Je vous écris aujourd’hui pour vous informer sur un changement important concernant ce blog “Toute une Affaire”.
Comme vous le savez peut-être, l’espace blogs du journal LeTemps est en train de fermer pour tous les contributeurs, et cela sans distinction. Je remercie le journal LeTemps pour l’hébergement accordé depuis janvier 2019.
Cependant, cela ne marque pas la fin de mon engagement envers la création de contenu de qualité et le partage d’informations intéressantes dans le domaine des entreprises, la gestion de crise et des organisations, les stratégies, l’innovation, les processus.
Et pour la suite des publications ?
Par le passé, j’ai eu le plaisir de collaborer avec plusieurs autres plateformes. Dès lors, je vous invite de me suivre sur ces canaux; et selon liste ci-après.
La Suisse Romande est (toute) petite mais ôh, combien vivace — alors c’est un bon au revoir, et pas un adieu.
L’ensemble de mes publications en français
Si les archives sur le site LeTemps ne devaient pas fonctionner comme prévu, retrouvez alors la lecture gratuite de ces archives et articles sur mon propre site et tels qu’ils ont été publiés : https://www.debbaut.solutions/fr/tag/toute-une-affaire/
Sur l’ensemble de ces canaux, découvrez de nouvelles publications, dont certaines teintées d’une ironie subtile sur le monde des entreprises, comme celles qui ont déjà ravi les lecteurs de ce blog sur le site LeTemps. Voici une courte sélection.
Le CEO d’Apple se lève à 3:45. D’autres, plus paresseux, se réveillent au maximum une demi-heure plus tard à 4:15. C’est ainsi aux États Unis. En Suisse, l’entrepreneur se réveille à 3:30. Enfin, s’il arrive à dormir. Suite …
Le chat, lui, n’est jamais allé à l’école, ne suit pas de formation continue, n’a pas de profil LinkedIn, et pourtant, il excelle pour développer et gérer ses affaires. Suite …
Le résultat des séminaires de “design thinking” reste globalement le même: après quelques mois, plus personne ne s’en souvient encore de ces réunions stratégiques. Suite …
En pratique, les entreprises font face à des défis liés soit à un excès, soit à une absence de processus, ou encore à des processus désorganisés ou non standardisés. Suite …
Les cadeaux destinés aux entreprises sont un moyen de témoigner de la gratitude, de l’appréciation et du respect, mais aussi un moyen de renforcer les relations d’affaires entre les parties. Du moins, en théorie. Soyons sincères, qui n’aime pas recevoir un cadeau, aussi insignifiant soit-il ?
Les cadeaux d’affaires peuvent ainsi prendre la forme de cadeaux perçus comme innocents — par exemple, une boîte de chocolat ou quelques objets publicitaires.
Mais il y a aussi des cadeaux plus conséquents comme de l’argent, voyages, divertissements, ou encore sous la forme d’autres faveurs envers les clients plus importants, ou les collaborateurs qui se sont surpassés dans l’atteinte de leurs objectifs professionnels.
Là où les choses se compliquent c’est quand les cadeaux ont une intention plus ou moins cachée envers le destinataire. Car oui, il y a toujours une idée cachée derrière un cadeau. Or, la période de fin d’année est particulièrement délicate.
Cette publication passe brièvement en revue les risques de trafic d’influence par les cadeaux, différents mécanismes d’action, ainsi que quelques solutions pour éviter les détournements qui peuvent impacter négativement une entreprise ou organisation.
Depuis longtemps, les cadeaux sont une forme traditionnelle d’influence au sein des entreprises. La période idéale est celle de fin d’année — l’atmosphère traditionnellement festive participe grandement à accepter plus aisément ces gratifications.
Après tout, c’est la fin d’une année et l’esprit des fêtes fait que les barrières tombent un peu.
Les cadeaux pour les employés
Les recompresses sont d’abord utilisées pour récompenser les employés, mais aussi pour les fidéliser tout en leur témoignant de la reconnaissance du travail effectué. Mais ces cadeaux peuvent influencer le comportement et les performances des employés de diverses manières.
La forme la plus courante et communément admise dans le monde des entreprises est l’octroi d’une prime ou d’un salaire supplémentaire aux employés qui présentent des bonnes performances ou qui ont atteint d’objectifs spécifiques complexes. Mais il y a aussi des récompenses comme des voyages dans des endroits plus luxueux, ou des cadeaux matériels d’une grande valeur, comme une montre ou une voiture.
Cette pratique a pour but de motiver à travailler davantage encore, et à augmenter ainsi la productivité future. Cette forme de cadeau peut également être utilisée pour récompenser les collaborateurs qui assument des responsabilités supplémentaires.
Une autre méthode est consiste à offrir aux employés des avantages en nature, ou des réductions sur des produits ou services auprès des entreprises partenaires. C’est un aussi un signal aux autres collaborateurs de faire plus, afin de recevoir aussi des cadeaux — la jalouse entre collègues est bien réelle.
Par exemple, une entreprise peut offrir des réductions sur un abonnement fitness dans une salle de sport, un repas à midi dans les restaurants proches de son siège, la liberté d’utiliser la voiture d’entreprise à but personnel, ou l’utilisation des points de fidélité sur un billet d’avion lorsqu’ils voyagent en famille. Ce type de cadeaux officieux sont admis, et sans pour autant se compliquer la vie avec la partie administrative.
Les cadeaux pour les clients
Les cadeaux pour les clients peut prendre de nombreuses formes, comme les remises et articles gratuits, en passant par des offres plus explicites d’argent ou objets à échanger contre une “monnaie virtuelle” comme les points acquis après des achats. Ces pratiques sont acceptée et même attendues dans certains secteurs, comme le commerce de détail B2B ou l’industrie hôtelière.
Cependant, dans certaines situations, ces cadeaux sont contraires à l’éthique et illégales quand le client est une entreprise. Certains cadeaux peuvent créer des situations dans laquelle les clients ne prennent pas leurs décisions en fonction de ce qui est le mieux pour leurs équipes ou pour l’entreprise — mais plutôt en fonction de ce qu’on leur offre en échange. Cela peut conduire à prendre de mauvaises décisions pour l’entreprise cliente.
Les cadeaux deviennent problématiques quand un représentant commercial propose à un client des vacances gratuites, ou des produits de luxe ou argent, ou des rabais en échange d’avis positifs en ligne, ou la fourniture de services ou produits gratuits à titre personnel quand l’achat se fait au nom de l’entreprise.
Afin de prévenir la corruption des clients, les entreprises doivent mettre en place des politiques claires indiquant quels types de récompenses commerciales sont acceptables, et à quel niveau la notion de pots-de-vin comme incitation n’est plus acceptable.
Idéalement, les entreprises doivent s’assurer que tous leurs employés connaissent ces politiques envers les clients existants, et que tous les cas de corruption de clients sont signalés et traités de manière appropriée.
Enfin, les entreprises doivent s’efforcer de créer une culture éthique, afin que les clients se sentent à l’aise, et ne pas avoir le doute si le prix du cadeau est intégré dans le prix de vente. Ainsi, le cadeau pour les clients doit avoir un rôle d’appréciation et pas toujours d’incitation commerciale.
Les cadeaux pour les entreprises
Lorsque ces cadeaux s’échangent entre entreprises, ils peuvent devenir une forme de corruption.
Certains cadeaux peuvent cacher un échange qui est demandé immédiatement ou laissé pour plus tard, ou encore, pour obtenir un avantage injuste dans une transaction commerciale, ou une compétition sous la forme d’enchères ou concours. Par exemple, une entreprise peut offrir à une autre entreprise un cadeau dans l’espoir d’avoir accès à sa liste de clients ou pour signer un gros contrat.
La pratique de la corruption d’entreprise est un délit grave, qui peut avoir de graves conséquences. En effet, l’utilisation de cadeaux comme forme de corruption d’entreprise est courante, malgré son illégalité. Cette approche peut entraîner des amendes, des peines de prison, voire même une atteinte à la réputation de l’entreprise. En outre, elle peut mettre l’entreprise dans une position difficile si ces informations sont rendues publiques.
Même si un cadeau est offert avec les meilleures intentions du monde, il peut être considéré comme une forme de corruption. La meilleure méthode afin que les entreprises évitent le soupçon de corruption est de s’abstenir d’offrir ou de recevoir des cadeaux, surtout pour la période en fin d’année.
En même temps, si une entreprise offre un cadeau, celui-ci doit être petit et peu coûteux — comme une carte pour souhaiter bonnes fêtes, ou une boîte de chocolats, ou une boite de biscuits ou bricelets. En outre, le cadeau d’entreprise ne doit pas être lié à l’attente de recevoir quelque chose en retour, même si cette attente existe toujours.
Les limites des cadeaux d’entreprise
Les cadeaux ont des limites — autant pour ceux qui les achètent que ceux qui les reçoivent. En effet, il peut s’agir d’une forme de corruption lorsque les cadeaux sont offerts au-delà de ce qui devrait être considéré comme normal ou coutumier.
Dès lors, les entreprises doivent fixer des limites précises quant au montant qui peut être dépensé ou reçu, et s’assurer que les cadeaux sont bien en rapport avec les relations d’affaires. En effet, la corruption peut être facilement dissimulée selon une grande variété de transactions.
Certaines entreprises considèrent les cadeaux et la forme de corruption qui y est associée comme une composante inévitable dans le fonctionnement des entreprises.
Il est donc important d’aborder cet aspect dans le cadre de la stratégie d’entreprise; la lecture entre les lignes est souvent bien utile pour les personnes avisées. L’ignorance comme stratégie d’entreprise est une approche risquée dans ce type de situations.
Dans certaines situations et contextes, le fait d’offrir un cadeau, et cela peut importe sa valeur, peut être perçu comme controversable.
En soi, ce n’est pas interdit par la loi d’offrir un cadeau à ses collaborateurs, employés, clients, ou aux autres entreprises.
Par contre, les tentatives d’influencer des décisions et corrompre, surtout au niveau gouvernemental est une action qui est punissable dans les législations de nombreux pays.
Dès lors, il est important pour les entreprises d’être conscientes quant aux conséquences potentielles, et veiller à ce que les cadeaux ne constitue pas, ou ne sont pas être identifiés clairement à une forme de corruption.
Les processus de contrôle pour les cadeaux d’entreprise
Le contrôle du processus de corruption est une partie cruciale de toute organisation commerciale, car il peut aider à prévenir les pratiques potentiellement illégales, réduire les risques de fuite des talents, et maintenir un environnement commercial plus éthique que ses compétiteurs.
Il est donc important d’élaborer une politique et une procédure décrivant les mesures à prendre en cas d’allégation de corruption. Un processus de contrôle pour les cadeaux d’entreprise fait partie intégrante de ces politiques.
Tout d’abord, une entreprise doit créer un cadre d’évaluation des risques permettant de rapidement identifier et documenter les risques de corruption dans le cadre de ses opérations courantes. Cela doit inclure un examen de la conformité aux lois et règlements anti-corruption, ainsi qu’un examen des politiques et procédures internes de l’organisation.
Les domaines couverts sont ceux qui ont un traditionnellement un contact direct avec une autre personne et peuvent en tirer un avantage — comme les départements de ventes, achats, logistique, ressources humaines.
Une fois l’évaluation des risques terminée, il est recommandé de créer un processus de signalement des actes de corruption et cela, dès que toute allégation est signalée, même par les bruits du couloir. Ce cadre de travail ne doit pas seulement inclure un processus d’enquête détaillé, mais aussi un formulaire de signalement.
Dans ce contexte, l’entreprise doit également créer un Programme de Prévention de la Corruption. Ce type programme permet également de traiter de manière proactive les risques de corruption. Par exemple, grâce à une formation et questionnaires réguliers, les collaborateurs et la direction ont les méthodes et le savoir pour identifier et signaler les activités de corruption potentielles.
D’ailleurs, il est possible d’automatiser une grande partie de ces opérations par un système de surveillance et d’évaluation constante des risques de corruption. L’automatisation robotisée des processus (Robotic Process Automation — RPA) est une méthode de plus en plus utilisée dans ce cadre.
Enfin, l’entreprise doit créer un programme d’audit interne pour examiner et évaluer l’efficacité de ses efforts de prévention de la corruption.
Ce programme doit inclure un examen des politiques et procédures internes de l’organisation, ainsi qu’une évaluation de l’efficacité du programme de prévention de la corruption. Un Code Déontologique peut également être utile dans certaines situations.
Quelques pistes pour la création d’un Programme de Prévention de la Corruption
Des mesures proactives peuvent aider à réduire les risques d’une mauvaise utilisation des cadeaux d’entreprise. Parmi ces mesures, il est à noter une communication claire, surtout au niveau des contrats gouvernementaux ou entre les entreprises, des procédures de conformité rigoureuses, ou l’éducation et la sensibilisation quant à ces aspects.
L’anonymisation totale des fournisseurs de cadeaux peut être une idée intéressante, surtout pour vérifier si l’idée d’appréciation est réelle ou motivée par d’autres intérêts. De même, les récompenses pour avoir résisté aux tentatives de corruption par les cadeaux peut être une autre piste utile.
En mettant en œuvre ces quelques mesures, une entreprise peut créer un système de contrôle du processus de corruption au sein de son entreprise. Cela permet de s’assurer que ses opérations restent éthiques et conformes aux lois et réglementations anti-corruption qui s’appliquent selon la région ou le type d’entreprise.
Quand le trafic d’influence se transforme en corruption
Le trafic d’influence a toujours existé à l’intérieur des entreprises et dans les relations commerciales entre les organisations. C’est la base même pour fédérer des personnes autour d’une idée ou d’un projet intéressant.
Mais quelque fois, ce trafic d’influence se transforme en corruption.
Et les situations d’influence sont aujourd’hui plus subtiles. La limite entre un cadeau symbolique à but publicitaire et un cadeau qui exige un retour de services ou autres avantages est de plus en plus vague.
Par exemple, faut-il accepter le joli panier avec produits régionaux ? Ou le repas fastueux avec un fournisseur de services ou un vendeur ? Ou accepter un voyage tous frais payés à l’étranger, dans un hôtel de luxe, et cela juste pour éventuellement faire connaissance avec quelques personnes clés ?
Ces questions ont été soulevées par le passé, notamment dans le domaine politique ou les organisation non-profit, en plus d’entreprises bien établies sur le marché. Certaines de ces situations ont été même jugées par la loi, mais paradoxalement, elles restent toujours d’actualité.
La corruption est définie comme un échange illégal de cadeaux d’une valeur élevée ou perçue comme étant élevée, comme de l’argent, ou autres formes de contrepartie — le but étant d’influencer le processus décisionnel. À son niveau le plus basique, la corruption consiste à offrir quelque chose de valeur afin d’obtenir un avantage injuste.
Mais la corruption au sein des organisations commerciales est une question complexe. Un certain nombre d’organisations et entreprises ont adopté des politiques visant à la prévenir, mais elle reste toujours un problème majeur. Il s’agit d’une question qui affecte non seulement les entreprises directement concernées, mais aussi le public, ainsi que l’environnement commercial et politique au sens large.
La cause la plus courante de la corruption est l’absence de normes éthiques et de responsabilité ainsi que les mauvais exemples de la direction elle-même. Le manque de confiance envers les responsables d’entreprise ou les institutions supposées contrôler ces dérives est de plus en plus visible.
Le récent scandale dans le parlement européen semblent aller dans ce sens: “«Les loups ne se mangent pas entre eux». Le pire c’est qu’il n’y a même plus de surprise devant ces typologies de scandales.
L’absence de normes claires et punitions
En effet, devant l’absence d’un ensemble de normes claires et d’un moyen pour les faire respecter et punir, alors la corruption peut devenir une pratique acceptée plus ou moins ouvertement au sein d’une entreprise ou toute autre organisation économique ou politique, et même au niveau des fondations ou associations non-profit.
La corruption peut être motivée par le désir d’obtenir un gain personnel, ainsi que par le désir d’obtenir un avantage sur les concurrents. Mais les conséquences de la corruption dans les organisations peuvent être considérables.
Les entreprises peuvent être tentées par les cadeaux d’entreprise sous la forme de corruption principalement en raison de facteurs économiques comme une concurrence intense pour les ressources ou les contrats.
Et la compétition est actuellement très importante pour un un grand nombre de secteurs.
Les secteurs compétitifs sont plus à risque de corruption
Ainsi, les récompenses pour contrats signés avec les agences marketing, ou tout autre service comme le soutien administratif, ou l’obtention de mandats de conseil en entreprise, voire même pour favoriser l’embauche de personnes pas toujours capables dans leur métier sont devenus un non-dit sous la forme d’un secret de polichinelle.
Il arrive très souvent que les responsables des achats dans une entreprise ou les responsables de ressources humaines ou toute autre personne à responsabilités ne se cachent même plus.
La question de “et moi, qu’est-ce que j’y gagne personnellement (!)” arrive dans les premières 10-15 minutes d’une discussion. Dans ce type de situations, le vendeur de services ou produits ne lance pas de démarches pour dénoncer ce type de comportements — après tout, la sagesse commerciale dit qu’il ne faut pas brûler les ponts.
Quant aux exemples sur les chercheurs d’emploi ou les candidats à la location d’un appartement, ceux-ci ne se trouvent pas toujours dans une position favorisée pour refuser.
Les exemples sont multiples, et affectent tous les aspects de la vie personnelle et professionnelle. Les scandales qui s’en suivent aussi.
La corruption cynique
Au niveau macro-économique, la situation actuelle n’a rien d’anormal.
D’ailleurs, les politiques néo-libérales encouragent ce type de comportement individualiste, sous le couvert d’une prétendue “main invisible” du marché.
