Le Super Bowl, c’est aussi de la politique

Cela ne m’avait pas traversé l’esprit. Pire, je n’étais pas vraiment au courant. Enfin si, mais cela m’était sorti de la tête. Je m’apprêtais donc à passer un dimanche soir tranquille, quand soudain, une amie qui me veut du bien (enfin, je commence à en douter) m’envoie un message: «Tu vas regarder le Super Bowl ce soir? C’est le grand truc ici, genre finale du mondial du foot chez nous. A ne pas rater, pour te mettre dans l’ambiance!». Ah. Ok. Soit. Elle me dit ensuite que Lady Gaga assurera le spectacle de la mi-temps. Bon. Et, puis, l’argument qui tue: «En plus la politique s’est immiscée dans tout ça, car dans l’équipe des Patriots, ils sont tous ou presque des supporters de Trump – surtout le quarterback Tom Brady, mari de la top model Gisele Bündchen -, et ça ne plaît pas à tout le monde». Ok, c’est bon, je regarde. A peine arrivée aux Etats-Unis, je dois probablement passer par ça pour parfaire mon intégration. Mais je me sens un peu lâchée: mon amie, après m’avoir dit tout ça, m’envoie un dernier message: «Perso, je ne comprends rien à ce jeu, même si on m’a expliqué 100 fois. Tu me raconteras car moi je ne vais pas regarder».

(Photo by Donna Connor/WireImage)

Raconter? Mais raconter quoi? Ce qui m’a frappée le plus? L’herbe est sacrément verte dans le stade du Super Bowl. Et ces shorts-leggings-pantacourts (ça a un nom?) sont parfois assez seyants, ma foi. Les traces de peinture sous les yeux des joueurs? Pas mal, pour rendre les regards plus intenses. A moins que cela ne protège des moustiques? Vérification faite, cela sert quand même à quelque chose: c’est censé atténuer la réflexion des spots de lumière et permettre aux robustes gaillards de mieux se concentrer sur l’action.

Bon, soyons sérieux: je relis vite cet article publié dans le Temps pour me rendre compte du phénomène qu’est le Super Bowl. Plus de 110 millions de spectateurs en 2015, idem en 2016, ça le fait. L’affrontement entre les Patriots (New England) et les Falcons (Atlanta) devrait en attirer tout autant cette année. Et le président des Etats-Unis ne manquerait ce rendez-vous sportif pour rien au monde. Alors moi non plus.

Donald Trump s’est d’ailleurs confié à Fox News quelques heures avant le début de cette grande finale de la Ligue nationale de football américain. Pour dire que les Patriots allaient gagner parce que Tom Brady est un winner. «L’autre équipe est fantastique», a-t-il ajouté. «Mais les Patriots ont moins de pression, car ils ont déjà gagné le titre. Une fois que vous avez gagné, il y a moins de pression». Il a eu raison. Ils ont gagné. Et Tom Brady, est devenu le premier quarterback à remporter le titre suprême à cinq reprises. C’est un proche de Donald Trump, tout comme Robert Kraft, le propriétaire de New England, et l’entraîneur Bill Belichick. Tom Brady en a d’ailleurs un peu marre d’être sans cesse questionné sur sa relation avec le président qui vient de semer le chaos avec son décret anti-musulmans. Il préfère rester évasif. Sa réponse standard: «Ce n’est pas parce que c’est un ami depuis seize ans que je partage tout ce qu’il fait». Donald Trump, lui, a tweeté à peine Tom Brady essuyait ses larmes d’émotion. Et l’a gratifié d’un: «Wow!».

Il y a donc l’idylle façon «Je t’aime, moi non plus» entre Brady et Trump qui a pesé sur le match et l’a rendu d’autant plus savoureux. Puis, une Lady Gaga virevoltante qui a profité de sa prestation pendant la mi-temps pour délivrer un message de tolérance. Enfin, Airbnb qui a malicieusement fait un pied de nez au décret anti-immigration de Donald Trump à travers une publicité diffusée pendant le match. Une publicité dont la diffusion a été précédée d’un tweet de son directeur général, Brian Chesky, en faveur des réfugiés: «Nous allons verser 4 millions de dollars sur quatre ans au Comité international de secours pour subvenir aux besoins des populations déplacées dans le monde».

Ce Super Bowl, ça reste finalement très politique. Promis, l’année prochaine, je serai prête!

Valérie de Graffenried

Valérie de Graffenried est la correspondante du Temps aux Etats-Unis.

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