Intégration: en Suisse mieux qu’ailleurs ?

Le Centre national de compétence sur les migrations « NCCR – On the move » de l’Université de Neuchâtel accueillait jeudi 3 décembre Thomas Liebig expert des migrations et du marché du travail à l’OCDE. Sa conférence portait sur les résultats d’une vaste comparaison de l’intégration des immigrés dans les pays de l’OCDE. Ce projet, bien qu’il envisage un nombre d’indicateurs un peu plus restreint que ne le fait l’Office fédéral de la statistique, offre le grand avantage de pouvoir positionner la Suisse en regard de nombreux autres pays d’immigration. Le site de l’OCDE offre à cet égard un remarquable outil interactif permettant de choisir les critères de comparaison et les pays à comparer.

L’impression qui se dégage est tout en nuances. L’intégration y apparaît comme un processus de longue haleine. De manière générale et dans tous les pays, les immigrants se retrouvent dans des situations de désavantage que ce soit dans le domaine de la langue, du logement, de la santé, de l’école ou du marché du travail. Avec le temps, eux et leurs enfants trouvent cependant pour la plupart leur place dans une société qu’ils contribuent à transformer.

Les grands facteurs explicatifs des différences d’intégration entre pays relèvent de trois grandes familles. Le profil des migrants eux-mêmes (ainsi un niveau de qualification élevé à l’entrée facilite l’intégration), la situation du pays d’accueil (la bonne conjoncture est évidemment la grande chance de la Suisse) et les politiques d’intégration qui appuient ou au contraire freinent la participation des immigrés. Ces dernières ne sauraient avoir autant d’impact que les deux premières mais ce sont les seules sur lesquelles il est possible d’agir. Ce n’est que récemment, avec la mise en place des Programmes d’intégration cantonaux que la Suisse en a véritablement pris conscience.

Il ressort des différents indicateurs présentés que la Suisse et ses immigrés s’en tirent plutôt bien. Ces derniers sont, en particulier, bien intégrés sur le marché du travail. Ils exercent le plus souvent des activités en rapport avec leurs compétences et sans déclassement professionnel[I1] . Ils sont en outre moins nombreux à se sentir discriminés[I2] , même si l’on sait que la discrimination existe bel et bien envers certains groupes.

L’opinion des Suisses à l’égard de l’impact économique de la migration s’avère par ailleurs moins défavorable que dans la moyenne européenne, même si la démocratie directe donne aux mécontents plus d’occasions de s’exprimer.

C’est dans le domaine de la formation que la Suisse déçoit. Sur la base de l’expérience des migrants des années soixante à quatre-vingt, on s’était en effet habitués à l’idée que le système scolaire parvenait bien à faire face aux défis de la migration. L’étude de l’OCDE montre pourtant que la mobilité sociale, dont l’école devrait être garante, reste particulièrement difficile en Suisse. Ainsi la proportion des jeunes migrants obtenant un diplôme supérieur reste faible et la proportion d’élèves qui parviennent malgré un niveau socio-économique modeste de leurs parents à obtenir de très bons résultats scolaires est quatre fois inférieure chez les enfants immigrés (2 fois chez les enfants nés en Suisse de parents immigrés).

L’un des grands intérêts de l’étude dans le contexte actuel est qu’elle permet dans une certaine mesure d’observer le cas spécifique de la migration des réfugiés. Les constats à cet égard tranchent avec les messages parfois très optimistes émis récemment, surtout en Allemagne, par certains milieux économiques. A l’évidence les pays où – comme en Suède – la part de la migration humanitaire s’accroît rencontrent des difficultés d’intégration accrues.

La Suisse ressort de l’étude comme le pays ayant connu la plus forte immigration par habitant au cours des années récentes. La proportion de l’immigration de réfugiés y est, elle aussi, en croissance. Pour continuer à obtenir de bons résultats et corriger les déficits elle se doit de redoubler d’effort en matière de politique d’intégration.

 

OCDE et Union Européenne (2015), Les indicateurs de l'intégration des immigrés 2015 – Trouver ses marques, Paris, OCDE (2015)

 


 [I1]17% de surqualifiés contre 36% dans l’OCDE

 [I2]9% contre 17%.

 

 

Etienne Piguet

Professeur de géographie à l’Université de Neuchâtel et Vice-président de la Commission fédérale des migrations, Etienne Piguet s'exprime à titre personnel sur ce blog.

Une réponse à “Intégration: en Suisse mieux qu’ailleurs ?

  1. Bonjour

    J’espere ne pas etre boycottee….ayez s’il vous plait l’amabilite d’entendre la voix des immigres meme si cela ne vous plait pas…
    Je peine a comprendre ces etudes, probablement biaisees, car la realite que je vois est totalement differente. Tous les gens que jai connus issus de l’immigration sont partis, des espagnols, italiens….sintegrer en Suisse meme pour des gens nes en suisse s’avere etre la galere…

    Ma mere devait passer des rayons x comme du betail…a quand un article de vitre part sur le traitement criminel vis a vis des saisoniers?

    Je suis universitaire et j’ai lhabitude d’etre mobbee, insultee, et viree pour des anneries…la suisse est un pays hostile…

Les commentaires sont clos.