Oh, l’ironie.
Ou plutôt le cynisme d’un système qui semble avoir perdu sa tête.
Dans la plupart des cas, les méthodes de corruption ne sont pas nécessairement choisies par nécessité directe, mais parce que ceux qui les utilisent pensent qu’elles leur donneront un avantage plus rapide et plus intéressant que par le cheminement classique.
Cette pensée est encore plus développée dans les environnements chaotiques et/ou avec une compétition déloyale. Quand il n’y a pas d’alternative économiquement viable à un choix dit “éthique” alors l’absence d’une autre solution se reflète dans la rentabilité et les flux de trésorerie.
En effet, l’éthique dans les affaires a une définition et une compréhension variable. De plus, aucune organisation, qu’elle soit ouvertement commerciale ou sous la cachette d’une étiquette non-profit, ne fonctionne selon des normes morales, mais seulement les obligations légales.
De plus, chaque humain est potentiellement corruptible.
Les personnes intègres sont rares.
La question est de savoir quel est le montant à partir duquel quelqu’un serait prêt à “céder” et se lancer dans toutes sortes de “combines” sachant que les risques légaux sont souvent insignifiants.
La réalité du terrain est que de plus en plus souvent, les cadeaux d’entreprise se transforment en pots-de-vin, avec des objectifs clairement affichées.
Ce qui était un moyen légitime pour garder les bonnes relations et un contact informel à but publicitaire est devenu aujourd’hui une démarche stratégique afin d’obtenir un avantage concurrentiel de base.
Or, de nos jours c’est devenu beaucoup plus difficile à gérer ce type de situations.
D’un côté, le public est devenu presque insensible à ce sujet — malgré les mobilisations temporaires contre les entreprises reconnues coupables de pratiques frauduleuses. Voici une sorte de “hyper-normalisation” soit l’acceptation incontestée de toutes décisions prises à un haut niveau, et avec une réduction intentionnelle des actions à un niveau individuel.
En effet, si les punitions ne sont pas exemplaires, cela ne fait que renforcer l’idée que “ils (!) sont tous pareil et toute résistance est inutile“.
Il y a une belle part de vérité dans cette pensée.
Aussi longtemps que les risques de punition sont plus bas que les avantages, alors ce type de situations vont continuer de plus belle et vont encore plus se généraliser. D’ailleurs, l’économie numérique s’y prête fort bien.
Anticiper les risques de corruption
Dans l’ensemble, pour anticiper les risques de corruption au sein d’une entreprise ou organisation, il est important d’établir des politiques et des procédures claires.
La partie implémentation consiste à de mettre en place des contrôles internes et des systèmes de suivi réguliers. Enfin, il faudra s’engager dans une évaluation et une gestion proactives des risques.
Cela pourrait impliquer la conduite périodique d’évaluations des risques permettant d’identifier les potentiels facteurs de corruption, puis la mise en œuvre de stratégies qui atténuent ces risques.
Il peut s’agir, par exemple, d’exercer une “due diligence” raisonnable sur des partenaires commerciaux potentiels, ou les collaborateurs, ou encore, d’implémenter quelques mesures visant à renforcer la transparence et la responsabilité individuelle. Cela passe par de processus d’audit et de reporting réguliers, ou des systèmes de surveillance anticipatifs, ainsi que de l’utilisation de la technologie pour surveiller les comportements suspects.
Faut-il donner et recevoir des cadeaux d’entreprise ?
Les cadeaux d’entreprise d’une grande valeur monétaire peuvent affecter des décisions comme la signature des contrats, les enchères, les embauches. Mais l’impact de ces “cadeaux” est aujourd’hui de plus en plus visible.
Je suis suffisamment âgée pour avoir connu une période quand la direction avait une “Politique” pour donner des cadeaux, mais … aucune pour les recevoir. Pas si loin que 25 à 30 ans en arrière, le budget “cadeaux à offrir” était tout aussi élevé que la place dans l’organigramme.
Les attentions sous la forme d’un cadeau avaient plutôt un rôle publicitaire, comme des calendriers, des stylos, un agenda annuel, un petit parapluie, des breloques, une tasse ou une calculette, et le tout, assorti du logo et le numéro de téléphone de l’entreprise. Ou encore, un arrangement floral, une petite boîte à chocolats, ou une corbeille de fruits.
Le bon vieux temps — quand un membre de la direction avait “droit” à un stylo ou une tasse, alors que sa secrétaire recevait presque toujours une minuscule agenda papier, et même pas avec une jolie couverture.
Au fil du temps, ces typologies de cadeaux sont devenus “innocents” — et surtout à l’égard de ce qui se fait aujourd’hui. Les cadeaux d’entreprise ont évolué, et leurs codes aussi.
La corbeille de fruits s’est transformé en panier à crabes.
Signe d’un changement de mœurs, un grand nombre d’entreprises et organisations se sont dotées d’un Code Déontologique, voire même des Programmes de Prévention de la Corruption. Ces documents indiquent clairement ce qu’un collaborateur peut ou ne peut plus faire quand il s’agit de recevoir ou donner un cadeau.
Les mécanismes et les motivations personnelles pour recevoir ou donner des cadeaux qui ont une intention plus ou moins directe de corruption sont complexes et variées — mais l’objectif final reste en priorité l’obtention d’un avantage plus ou moins mérité, et pas toujours un remerciement anodin.
La question controversée est de savoir s’il faut entrer dans ces “combines” et recevoir, ou offrir des cadeaux.
La réponse est que cela dépend d’une multitude de situations et cultures.
Comme nous l’avons pu voir plus haut, certains secteurs ou domaines hautement compétitifs fonctionnent sur la base de favoritismes, et les cadeaux aident à avoir une bonne base. Mais le choix de l’entreprise ou de ses responsables reste purement individuel.
Si les compétiteurs font la même chose, et que les lois sont intentionnellement vagues, et que les risques sont plus bas que les gains, alors il faudra peut-être procéder de la même manière pour garder son avantage compétitif.
Si, à l’inverse, les lois sont hautement punitives et que l’impact des scandales sera fortement négatif, alors il vaut mieux s’abstenir et faire le nécessaire pour justement, contrôler ce processus.
Un montant maximal sur les cadeaux acceptés peut ajouter une limite facile à comprendre — par exemple cela peut couvrir toute faveur d’une valeur monétaire supérieure à 70 francs environ. Cette valeur est celle que je recommande pour le marché suisse, car elle n’est pas suffisamment importante pour risquer la déshonneur.
Je suggère également de toujours déclarer les cadeaux données ou ceux reçus, et cela peut importe leur valeur. Ainsi, des formulaires en ligne standardisés et préremplis avec le nom, et avec seulement quelques cases à cocher facilitent cette surveillance. Un système d’information centralisé peut être utilisé avec de très bons résultats pour le suivi.
En outre, je recommande aux entreprises de ne jamais prendre des décisions stratégiques ou d’achats sous l’influence d’un cadeau (ni plusieurs). En effet, les risques de malversations financières, abus de pouvoir, favoritisme, fraude, et détournements de budgets impactent négativement le fonctionnement d’une entreprise ou organisation, et cela quel que ce soit sa taille ou son secteur d’activités.
Idéalement, une entreprise devrait prendre des décisions basées sur la logique, mais ce n’est pas toujours le cas.
Pourquoi ?
En général, l’humain est faible, et assez souvent, facilement manipulable.
Les esprits libres et éthiques sont rares.
Le pouvoir individuel a une grande capacité de corruption.
Et les cadeaux aident grandement à obtenir plus facilement des faveurs.
Le problème ne réside pas dans le système d’une entreprise ou organisation, ni dans les lois, mais dans le fait que ceux-ci sont administrés par des humains — et tous les humains sont imparfaits d’une manière ou d’une autre. Quelques solutions comme les processus de contrôle ou la limitation des pouvoirs décisionnels peuvent aider à réduire et anticiper les risques, mais le dénouement et le choix final ne pourra pas être contrôlé avec certitude.
Alors, faut-il encore recevoir et/ou donner des cadeaux d’entreprise ?
Pour la majorité d’entreprises, l’approche traditionnelle dans la gestion de crise consiste à faire venir une équipe externe de consultants spécialisés dans le redressement des projets et entreprises en difficultés, créer une Task Force subordonnée à la direction, et envoyer quelques communiqués à la presse afin de justifier les licenciements en masse.
Ces concepts et méthodes sont moyennent efficaces, et encore plus quand la direction est plus occupée à couvrir ses arrières tout en tentant maladroitement de mettre la faute sur des causes externes et ignore ses propres manquements.
Dans ces conditions, la gestion de crise a toutes les chances d’échouer. Les causes sont multiples. Une des raisons à ce échec est l’absence de décisions audacieuses appuyées par la direction ou le conseil d’administration, ainsi que le manque de compréhension du fonctionnement des structures opérationnelles pendant une gestion de crise.
Cette courte publication fait partie d’une série consacrée à la gestion de crise. Son contenu est un résumé à partir de plusieurs articles académiques que j’ai publiés dans le passé pour le compte des cabinet de conseils en entreprise. La liste partielle de mes publications originales sur ce sujet se trouve en fin de cet article.
Cadre général du groupe de travail de type Task Force
Les groupes de travail de type Task Force peuvent être crées pour satisfaire diverses stratégies d’entreprise, mais sont encore plus bénéfiques pendant les situations comme le redressement opérationnel et la restructuration d’entreprise. Les sections suivantes décrivent quelques démarches pratiques sur la Task Force, et que j’utilise depuis près de 30 ans pour améliorer la gestion pendant les situations critiques pour l’entreprise.
La dimension structurelle sera le point principal lors de la discussion ci-après sur les principaux aspects opérationnels d’une Task Force.
À la fin de ce court article, vous aurez une compréhension plus structurée sur la manière la plus efficace permettant de constituer et travailler avec une Task Force. Cet article résume en quelques paragraphes les aspects suivants :
1 – La gouvernance de la Task Force
2 – Le calendrier de la Task Force
3 – Les activités de la Task Force
4 – La localisation opérationnelle de la Task Force
5 – La gestion financière et opérationnelle de la Task Force
Généralement, une Task Force possède un large éventail de compétences technologiques, managériales et entrepreneuriales variées et pratiques, ainsi qu’une approche transversale et multidisciplinaire qui a fait ses preuves.
1 – La gouvernance de la Task Force
La structure générale de gouvernance clarifie non seulement les rôles, les responsabilités et le résultat global de l’entreprise.
Une implémentation pragmatique de la gouvernance pour la Task Force au début d’un mandat de rétablissement permettra de faire le lien entre la stratégie générale et les efforts opérationnels permettant le rétablissement des opérations courantes (“run the business“). En procédant de cette manière, le succès d’une telle mission se confirme après seulement quelques mois.
En revanche, les programmes dotés d’une structure de gouvernance plus sophistiquée prennent en compte plusieurs facteurs sur l’impact à long terme sur les opérations et la stratégie de l’entreprise.
Alors que les projets sont soumis à un calendrier bien défini, tous les programmes de gestion de crise et associés aux résultats globaux et financiers de l’entreprise sont souvent soumis à des contraintes de temps chaotiques.
Dans ces conditions, la garantie de la livraison dans les délais d’un produit ou d’un service spécifique est essentielle. Dans ces conditions, la garantie de la livraison dans les délais d’un produit ou d’un service spécifique est essentielle.
Certains obstacles, comme les difficultés liées aux jeux politiques internes, ou encore la nécessité de parvenir à un consensus pour absolument chaque décision risquent de compromettre le calendrier de livraison. Les résultats attendus de la Task Force sont ainsi bloqués par des barrières administratives. Dans ce contexte, une entreprise devrait s’abstenir à appliquer les même méthodes ou habitudes d’un autre temps, et qui ont justement contribué à la crise.
3 – Les activités de la Task Force
Une Task Force typique doit avoir une connaissance approfondie concernant la gestion d’entreprise mais aussi des compétences professionnelles et techniques individuelles et qui peuvent être très rapidement activées en cas de besoin. En effet, les entreprises en difficulté s’attendent à bénéficier d’une approche multidisciplinaire en termes de compétences techniques, managériales et entrepreneuriales.
Lors d’une crise, les membres du groupe de travail devront savoir “comment” et “pourquoi” répondre aux questions opérationnelles sur place, et cela dans les plus brefs délais.
Dans la plupart des cas, sur le plan des activités opérationnelles surtout pendant une gestion de crise, il n’est pas possible de trouver et d’embaucher à brève échéance un employé supplémentaire dont sa mission consisterait en seulement quelques corrections mineures et urgentes. C’est pourquoi, un membre de l’équipe Task Force doit être en mesure de couvrir aussi des tâches opérationnelles peut-être moins glorieuses que celles liées à la gestion stratégique.
Pour un certain nombre de structures à vocation professionnelle, il est possible d’avoir déjà au siège de l’entreprise ou ses unités administratives un PMO (Enterprise Project Management Office) soit un “Bureau de Projets” qui gère le pilotage des processus et activités permettant la livraison des projets.
La grandeur et complexité d’une telle structure PMO peut varier selon des facteurs comme le secteur d’activités, le nombre de collaborateurs, le degré de maturité d’entreprise. En même temps, la mise en place d’une telle structure peut être rapide pendant une situation de crise.
Grâce à cet outil, la Task Force peut ainsi se concentrer sur la constitution et le développement de nouvelles opérations nécessaires pendant la gestion de crise, et éviter ainsi l’échec des projets futurs et le dysfonctionnement dans les opérations courantes de l’ensemble de l’entreprise. Parallèlement à la concrétisation sur le terrain de la stratégie de redressement, une Task Force peut également fournir toute l’assistance pratique requise pour la continuité des opérations et la transformation d’entreprise.
Lorsqu’une Task Force efficace est présente sur place, une entreprise peut gagner un temps considérable en supprimant toutes les formalités inutiles et les jeux politiques interne. En outre, l’entreprise doit éviter d’appliquer “à la carte” les méthodologies habituelles dans la gestion de projet et de programme. Certes, il s’agit de laisser à des tiers le contrôle temporaire et dans un cadre clairement défini, mais pendant une crise il n’y a pas de temps à perdre pour chercher et blâmer les coupables.
5 – La gestion financière et opérationnelle de la Task Force
En règle générale, l’équipe de travail de type Task Force évitera de remplacer l’ensemble de processus existants, ou les pratiques financières, ou les dispositifs de contrôle globales qui existaient avant le déclenchement de la crise.
La Task Force doit immédiatement identifier toutes les relations et les interdépendances entre les projets transversaux du Programme de Gestion de Crise afin d’assurer les corrections essentielles au niveau du calendrier de livraison et les interventions liées au redressement financier.
En conséquence, un facteur important pour le succès de la reprise opérationnelle est la capacité de la Task Force à gérer simultanément les opérations de chaque jour du projet tout en gardant l’attention autant sur le programme global au niveau de l’entreprise que sur sa stratégie globale.
Une Task Force ne doit pas se limiter à seulement applique le principe bien connu de la “gestion par exception” (ad-hoc) mais devra aussi savoir suivre efficacement toutes les opérations sur site, en particulier au niveau du projet ou du programme. En général, la Task Force présente des rapports et recommandations régulières aux dirigeants de l’entreprise ou à la direction générale. Ces comptes-rendus portent principalement sur les changements, les besoins existants et futurs, ainsi que les réponses apportées ou les stratégies à suivre au niveau financier et opérationnel.
Une Task Force agira souvent en marge des processus opérationnels habituels et nécessite une “approche agile” pour stabiliser une crise.Les membres d’une équipe Task Force en situation de crise agissent également de manière préventive sur les déviations possibles et minimisent l’impact négatif, contribuant ainsi à stabiliser les opérations courantes et préparer la transformation. Ses intervenants sont généralement très efficaces lorsque l’entreprise communique sur ses attentes et soutient ce type d’interventions.
Ce qu’il faut retenir sur une équipe de travail Task Force
Certaines entreprises envisagent la mise en place d’une équipe de travail Task Force uniquement lorsque la situation est très critique. Très souvent selon la pratique du terrain, cette décision est prise tardivement, bien qu’une situation de crise ne va pas se résoudre par par elle-même et va même s’empirer.
Il arrive aussi qu’une Task Force soit utilisée pour des projets simples et de petite importance stratégique, alors que ces situations ne nécessitent qu’une meilleure méthodologie et des personnes qualifiées. Par conséquent, une évaluation correcte des besoins globaux de l’entreprise, dans un contexte macro-économique fera la différence entre le succès et l’échec de ces initiatives et programmes de redressement pendant une situation de crise.
En raison de la nature temporaire et hautement agile de cette structure organisationnelle particulière, la Task Force doit bénéficier non seulement du soutien total des cadres supérieurs de direction (le fameux C-level), et le conseil d’administration, mais aussi d’un pouvoir de décision sur le terrain.
L’implémentation et la gestion d’une Task Force est plus complexe et nuancée dans la réalité du terrain, et ce n’est jamais une mince affaire.
Liste partielle des publications de Elena Debbaut dans la série “gestion de crise”
Comment améliorer la performance opérationnelle de votre entreprise – Cet article en format long passe en revue des notions comme les programmes de formation continue, la numérisation et la centralisation avec un système d’informations, et quelques stratégies de performance opérationnelle. Elena Debbaut: “L’excellence opérationnelle permet, entre autres, de se distinguer de la compétition.”
Comment choisir et implémenter la bonne stratégie d’entreprise ? – La bonne approche c’est de percevoir la stratégie d’entreprise plutôt comme un processus créatif et en constante évolution, et en même temps comme une activité de gestion régulière. Elena Debbaut: “Toute stratégie d’entreprise possède un élément très important d’intuition. Et surtout, une bonne dose de chance.”
