Des bourses d’études pour réguler l’immigration…

Mes étudiants du Master en géographie « Espaces de la mondialisation » et du Master interdisciplinaire « Migration et citoyenneté » ne chôment pas. A la veille des examens, ils confirmeront que leur pensum est lourd. Acquérir 90 crédits ECTS sur une année et demi, c’est tout simplement un emploi à plein temps avec 5 semaines de vacances par an (1 ECTS = 25/30 heures de travail effectif).

Le fait que seule une petite minorité d’étudiants puissent actuellement bénéficier de bourses implique qu’une majorité doit ajouter au temps d’étude un travail rémunéré. C’est le cas de trois quarts des universitaires. L’un de mes étudiants me raconta un jour qu’il se levait tous les matins à 5h pour faire de la conciergerie dans différents immeubles avant d’aller aux cours durant la journée et de travailler dans un fast-food le soir… Essayez de lire « The Ethics and Politics of Asylum » ou « Les théories des migrations » dans ces conditions…

Les résultats sont préoccupants: les études se rallongent, le niveau est difficile à maintenir pour les enseignants et beaucoup d’étudiants abandonnent ou échouent aux examens. Ce fut le cas du malheureux « concierge-burgerman-étudiant » ci-dessus…

C’est là qu’entre en jeu la question migratoire: confrontés à une pénurie de main-d’oeuvre, les employeurs se tournent – Accord de libre-circulation avec l'UE aidant – vers l’extérieur et l’immigration atteint des records. Avant de décréter de grands efforts nationaux assez flous pour combattre la pénurie de personnel qualifié, un bon système de bourse semble l’évidence. Ceux qui en Suisse dénoncent l’immigration à grands cris ne semblent pourtant pas de cet avis. Peut-être leur manque-t-il quelques ECTS…

Etienne Piguet

Professeur de géographie à l’Université de Neuchâtel et Vice-président de la Commission fédérale des migrations, Etienne Piguet s'exprime à titre personnel sur ce blog.