Yves Jeannotat, ce cœur a donc fini par s’arrêter

Yves Jeannotat est parti courir sur la voie lactée, le 6 novembre. Il avait 92 ans. Tout a déjà été écrit sur le palmarès de ce champion de course à pied, de même que sur sa plume affûtée et poétique, car il était aussi journaliste de talent. Mais lorsqu’on l’interrogeait sur son plus grand titre de gloire, il répondait que c’était d’avoir su négocier le passage de la compétition à la course à pied pour le plaisir.

À y regarder de plus près, c’est vrai qu’ils ne sont pas si nombreux, les championnes et les champions qui ont réussi à descendre des podiums pour se mêler, avec joie et gourmandise, au peloton des courses populaires. Parmi nos mythiques vétérans, il y a la grande Katherine Switzer, première femme à courir le marathon de Boston (1967). Il y a Raymond Corbaz, à qui les “populaires” (moi la première!) et leurs pieds doivent tant… et puis il y avait Yves Jeannotat. Rien qu’à l’entendre, ou à le lire, on n’avait qu’une envie: mettre les chaussures de course et partir pour un footing dans les bois.

Yves Jeannotat, vainqueur à deux reprises de Morat-Fribourg. La première fois, en 1959, il avait pris le départ contre l’avis du médecin qui trouvait que son cœur “battait trop lentement”, s’amusait-il. Un cœur qu’il devra finir par faire opérer à passés 80 ans et qui demandait naïvement à son chirurgien ce qu’il avait bien pu faire de faux pour en arriver là!

Un Jeannotat farceur et frondeur, fou de course à pied et de nature, poète et passionné, qui va nous manquer.

Emmanuelle Robert

Après des études de lettres et un parcours de journaliste, Emmanuelle Robert a travaillé dans la coopération au développement. Active dans la communication (le jour), elle écrit (la nuit) et est l'auteure de Malatraix (Slatkine, Genève, 2021). Elle est aussi coach professionnelle et amatrice de course à pied.