Autres publications, livres, workshops sur des sujets précis qui couvrent la stratégie, la technologie, les opérations, le marketing et les ventes en situation de crise. Retrouvez une partie des autres publications avec Elena Debbaut et son cabinet de conseil en entreprise. Les publications couvrent des aspects pratiques comme des analyses, rapports et études de cas, plus des approches et solutions ayant fait leurs preuves sur le terrain dans les secteurs d’activité comme la fabrication CPG/FMCG, les processus et opérations fintech & bancaire, les services B2B2C, le marketing traditionnel & digital, médias & publicité.
J’ai assisté à une conférence qui parlait de la réussite entrepreneuriale. C’est une activité très amusante. Je découvre toujours quelques perles fort divertissantes et qui me mettent de bonne humeur pendant au minimum quelques semaines.
Cette conférence était offerte par un entrepreneur de succès. Un entrepreneur homme d’un certain âge très respectable; c’est très important de le préciser. Habituellement, pendant que j’écoute les présentations pendant les webinars, je peux faire d’autres activités en parallèle. Mais sa lecture était suffisamment fascinante pour lui accorder mon entière attention.
J’entends un conseil prodigué sur un ton bien convaincant: “pour réussir, il faut se réveiller à 3:30“. Oui, trois heures trente. La nuit.
Qui se lève de bonne heure arrive à la fortune, dit la sagesse populaire.
Le CEO d’Apple se lève à 3:45. D’autres, plus paresseux, se réveillent au maximum une demi-heure plus tard à 4:15. C’est ainsi aux États Unis.
En Suisse, l’entrepreneur se réveille à 3:30.
Enfin, s’il arrive à dormir.
Compte tenu du succès de leur fortune, cela doit être la bonne tranche horaire. Selon un article publié dans le journal LeTemps en 2016 le sommeil serait même un truc de loosers. Le succès se réveille, lui aussi, de très bonne heure pour attendre tranquillement les coureurs qui l’ont cherché pendant les 15 (quinze) kilomètres de jogging.
Table des matières
Les résultats de mon expérience
Déjà très enthousiaste pendant la conférence, chose qui m’arrive très rarement pendant ce type de présentations, je décide de faire un essai pour contempler la forme de ce nouvel succès. Mon entourage fut vite très curieux sur ma démarche.
Jour 1 du réveil à 3:30
J’ai commencé la première journée de mon expérience par mettre mon réveil à trois heures trente du matin. Selon le fuseau horaire en Suisse cette heure est en pleine nuit. J’ai donc utilisé le mode vibrateur, afin de ne pas réveiller l’entier du bâtiment où j’habite.
Oui, 3:30 est en pleine nuit: tout est noir et silencieux.
Mon époux a brièvement ouvert son œil droit en guise de question muette: c’est pour entrer se coucher, ou aller dans une expédition nocturne aux toilettes ? Ni une ni l’autre, je répondis en silence: c’est pour une journée remplie de succès.
Mon esprit a vacillé quelques secondes, étant bien entourée par la chaleur du lit.
Mais l’appel du succès a été plus fort.
Quand il faut y aller, il faut y aller !
Ma quête du succès commence devant la machine à café.
Une pensée vive me retient brusquement avant d’appuyer sur bouton qui la met en route. Quel serait le niveau du bruit ? Une recherche sur Google me permet de contrôler la fiche technique. C’est incroyable le bruit qu’une machine à café peut faire: quelque 67 décibels. Rien que ça. Ce niveau de bruit est similaire à celui d’une machine à laver. Or personne ne lance une machine à laver en pleine nuit. En tout cas, pas en Suisse, pas avec une famille, et surtout pas dans un immeuble locatif.
Pas de thé non plus. Il se trouve que certaines bouilloires électriques peuvent même aller jusqu’à 95 décibels, soit le bruit d’une tondeuse à gazon. En pleine nuit, c’est fortement déconseillé. Je me dis que le grille-pain fait aussi du bruit, tout comme la préparation de mon omelette, alors je décide de sauter le petit-déjeuner. Pour un premier jour, je me dis que je vais reprogrammer aussi le jogging de 15 kilomètres.
J’arrive au bureau par des rues désertes, et je sors le badge d’accès.
Refusé.
Le bureau, ça ouvre à 7 heures du matin.
Ça ne s’annonce pas très bien.
C’est seulement 4 heures le matin, et le succès lui, est très impatient d’y entrer. Je le sens.
Je note qu’il faudrait que j’envoie aux propriétaires de mon bureau le lien vers la conférence de l’entrepreneur à succès.
Ces propriétaires doivent laisser les portes ouvertes 24/7jours parce que beaucoup de personnes commencent à chercher le succès à 3:30 la nuit.
Une voiture de police me voit. Les deux policiers s’arrêtent et me demandent si tout va bien et quelle est la raison de ma présence sur les lieux en pleine nuit.
Je leur explique que je cherche le succès à 3:30. Ils notent quand même mes coordonnées; si jamais ils trouvent le succès nocturne avant moi.
Je fais le choix d’une journée télétravail pour regagner le temps perdu avec mon déplacement au bureau, en pleine nuit.
Je continue jusqu’à 13:30 quand je prends mon déjeuner. Vers 14 heures j’étais déjà endormie. Je me réveille vers 15:30 soit pendant ma pause habituelle. Je conclus que les patrons et les directeurs ont une très bonne raison pour fermer la porte après la pause déjeuner. Pendant ce temps, les fidèles cadres opérationnels, eux, travaillent.
Je finis ma journée à 19:30, comme c’est dans mes habitudes des 20 dernières années.
Mon époux me demande pendant le souper: alors, ta journée ? J’esquisse un sourire enthousiaste. Je n’ai pas été en mesure de continuer la totalité de mon repas, ni même de commencer le film du lundi soir sur la RTS.
Vers 21h j’étais déjà endormie.
Profondément.
Jour 2 du réveil à 3:30
Le réveil vibre.
Je suis toujours motivée pour trouver le succès en pleine nuit.
Je saute du lit, mais je reste en télétravail. Je fais quand même un détour dehors sur 4 kilomètres, question de rencontrer le succès. Mais outre quelques chats très curieux suite à ma présence nocturne, rien d’autre.
Je travaille jusqu’à midi et je prépare le déjeuner. Je répète la sieste après le déjeuner. Je travaille pratiquement sans interruption jusqu’à 19:30.
En fin de journée je me dis que ce n’est pas trop mal, faire une sieste après le déjeuner.
La fin de deuxième journée arrive à 19:30, et l’heure du coucher arrive encore plus vite, à 20:30. Ma soirée fut encore plus courte que celle de la journée précédente.
Jour 3 du réveil à 3:30
C’est mercredi.
Je me suis réveillée avant l’heure, à 3:10. C’est toujours la nuit. Magnifique, après seulement 3 jours je commence à m’habituer à un nouveau rythme. L’humain s’habitue à tout.
Je me dis que si je continue ainsi, avec un gain de 20 minutes chaque jour, alors en 15 jours je vais me réveiller même à 10:30 heures le soir d’avant. Ça, c’est un vrai succès: l’heure du coucher qui coïncide avec l’heure du réveil. Je me fais la réflexion que l’humain du futur sera tellement amélioré techniquement qu’il n’aura même plus besoin de dormir.
Pour le moment, et afin d’aider mon expérience, j’ajoute une sieste de plus en pleine matinée. Pas trop mal non plus. Sauf le facteur qui me réveille vers 10:30 pour un colis et une lettre. Les appels téléphoniques aussi.
En fin de journée à 19:30 je cours pendant 10 kilomètres. Je m’arrête et je fais quelques exercices sportifs de pom-pom girl pour compenser les 5 kilomètres manquants. Pas trop mal non plus, c’est bien physique.
Le chat du voisin qui a l’habitude de m’accompagner me regarde très curieusement. Il suit mes mouvements. Je lui explique comment atteindre le succès avec le réveil à 3:30 la nuit. Il écoute très attentivement, les yeux dans les yeux. Un autre chat se joigne à nous. Je commence à rire, encore quand je vois trois autres chats qui s’approchent pour participer à ma présentation improvisée.
Un voisin s’arrête et nous regarde, lui aussi. Il trouve mon auditoire de chats en demi-cercle très amusant, presque magique. Je lui explique à lui aussi, le réveil à 3:30 et qui est supposé apporter le succès. Les tremblements de sa moustache lui donnaient un air clairement perplexe et incrédule. Mais il ajoute quelques bons points: même les poules ne se réveillent pas à 3:30 la nuit, mais peut-être les chats, eux, sont débout toute la nuit et dorment ensuite toute la journée pendant 18 heures. Ça doit être un truc de patron et directeur, il avait conclu.
Sur le chemin de retour, je fais remarquer à mon voisin que les poules n’ont pas beaucoup de succès et travaillent chaque jour pour pondre un œuf, sinon elles finissent à la casserole.
Par contre, le coq, lui, est un vrai chef: il pousse un chant bien puissant dès les premiers rayons de lumière pour réveiller tout le monde. Le coq est debout au minimum 90 minutes avant le lever du soleil et il chante même pendant la nuit quand c’est pleine lune. Les petits coqs en surplus finissent en pâte à nuggets, seul le vrai coq résiste. Belle illustration pour la réussite entrepreneuriale.
La comparaison entre un coq et un entrepreneur a eu beaucoup de succès, y compris parmi les trois chats qui nous ont suivi très sagement. Mais le voisin a persisté dans son opinion: un entrepreneur est plutôt comme un chat, selon une de mes publications plus anciennes.
Autrement, ma soirée a vite fini, parce que je suis allée dormir à 20:30 heures, et sans finir mon repas.
Jour 4 du réveil à 3:30
Enfin, le jeudi.
Je me dis que la semaine est presque finie.
J’attends presque impatiemment le vendredi, bien que j’aime plutôt les lundis.
Mais un semblant de succès est déjà là: mon livre sur l’économie numérique a été accepté pour la publication. Je ressens aussi une connexion avec les humains qui se réjouissent à l’avance du dernier jour de la semaine. Pendant une grande partie de ma vie, y compris la scolarité, le dernier jour de la semaine a été le samedi, alors un vendredi est presque contre-nature.
Le soir, après les courses, je m’effondre en plein repas.
Ma conversation sur la journée et mon livre a été limitée à quelques grognements et une multitude de grimaces muettes.
Je me suis endormie à 20:10 précises.
Jour 5 du réveil à 6:30
La journée de vendredi s’annonce très bien.
Je me suis réveillée le matin à 6:30 exact, sans aucune alarme, et comme je me réveille depuis deux décennies. La vibration de l’alarme à 3:30 n’a pas été suffisante pour me réveiller. Mon expérience qui consistait à me coucher avec les poules et me réveiller avant le coq n’a pas été concluante.
La journée de travail commence à 7:30 le matin.
Et la journée finira exactement à 19:30, comme c’est le cas depuis presque 2 décennies.
La journée fut productive, et sans aucune sieste. En fin de journée, le chat du voisin arrive en courant pour me saluer pendant que je récupère le courrier, et comme il le fait chaque soir de la semaine à 19:30 précises.
Encore une semaine pendant laquelle je n’ai pas écrit d’article académique, ou pour un autre livre. J’ai fini la semaine avec un article qui a partagé une expérience et une autre vision sur les conseils prodigués par les gourous d’entreprise.
Le repas commence à sentir bon.
La table est prête, et je peux enfin tenir une conversation sans m’effondrer de fatigue.
Je passe ensuite une très belle soirée.
Et si c’était ça, le succès et la bonne fortune ?
La vie, tout simplement.
Alors, cette expérience du réveil à 3:30 ?
Si vous êtes arrivés jusqu’ici, c’est que le sujet vous intéresse.
Le réveil à 3:30 et la fin d’une journée de travail à 19:30 avec 21 heures au maximum pour aller dormir n’est pas pour moi, et peut-être pour vous non plus. Avec un tel rythme vous vivez décalé et pour la plupart des journées, en totale solitude.
Mon expérience m’a fait penser que la plupart de gens font l’erreur de suivre à la lettre les gourous d’entreprise, au lieu de définir leur propre succès et sa stratégie pour y arriver.
Il est possible de faire plus avec un tel rythme
Certes, avec un tel rythme de travail il est possible de faire beaucoup de choses et couvrir beaucoup de projets, mais il faudra impérativement ajouter au minimum trois périodes de siestes pendant la journée et passer vers un sommeil multi-phases.
Selon mon expérience de 7 ans pendant mes études et le travail en parallèle j’ai pratiqué le sommeil multi-phases de manière intensive. Cette méthode a bien fonctionné pour moi. Ainsi, je m’endormais pendant les cours à l’université, les examens, le transport, ou encore les réunions ennuyantes. Un sommeil volé. En 24 heures je pouvais avoir mes 4 à 7 heures de sommeil, avec quelques périodes difficiles de seulement 2 heures 30.
Cela m’a permis de couvrir efficacement les 16 à 18 heures de travail intense chaque jour pour mon entreprise, mes études, et mes obligations familiales. Le sommeil multi-phases est très exigeant et je ne recommande pas cette méthode sur de longues périodes. Il faudra retenir que toute “dette du sommeil” se paye par une dégradation de l’état de santé. Cette dégradation se voit après seulement quelques mois, alors que les effets négatifs peuvent durer même quelques années.
En effet, le sommeil est indispensable pour correctement fonctionner et prendre les bonnes décisions, surtout au niveau de la direction. Hasard du calendrier, la date de publication de cet article est 19 mars, soit la journée du sommeil.
L’aide externe est indispensable
Encore: si vous décidez de suivre un tel rythme intensif, alors vous devez avoir au moins une personne qui vous assiste avec les tâches administratives de la vie courante ou celles ménagères comme le nettoyage ou la préparation des repas.
Soit vous payez quelqu’un pour ces tâches, soit, en absence de capital, vous allez devoir utiliser le support familial. Vous ne pourrez pas tout faire. Pour ne rien arranger, la pression sociale pour externaliser ces tâches est même mal perçue pour les femmes entrepreneur.
Je conclus aussi que le réveil à 3:30 peut mieux fonctionner si vous êtes un homme d’un bon niveau socio-culturel qui est né dans une bonne famille, avec un revenu régulier, et qui habite dans une maison individuelle pour pouvoir faire du bruit nocturne. De plus, le capital de son entreprise doit être suffisant important pour embaucher les bonnes équipes qui exécutent l’ensemble des tâches opérationnelles.
En effet, il y a une grande différence entre donner des ordres et “venir avec des idées” en guise de stratégie et la finalité de l’implémentation opérationnelle.
C’est les équipes opérationnelles et les cadres qui concrétisent les idées de la direction ou de tout entrepreneur et c’est souvent par les heures supplémentaires après 19:30, alors quand notre entrepreneur a fini sa journée.
Or, les entrepreneurs ne voient plus ce travail accompli tard pendant la soirée ou les nuits; et ils sont même très contrariés quand les équipes opérationnelles ne sont pas toujours réveillées au petit matin. Mais les collaborateurs de nos jours ne veulent plus être limités à un simple rôle d’exécutant, ni exploités selon des méthodes d’une autre époque.
L’innovation et la culture d’entreprise souffrent
Les entrepreneurs qui appliquent ce modèle de travail décalé n’ont pratiquement aucune interruption en pleine nuit.
Chaque matin, ils ont donc suffisamment de temps pour réfléchir et venir avec de nouvelles stratégies, alors que les équipes opérationnelles n’ont même pas fini d’implémenter les idées de la journée précédente. Ainsi, il n’est pas rare que les équipes opérationnelles suivent un rythme effréné et qui finira souvent … vers 3:30 le matin. Soit à l’heure quand notre entrepreneur se réveille.
Les coûts et l’épuisement de type burn-out pour les collaborateurs à tous les échelons est ainsi très grand. Les personnes de qualité qui composent les bonnes équipes opérationnelles quittent ce type d’entreprises et ces entrepreneurs.
De plus, ce décalage dans la manière de travailler n’est pas propice à l’innovation.
En effet, de nos jours, l’innovation n’est plus l’idée d’une seule personne, mais c’est devenu un processus.
La très grande majorité des entrepreneurs implémentent eux-mêmes leurs propres idées et investissent leurs économies, très souvent sans aucune aide familiale. Cet investissement entrepreneurial permet de développer et présenter aux investisseurs un produit ou un service minimum viable.
Par la suite, si ce produit ou service est intéressant, et qu’il n’a pas été copié par d’autres entreprises, alors il est possible d’obtenir une augmentation du capital pour s’agrandir.
Pendant cette période, le manque de sommeil est cruel et les nuits blanches sont la normalité. En pratique, l’heure de 3:30 la nuit correspond plutôt à l’heure du coucher. Au final, si l’entreprise fonctionne, il est possible d’espérer un revenu régulier et un horaire plus adapté au rythme naturel diurne.
En réalité, c’est dans cet ordre que les choses se passent.
Comme vous pouvez déjà l’imaginer, les chances de “succès” d’une entreprise sont minimes.
Rien n’est garanti.
Et gare aux entrepreneurs qui succombent à la propagande entrepreneuriale et le réveil à 3:30 qui apporterait le succès.
Le réveil à 3:30 c’est toute une affaire, et même une mauvaise affaire, au bout du compte.
L’établissement et l’implémentation d’une stratégie d’entreprise est une activité très agréable quand l’implémentation est un succès, ce qui dans la pratique est rarement le cas.
