise, une technique encore pratiquée de nos jours par certaines populations de l’Himalya (figure de gauche). De nombreux sites archéologiques attestent de la présence de cire d’abeille dans divers récipients au néolithique.

Egyte ancienne          Ce n’est qu’avec l’écriture qu’apparaissent les premières mentions d’une apiculture au sens propre du terme. C’est en particulier le cas dans l’Egypte ancienne avec des bas reliefs interprétés comme des scènes de récolte, de manipulation de miel et de travail aux ruches (Kritski ref), sans parler de l’abeille comme hiéroglyphe en soi. De récentes découvertes à Rehov en Israël confirment l’usage à la même époque de ruches cylindriques similaires à celles représentées sur les bas-reliefs égyptiens.

 

 

 

L’Antiquité gréco-romaine est marquée par le mythe d’Aristée. Fils d’Apollon et de la nymphe Cyrène, Aristée est épris de la nymphe Eurydice et la poursuit de ses fiévreuses assiduités. En tentant de s’enfuir, celle-ci marche sur un serpent qui la mord causant ainsi sa mort le jour-même de ses noces avec Orphée. Pour la venger, l(#metoo n’était pas encore né), ses compagnes les nymphes tuent les abeilles d’Aristée. Inconsolable (de la mort de ses abeilles tout au moins), Aristée demande conseil à —Protée qui lui suggère de sacrifier 4 taureaux et 4 génisses pour purger son méfait. Comme par magie, il sort des abeilles du ventre des animaux sacrifiés, d’où le mythe de la bougonie, théorie qui prétendait que les insectes naissent ainsi, par génération spontanée.

Depuis lors, Aristée est non seulement considéré comme la divinité des abeilles dans l’antiquité gréco-romaine, mais ces dernières endossent également un caractère de divinté. Ainsi, Aristote, dans ses écrits, leur attribue-t-il une nature divine, qualité qu’il dénie par ailleurs  aux guêpes et aux frelons! On retrouve  plus tard le mythe d’Aristée en Sicile et il est encore vivace dans la Sardaigne moderne.

En Amérique pré-colombienne: les peuples pré-colombiens, Incas, Mayas et Aztèques vénéraient, quant à eux, leur abeille locale sans dard, une mélipone dont les constructions sont très spectaculaires et dont certains pensent même qu’elles auraient inspiré les architectes de leurs pyramides.

Le christianisme n’est pas en reste: —même si elle désacralise les abeilles, la culture chrétienne ne sera pas en reste. Les abeilles et l’apiculture sont étroitement associées à son développement. En effet, on trouve des ruchers dans de nombreux couvents, De plus, moultes prélats vont jouer un rôle prédominant dans le développement de l’apiculture à travers les siècles. On peut citer de nombreux exemples. C’est une particularité tout à fait étonnante avec un clergé très investi à la fois dans la conduite de ruchers, mais également le développement de techniques nouvelles. Cet engouement est généralement attribué à l’importance de la cire pour la fabrication de bougies de culte. Mais est-ce une explication suffisante pour affronter le dard des abeilles ? Probablement pas,  peut-être ces prélats rendent-ils tout simplement hommage à l’ancienne tradition  prônant une origine divine aux abeilles.

Galerie de quelques prélats qui ont marqué l’apiculture

Lorenzo Lorraine Langstroth (1810-1985)

Belle coïncidence, Langstroth, considéré comme le “père” de l’apiculture en Amérique, est né un 25 décembre à Philadelphie en Pennsylvanie. Diplômé de Yale Universitiy, il devient pasteur et pratiquera dans diverses paroisses réformées. Il est considéré comme le créateur de la ruche à cadres mobiles inspirée de la ruche en livre de François Huber. Il est également considéré comme le découvreur du “bee space”, l’espace standard de 8-9 mm entre deux cadres. Ce qu’il a breveté vers 1860. Son modèle de ruche est actuellement le plus répandu dans le monde.

Voici ce qu’il écrit dans son livre “L’abeille domestique” publié en 1860

“L’utilisation de la ruche Huber m’avait convaincu qu’avec des précautions adéquates, les rayons pouvaient être enlevés sans fâcher les abeilles, et que ces insectes pouvaient être apprivoisés à un degré surprenant. Sans connaissance de ces faits, j’aurais dû considérer une ruche permettant d’enlever les rayons comme trop dangereuse pour une utilisation pratique.”

