BD : « Irena » l’ange du ghetto de Varsovie

Irena Sendler : une résistante courageuse et modeste

Irena Sendler. 1944.

Entre 1941 et 1943, sans se soucier du danger, Irena Sendler sauve 2500 enfants juifs du ghetto de Varsovie. Pourtant, cette résistante catholique polonaise culpabilisera jusqu’à sa mort de ne pas en avoir sauvé assez. Qu’on l’appelle « héroïne » l’offusquait. « Je ne suis pas une héroïne. J’ai fait ce qu’il y avait à faire. Ce que j’ai fait est normal. Les enfants juifs sont les véritables héros ». Une « normalité » qui, en 1943, lui coûte d’endurer, chaque jour et durant des mois, de longues séances de tortures infligées par la Gestapo, sans que jamais elle ne dénonce aucune des personnes de son réseau. Condamnée à mort, elle s’en sort grâce aux membres de la résistance qui organisent son évasion mais les sévices infligés l’ont rendue définitivement infirme.

 

Irena Sendler : l’effacement

Après la guerre Irena Sendler (Sendlerowa en polonais) demeure fidèle au gouvernement polonais en exil. Cela lui vaut d’être à nouveau emprisonnée de 1948 à 1949, et d’être brutalement interrogée par la police secrète communiste. Elle est finalement libérée. Toutefois, ses liens avec la résistance polonaise proche du gouvernement en exil empêchent que les sauvetages qu’elle a effectués durant la guerre soient reconnus.

 

Irena Sendler : sauvée de l’oubli

Malgré la volonté du régime communiste à l’effacer de l’Histoire de la Pologne, en 1965, elle est déclarée Juste parmi les Nations et, en 1991, Citoyenne d’Honneur de L’État d’Israël. Cependant, son rôle durant la Seconde guerre mondiale reste largement ignoré jusqu’à la chute du régime communiste. En 1999, c’est un travail de fin d’études réalisé sur la Shoah par quatre étudiantes du Kansas, qui permet de mettre au jour ce pan de L’Histoire et de le diffuser mondialement. Depuis, Irena Sendler a reçu de nombreux prix. En 2003, alors qu’elle vivait encore, on lui décerne L’Ordre de l’Aigle Blanc, la plus haute distinction polonaise. En 2007, elle est distinguée de l’Ordre du Sourire, attribué à des personnalités œuvrant pour Le bonheur et le sourire des enfants. En 2009, Irena Sendler reçoit, à titre posthume, le prix humanitaire Audrey Hepburn, nommé ainsi en l’honneur de l’actrice et ambassadrice de l’Unicef. Le Parlement polonais a déclaré l’année 2018 « Année Irena Sendler ».

Irena Sendler. 2007.

 

Irena : la bande dessinée

Des livres et documentaires racontent les actions et la bravoure de cette grande dame, dont une série de bandes dessinées parues chez Glénat. Le scénario a été réalisé par Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël d’après le documentaire Les Justes de Marek Halter. Afin que le dessin soit accessible aux plus jeunes, c’est le dessinateur David Evrard que l’on a sollicité, tandis que l’on a demandé au coloriste Walter de garder la couleur des films documentaires tournés durant la Deuxième Guerre Mondiale. Didier Pasamonik, spécialiste en bande dessinée, éditeur, directeur de collection, journaliste et commissaire d’exposition, écrit à propos de leur travail :

« Le regard qu’ils portent sur cette histoire a une qualité essentielle : ils l’abordent du point de vue de l’enfant. Cette tradition du dessin simple, au vibrato sensible doté d’une probité impeccable, nous la connaissons bien : elle est de la lignée, puissante parce que poétique, éternelle parce que authentique et universelle, du Petit Nicolas de Sempé et René Goscinny. Ils ont la même évidence. »

En cinq volumes, cette BD raconte le quotidien du ghetto de Varsovie, les déportations, les moments d’espoir, de désespoir et d’horreur, et comment Irena en est venue à sauver 2500 enfants, en prenant soin de noter et de cacher leur nouvelle identité jointe à l’ancienne, afin qu’après la guerre ils puissent connaître leurs origines et retrouver leurs familles. Les scénaristes se sont également aventurés dans l’après-guerre pour nous raconter les exactions du régime communiste, ainsi que quelques décennies plus tard à la rencontre des enfants, devenus adultes, qu’Irena a sauvés. La trame, souvent entrecoupée de scènes de tortures, est allégée par des moments où Irena imagine son père, un homme bon décédé très jeune, près d’elle et fier de son engagement. Des instants de tendresse tout aussi poignants que les scènes les plus dures.

Des frises historiques permettent de comprendre la chronologie de la montée du nazisme, la guerre et l’après-guerre, ainsi que la vie entière d’Irena Sendler.

Née à Varsovie le 15 février 1910, Irena décède dans la même ville, à l’âge de 98 ans, le 12 mai 2008.