La raison est évidente: en majorité, les tacticiens et les créateurs d’une stratégie n’ont pas toujours conscience quant aux difficultés de l’implémentation. En effet, il ne suffit pas de transformer en stratégie toute nouvelle idée, mais de bien analyser les alternatives, choisir seulement ce qui a le plus de chances de succès, et implémenter correctement sur le terrain, en fonction de processus déjà existants.
Alors, comment choisir et implémenter la bonne stratégie d’entreprise ?
La stratégie et le facteur temps
En théorie, la stratégie d’une entreprise est conçue pour le moyen et le long terme.
Effectivement, une bonne stratégie nécessite du temps pour être correctement implémentée à tous les niveaux.
Mais il y a quelques chiffres qui contredisent cette idée. D’abord, en 2016 déjà, la durée de vie moyenne d’une entreprise se situe à moins de 18 ans, soit entre 7 et 12 ans, selon une étude du cabinet de conseil McKinsey.
Concrètement, cela veut dire qu’une entreprise peut appliquer 1 à 3 stratégies majeures pendant l’entier de sa durée de vie.
Tout concept “stratégique” dont la durée se limite à quelques semaines ou quelques mois s’apparente plutôt à l’implémentation de quelques tactiques et méthodes déjà connues et appliquées ailleurs. Une entreprise ne peut pas collecter les idées, concevoir, analyser ses effets possibles, et implémenter une stratégie en si peu de temps.
Selon le cas, le but d’une stratégie est d’améliorer la viabilité d’une entreprise dans un délai de 3 à 7 ans. En même temps, comme vous avez pu voir plus haut, dans l’actuelle économie numérique, le futur n’existe plus pour une très grande majorité d’entreprises. Les concepts de “futur” et “entreprise pérenne” sont limités par la durée de vie moyenne d’une entreprise.
La conception stratégique
J’ai presque un demi-siècle d’existence, et une expérience de plus de trois décennies dans le monde des entreprises. Je m’en souviens encore de ma surprise suite à l’agitation qui avait gagné l’entreprise après la réception du mémo de convocation pour les “réunions et conception des plans stratégiques“.
Les directeurs étaient assez joyeusement excités.
Les collaborateurs des équipes opérationnelles étaient jaloux sur ce qui était perçu comme quelques “journées de farniente, tous frais payés” et dans un endroit digne d’une belle vacance.
La jalousie était justifiée.
Les équipes opérationnelles restaient confinées et limitées à une boîte à idées, laquelle boîte se trouvait sur un couloir avec très peu de lumière. La boîte à idées était en carton, et la qualité du contenant un peu pareil. Pendant le même temps, les directeurs étaient à l’extérieur, tous frais payés, et avec un bon repas matin, midi, et soir.
Le but de ces séminaires à l’extérieur était d’extraire et affiner quelques bonnes idées. Il fallait impérativement venir avec des idées à accrocher sur un mur. Ces idées étaient ensuite analysées de fond en comble, enregistrées, et catégorisées. Sauf quelques exceptions, il ne restait plus assez de temps pour faire des réflexions opérationnelles sur les plans stratégiques.
Tout à la fin de ces journées, la direction se disait: “Oh, regardez-moi tous ces post-it de couleur. Comme on a bien travaillé. C’est beau.” Pendant ce temps, les équipes opérationnelles avaient une toute autre réflexion. “En voilà encore des conneries.”
De nos jours, cette manière de faire n’a pas profondément changé.
Les lieux extérieurs ont été remplacés avec la salle de réunion dans laquelle quelques plantes agonisent de plus belle, ou ceux d’un espace de co-working en open-space et dans lesquels les nouveaux coachs d’entreprise vivent leur vie. Les idées sont aussi accrochées au mur, mais aujourd’hui il y a des feuillets en couleur et déjà découpés en diverses formes comme les nuages, petits cœurs, et signes d’exclamation.
Il y a même de la pâte à modeler et briques en plastique. Voyez-vous, c’est du “design thinking” moderne avec quelques gribouillis provenant d’une quantité impressionnante de crayons en couleur. Un vrai arc-en-ciel. Le tout, entre quelques petits croissants et cafés, des tables debout, ou quelques coussins par terre. Oui, c’est plus facile à ranger, moins de coûts pour une entreprise, et il semble que cela ajoute de la convivialité. Tiens, dans mes vagues souvenirs, cela ressemble à mes classes de maternelle dans les années ’70; mais sans le café.
Le résultat final de ces séminaires reste globalement le même que celui des pratiques passé: après quelques mois, plus personne ne s’en souvient encore de ces réunions stratégiques ou leur contenu, parti dans les bacs de récupération papier (écologie oblige).
Ces “stratégies” sont vouées à l’échec parce que la partie opérationnelle n’est pas couverte pendant la phase d’idéation. C’est un paradoxe. Les équipes opérationnelles ont besoin de connaître les activités journalières permettant l’implémentation d’une stratégie, mais la stratégie ne couvre pas cet aspect.
Soyons très clairs: une stratégie n’a pas comme but de détailler la partie opérationnelle.
En même temps, une entreprise a besoin pas seulement d’une vision stratégique, mais aussi d’une implémentation sur le terrain. C’est cela, la bonne stratégie d’entreprise: établir un lien entre la vision sur le moyen et le long terme, ainsi que les activités concrètes au niveau opérationnel.
L’implémentation d’une stratégie
En 2017, un article de Harvard Business Review avait fait beaucoup de bruit.
Et pour cause: cet article mentionnait que seulement 8% des membres de la direction sont suffisamment compétents autant sur le volet stratégie que celui implémentation opérationnelle.
Concrètement, cela veut dire que sur une centaine de dirigeants, seulement 8 d’entre eux sont bons autant sur le volet stratégie que celui de l’implémentation.
L’explication est que la plupart des dirigeants d’entreprise sont qualifiés et arrivent depuis une seule zone fonctionnelle comme les finances ou le marketing. Très souvent, cet aspect “familier” dicte la stratégie d’une entreprise.
Il y a pire: d’autres dirigeants ne possèdent absolument aucune compétence opérationnelle. L’aspect multi-fonctionnel d’une entreprise est négligé. Les entreprises commencent à s’en rendre compte, mais le recrutement de ces personnes est difficile par l’apparition de besoins technologiques très pointus. Les chiffres de 2017 sont donc aujourd’hui encore plus bas.
Afin d’augmenter la capacité d’implémentation, je recommande une approche qui combine les aspects “top-down” et “bottom-up“.
Assez souvent, les entreprises appliquent une ou l’autre approche, mais une combinaison adaptée au contexte de votre entreprise permet un meilleur retour. Les retours “bottom-up” de l’opérationnel permet de comprendre et adapter sa stratégie selon les réalités du terrain.
Cette approche permet un meilleur choix des options stratégiques ainsi qu’une adaptation constante et presque en temps réel.
Il y a plusieurs moyens permettant d’obtenir cet équilibre sans tomber dans l’erreur du micro-management, avec une gestion trop détaillée. Si la stratégie tient la route, avec l’indication claire de quelques activités concrètes, dans un langage clair et sans mots ou concepts à la mode, alors les équipes opérationnelles peuvent parfaitement prendre le relais et faciliter l’implementation.
Une stratégie d’entreprise ne doit pas seulement exprimer quelques idées, mais aussi le “comment y arriver” soit la partie opérationnelle. Il faudra également garder à l’esprit que toute stratégie d’entreprise possède un élément très important d’intuition. Et surtout, une bonne dose de chance.
Encore, une entreprise devra percevoir la stratégie à la fois comme un un processus créatif et en constante évolution, mais aussi comme une activité de gestion régulière. Les notions de “change the business” et “run the business” retrouvent ici tout leur sens.
Cette manière de faire est donc très orientée sur la pratique, et c’est la seule qui permet de “faire fonctionner” la stratégie.
Cet article présente quelques recommandations d’ordre général permettant de faciliter l’acceptation culturelle et l’implémentation opérationnelle d’une telle forme de travail.
Il s’agit des pratiques qui fonctionnent dans une majorité des cas, comme l’identification du bon candidat et l’organisation de l’entreprise. À la fin, je partagerai quelques expériences pratiques pour éviter les échecs les plus habituels dans le télétravail.
Le point de vue dans cet article varie selon une approche focalisée tantôt sur les besoins d’une entreprise, tantôt comme collaborateur sous statut indépendant ou employé. En effet, la compréhension des deux points de vue permet le succès d’un projet de télétravail.
Cet article ne couvre pas des aspects concrets quant à l’implémentation du télétravail, mais une approche plus généraliste et simplifiée. Cet article n’a pas non plus la prétention d’être exhaustif — mais une approche entrepreneuriale et pratique permettant d’identifier quelques pistes de réflexion.
Table des matières
Introduction
J’ai commencé avec le télétravail à une époque où ce concept était très peu connu et il y a avait même une opinion fortement négative sur cette méthode.
C’était au printemps de 1991.
Pendant les presque 30 ans qui ont suivi, j’ai pu voir les améliorations technologiques, la diminution des barrières d’entrée, et surtout, percevoir de manière directe l’évolution des mentalités. Mon expérience en télétravail couvre des entreprises de diverses tailles, y compris les grandes multinationales, et même comme indépendante, dans plusieurs zones géographiques, divers fuseaux horaires, et secteurs d’activité.
Cet article consolide diverses expériences.
Vous pouvez ainsi éviter quelques oublis et erreurs habituelles, sans tomber dans le piège des listes réchauffées avec des étapes inapplicables. Une fois que vous avez compris la dynamique du télétravail, vous pourrez expérimenter et appliquer une méthodologie qui fonctionne bien dans votre situation.
Le télétravail ou le travail à distance
Je vois le télétravail plutôt comme un processus évolutif et pas du tout comme une simple méthode “clé en main” qui pourrait être appliquée sans aucune préparation.
Le grand avantage c’est que de nos jours, l’implémentation de ce processus est grandement facilitée et plus rapide. Mais attention, la facilité de compréhension et mise en service ne veut pas dire que tout est “facile“.
Les pièges et les fausses idées sur le télétravail sont encore nombreux.
Peu importe sa taille, une entreprise ne réussira pas ce processus quand son implémentation se fait sans réflexion suffisante par rapport aux besoins à moyen et long terme. Ainsi, la direction peut très bien décider de manière stratégique sur le choix majoritaire du télétravail, mais réduire la partie opérationnelle à des improvisations d’urgence et seulement en situation de crise.
La réflexion sur le télétravail doit se faire de manière réfléchie: les réactions urgentes en situations de crise sont une solution temporaire.
Le télétravail est un projet qui est souvent mal compris.
Dans un article de 2019 sur l’organisation du travail et des équipes, que j’ai publié sur mon blog du journal LeTemps, j’avais écrit que “Les nouvelles formes et lieux de travail doivent s’adapter à l’entreprise et aux collaborateurs existants, et pas l’inverse“. C’est une adaptation par rapport à la culture existante. Un chapitre sur le télétravail proposait quelques suggestions à ce sujet.
Dans les années 1990, quand j’ai commencé ma vie professionnelle, l’accès et le coût technologique était dissuasif pour un indépendant.
Il fallait investir plusieurs milliers de francs pour un ordinateur et l’accès Internet était encore réservé en priorité à un usage académique, les organisations mass-média comme les journaux ou la télévision, ou les très grandes entreprises. La communication vidéo et la coordination centralisée en temps réel via Internet étaient des notions inexistantes. Les barrières pour faire du télétravail étaient donc assez élevées. Le télétravail était perçu comme “repos” à la maison.
30 ans plus tard, voici que le télétravail commence à être de plus en plus pratiqué, mais l’implémentation à grande échelle de ce type de projet est toujours retardée par les entreprises. Les raisons sont multiples; mais la méconnaissance des principes du télétravail est un élément mis en avant. La méfiance est une autre justification.
Dans la vie de tous les jours, la majorité d’entre nous appliquent déjà les principes du travail à distance. En effet, depuis plus d’une vingtaine d’années il est possible de commander en ligne (au lieu d’aller dans un magasin), accéder à des informations en ligne (au lieu de se déplacer pour les consulter), et donner accès depuis l’extérieur à son endroit de présence physique (vidéos, audio). Chacun d’entre nous a déjà fait une ou plusieurs de ces activités.
Or, les mêmes principes de base s’appliquent pour le télétravail.
Ces principes peuvent s’adapter à la situation de chacun selon divers autres critères comme la taille de l’entreprise, la nature du travail, le degré du télétravail. Les collaborateurs, les fournisseurs et l’entreprise peuvent ainsi très bien travailler et s’organiser à distance, d’autant plus que la technologie est à disposition et devient de plus en plus performante et moins coûteuse.
Aujourd’hui, et sans même s’en rendre compte, nous appliquons déjà les principes du télétravail.
Certains collaborateurs vont adorer cette manière de travail, pendant que d’autres seront impatients de revenir dans les locaux de l’entreprise. D’autres n’ont aucune préférence et sont confortables avec les deux méthodes.
Il y a une grande variété d’activités qui peuvent être exécutées en télétravail, même ceux industriels et techniques.
Le travail tertiaire dans le domaine des services se prête particulièrement bien au télétravail mais il existe une multitude d’autres métiers — même ceux qui nécessitent un usinage et assemblage en petite série — qui peuvent être très bien être exécutées dans un autre endroit que les locaux de l’entreprise.
Quelques fausses idées sur le télétravail
La terminologie “télétravail” contient le mot “travail“.
Très souvent, il y a cette confusion entre “télétravail à un autre endroit que les locaux de l’entreprise” – “travailler depuis la maison” – “travailler dans la maison“. Ces 3 notions n’ont pas la même signification.
Tout d’abord, le télétravail peut se faire depuis d’autres endroits, comme les espaces de coworking, bureaux temporaires, pendant un déplacement, ou dans d’autres locaux professionnels loués pour l’occasion comme les studios d’enregistrement ou les salles de formation. Le télétravail ne veut pas dire de “toujours travailler depuis la maison“. En effet, le télétravail est synonyme de “travail à distance“.
Ensuite, le travail “depuis la maison” est souvent compris dans le sens des activités domestiques “pour” la maison ou “dans” la maison. Je l’ai déjà écrit, et je le répète: ce n’est pas possible de travailler sur la table de cuisine, surveiller les gamins, s’occuper de la préparation des repas, et lancer une machine à laver en même temps. Sinon, la productivité sera à un très bas niveau.
Ainsi, un parent qui souhaite aller vers le télétravail en pensant “pouvoir accorder toute (sic!) son attention aux enfants” et avec des “horaires totalement libres” n’est pas adapté à cette forme de travail à distance. Certes, le travail à distance permet une certaine flexibilité au niveau des horaires, mais pour certains projets et équipes, au minimum 70-80% du temps doit être commun avec les autres collaborateurs.
Le télétravail est un travail “à distance” des locaux d’entreprise – ce travail ne doit pas être compris comme “travailler toujours depuis la maison” ni travailler “pour la maison”.
Le fait d’être “présent à la maison” dans le cadre de son travail ne donne pas une autorisation pour qu’un ami ou un membre de la famille débarque à l’imprévu et sans raison valable.
Si le travail a lieu dans un autre endroit extérieur au domicile personnel, alors ces mêmes personnes n’avaient jamais à l’esprit d’entrer dans la salle de réunion et interrompre les participants. Il en va de même pour ceux qui possèdent un local technique et des équipements ou outillages spécifiques; ces personnes ne prendraient même pas le risque de s’y aventurer.
Il faudra aussi garder à l’esprit que les responsabilités dans le cadre de son travail restent les mêmes, peu importe l’endroit d’exécution. Avec le télétravail, il ne s’agit pas de faire “ce qu’on a envie” (sic!), encore moins avoir le luxe de “choisir ses projets et clients“. Malgré les fausses idées, même un indépendant n’a pas ces libertés totales. Cette approche libertarienne n’est donc aucunement envisageable avec un employé qui a une relation de travail plus stricte avec l’entreprise.
Souvent, les fausses idées par rapport au “télétravail” se résument à l’endroit, les horaires et les responsabilités.
Les exigences du télétravail
Travailler depuis la maison implique le même cadre que le travail au bureau.
Les exigences réglementaires sont les mêmes et passent par le respect des conditions légales, techniques, de qualité, de sécurité et confidentialité, suivi des instructions hiérarchiques. Concrètement, voici ce que cela veut dire en grandes lignes:
un projet délivré selon les conditions convenues de qualité, ressources, budget, délais
un espace de travail bien aménagé, nettoyé et accueillant
du matériel technique professionnel comme une station fixe de type desktop, ou un ordinateur portable, imprimante, casque téléphone ou caméra vidéo, ou toutes autres sortes d’outils et machines
Pour certains métiers, ces quelques points ne sont pas tous obligatoires.
Si la nature du travail l’exige, il faudra prévoir des solutions logicielles permettant un accès Internet sécurisé. Le niveau de sécurité peut varier, voici pourquoi le télétravail ne représente pas une option viable pour quelques secteurs d’activité comme les banques.
Reste que les interruptions dans l’exécution de son travail, les distractions et les bruits externes doivent toujours être réduits au minimum. Il n’y a rien de plus désagréable que d’appeler un collègue travaillant depuis la maison et entendre en fond les paroles d’un poste de télévision ou les hurlements déchirants d’un ou plusieurs bébés. Surtout quand cela commence à devenir la règle, et dépasse le stade amusant d’une interruption qui fait le buzz mondial pendant une intervention en direct avec BBC. Encore pire: prétexter des pannes Internet ou électricité qui n’existent pas.
Travailler à distance implique avoir (i) une discipline et coordination presque militaire, (ii) une force mentale pour être suffisamment confortable en solitude, et (iii) une maîtrise technologique qui soit bien supérieures à la moyenne.
