L’ombre de Donald Trump sur les Oscars et un faux gagnant

Forcément, on s’y attendait. La cérémonie des Oscars version 2017 était très politisée. Avec une question qui était sur toutes les lèvres: pendant combien de temps Donald Trump allait-il réussir à se retenir de twitter? Le président avait une bonne excuse: il était au Bal des gouverneurs. Mais son «intérêt» pour les Oscars, il l’avait déjà affiché, en 2014, sur Twitter. En suggérant d’en être le maître de cérémonie, «pour secouer un peu».

Pour la 89e édition, Trump donc, à défaut d’être le maître de cérémonie, était au coeur des attentions. Précisément, parce qu’il a décidé de «secouer un peu», mais sur un terrain dépassant largement celui de Hollywood. Jimmy Kimmel, le maître de cérémonie, humoriste et animateur, n’a cessé de lui lancer des piques, entre larmes des oscarisés, phrases-slogans de type «all you need is love», lâcher de bonbons et lâcher de touristes (si, si). Il a d’abord rappelé l’audience importante des Oscars, aux Etats-Unis, et «dans 25 pays qui maintenant nous détestent».

Puis, il a demandé une ovation forcément non méritée pour la «surévaluée» – overrated – Meryl Streep. Une allusion aux attaques pas très fines du président des Etats-Unis sur son réseau social favori contre l’actrice, qui a osé s’offusquer de son imitation d’un journaliste du New York Times handicapé. C’était lors de la cérémonie des Golden Globes le mois dernier. Enfin, il y a eu ceux qui ont brandi leur Oscar «au nom de tous les immigrés».

Et ceux qui n’ont pas pu le faire. Comme Asghar Farhadi, qui a reçu l’oscar du meilleur film étranger avec The Salesman. Victime directe du décret anti-islam de Donald Trump, le réalisateur iranien n’a pas pu entrer aux Etats-Unis. Il a fait lire un discours fustigeant la politique discriminatoire du président américain. Court et direct. Gael Garcia Bernal a lui, comme Mexicain, dénoncé l’érection d’un certain mur qui fait beaucoup parler de lui ces temps. Scarlett Johansson, pourtant très anti-Trump – elle s’est montrée lors de la Marche des femmes à Washington le 21 janvier -, a choisi une autre tactique: l’ignorance totale. Idem pour Leonardo DiCaprio, qui a remis l’Oscar de la meilleure actrice à Emma Stone.

Vendredi soir déjà, George Clooney avait ouvert les feux, en France, en recevant son César d’honneur. Il a pu faire sentir son aversion pour Donald Trump, avec l’aide de Jean Dujardin, qui a volontairement proposé une traduction parfois fantaisiste de certains de ses propos.

La cérémonie des Oscars vient de se terminer. Et Donald Trump n’a toujours rien tweeté. Ce n’est pas «fake news». Par contre, l’équipe de La La Land a cru pendant cinq bonnes minutes, le temps de monter sur scène, avoir remporté l’Oscar du meilleur film. Jusqu’à ce qu’une cruelle erreur d’enveloppe désigne le véritable gagnant: Moonlight. Voilà ce que l’on retiendra désormais des Oscars 2017.

Valérie de Graffenried

Valérie de Graffenried est la correspondante du Temps aux Etats-Unis.

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