 

Sources :

  • Irena, les 5 volumes parus chez Glénat : Le Ghetto ; Les Justes ; Varso-vie ; Je suis fier de toi ; La vie, après. Scénario : Jean-David Morvan et Séverine Tréfouël. Dessins de David Evrard. Couleurs par Walter.
  • La bibliothèque de la ville de La Chaux-de-Fonds.
  • Wikipedia

 

“Dernier concert à Pripyat” : les photographies de La Zone (2)

Pripyat: une ville où il faisait bon vivre

Avant l’accident nucléaire, Pripyat se voulait une ville très occidentale et animée, avec ses cinémas, ses théâtres, ses centres culturels et ses bars à la mode. Ce qui est à présent un no man’s land fut, avant la catastrophe, un endroit très prisé ou les gens étaient heureux et contents de vivre. Il y régnait une fierté à faire partie de cette grande famille qui travaillait et vivait grâce à la puissance de l’atome.

L’eau de la rivière Pripyat, que l’on voit sur plusieurs photographies publiées entre jeudi et ce samedi, alimente la piscine de refroidissement. Elle traverse la zone de 30 kilomètres autour de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Elle draine encore actuellement des radioisotopes. La Pripyat se jette dans le fleuve Dniepr qui se jette à son tour dans la Mer Noire. La réserve radio-écologique qui correspond à la zone la plus contaminée par la catastrophe de Tchernobyl est en partie interdite d’accès. Toutefois, elle accueille une faune sauvage d’un grand intérêt.

Dernier concert à Pripyat, le roman de l’écrivaine et journaliste Bernadette Richard, paru aux Éditions L’Âge d’Homme cet automne, est inspiré par son séjour dans La Zone de Tchernobyl et Pripyat. Aujourd’hui, je publie une dernière sélection des photographies qu’elle a ramenées de son passage en ces lieux. Toutes datent de 2013 et sont légendées par la romancière elle-même. Si vous n’avez pas encore lu l’interview de Bernadette Richard, ni lu les extraits de son livre, vous pouvez cliquer ici.

 

 

Les immeubles qui ont inspiré le début du livre. ©BernadetteRichard2013

 

Malgré les ravages de la catastrophe et les pillages permanents, la nature, bien que hautement irradiée, reprend ses droits. ©BernadetteRichard2013

 

Sculpture en hommage aux liquidateurs qui ont donné leur vie dès le 26 avril 1986 pour tenter du juguler la catastrophe. ©BernadetteRichard2013

 

Bâtiment officiel sur la grande place. ©BernadetteRichard2013

 

Le très chic hôtel Polissa sur la grande place de Pripyat. ©BernadetteRichard2013

 

Une salle de spectacles dans Pripyat ou ce qu’il en reste. ©BernadetteRichard2013

 

Bâtiment officiel dans la ville de Tchernobyl, en bon état car encore utilisé. ©BernadetteRichard2013

 

Un magnifique vitrail fracassé. ©BernadetteRichard2013

 

Près d’un bâtiment officiel, un pommier donne chaque années des fruits sans doute délicieux et irradiés. Une petite pomme pour la soif? ©BernadetteRichard2013

 

Les machines qui ont servi à assainir un minimum le lieu. Totalement contaminées, on a dû les enfermer derrière une barrière pour éviter que les touristes imprudent ne soient dangereusement irradiés. ©BernadetteRichard2013

 

Le restaurant branché de la belle époque, il borde la rivière. Le décor est magnifique et … irradié. Un petit verre pour la route? ©BernadetteRichard2013

 

Face au restaurant branché, le ponton qui permettait de prendre le bateau pour des balades sur la rivière Pripyat. ©BernadetteRichard2013

 

Les arts de la rue défient la mort de Pripyat. Quelques très bons artistes et des stalkers ont laissé leur griffe. ©BernadetteRichard2013

 

Compteur Geiger de l’historienne qui m’accompagnait. A 1.12, rien de grave, mais le dosimètre s’emballe très vite, parfois à 10 mètres plus loin. ©BernadetteRichard2013

 

 

Un manège et divers jeux avaient été installés tout exprès pour la fête du 1er mai 1986. Un manège figé jusqu’à ce que la flore l’absorbe complètement. ©BernadetteRichard2013

 

Petite balade de « santé » le long de la rivière Pripyat qui borde la Centrale Lénine? ©BernadetteRichard2013

 

Au sortir de la Zone, examen dans une machine qui semble sortie d’un vieux film de science-fiction qui fait office de contrôle de l’irradiation des visiteurs. Ici, j’étais en zone orange, ça passe… mais j’y ai perdu mes Doc Martens et mon manteau trop irradiés pour les promener dans le reste du monde. ©BernadetteRichard2013

Sources :

  • Bernadette Richard
  • Wikipédia

 

 

“Dernier concert à Pripyat” : les photographies de La Zone (1)

Tchernobyl-Pripyat : No Man’s Land ukrainien

De son séjour dans La Zone interdite en 2013, la journaliste et romancière Bernadette Richard a ramené les photos des lieux qu’elle décrit dans son roman Dernier Concert à Pripyat. “Mes photographies sont nulles. Photographe c’est un métier or je ne suis pas de ce métier. En revanche, elles reflètent parfaitement les couleurs du lieu et les ambiances du roman”. C’est pourquoi j’ai trouvé intéressant de donner, exceptionnellement, une suite à ma publication d’hier. Beaucoup d’entre elles ont été prises d’une voiture. La radioactivité trop élevée ne permettait pas d’en sortir, d’où les flous. Elle sont légendées par Bernadette Richard. Mais auparavant elle nous invite à un à boire un thé ou un café un peu particuliers dans des tasses ramenées de son séjour dans La Zone.