Dans le cadre du télétravail, les interactions avec ses collègues et le monde extérieur sont profondément changés. Voici pourquoi les quelques contraintes et exigences mentionnées ci-avant sont indispensables pour augmenter les chances de succès.
Comment éviter les échecs du télétravail
Comme vous pouvez lire en continu sur le site du journal LeTemps, la situation actuelle de pandémie COVID-19 n’a aucun précèdent, et nombreux sont ceux qui se sont démunis devant l’ampleur du désordre dans la société et les entreprises.
Pendant ces situations, les injonctions pour aller vers le télétravail sont plus prononcées.
La plupart des gens découvrent le télétravail seulement pendant une période de crise. Souvent, il n’y a personne pour montrer “comment faire” et c’est la panique.
La gestion de crise et le télétravail
En théorie, une entreprise (et pas seulement) doit appliquer des actions précises pendant une gestion de crise. Quand il y a des perturbations sur les opérations courantes, il y a toujours des adaptations ponctuelles selon le développement de la situation; mais une réflexion d’ensemble sur les actions principales doit être faite avant la crise.
Le manque d’anticipation a un impact immédiat sur toutes les opérations courantes. Oui, la gestion de crise et la solution de recours au télétravail est aussi un processus. Une entreprise fonctionne efficacement grâce aux processus. Autrement, comme je l’ai déjà écrit par le passé: “le manque de processus est une des causes qui peut être à l’origine des profonds dysfonctionnements“.
Ces dysfonctionnements sont encore plus graves et visibles en situation de crise. Le manque d’anticipation a un impact immédiat sur toutes les opérations courantes. La direction exige trop d’efforts pendant que les collaborateurs sont inquiets et surpris par l’inconnu.
Si l’état d’urgence est déclaré à l’échelle d’une entreprise, une région ou un pays, il y a un impact très négatif quant à la productivité des collaborateurs. C’est normal, et c’est humain d’accorder son attention à d’autres sujets. Il faudra donc garder à l’esprit que le télétravail dans le cadre d’une gestion de crise ne va pas tout résoudre.
La magie n’existe pas, et les humains ne sont pas des robots. En situation de crise, c’est irréaliste et inacceptable d’exiger une productivité élevée. Le télétravail n’est pas la seule solution pour assurer la continuité des opérations.
Certes, certains métiers exigent encore une présence physique obligatoire sur place, mais grâce à des processus bien établis, une entreprise peut assurer, au pire, un service minimum, tout en rassurant les collaborateurs sur la direction à suivre. L’existence d’un plan d’un plan de continuité enlève un grand stress autant pour l’entreprise que pour tous ses autres intervenants internes et externes. Chacun doit connaître son rôle dans une telle situation.
Là où c’est possible, le télétravail offre la possibilité de continuer partiellement ou totalement, une majorité des activités courantes. Il s’agit du fameux “plan de continuité“. Même en manque de commandes, une entreprise peut choisir de réorienter très rapidement une partie de ses travailleurs vers des projets internes. Or, seul un processus de gestion de crise permet de sereinement envisager et s’adapter à une situation de crise.
En pratique et dans une majorité des cas, les choses ne se passent pas ainsi.
Les entreprises mal préparées n’ont aucun processus de continuité. Les autres processus opérationnels sont approximatifs. Les exigences du télétravail n’ont même pas été prises en compte; il manque même une liste actualisée avec les adresses e-mail ou le numéro de téléphone des collaborateurs, les responsabilités, ou un inventaire des besoins. Le budget pour achat de matériel comme les ordinateurs ou les écrans n’existe pas, l’expérience pratique et les compétences font défaut.
Les difficultés principales du télétravail
Plus la taille de l’entreprise augmente, plus c’est difficile d’implémenter le télétravail. Pourquoi ? Parce qu’il y a un plus grand nombre de collaborateurs et exigences supplémentaires comme l’harmonisation des processus, la communication, la coordination générale, ou la technologie.
Une entreprise de petite taille peut adopter plus rapidement le télétravail. La Suisse a plus de 99% de petites entreprises. C’est une chance qu’il faut saisir.
D’un point de vue opérationnel et selon mon expérience sur le terrain, c’est surtout la culture d’entreprise qui décide du succès d’un projet de télétravail. Ensuite, au niveau des collaborateurs, c’est essentiellement l’intelligence d’un esprit indépendant, mais capable de s’adapter et travailler en coopération avec les autres équipes.
Pas dernièrement, c’est l’existence des bons processus d’entreprise et qui définissent clairement qui, quoi, comment, à quel moment. C’est donc le processus qui “connecte” le collaborateur à l’entreprise.
La structure de l’entreprise et le secteur d’activité ont aussi un grand impact sur le télétravail. Il en va de même pour sa zone géographique. Pour les projets pluridisciplinaires il faudra prévoir à ce que les horaires de travail se superposent en majorité avec ceux des autres collaborateurs.
Aux problématiques usuelles du télétravail se rajoutent des contraintes et limites qui sont souvent d’ordre technologique comme la sécurité, la capacité des serveurs entreprise, l’éventuel réseau virtuel privé (VPN), le réglage des différentes solutions logicielles en nuage et locales, les accès aux autres données ERP, CRM, système d’information.
Cet article n’a pas comme but de détailler l’aspect technologique mais rester sur l’aspect business de l’entreprise. Vous pouvez néanmoins lire plus d’articles spécialisés et études de cas sur les stratégies et opérations IT en suivant le lien qui se trouve sous ma description à droite ou tout à la fin de cet article.
L’organisation de l’entreprise et des collaborateurs en télétravail
Dans les grandes entreprises multinationales ou dans les secteurs d’activité orientés sur le long terme il y a une dynamique particulière.
Les collaborateurs des “services de soutien” sont habitués avec un rythme de travail qui est plus lent. De plus, dans ce type de structures, les responsabilités ne sont pas clairement définies et la politique de bureau fait des ravages. L’esprit des demi-mesures pour contenter un plus grand nombre d’intervenants et équipes se trouve souvent privilégié au détriment des initiatives individuelles. Tout cela a un fort impact sur l’aspect stratégique et opérationnel. Dans ces conditions, l’implémentation du télétravail s’avère difficile.
Les collaborateurs dans les multinationales des secteurs technologiques ou FMCG (biens à consommation rapide) ainsi que ceux des petites entreprises PME ou les startups ont l’habitude de réagir beaucoup plus rapidement et s’adapter plus facilement au télétravail.
Comment identifier les bons candidats au télétravail
Un collaborateur peut exprimer un désir sincère d’aller vers le télétravail, mais après un essai, cela peut se solder avec un échec. Le désir, à lui seul, ne fait pas tout. L’expérience passée avec le télétravail non plus.
Ces deux éléments peuvent éventuellement faciliter le processus. En réalité, il arrive que certains collaborateurs ne s’expriment pas sur le sujet et n’ont aucune expérience avec cette méthode de travail, mais finissent par s’intégrer parfaitement avec les autres équipes à distance.
Selon mon vécu sur le terrain, c’est surtout l’éthique du travail qui prime dans le choix parmi tous les candidats potentiels au télétravail. Avec le télétravail il y a beaucoup de liberté et d’auto-responsabilité. C’est précisément pour cette raison qu’il faudra très vite identifier cette qualité.
Ensuite, un bon collaborateur en télétravail est celui qui se distingue par sa fiabilité et livre comme convenu – même en absence d’une supervision directe sur la partie opérationnelle. Les indépendants et les consultants externes sont souvent reconnus pour cette capacité, mais ce n’est pas une règle absolue.
Au final, les bons candidats pour le télétravail sont des gens diablement efficaces qui n’ont pas besoin de gesticulations politiques ou des heures de présence pour être “bien vus” par la direction. Les résultats parlent pour eux.
De plus, ces personnes sont souvent polyvalentes et arrivent à se débrouiller très rapidement avec les ressources existantes. Cela arrive souvent en cas de panne technique comme visioconférence, connexion Internet, arrêt de téléchargements ou blocages réseau et matériel défectueux, voir même un remplacement d’urgence d’autres collaborateurs.
Effectivement, quand le travail se fait à distance, il y a des limites physiques dans la stratégie du “le faire voir … mais lentement” au détriment du “délivrer rapidement … et le faire savoir“.
Comment organiser l’entreprise pour le télétravail
Pour des nombreuses personnes, le travail dans les locaux de l’entreprise représente bien plus que l’exécution des tâches: c’est être vu, socialiser, boire un café ou manger ensemble, et aussi partager quelques rumeurs croustillantes.
Là où cela peut s’appliquer, le télétravail augmente la productivité et malgré les fausses idées, la coopération entre les équipes.
J’ai observé que le télétravail privilégie la productivité en lieu et place de la visibilité des gesticulations politiques. Nombreux sont ceux qui prétendent “maîtriser et aimer” la technologie, mais l’organisation d’une simple audio ou visioconférence avec un clic leur semble trop compliqué. Ces personnes préfèrent “voir” les gens; même si cela implique une perte de temps plus importante que la réunion elle-même.
Avec le télétravail, les différences dans le “professionnalisme” sont encore plus visibles.
Un directeur ou manager peut donner les mauvaises instructions à ses équipes, tout simplement parce qu’il ne sait pas s’exprimer à distance ou ne possède pas la capacité d’assimiler et comprendre rapidement une grande masse d’informations. Avec le télétravail, ces informations manquent de contexte fourni par le langage corporel. Ainsi, des collaborateurs peuvent accuser un retard par rapport à d’autres. Les infrastructures, les procédures “dans la tête” et le manque de documentation écrite peuvent empêcher l’efficacité opérationnelle du travail à distance.
Voici pourquoi une entreprise doit clairement définir un cadre pour le télétravail.
Quelles sont les activités qui peuvent être faites à distance ? Quelles sont les activités qui ne peuvent pas l’être ? Les activités peuvent être organisées de manière synchrone comme les réunions, ou de manière asynchrone, comme le développement informatique ou le support client par e-mail ? Quel est le niveau de sécurité ? Quels sont les outils ou les équipements nécessaires ? Quelles sont les ressources disponibles ? Le temps gagné ? Le budget ? Les personnes ?
L’établissement d’un cadre de travail qui soit clairement défini offre un avantage compétitif à toute entreprise. Le télétravail ne fait pas exception. En même temps, les questions ci-avant ne donnent qu’une partie de réponse. Car oui, une entreprise peut avoir des très bons processus opérationnels, mais passer à côté de quelque chose d’important qui ne peut pas être mesuré par les chiffres.
La notion de “confiance” dans le télétravail
Le télétravail est basé sur la confiance, et c’est un élément qui ne peut pas être déclaré, et encore moins mesuré. Une entreprise qui fait confiance à ses collaborateurs peut sembler contre-intuitif, mais selon mon expérience, c’est quelque chose qui fonctionne.
Une entreprise peut appliquer différentes formes de télétravail, et avec différents taux d’occupation (partiel ou total). Ces choix sont assez souvent dictés par les préférences des collaborateurs. Mais c’est surtout l’organisation de l’entreprise et son degré de confiance qui décident sur le succès du télétravail. Les contraintes et les risques varient selon l’organisation prédominante dans l’entreprise.
Selon mes observations sur le terrain, il y a 3 grandes catégories d’entreprise. Voici leurs caractéristiques principales et la capacité d’aller vers le télétravail.
1 — entièrement sur site: ces entreprises privilégient le travail en personne, seulement dans les locaux de l’entreprise, et selon des horaires stricts.
Le premier exemple pour illustrer ce modèle se trouve dans les usines de fabrication. Une présence sur site est obligatoire pour les équipes de production; ce n’est pas possible autrement. Une grande partie du travail fourni par les équipes de services de soutien peut aller vers le télétravail sans impacter la sécurité des informations. C’est le cas de la comptabilité, la gestion administrative, le marketing. En même temps, l’entreprise choisit de ne pas le faire, par manque de confiance.
Un autre exemple c’est les entreprises actives dans le domaine des services mais qui pourraient aller partiellement en télétravail mais ne le font pas par souci de sécurité: c’est le cas des services financiers, bancaires, médicaux.
Il y a aussi des entreprises actives dans le domaine des services avec un besoin sécuritaire bas ou moyen mais qui exigent une présence obligatoire dans les locaux de l’entreprise. C’est souvent le cas des entreprises qui offrent un support client, des agences marketing ou des petites entreprises de développement informatique. Si tel est le cas, alors il s’agit souvent des entreprises fortement hiérarchisées, politisées, et très peu confiantes quant aux avantages technologiques (malgré le matériel publicitaire qui dit le contraire).
Pour toutes ces entreprises, le passage au télétravail sera difficile et lent. Une fois que la supervision directe n’existe plus, les collaborateurs vont “se lâcher” et la qualité du travail va baisser. Les contrôles des risques inhérents au télétravail sont trop coûteux, surtout à cause de la surcharge administrative ou de sécurité.
2 — plusieurs sites: ces entreprises ont plusieurs centres, distribuées géographiquement. Cela peut être un siège principal avec diverses filiales dans le même pays, ou situées à l’étranger.
Ces entreprises font régulièrement du télétravail avec les centres éloignés, pendant que des personnes sont périodiquement présentes sur un site défini.
Le télétravail peut être toléré, mais il n’y a aucun processus en place. Le passage à un taux plus élevé de télétravail est facilité parce que les connaissances techniques et organisationnelles existent déjà. Le degré de confiance varie selon les zones fonctionnelles de l’entreprise. Habituellement, le département informatique bénéficie le plus, avec les ressources humaines et marketing au plus bas.
C’est surtout pendant les déplacements ou les réunions que le télétravail est utile. Pour les entreprises dont les sites couvrent plusieurs fuseaux horaires, le télétravail est très respectueux pour les collaborateurs et permet d’éviter les allers-retours. Il est ainsi possible d’organiser une réunion à 6 heures le matin ou 10 heures le soir, avec une pause plus grande en milieu de la journée.
Une clarification et officialisation des “règles non-dit” par rapport au télétravail et le travail sur site peut réduire les risques organisationnels. Il faudra toujours identifier les bons candidats au télétravail.
3 — aucun site: ces entreprises travaillent totalement à distance.
Avec ce modèle, il est possible d’avoir quelques centaines de personnes. Le chiffre de quelque 200 collaborateurs semble une limite pour garder l’efficacité opérationnelle de l’entreprise.
Il s’agit souvent des entreprises en phase de start-up, et très rarement des grandes entreprises. Les entreprises qui choisissent ce modèle le font surtout pour des questions de coûts fixes et un accès très rapide à plusieurs zones géographiques. En effet, les coûts des charges usuelles pour maintenir plusieurs sites et locaux sont inexistants. Selon la stratégie de l’entreprise, cela permet un développement plus rapide.
Les entreprises qui appliquent ce modèle sont actives dans le domaine des services comme le développement informatique ou les agences marketing et communication. Les activités étant en majorité asynchrones, cela facilite une très grande liberté au niveau des horaires. Tout le monde a son propre espace de travail et équipements choisis par ses propres soins.
Le plus grand risque pour l’entreprise réside dans la diversité des solutions technologiques et organisationnelles, parce que chaque collaborateur a ses propres préférences. La centralisation dans un système d’information est donc encore plus importante, de même que la sélection du bon collaborateur. Dans un tel contexte, toute erreur d’embauche se paye encore plus cher parce que même la sélection du collaborateur se fait entièrement à distance.
Conclusions
Comme vous pouvez le constater, il n’y a pas de “modèle parfait” pour organiser le télétravail. Il n’y a pas non plus de “candidat parfait” même si certaines typologies de personnes sont plus adaptées à ce style de travail. C’est surtout l’organisation de l’entreprise et sa culture qui décident sur le succès du travail “à distance“.
Pour un employé ou un indépendant, le télétravail peut être un style de vie. Pour l’entreprise, c’est une partie de sa culture et sa capacité organisationnelle.
Autant pour l’entreprise que pour le collaborateur, le télétravail peut être un moyen de réduire les coûts fixes, augmenter la réactivité et la productivité. C’est une relation gagnant-gagnant, dans une majorité des cas.
Les entreprises et les collaborateurs qui pratiquent activement le télétravail peuvent assurer la continuité des opérations pas seulement en période de crise, mais aussi pendant d’autres situations. Par exemple, une alarme incendie qui se déclenche sans suites n’empêche en rien de continuer son travail depuis un autre endroit. Une courte visite de contrôle chez le médecin n’entame pas une demi-journée de congé, une partie du travail pouvant être réalisée dans la salle d’attente. C’est pour cette raison que la confiance doit être présente des deux côtés.
L’existence des processus permet de maîtriser les risques et d’assurer une continuité de cette méthode de travail.
Finalement, le télétravail c’est toute une affaire … et ne se passe pas toujours à la maison.
Sur la boîte, le mot “PRODUIT INNOVANT” attire immédiatement mon attention.
Je n’ai pas compris comment ce banal biscuit pouvait être qualifié d’innovant; les ingrédients étaient celles d’une recette connue: de la farine, beurre, eau, levure. Est-ce que le fait de revenir à une fabrication classique était de l’innovation ?
Pendant que je lis les nouvelles, tout en croquant ce biscuit, je vois que le mot “innovation” se retrouve presque partout, et souvent, sans aucune justification quelconque.
Et si ce mot était utilisé seulement pour vendre plus ?
Une idée venue droit du département marketing pour cacher un dysfonctionnement de l’entreprise ? Une simple astuce pour augmenter les ventes d’un produit ou service qui manque d’innovation ?
L’innovation
L’innovation est assez facile à reconnaître, malgré les confusions avec des notions comme l’invention et l’amélioration.