Lorenzo L. Langstroth
Abbé Bienaymé, France, auteur d’un ouvrage d’apiculture en 1780
Abbé Della Rocca, Vicaire général de l’île de Syra, auteur d’un ouvrage d’apiculture en 1790, cite l’Abbé Tessier et l’Abbé de Lille
Jan Dzierzon(1811-1906), curé de Carlsmarx, apiculteur en Silésie, fut le premier à mettre en évidence la manière dont la reine, suivant sa volonté, pondait des oeufs qui donnaient des mâles par parthénogenèse, ou des oeufs fécondés qui donnaient des femelles. Il découvrit également le rôle de la gelée royale dans les développement des reines. Auteur de nombreux ouvrages, il invente le cadre mobile à la même époque que Langstroth. Prend sa retraite de curé en 1868. Opposé au nouveau dogme de l’infaillibilité du pape, il sera excommunié.
Abbé Jean-Baptiste Voirnot (1844-1900)

Créateur d’une ruche à cadres mobiles qui porte son nom et de plusieurs ouvrages d’apiculture (France)

Abbé Emile Warré (1867-1951; France)

Auteur de “L’apiculture pour tous”, manuel dans lequel il fait la revue des différents types de ruche, l’abbé Warré préconise des méthodes simples, un matériel bon marché et accessible à tous. Il est le créateur d’une ruche qui porte son nom et qui est encore  populaire dans certains milieux. La ruche est composée d’un plancher, d’un toit. et de trois éléments (hausses) identiques de 30x30x20 cm empilés. L’abbé Warré préconise une apiculture fixiste, c’est-à-dire dont les rayons ne sont pas mobiles et des ruches dont l’agrandissement, soit le rajout d’une hausse, se fait par le bas.

Frère Adam (1898-1996)

Grande figure de l’apiculture du 20ème siècle, frère Adam, né dans le sud de l’Allemagne, entre à 11 ans au monastère bénédictin  de Buckfast, dans le Devon. Affecté au rucher, il est confronté au problème de l’acariose des trachées, un acarien qui provoque de graves dégâts dans les ruches. Il s’adonne à la sélection de souches résistantes au parasite et à travers de nombreux voyages “A la recherche de la meilleure abeille”, il parcourt l’ensemble de l’aire de distribution d’Apis mellifera, et en rapporte les meilleures reines qu’il croise avec celles de ses propres élevages. Ainsi naît l’abeille Buckfast, une souche issue de nombreux croisements et l’une des plus répandue dans le monde.

 

Frère Adam, abbaye de Buckfast, 1918
Abbé Léon Gapany (?-1956), curé de Vuippens, président de la Société romande d’apiculture, SAR, durant la 2ème guerre mondiale

Trois prêtres présidents de la Société d’apiculture de la Gruyère au 20ème siècle

Abbé Léon Gapany, curé de Vuippens, 1921-1953 (32 ans!).

Abblé Dubey, de 1957 à 1959

Abbé Michel Robatel, curé de Crésuz, de 1994 à 2002

Abbé Gapany, Vuippens, 1935

 

Francis Saucy

Francis Saucy, Docteur ès sciences, biologiste, diplômé des universités de Genève et Neuchâtel, est spécialisé dans le domaine du comportement animal et de l'écologie des populations. Employé à l’Office fédéral de la statistique, Franci Saucy est également apiculteur amateur et passionné, et il contribue par ses recherches et ses écrits à l'approfondissement des connaissances sur les abeilles et à leur vulgarisation dans le monde apicole et le public en général. Franci Saucy fut également élu PS à l'exécutif de la Commune de Marsens, dans le canton de Fribourg de 2008 à 2011 et de 2016 à 2018. Depuis mars 2019, Franci Saucy est rédacteur de la Revue suisse d'apiculture et depuis le 15 septembre 2020 Président de la Société romande d'apiculture et membre du comité central d'apisuisse Blog privé: www.bee-api.net

Une réponse à “…étaient de divine origine….

  1. Bien sûr que les abeilles sont d’origine divine.

    Même si, selon la fameuse formule attribuée à Einstein (“Le jour où les abeilles disparaitront …”), elles disparaissent à l’instar du lombric (cf blog Porret) et de milliers d’autres espèces chaque jour. C’est dire le futur de l’homme.

    Bon, moi, je suis un vieux con, mais toute la jeunesse… !
    🙁

    P.S. J’ai la chance, au moins de ce point de vue et pour l’instant, de vivre au cul du monde, où il n’y a pratiquement pas de pesticides et j’ai des abeilles sauvages, sans doute noires 🙂

    Bonne année quand même

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