Dormir tout près de Donald Trump

En m’installant à New York, début novembre, je suis d’abord passée par Airbnb. Et comme je m’y étais prise un peu au dernier moment, je n’avais plus beaucoup de choix du côté de Brooklyn, où je voulais passer mes premiers jours new-yorkais. Il a donc fallu se décider rapidement, entre cinq offres différentes. Tiens, cet appartement-là semble pas trop mal. Vendu! Une fois sur place, on se dit qu’on aurait pu faire un peu plus attention. Pour éviter de se retrouver dans une espèce de cave sans fenêtre (ou plutôt si, mais des fenêtres qui mangent le trottoir), dans un sympathique quartier jamaïcain de Flatbush, mais où on peut compter au moins une quarantaine de «groceries» jamaïcaines, avant de trouver une bouche de métro.

En prenant le temps de regarder plus attentivement les offres d’Airbnb, j’aurais surtout très bien pu me retrouver à quelques mètres de celui qui allait devenir le nouveau président des Etats-Unis. Car une propriétaire d’un appartement de la Trump Tower, sur la 5ième avenue, à Manhattan, avait discrètement mis son bien sur la plateforme, pour un prix oscillant entre 300 et 450 dollars la nuit. C’est le New York Times qui le raconte dans son édition de mardi. Et qui du coup a provoqué le retrait de l’annonce du site, quelques heures seulement après avoir joint la société pour un commentaire.

L’appartement était disponible depuis le mois de septembre. Il était déjà réservé pour mars, avril et mai. Un journaliste du New York Times l’avait booké pour un weekend en avril. La propriétaire lui a tout de suite fixé un rendez-vous au bas de l’immeuble, en précisant qu’il ne fallait pas parler d’Airbnb au personnel mais plutôt faire croire qu’il venait lui rendre visite. Mais deux jours plus tard, la femme annule la réservation: elle avait découvert que son nouvel hôte était journaliste, et ne voulait pas que son appartement soit utilisé pour se rapprocher de Donald Trump ou pour être mentionné dans un article. Trop tard.

La location était par ailleurs illégale, la propriétaire n’ayant théoriquement pas le droit de sous-louer son appartement moins de 30 jours si elle-même n’y loge pas en même temps que son hôte. Le Secret Service, qui quadrille l’immeuble, était-il au courant que cette femme louait régulièrement son appartement? Airbnb ne l’avait visiblement pas découvert. L’annonce ne mentionnait bien évidemment pas directement la Trump Tower, et ce n’est qu’une fois que des gens étaient intéressés par son appartement que la propriétaire donnait des détails supplémentaires. Le texte de l’annonce précisait toutefois qu’il s’agissait d’un building «ultra-sécurisé et unique». Et qu’il convenait d’être politiquement neutre: «c’est un immeuble particulier, il ne faut pas montrer ses opinions politiques». Un étudiant mexicain qui y était le mois dernier a posté le commentaire suivant: «Le seul inconvénient quand vous arrivez est que vous devez passer par un contrôle des services secrets, un peu comme dans les aéroports. Mais une fois que vous l’aurez fait la première fois, vous n’y prêterez même plus attention».

Bon, dans ma cave jamaïcaine à Flatbush, j’avais au moins l’avantage de ne devoir me soumettre à aucun contrôle.

 

Valérie de Graffenried

Valérie de Graffenried est la correspondante du Temps aux Etats-Unis.

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