L’innovation change quelque chose d’existant, elle contamine par la force des idées d’autres secteurs d’activité, se développe de plus en plus vite, dans nombreux cas améliore la vie de millions de personnes, et amène la prospérité pour les entreprises, les emplois, la société dans son ensemble.
Dans d’autres cas, l’innovation est souvent perçue comme solution à presque tous ses maux, y compris contre la compétition, la situation du marché, l’attraction des nouveaux talents qui manquent, et même les dysfonctionnements organisationnels.
C’est presque magique.
Et voici comment une entreprise commence à déclarer l’innovation comme une “priorité stratégique” . Les grandes entreprises essaient d’innover à coup de grand investissements et Labs, départements, ou incubateurs qui sont spécialement dédiés à cette tâche. Même les petites PME savent qu’elles doivent suivre cette tendance.
En même temps, les chefs d’entreprise et les investisseurs se plaignent de l’absence des résultats.
Une enquête du cabinet McKinsey sur l’innovation avait découvert que seulement 6% des chefs d’entreprise sont satisfaits avec la performance de leur innovation. Et ce sont les chiffres du 2016. Toujours selon cette étude qui a fait pas mal de bruit à l’époque, pas moins de 84% considèrent que l’innovation est importante pour la croissance de l’entreprise.
Ces chiffres se retrouvent sous d’autres étiquettes dans d’autres analyses.
Par exemple, une analyse comparative de l’innovation du cabinet de conseil PWC avait constaté en 2017 que 54% des chefs d’entreprise ont de la peine avec l’innovation et 72% n’arrivent pas à dépasser ses compétiteurs.
Comment cela est possible pour une entreprise qui a la prétention d’être innovante ?
L’engouement pour l’innovation
L’innovation reste encore à la mode, même en 2020.
Il y a des années en arrière c’était la disruption par les petites entreprises (qui à coup de millions d’investissement deviennent des unicornes monopolistes en très peu de temps avec un produit ou service médiocre), auparavant, les talents (qu’il faut les appâter avec jouets et bananes), l’externalisation (implémentée plutôt comme réduction des coûts au détriment des expertises existantes), et toutes sortes d’autres idées.
Les nouvelles idées, c’est bien.
Le problème avec les nouvelles idées c’est qu’une fois qu’elles deviennent dominantes, elles perdent assez rapidement tout le bon sens et la logique. Avec le temps, le message initial se retrouve modifié, comme dans un téléphone sans fil. L’innovation actuelle ne fait pas exception, avec sa pléthore de séminaires, congrès, formations, chefs CIO’s (rien à voir avec le comité olympique) et experts autoproclamés.
En pratique, l’innovation est lancée sans aucune analyse préliminaire, sans stratégie, et sans même prendre en compte la gestion des opérations. Au final, aux échecs presque annoncés se rajoutent d’importantes pertes financières qui mènent directement à la faillite, ou des licenciements de masse et externalisations. C’est donc l’effet inverse qui est obtenu.
Pourquoi ?
L’idée à elle seule ne possède pratiquement aucune valeur, c’est l’implémentation qui compte le plus.
Dans le monde des entreprises et plus particulièrement dans les startups, l’innovation est devenue presque obligatoire. Mais elle reste souvent au stade d’un simple mot.
En effet, la plupart des entreprises ne possèdent pas suffisamment de ressources humaines et financières pour soutenir les efforts nécessaires à un processus d’innovation. Souvent, la notion d’innovation est comprise par la plupart des entreprises et futurs entrepreneurs:
comme une copie d’une idée ou d’un modèle d’affaires qui semble fonctionner chez un compétiteur
qui se trouve dans les grâces (temporaires) des investisseurs
et bénéficie d’une bonne couverture médiatique dans la presse.
Et les choses s’arrêtent là; les aspects opérationnels de l’implémentation sont à peine survolés. Il est assez courant d’avoir cette confusion entre l’idée initiale et le processus d’innovation. Dans le cas de l’innovation, le lien entre la stratégie (le pourquoi) et les opérations (le comment) est encore plus négligé.
La plupart des personnes qui travaillent au niveau C-level ou direction arrivent dans une entreprise en pensant systématiquement que la stratégie serait le seul élément qui compte et que la partie opérationnelle se doit d’être “déléguée” depuis le haut d’une tour d’ivoire.
Cette idée est très répandue surtout avec le tout nouveau c h o u c h o u département qui est celui “responsable des innovations“.
En vertu de cette fausse idée, voici comment se met en place une traque agressive des investisseurs. Par la suite, il suffirait de simplement exiger l’implémentation, mais sans posséder les compétences opérationnelles pour savoir ce qu’il faut demander. Un aspect qui n’est pratiquement jamais abordé c’est la livraison et la stabilisation d’un produit ou service “minimum viable” (MVP ou MVS).
En pratique, les entreprises savent très bien que la partie opérationnelle et exécution est plus importante que la simple phase initiale des idées. Et que ces opérations ont un coût payé par le client final.
Les responsables ou directeurs de l’innovation pensent être embauchés pour “établir une stratégie d’innovation” mais concrètement, tout ce qu’ils font c’est gérer les opérations courantes ou réparer sur le terrain une mauvaise livraison d’un service, un produit ou logiciel quelconque; tout en gardant un œil attentif sur le budget et les ressources.
À cela se rajoute la confusion sur la complexité de l’innovation. Effectivement, pour innover il faut bien délivrer un produit ou service qui soit viable commercialement et profitable, pas seulement venir avec quelques idées.
Voici pourquoi la “déception” quand ces personnes comprennent que seule l’annonce du poste était “innovante” et finalement, assez bien présentée pour vendre un emploi de gestion et purement opérationnel. L’élément stratégique (soit la vision d’ensemble) n’a jamais existé, par conception. Le rêve d’être au même niveau, voir même dépasser les grands leaders charismatiques qui changent le monde avec une idée était seulement … un mirage.
L’innovateur est ainsi frustré rapidement, donc il décide de se lancer comme indépendant pour implémenter ses propres idées.
Ce phénomène se retrouve dans pratiquement toutes les entreprises.
3 – La stratégie (le pourquoi)
Peut-être vous avez déjà eu l’occasion de discuter ou rencontrer un entrepreneur qui a décidé de créer une entreprise sur la seule base de ses idées innovantes.
Pendant la recherche des fonds, le discours de ces entrepreneurs se limite très souvent à un enthousiasme et une énergie presque sans limites. Après tout, les histoires à succès ne manquent pas: il suffirait de venir avec une bonne idée pour créer des unicornes et des grandes entreprises, reconnues partout dans le monde.
En pratique, il faut bien plus pour réussir.
Est-ce que l’élément stratégie est présent et apporte la structure nécessaire aux opérations, et cela depuis la phase initiale à la livraison finale et la maintenance ultérieure ?
Cet élément est souvent absent.
Le lancement d’une présentation “allons innover dès demain, mais seulement entre 9h et 18h et après quelques séminaires et recherches d’idées chez les compétiteurs” – le tout parsemé de quelques citations fameuses sur les réussites spectaculaires n’est pas de la stratégie. Et ce n’est même pas de l’opérationnel.
En pratique, il s’agit à peine d’une “idée d’action” avec “quelques tactiques“. Or, cette construction est instable; il manque autant la partie planification stratégique que la partie opérationnelle. Les quelques éléments tactiques qui peuvent être confondus avec la gestion des opérations ne se substituent pas à la stratégie.
La gestion de l’innovation
La gestion de l’innovation est encore une chose qui est mal comprise.
La gestion de l’innovation est aussi un processus, tout comme le processus d’innovation. Les deux peuvent sembler identiques, mais ne le sont pas.
La confusion arrive parce que la gestion de l’innovation a une approche plus globale qui s’applique à l’ensemble de l’entreprise.
La gestion de l’innovation couvre donc le cadre général, y compris la stratégie de l’innovation et les opérations d’entreprise. Revoir le concept: “run the business & change the business” – “gérer l’entreprise et changer l’entreprise“.
En d’autres mots, il s’agit d’intégrer l’innovation dans les opérations courantes d’une entreprise. Les opérations courantes d’une entreprise passent par des notions comme les équipes, les responsabilités, les ressources et équipements, gestion des risques, processus, coopérations et échanges entre diverses zones fonctionnelles, contrôles, optimisations. Le but final des opérations d’une entreprise est de délivrer et vendre un produit ou service profitable.
Le processus d’innovation est une sorte d’exécutant qui découle du cadre général de la gestion de l’innovation. Ce processus d’innovation ne doit pas être limité à un seul département, mais l’appliquer partout où cela est utile et possible.
C’est surtout ce processus qui permet d’atteindre l’excellence opérationnelle et en même temps, délivrer le produit ou le service innovant.
Le fait de venir avec des idées n’est pas une gestion de l’innovation. Déclarer que l’innovation est une priorité stratégique et l’octroi d’un budget non plus. La création d’une équipe “responsable de l’innovation” encore moins.
Et pourtant, des nombreuses entreprises se limitent à ces activités; la création d’une équipe dédiée étant souvent perçue comme le summum de l’innovation.
Désormais, c’est leur travail pour “innover“.
L’innovation qui n’est pas de l’innovation
Une recherche avec le mot “innovation” sur un grand réseau professionnel donne pas moins de 5 198 297 résultats. Oui, en ce début 2020, il y a plus de 5 millions de personnes dans le monde dont le titre du poste contient ce mot.
Presque toutes les entreprises se vantent sur leur capacité innovante. Ce mot est présent partout: sur leur site web, sur les réseaux sociaux, dans leur philosophie et vision d’entreprise, dans les diapositives de présentation faites dans le cadre des grands événements. Les employés rajoutent aussi des louanges de “fierté” — comme une sorte de chœur géant à la gloire de l’entreprise innovante.
Après tout, voici toutes ces personnes qui travaillent pour innover. Et nous, on en fait partie: l’élite de l’innovation.
Ce spectacle continue à l’intérieur de l’entreprise, pendant les longues heures de “réunion stratégiques” et où il est plutôt question de “créer un besoin” sur le marché – au lieu de l’écouter attentivement.
Ainsi, très rapidement, un écosystème malsain se met en place.
Que se passe-t-il quand la direction ignore volontairement, et pour des raisons purement politiques, des sources d’innovation importantes comme les besoins du marché ou le retour des clients existants ? Ou quand les équipes de production attendent sur les idées trop théorétiques du département d’innovation ? Ou quand le cycle de mise sur le marché est raccourci au minimum pendant que les risques sont augmentés de manière irréfléchie ?
Le signal donné aux équipes opérationnelles est clair: “livrer vite et peu cher” et cela même si ce n’est pas toujours réaliste, éthique, ou possible. Les départements marketing et ventes comprennent qu’il faut “vendre beaucoup, très vite” . Quand le marché ne suit pas et la direction s’impatiente au vu des montants investis, alors la tentation est très forte pour “forcer” le passage des clients vers les produits et services prétendument innovants. Seule la poursuite du profit rapide est imposée, et cela, au détriment du cercle vertueux d’améliorations constantes mais basées sur un retour des cycles d’itération.
Et voici comment des mauvaises pratiques commerciales mais déguisées comme “innovation” sont presque devenues la nouvelle norme pour vendre et faire des affaires.
Conclusion
Nombreuses sont les entreprises qui utilisent le mot innovation, alors qu’en réalité, la plupart de leurs équipes, cadres et directeurs ne font que manier quelques mots à la mode.
La gestion de l’innovation devrait permettre d’améliorer le service ou le produit qui est proposé au client final. Mais en pratique, cette notion se résume à “obtenir la vente, même si pour cela il faudra mentir au client” avec un produit ou service “minimum viable“. Ceci n’est pas de l’innovation, c’est seulement une entreprise qui, en utilisant ce mot dans un but purement marketing-ventes, cherche à grappiller quelques pourcentages de parts de marché. Dans ce contexte, l’innovation ne doit pas être perçue comme un concept simpliste pour augmenter les ventes.
Les situations dans cet article ne sont pas si rares que cela et conduisent invariablement à la crise. Les solutions pour résoudre ces problèmes ne sont pas simples, et il n’y a pas de “recette toute prête” .
En règle générale, je conseille aux entreprises de commencer à améliorer en premier lieu les opérations orientées client, comme ceux permettant un gain de réactivité, coûts et qualité, une meilleure logistique de production et temps de livraison réduit. Ensuite, l’entreprise devra résoudre les problèmes latents; par exemple ceux liés aux processus. Pas dernièrement, une entreprise doit constamment adapter sa stratégie d’innovation selon sa situation sur le marché. Ces étapes peuvent être exécutées en parallèle.
En procédant ainsi, il y a des belles opportunités pour la découverte et le développement d’une véritable innovation.
Une gestion adéquate de l’innovation permet de faire remonter les signaux donnés par les clients et les employés. Une entreprise peut développer les nouvelles idées selon les critères principaux: la bonne idée, le bon moment, la bonne profitabilité, et si affinité avec la stratégie d’entreprise. Ainsi, l’entreprise facilite la création de l’innovation.
Le mot “innovation” à lui seul, peut faire vendre beaucoup, mais pas pour longtemps.
Pendant ma carrière de presque 3 décennies, il m’est arrivé assez souvent de rencontrer des entrepreneurs et fondateurs de start-up.
Ils sont tous très enthousiastes par rapport à leur nouvelle idée d’un produit ou service innovant, qui, il va de soi, va révolutionner, disrupter, et changer les règles du jeu et même le jeu lui-même, tant qu’on y est.
Toutes ces démarches sont faites avec l’espoir de convaincre sur sa capacité à accomplir quelque chose de vraiment important et rester dans l’histoire des 20 prochaines années (au minimum) tout en faisant la une des divers médias (chaque jour, si possible).
Ça … c’est le discours usuel.
En pratique, la réalité est un peu différente.
Avant toute chose, les fondateurs d’une entreprise cherchent à appâter les investisseurs.
Il s’agit d’une démarche justifiée quand l’idée a été validée avec un esprit critique par rapport au potentiel et quand son développement serait ralenti par manque de ressources pour l’implémentation, surtout pendant les premiers stades du développement de l’entreprise.
Il y a également des secteurs spécifiques où les fonds de départ sont indispensables pour venir avec un concept qui dépasse le stade d’idée.
Après l’excitation initiale, c’est surtout sur le point financier que les choses se compliquent.
La raison est simple: les investisseurs, peu importe le domaine, cherchent à rapidement trier toute cette masse de personnes inexpérimentées et totalement déconnectées de la réalité du terrain. Ce triage est rapide.
Les fonds sont importants pour le début et le développement d’une entreprise, mais ce qui compte plus que l’idée c’est la capacité opérationnelle d’implémenter cette idée avec l’argent des autres personnes.
Un investisseur souhaite avoir un retour sur son investissement (en temps ou argent).
C’est aussi simple que cela.
Juste pour mettre cette notion en perspective: cet objectif de retour sur investissement est identique pas seulement pour les organisations à but commercial, mais aussi pour celles actives dans le secteur non-profit, et même pour les particuliers dans la vie de tous les jours.
Un investisseur avisé possède la capacité d’identifier très rapidement le potentiel d’une nouvelle idée. Ce n’est pas pour rien que les personnes et les sociétés de capital-risque sont perçues comme étant “froides” car ayant un fort esprit des chiffres, en plus d’un esprit critique assez bien prononcé.
Mais ce n’est pas seulement les chiffres qui sont analysés pendant une demande de financement. C’est aussi les qualités humaines et organisationnelles qui sont évaluées.
Cependant, il faudra retenir que le but principal d’un investisseur n’est pas de changer les comportements des fondateurs et encore moins de les pouponner – pour cela il existe divers services de soutien de start-up et mentoring individuel.
Le but de cet article n’est pas non plus d’apprendre comment obtenir ces investissements, mais quel est le mécanisme d’évaluation qui s’applique à un grand nombre de fonds et fournisseurs en capital-risque. En effet, les critères d’évaluation peuvent varier de manière significative, selon le secteur et les spécialisations qui sont recherchées.
Mais que faut-il avoir comme capacité essentielle, afin de convaincre les investisseurs à signer le chèque si attendu ?
Il s’agit d’une question qui revient régulièrement.
Est-ce le charisme des grands chefs d’entreprise, aujourd’hui très médiatisés ? Est-ce la capacité de croire dans son idée ? Est-ce le succès du passé ? Est-ce la formation ?
Ou l’intelligence ? Ou la capacité de constituer une équipe ? Ou la capacité de diriger et inspirer une vision ? Ou l’expérience passée d’une excellence opérationnelle pour bien mener à terme son projet ? Ou la capacité d’entrer en détail tout en gardant une vision d’ensemble ?
Est-ce tout simplement le potentiel de l’idée, la grandeur du marché et l’intérêt des clients ?
Quelques investisseurs et fonds spécialisés ont des critères précis avant de s’engager d’un point de vue financier et selon le cas, opérationnel. Cela peut être un domaine spécifique comme la technologie, ou la durabilité et l’écologie, ou tout un secteur particulier comme celui des services financiers ou pharmaceutique.
Peu importe le domaine ou le secteur, tous les investisseurs et les sociétés de capital évaluent tout d’abord le potentiel du fondateur ou de l’équipe initiale (si plusieurs cofondateurs).
Chaque fond de capital a des mécanismes permettant l’identification du profil-type du fondateur qui a le plus de chances de réussite selon la spécialisation recherchée dans le portfolio d’investissement.
Je ne suis pas un investisseur direct, mais grâce à mon expérience opérationnelle j’interviens quelquefois dans les derniers stades d’évaluation finale, surtout en cas de doute sur la capacité du futur fondateur. Pour ma part, j’ai une méthode qui a fait ses preuves dans la durée, car fondée sur une approche holistique et culturellement adaptée selon le but recherché et le domaine d’activité.
Par exemple, dans les domaines fortement compétitifs comme la technologie c’est un autre type de fondateur qui est recherché que celui perçu comme idéal pour le secteur de santé.
L’intuition joue aussi un rôle important, car ce n’est pas tout qui peut être mesurable de manière concrète.
En règle générale, voici les questions les plus habituelles.
Dans quelle mesure cette équipe initiale pourra tenir sa parole et explorer toute nouvelle voie possible ? Est-ce que cette personne ou équipe possède la crédibilité nécessaire auprès des clients et employés ?
Est-ce qu’il y a déjà une expérience opérationnelle sur le terrain ? Est-ce que les tendances dans la stratégie, la technologie, les opérations, le marketing et les ventes sont suivies à la lettre ou ces tendances sont plutôt adaptées selon la réalité du terrain ?
Outre l’analyse financière du marché et du potentiel, c’est l’ensemble des éléments ci-avant qui jouent un rôle supplémentaire par rapport à la capacité principale d’adaptabilité et rigueur. L’accent est souvent mis sur ces aspects, tout simplement parce qu’ils sont perçus comme une sorte de “garantie morale“.
En même temps, ces qualités sont inutiles si les autres aptitudes et le potentiel du marché font défaut. C’est pour cette raison que cet ensemble est complexe et peut sembler incompréhensible aux fondateurs qui ne comprennent pas les raisons derrière un refus.
Pourquoi la capacité d’adaptabilité et rigueur est une qualité indispensable ?
Ces deux notions vont souvent ensemble parce que l’adaptation à elle seule, ne sert pas à grand-chose sans la rigueur.
L’adaptation permet de correctement réagir dans une situation de changement. De nos jours, la question ne se pose plus s’il y aura un changement, mais comment gérer la situation quand ce changement arrivera. Ce changement peut être déclenché par une nouvelle technologie, les changements du marché, voir même un événement imprédictible. Voici pourquoi l’adaptabilité est importante.
En même temps, trop d’adaptabilité est une approche inadéquate aux réalités du terrain, car elle empêche de maintenir les engagements déjà pris et apporte un chaos inutile avec des changements incessants de la stratégie et des opérations courantes. Une flexibilité entre certaines limites déjà définies auparavant est saine, mais trop de changements juste pour changer, c’est néfaste pour l’existence même d’une entreprise.
C’est donc la rigueur qui permet de poursuivre les divers objectifs et stratégies. Si la capacité de les faire exécuter ou les implémenter sur le terrain manque cruellement, alors il est inutile d’avoir plein d’idées. Cette rigueur peut être mesurée par des indicateurs de performance. La même rigueur permet d’améliorer les processus afin d’atteindre un bon niveau d’excellence opérationnelle, pour donner un autre exemple.
Cette capacité d’adaptabilité et rigueur est indispensable pas seulement aux fondateurs d’entreprise mais aussi à un manager ou un directeur de département, voir même à des employés dans les fonctions de support administratif.
En effet, le monde d’aujourd’hui est en constante évolution et changement.
Qui aurait pensé en 2008 que les médias sociaux allaient prendre tellement d’importance ? Qui aurait pensé que des nouveaux produits et services peuvent être lancés avec des barrières d’entrée si basses ? Qui aurait anticipé le monde globalisé d’aujourd’hui dans lequel une offre compétitive et rapidement disponible se trouve à moins de 3 clics ? Qui aurait pu deviner l’essor actuel des nouvelles formes de travail à distance ?
Je pense que c’est très important d’avoir cette capacité d’adaptabilité et rigueur.
Cette capacité rajoute un bon sens solide par rapport aux incantations presque religieuses d’aller vite et “casser des choses” avec une attitude chaotique, sous le prétexte d’une “disruption de rupture” et “innovation mythique en style unicorne” .
En même temps, les innovations de qualité et qui sont bien conçues poussent à une adaptation constante. Aujourd’hui, cette adaptation est un processus rapide. Il y a ainsi des nouvelles technologies et des nouvelles manières de faire les choses, pour illustrer le côté pratique du besoin d’adaptation.
Comment développer cette capacité d’adaptabilité et rigueur ?
Il n’y a pas de recette magique à appliquer du jour au lendemain, mais quelques stratagèmes efficaces permettent d’améliorer rapidement cette capacité.
La première serait d’imaginer ce qui peut arriver dans le pire des cas. Pas seulement cet exercice pratique est utile dans la gestion d’une crise, mais aussi pour décider sur l’implémentation d’un processus permettant d’anticiper et contenir les éventuels effets négatifs. D’ailleurs, l’implémentation d’un processus fiable est indispensable à toute organisation qui souhaite être suffisamment viable sur le moyen et le long terme.
Une autre stratagème consiste à apprendre de ses leçons.
Cette manière de faire est très utilisée dans la gestion de projet, par exemple. Elle fait d’ailleurs partie des diverses méthodologies comme le PMP ou Prince2. Pendant que j’ai passé les divers examens pour obtenir ces certifications moi-même, j’ai été étonnée que nombreuses personnes échouent à obtenir des points suffisants sur ce module et pendant l’examen d’évaluation.
Le motif était simple: ces personnes ne comprenaient pas la logique derrière cet apprentissage, alors que le projet était déjà livré. Cette étape importante était perçue comme une “perte de temps et ressources” au détriment d’un tout nouveau projet.
Pour ma part, je suis convaincue que cet apprentissage est essentiel, car cela permet ensuite d’adapter toute nouvelle tendance ou idée. Nombreux peuvent penser qu’il s’agit d’expérience, mais en fait c’est de l’adaptabilité. Une personne de niveau junior peut ainsi, sans avoir beaucoup d’expérience, posséder la capacité d’apprendre suite aux diverses situations qui sont rencontrées sur le terrain.
L’expérience permet de rapidement venir avec une solution car dans nombreux cas c’est quelque chose de “déjà vu“, pendant que l’adaptabilité permet d’avoir aussi une solution rapide, mais sur la base de situations différentes.
Au final, la rigueur permet de poursuivre les objectifs professionnels et personnels mais dans un cadre opérationnel bien établi.
Par exemple, les fondateurs ont souvent cette fausse idée de sous-estimer les besoins des divers collaborateurs dans le cadre d’une entreprise qui ne sera pas la leurs.
Il y a donc une sorte de dissonance par rapport aux ambitions d’un fondateur et celle des employés qui ont d’autres objectifs. Un fondateur est capable de travailler jusqu’à l’épuisement pendant 12 à 18 heures chaque jour et tester des nouvelles idées, pendant qu’un employé se trouve dans un autre type de relation avec l’entreprise.
La capacité d’un fondateur qui arrive, par la rigueur, à rapidement “mettre de l’ordre” dans le chaos d’une start-up permet aussi de trouver les bons collaborateurs qui vont s’intégrer naturellement et aider les objectifs du fondateur. Un employé n’apprécie pas toujours le chaos d’une start-up.
Dans ce cas, ce n’est pas dans une optique d’exploitation du plus faible, du plus jeune, ou du plus naïf qui prime pour l’entreprise qui souhaite rester viable sur le moyen et le long terme. Le but d’une entreprise n’est pas d’épuiser les équipes opérationnelles qui participent depuis le démarrage.
Grâce à la rigueur, le fondateur d’une entreprise peut implémenter un processus permettant une exploitation efficace des ressources existantes, mais avec un gain réciproque pour toutes les parties impliquées. C’est d’ailleurs un des nombreux facteurs de réussite pour une entreprise et cela peu importe le domaine d’activité.
Une personnalité avec un grand égo ne possède pas cette rigueur et capacité d’adaptation. Il en va de même pour les individus qui manquent d’éthique ou sont trop opportunistes.
Certes, une entreprise doit vendre ses produits ou services et aussi trouver des nouvelles débouchées, sous peine de vite fermer en absence de clients. Malgré cela, une personnalité charmante et humble peut en même temps être éthique. Cela permet de garder les bonnes relations avec ses prospects et clients, même si ce n’est pas (encore) le bon moment.
Les fondateurs qui ont le plus de chances de réussite avec leur entreprise conçoivent cette rigueur des opérations comme un élément indispensable à la bonne marche des affaires.
Loin d’être un frein, cette rigueur permet de correctement analyser et organiser toute nouvelle opportunité. C’est cette capacité qui permet, entre autres, d’implémenter un bon processus d’innovation.
Un bon tempérament comme fondateur permet d’être constamment à l’affût des nouvelles possibilités tout en gardant une excellence opérationnelle.
Il s’agit ici du fameux concept gérer l’entreprise et la faire évoluer en même temps ( “run the business” – “change the business” ).
Chaque fondateur d’entreprise a la possibilité de développer cette capacité d’adaptabilité et rigueur, de la même manière qu’un athlète se prépare constamment pour réussir ses compétitions. Une fois cette capacité acquise et développée, pas seulement l’entreprise a plus de chances de succès, mais aussi elle augmente les possibilités de financement externes.
Avec le temps, un fondateur d’entreprise saura évoluer avec son entreprise, tout en préservant des bases saines autant sur le plan personnel que professionnel. Quand les crises arrivent dans le cadre d’une entreprise dirigée par un tel fondateur, alors les risques de perdre les deux sont réduits.
Depuis le début de mes activités professionnelles, j’ai eu la conviction que l’avenir d’une entreprise saine passe par sa capacité de s’adapter aux divers changements tout en gardant aussi son excellence opérationnelle, la compétitivité et la capacité d’innovation. En effet, les perturbations n’ont pas leur place dans la gestion des opérations courantes, mais la rigueur retrouve tout son sens.
Finalement, trouver l’entrepreneur convenable, c’est toute une affaire.
Comme propriétaire d’une entreprise ou comme cadre dirigeant, vous devez vous assurer que vos collaborateurs et équipes planifient, exécutent, organisent et contrôlent leur travail.
Voici pourquoi la création, l’implémentation et l’ajustement d’un ou plusieurs processus est une des responsabilités les plus grandes.
Les processus et l’excellence opérationnelle
Les processus assurent une cohérence et fiabilité opérationnelle par rapport au respect de la stratégie d’entreprise. C’est par un processus que l’exécution de la stratégie d’entreprise peut être faite de manière plus cohérente et plus fiable que celle de la concurrence. Cela permet également d’avoir un contrôle plus poussé sur les coûts (embauche, budget, délivrables) et aussi sur les délais.
En pratique, les entreprises souffrent principalement soit d’un trop grand nombre de processus qui souvent se superposent, soit d’une absence totale, soit d’un processus chaotique et mal respecté.
Cet article passera très brièvement en revue les avantages d’un processus et présentera ensuite un cadre général et simplifié permettant d’établir les bonnes bases.
Cet article n’a pas la prétention de couvrir tous les aspects opérationnels liés à la création ou la gestion des processus — seule une analyse adaptée à son secteur d’activité et zone géographique peut permettre d’avoir un meilleur aperçu de la situation.
Cet article n’a pas non plus la prétention d’être exhaustif — mais l’approche entrepreneuriale et pratique basée sur le retour des investissements dans une entreprise sera prépondérante.
« Quel est le principal processus opérationnel déjà en place et pourquoi pensez-vous qu’il ne fonctionne pas correctement dans le cadre de votre entreprise ou département ? »
Quelques fois, un silence pesant s’installe comme seule réponse. D’autres fois, des balbutiements artistiques sur l’existence d’un processus qui existe, est bien documenté, mais qui n’est tout simplement pas appliqué. Dans d’autres cas, quelques responsables tentent maladroitement de s’expliquer en utilisant une belle quantité de mots à la mode.
La plupart des responsables et managers sont fermement convaincus que l’implémentation d’un processus pour la gestion des diverses opérations dans une entreprise serait une mauvaise chose qui doit être combattue à tout prix. Ainsi, le manque de processus est perçu comme un avantage, et cela en vertu de diverses excuses comme moins de bureaucratie, la liberté d’innover et la capacité de réagir rapidement.
Or, la création d’un système qui permet la documentation des actions, activités et étapes est la meilleure chose qu’une entreprise peut faire, avant même de se lancer dans des opérations plus complexes.
Un processus n’empêche aucunement l’innovation (qui d’ailleurs est aussi un processus), ni l’agilité de réaction. C’est tout le contraire, un processus encourage surtout ces 2 aspects.
Généralement, les responsables d’une entreprise ou d’un département pensent qu’ils doivent consacrer leurs efforts pour démanteler tout processus existant, et gérer chaque opération même la plus banale, au lieu d’utiliser ce moyen comme une sorte de gestionnaire automatique des prises des décisions sur les opérations courantes.
Malgré cela, un grand nombre d’entreprises de diverses tailles, et même les multinationales, continuent à se contenter avec un système chaotique, même si tout le monde sait que ce n’est pas la bonne solution.
La nécessité d’une stabilité et excellence opérationnelle
Un processus inadapté ou absent a des conséquences pour les résultats financiers d’une entreprise. Le problème s’aggrave avec le temps et tôt ou tard, une telle méthode opérationnelle pose des problèmes structurels qui impactent l’existence même de l’entreprise.
Prenons l’exemple de l’industrie hôtelière.
Voici un excellent exemple qui illustre la nécessité d’un processus efficace et l’acquisition naturelle d’une excellence opérationnelle.
Le besoin d’un processus répétable s’est fait sentir alors que les clients voulaient louer de manière temporaire une chambre, sans même être allé voir sur place. Les équipements devaient y figurer dans la liste, ainsi que les autres fonctionnalités comme l’existence d’un restaurant ou d’un bar. Le client voulait avoir l’assurance que sa chambre sera disponible pour lui, dans un état propre, et aux délais indiqués.
Les grandes entreprises ont optimisé pas seulement la gestion des opérations, mais également les processus permettant de faciliter la gestion et le flux des voyageurs dans leurs établissements hôteliers (réservations, check-in, check-out). Tout ceci a été fait au détriment des petits propriétaires et indépendants, qui ne voyaient pas l’utilité d’un processus opérationnel et encore moins la nécessité d’une stabilité et excellence opérationnelle.
Ce modèle s’est répété avec d’autres secteurs d’activité comme les divers magasins de proximité, les bouchers, les boulangers, autres petits artisans. C’était une stratégie imprudente. La conséquence directe a été l’exclusion du marché.
Comme nous avons pu voir depuis quelques décennies, les clients finaux ont choisi des entreprises ayant un processus de traitement rapide de toutes leurs demandes, avec une efficacité prouvée, et pouvant offrir une expérience prévisible.
Parmi d’autres facteurs, un processus permet de réduire, comme nous allons le voir plus bas, autant les coûts que les délais, tout en offrant une stabilité opérationnelle.
Cette stabilité des opérations courantes est nécessaire pas seulement à l’entreprise mais également aux clients finaux.
L’entreprise peut ainsi utiliser ses ressources pour d’autres activités comme l’innovation et le développement de nouveaux services ou produits, pendant que le client final sera « rassuré » quant à l’absence de mauvaises surprises en cas de problèmes.
À qui profite le manque de processus ?
Les gens sont réticents à l’idée d’être surveillés.
Effectivement, il est stressant de savoir que chaque action est contrôlée, mesurée, analysée et enregistrée. Il est encore plus stressant quand les KPIs (indicateurs de performance) deviennent la référence.
De plus, il peut être difficile à définir des étapes précises pour une entreprise active dans le développement informatique, par exemple. La nature du travail est différente par rapport à celle d’une usine de fabrication.
Malgré ces difficultés, lorsqu’il s’agit de correctement délivrer un projet et afin d’assurer le respect des travaux livrables, délais, et budgets, alors les processus opérationnels doivent bénéficier de toute l’attention et faire partie de la stratégie d’entreprise. Cette approche est la seule voie possible pour ne pas échouer et encore plus si on veut obtenir le maximum de résultats par rapport aux ressources investies.
Dans une majorité d’entreprises proches de l’effondrement, c’est le manque de processus qui est principalement lié à l’essor considérable des « responsables et managers superstar, présents partout, en tout temps » et l’augmentation du taux d’échec des multiples projets.
Si chaque décision et opération, même des plus banales, a besoin de l’accord et la surveillance proche d’un manager ou d’un responsable de département, alors c’est l’effet contraire qui est obtenu par rapport à l’innovation et l’agilité.
La volonté d’une ou plusieurs personnes de garder tout le contrôle dans un but illusoire de se rendre « faussement indispensable » n’apporte rien de bon sur le moyen et long terme.
Il n’est pas facile de convaincre que le respect d’un processus permet de gagner principalement, du temps. Le temps ainsi gagné permet, pour donner seulement quelques avantages, la transformation des métiers par une meilleure utilisation de l’intellect, une meilleure circulation de l’information et ressources entre les divers départements, équipes et zones fonctionnelles, le lancement de nouveaux produits ou services, et aussi plus d’attention accordée au client final.
Un exemple de structure générale et simplifiée pour la création, l’implémentation et l’évolution d’un processus
Cette structure peut servir comme modèle de référence simplifié. Une étude spécifique est toujours nécessaire afin de hiérarchiser les diverses opérations, décrire, évaluer et optimiser les processus opérationnels.
À partir de ce modèle crée par moi-même (Elena Debbaut), vous pourrez faciliter l’identification des opérations qui peuvent faire l’objet d’un processus et d’intégrer naturellement ces possibilités dans votre organisation. Ce modèle peut s’appliquer à toutes les entreprises peu importe le secteur d’activité, la zone géographique et leur taille.
Si vous n’adoptez pas l’idée de processus dans votre organisation, alors vous encourez les risques d’une personnalisation inutile et des coûts opérationnels trop élevés, ainsi que des délais plus longs. Tout ceci va se refléter inévitablement sur le client final de l’entreprise.
Pire encore, vous risquez de ne pas obtenir le retour attendu sur vos investissements (financiers, humains, temps) à cause des occasions manquées permettant d’augmenter la productivité et la réactivité.
Ci-après, voici un cadre général et simplifié permettant d’établir les bonnes bases. Afin d’obtenir un meilleur résultat sur le terrain, ces phases peuvent avoir lieu en parallèle.
1 – phase de réflexion. Identification des besoins, établissement inventaire opérations, analyse possibilités pour augmentation de la productivité, amélioration du service client, et autres opportunités pour accroître les revenus.
2 – phase de création. Sur la base des flux de travail prévus ou déjà existants, établissez l’enchaînement des tâches, ce qui peut être fait, par qui, à quel moment, à quel endroit, sous quelles conditions, et prévoir toujours les exceptions au process.
3 – phase implémentation. Des ajustements sont toujours nécessaires pendant la phase d’implémentation et la phase évolutive suivante. Ces correctifs font partie intégrante des processus ‘SOP – standard operating process’ ayant le meilleur taux de conformité, adoption et succès.
4 – phase évolutive. Un processus évolue et s’adapte aux besoins. Toute nouvelle donnée et expérience peut rajouter des éléments permettant d’améliorer le processus initial. L’élimination du gaspillage doit rester une priorité constante.
Voyons plus en en détail ces 4 étapes.
1 – La phase de réflexion sur un processus
Les processus documentés sont utiles pas seulement pour créer l’excellence opérationnelle, mais aussi pour former tout nouveaux collaborateur et intégrer des manières de faire qui autrement seraient perdues par la rotation du personnel.
Selon mon expérience, cette phase initiale offre d’excellents résultats quand il y a une approche orientée en priorité sur l’amélioration de la productivité, c’est-à-dire la capacité de faire plus avec les mêmes ressources. L’efficacité, soit faire plus avec moins (temps, argent, ressources) est une autre conséquence positive. Cette approche permet une meilleure répartition des ressources qui permet ainsi indirectement d’améliorer le service client et partant, une croissance de revenus.
La réflexion sur les divers documents de type « Business Case » et les propositions dans la conduite des affaires peuvent donner des idées permettant d’implémenter des nouveaux processus.
Si ces réflexions initiales sont faites avec une vision axée sur le moyen et long terme, alors les résultats financiers sont constants et prévisibles sur le même horizon de temps. Pour des résultats durables, il va falloir néanmoins sacrifier le court-terme.
2 – La création d’un processus
La création d’un processus pour les activités qui s’y prêtent est un sujet qui me tient à cœur. J’ai beaucoup écrit sur ce sujet, car je sens que dans la littérature spécialisée, il y a une approche trop technique, trop procédurale, et qui manque de nuance.
La création d’un processus n’est pas un objectif en soi. Il est inutile de créer tout un manuel avec des centaines de pages. Un processus doit être facile à expliquer, facile à comprendre, logique et pratique.
Ensuite, un processus doit être respecté dans une majorité de situations, mais ce respect ne doit pas non plus être ridiculement rigide dans le cas des situations exceptionnelles. Aussi paradoxal que cela peut paraître, un processus bien conçu possède d’ailleurs la fonctionnalité et les critères pour ne pas le respecter. C’est la partie « agilité » même si le cadre opérationnel est bien structuré à la base.
Au final, un processus efficace n’est pas seulement un enchaînement de tâches à exécuter, mais aussi un outil très puissant qui permet d’optimiser les opérations et les divers investissements en temps, ressources et argent.
La nécessité d’un processus s’explique par les importants changements technologiques qui sont apparus initialement dans le secteur de l’industrie manufacturière. La transformation de l’économie, avec l’apparition d’entreprises actives principalement dans le secteur des services ou des technologies, a pu faire penser, à tort, que les processus ne seraient plus nécessaires dans la gestion des opérations. Or, même une entreprise locale et artisanale a besoin de processus bien conçus, afin d’optimiser au mieux la gestion de ses opérations.
A mon avis, la réussite d’une entreprise passe par une excellence opérationnelle en premier lieu, ensuite par la capacité à rapprocher les différents types de compétences techniques, et un véritable travail d’équipe, même dans le cas où les collaborateurs sont localisés à distance. Si une entreprise souhaite réussir dans le monde actuel des affaires, alors elle devra savoir comment travailler de manière efficace.
Tout ceci peut être obtenu grâce à un processus.
Il est important de bien comprendre cette réalité.
3 – L’implémentation d’un processus
Le moment idéal pour faire cette démarche n’est pas séquentielle, juste après la phase de création. Idéalement, je recommande de faire l’implémentation en parallèle avec la création et la phase suivante d’ajustement par rapport aux réalités du terrain.
Les plus grands bénéfices sont obtenus en commençant au plus tôt possible, dès que le moment se fait sentir, mais il n’est pas trop tard si vous arrivez à clarifier, officialiser et documenter les diverses manières de faire qui sont déjà existantes.
L’implémentation d’un processus n’est plus réservée aux seuls cadres supérieurs ou directeurs.
Il est important de comprendre que même les collaborateurs de niveau intermédiaire peuvent proposer et implémenter des nouvelles manières de travail qui s’inscrivent dans la stratégie globale de leur entreprise.
Dans le même ordre d’idées, même un collaborateur du plus petit niveau peut apporter beaucoup s’il possède la capacité à comprendre comment son travail interagit avec autres départements et s’intègre dans l’ensemble de l’entreprise. Un tel collaborateur peut aider à créer quelque chose de plus grand que la somme de chaque travail individuel.
Les divers collaborateurs d’une entreprise peuvent aussi venir avec des nouvelles idées, plutôt que d’exécuter seulement ce qui leur est donné comme tâche par les niveaux hiérarchiques plus hauts.
A mon avis, les entreprises doivent développer cette capacité d’écoute, que cela soit par des réunions ad-hoc, des visites imprévues, des conversations, ou analyse de données.
Cette aptitude ne doit pas être limitée à quelques niveaux hiérarchiques et titres pompeux. Il suffit de surmonter la peur naturelle de « perdre le pouvoir ». D’ailleurs, un leader réel, et pas celui auto-proclamé, encourage et accompagne toutes les bonnes initiatives, même celle provenant d’un niveau hiérarchique plus bas que le sien.
Les entreprises qui arrivent à survivre dans une économie en mutation comme celle d’aujourd’hui sont justement celles qui acceptent que tous les collaborateurs ont un rôle à jouer et possèdent la capacité de résoudre les problèmes opérationnels ou de processus qu’ils ont pu identifier à leur niveau.
4 – L’évolution d’un processus
De plus en plus de clients choisissent les entreprises qui arrivent à fournir une expérience client prédictible et satisfaisante, même en cas de problème. Voici pourquoi les processus de base doivent garantir que la majorité des situations sont couvertes dans les plus brefs délais et avec le moindre coût autant pour l’entreprise que pour le client.
Par exemple, si le paiement d’un service ou produit ne se fait pas correctement, un processus permettrait d’identifier et corriger rapidement. Dans le cas d’un produit défectueux ou service insuffisant, le client s’attend à une résolution rapide de son problème. Les éventuels problèmes de fabrication ou livraison doivent être communiqués et corrigés.
Une gestion au cas par cas de ce type de situations ne serait pas efficace, parce que pour le client final, il n’y a rien de pire qu’une entreprise qui panique et multiplie les erreurs.
Même avec un processus bien conçu et admirablement implémenté, il y aura toujours le besoin d’une gestion individuelle pour les cas hors-normes. Selon le cas, toute nouvelle expérience peut rajouter des éléments permettant d’améliorer le processus initial.
La gestion de ces changements de processus doit assurer que les éventuels rajouts ont une justification réelle, sont bien documentés, et qu’elles ne rajoutent pas une complexité inutile.
Dans le même ordre d’idées, l’élimination du gaspillage (ressources, étapes, tâches) doit rester une priorité constante. Cette optimisation peut être faite avec des méthodes comme le « lean » ou « six sigma ». Ces méthodes ne sont pas réservées au seul secteur de l’industrie manufacturière, mais aussi aux services.
Un processus, de par sa capacité évolutive, permet d’augmenter pas seulement la qualité des opérations et le bien-être des équipes, mais également de réduire le temps et les coûts, tout en délivrant une expérience client supérieure.
Au final, tout le monde est gagnant: l’entreprise, les collaborateurs, les clients.
Conclusion
De nos jours, de plus en plus d’entreprises sont axées sur les services et utilisent un capital intellectuel plutôt que physiques. La création et l’implémentation d’un processus opérationnel est aussi importante pour les entreprises de fabrication que pour celles orientées sur les services.
Parmi les dirigeants, les preuves sur la nécessité d’un processus ne cessent de s’accumuler. En effet, le manque de processus est une des causes qui peut être à l’origine de profonds dysfonctionnements autant dans la gestion de projets que pour l’entreprise même.
L’implémentation de bons processus nécessite un leadership naturel, une vision orientée sur le long terme, et surtout, une compréhension pratique des diverses zones fonctionnelles d’une entreprise.
Les avantages d’un processus couvrent des aspects comme une expérience prévisible, une qualité améliorée, des coûts et risques réduits lors de la production ou la fourniture d’un service, et des opérations simplifiées. Au final, ces bénéfices se reflètent autant à l’intérieur de l’entreprise qu’à l’extérieur, sur le client final.
Une fois que l’excellence opérationnelle est atteinte, il n’y a pratiquement plus le besoin d’interventions régulières dans la gestion des affaires courantes.
Cet article n’a pas la prétention d’être exhaustif au sujet d’un domaine si complexe qui est l’externalisation du processus (BPO – business process outsourcing) ni la délocalisation avec ses diverses formes possibles à l’interne ou avec un partenaire externe (sous-traitance offshore) mais il résume quelques points sensibles rencontrés sur le terrain.
Par souci de simplification, je vais utiliser le terme “externalisation” pour designer toutes les formes qui consistent à remplacer une partie ou l’entier d’une équipe ou zone fonctionnelle existante.
Le nerf de la guerre: l’externalisation comme moyen de réduire les coûts de fonctionnement
Assez souvent, le directeur financier ainsi que le directeur responsable de la stratégie ont la conviction que la seule façon de réduire les coûts dans les diverses fonctions de support (marketing, administratif, IT, comptabilité) consiste dans la délocalisation totale ou partielle.
Cette perception est très répandue dans le cadre des entreprises de type PME et les multinationales.
Il y a une part de vérité dans cette perception: l’externalisation permet effectivement de réduire les coûts de fonctionnement d’une organisation, mais seulement si cette externalisation a été bien implémentée.
Dans le cas contraire, une optimisation des processus existants donne des meilleurs résultats pour la réduction des coûts, et cela sans rien externaliser.
Une comparaison rapide démontre que la structure des coûts d’une ressource onshore (homeshore et nearshore inclus) et celle offshore peut être variable. Les coûts non-mesurables de manière directe sont souvent oubliés dans les calculs car la réalité du terrain est assez difficilement modélisable depuis un bureau.
En effet, cette variation peut s’expliquer en partie par divers facteurs comme le secteur d’activité, la complexité du produit ou service, la proximité culturelle et géographique, le degré de formation et expérience.
Les points sensibles sur l’externalisation
La littérature spécialisée sur l’externalisation est abondante; les détracteurs et les supporteurs s’entre-déchirent, bien que chacun a raison.
Reste que la prise en compte du seul élément “coût horaire” n’est pas suffisante.
Il faut rajouter et ne pas sous-estimer les éléments liés à la productivité, la formation, la qualité, les besoins supplémentaires en supervision et protection de ses intérêts.
La comparaison entre la productivité et l’efficacité doit être la fondation des analyses quant au coût réel de l’externalisation. Car en pratique, le budget final s’avère presque toujours plus important que prévu par une estimation initiale.
Le manque de compétences et connaissances métier de la ressource offshore impacte directement l’expérience client et l’efficacité opérationnelle d’une entreprise
Le plus important point c’est que les employés “offshore” sont généralement peu expérimentés sur les manières de faire et la culture de l’entreprise initiale. Quelquefois, cela peut devenir un avantage par rapport à l’accélération du processus d’innovation, mais pour une entreprise qui doit fonctionner sans interruption des opérations courantes, c’est un mauvais point.
De plus, les employés, peu importe la localisation, ont peu de chances à devenir des experts du jour au lendemain, et encore moins quand il s’agit de tâches hautement spécialisées.
Dans les cas d’une externalisation de type BPO (business process outsourcing) avec une entreprise externe proposant des services “sur demande”, il arrive même que l’équipe offshore n’a pas toujours une expérience dans le domaine, ni sur des zones géographiques ou secteurs d’activité spécifiques.
Dans un bon nombre de cas, l’acquisition de cette expérience ne peut pas se faire de manière rapide.
Les tarifs pratiqués se sont uniformisés partout dans le monde
Un autre point aussi important, et sur lequel je reviens régulièrement, c’est que les tarifs pour des compétences spécifiques et la fiabilité sont similaires partout dans le monde.
Effectivement, les ressources “offshore” ont connaissance des montants qui sont pratiqués ailleurs dans le monde et les promesses par rapport à une “augmentation salaire – prime – carrière – promotions régulières” n’ont plus tellement de “succès” que par le passé.
Pourquoi la solution “délocalisée en offshore” est parfois plus coûteuse que la solution “onshore ou interne” ?
La réponse se limite en une seule phrase:
En général, le coût d’un service “délocalisé en offshore” est effectivement moins cher; mais cette ressource nécessite beaucoup plus de temps pour fournir au final assez peu de résultats.
C’est moins cher par heure, mais il y a plus d’heures facturés.
Ainsi, aussi paradoxalement que cela peut sembler, il y a moins pour son argent. Selon mon expérience, il s’agit du point principal qui pousse vers l’échec une majorité des projets d’externalisation.
En fait, tout se résume à la productivité — et pas seulement au calcul des coûts horaires de base (efficacité financière ou pur calcul comptable). Or, la productivité c’est faire plus avec les mêmes ressources, pendant que l’efficacité c’est faire plus avec moins.
Dans le cas d’une externalisation processus, c’est souvent la productivité et l’efficacité qui sont impactées. Ainsi, il faudra utiliser plus de ressources comme les couches intermédiaires de gestion sur site ou à distance (manager, gestionnaire projet, directeurs). Or, le fait d’avoir plus de ressources à gérer conduit à une perte d’efficacité.
Mon retour d’expérience
Je ne suis pas adepte de la stratégie d’une externalisation juste pour l’amour de l’externalisation et encore moins parce que c’est tout simplement moins cher et que tout le monde le fait. Les entreprises qui font le choix d’une telle externalisation ne possèdent pas une évaluation nuancée, malgré les analyses positives des divers cabinets de consulting.
En pratique, lorsque vous décidez d’externaliser complètement à l’étranger vos diverses fonctions de support critiques comme le marketing, l’informatique IT, la gestion des projets, le service commercial et administratif alors pensez à prendre en compte les éléments suivants:
contrôler la qualité délivrée qui peut impacter commercialement la bonne marche de vos affaires courantes
tenir compte des délais supplémentaires, retards et erreurs de votre centre offshore
implémenter une stratégie de “business continuity” (continuité d’affaires) pour atténuer vos risques stratégiques (surtout au niveau de la propriété intellectuelle)
Ne jamais oublier les coûts cachés de votre projet d’externalisation car une économie sur le court terme s’avère coûteuse sur le moyen et long terme.
Une externalisation bien pensée peut donner de très bons résultats à condition de respecter un principe gagnant-gagnant entre les diverses parties et équipes. L’intégrité entrepreneuriale retrouve ici tout son sens.
Voici 2 exemples:
1 – dans le domaine de la création visuelle,
Des activités répétitives, comme le détourage d’une image peut être externalisé aux bons partenaires, car les équipes onshore ou internes sont devenues avec le temps trop expérimentées pour l’exécution de ce type de tâches. Ces équipes ont plus de valeur rajoutée sur des projets complexes.
Par contre, la création d’un logo à 5.- francs par heure n’est pas une tâche répétitive, car elle apporte une réelle valeur à l’entreprise. Ce n’est plus réaliste d’attendre un tarif bas, sachant que même les pays à faible coût salarial pratiquent des prix similaires à ceux onshore. L’effort d’externalisation ne justifie pas la prise de risques et la gestion supplémentaire.
2 – dans le domaine du développement informatique
La Suisse est un pays réputé comme étant “cher” pour le développement informatique, mais tout est en fonction de quel type d’externalisation il s’agit. Ainsi, une banque peut estimer à juste titre que les logiciels produits à l’étranger peuvent présenter quelques risques.
Souvent, les fonctions de support utilisateur de complexité moyenne (helpdesk, administration, dépannage informatique) peuvent être correctement externalisées à condition d’avoir les experts-métier sur place.
Conclusion
Les coûts compétitifs de l’externalisation “offshore” pour les diverses fonctions de support représentent un argument majeur dans le choix d’une telle solution. Mais le coût ne doit pas être le seul élément décisif. L’expérience concrète, la fiabilité et la ponctualité sont également importantes.
D’un point de vue financier et commercial, le fait d’externaliser trop vite et trop mal représente un non-sens stratégique.
Le résultat final sera une entreprise dysfonctionnelle, plus coûteuse au niveau du fonctionnement, une augmentation des risques commerciaux, et au final, une réduction du profit global.
Lorsque les fonctions de support nécessitent des adaptations constantes, sont spécifiques à des secteurs d’activités de niche, et doivent être culturellement adaptées à des zones géographiques bien délimitées, alors l’externalisation n’est pas une bonne stratégie.