“Alors, un petit goûter gore avec les souvenirs de Tchernobyl ? J’attends mes lecteurs avec impatience !” Euh, non merci Bernadette je passe mon tour. Surtout lorsque l’on sait ce qui suit.

Tchernobyl : la Centrale Nucléaire

Bernadette Richard : “Construit en urgence de mai à octobre 1986, afin de recouvrir les ruines du réacteur no 4 de Tchernobyl, le sarcophage avait été garanti 25 à 30 ans de bons et loyaux services. Il avait été réalisé, dans des conditions de travail abominables, en 206 jours, requérant 400 000 m. carré de béton et 600 000 ouvriers, tous très exposés aux radiations mortelles. Les pilotes d’hélicoptères qui transportaient le matériel eux aussi furent violemment contaminés. 

 

La Centrale de Tchernobyl avant que l’arche soit posée. Les cheminées sont en train d’être démontées. L’échafaudage est posé sur le réacteur no 4. La statue montre le courage des ouvriers face au travail de décontamination, mais hommage aussi à ceux qui ont continué à faire fonctionner les autres réacteurs durant des années. ©BernadetteRichard2013
Le vieux sarcophage a tenu ses promesses, vaille que vaille. Mais peu à peu, au début du millénaire, des fissures apparurent et bien que des travaux de stabilisation furent menés en 2004 et 2008, des brèches de plus en plus étendues (sur la photo, on distingue une large faille de 6 mètres de long dans la façade) firent craindre le pire, à savoir la dispersion d’une nouvelle pollution radioactive. 
En 2015, une faille de 6m de long est visible le long de la façade du 4ème réacteur. D’autres petites failles sont apparues au fil du temps, nécessitant la construction de la grande arche de protection. ©BernadetteRichard2013

Alors que la nouvelle arche était déjà en cours de réalisation, le toit de la vieille structure s’effondra au cours de l’hiver 2013, particulièrement rigoureux. Bouygues travaux publics et Vinci Construction Grands Projets, qui participaient largement au chantier, rappela ses 80 employés français le 13 février. Le chantier prit un retard considérable avant que l’arche soit « glissée » au-dessus des ruines du 4ème réacteur et hermétiquement fermée en 2019. Et enregistrera un dépassement du budget de plus d’un milliard d’euros.

La grande arche en construction, ici en 2013. Elle a coûté bien plus cher que prévu, a pris du retard, mais en 2019, elle a été roulée au-dessus du réacteur no 4, censée protéger l’Europe d’une seconde catastrophe durant un siècle: plus de 120 tonnes de matériel gravement irradié sont encore enfouis sous le réacteur no 4. ©BernadetteRichard2013

Cette réalisation pharaonique « composée de deux structures métalliques, pour un poids total de 25 000 tonnes, est longue de 162 mètres, haute de 108 mètres et elle affiche une portée de 257 mètres. A elle seule, elle pourrait recouvrir le Stade de France ou la Statue de la Liberté. Cette enceinte a été conçue pour résister à des températures comprises entre -43°C et +45°C, ainsi qu’à une tornade de classe 3 et à un séisme d’une intensité de 6 sur l’échelle de Mercalli. Sa durée de vie est estimée à une centaine d’années. » Parmi la population ukrainienne et biélorusse, le doute subsiste: un siècle, vraiment?”

Comme si tout était normal, distributeurs d’électricité à haute tension, bassin de refroidissement, signal routier… mais construction de la grande arche qui devrait protéger le réacteur 4 pour un siècle. Aujourd’hui posé. ©BernadetteRichard2013

Une cité morte : le décor du roman Dernier concert à Pripyat

Une école dans la Zone entre Tchernobyl et Pripyat. ©BernadetteRichard2013

 

 

 

Ce qui fut une maison de commune, école, centre culturel entre Tchernobyl et Pripyat. ©BernadetteRichard2013

 

Entrée dans la ville de Tchernobyl, encore habitée aujourd’hui. On y trouve même une boutique à souvenirs , babioles, vaisselle, tee-shirts, etc. ©BernadetteRichard2013
Une vue de la grande place. ©BernadetteRichard2013

 

Le très chic hôtel Polissa sur la grande place de Pripyat. ©BernadetteRichard2013

 

L’entrée au Centre culturel de Pripyat. La monstrueuse déco soviétique a résisté à la radioactivité et au temps qui passe ! ©BernadetteRichard2013

 

La salle de spectacle du Centre culturel de Pripyat, vue depuis la scène… le carnage. Le temps n’a rien à y faire, ce sont les voleurs qui récupèrent tout ce qui est vendable loin de Tchernobyl, avec une décontamination plus ou moins laxiste. ©BernadetteRichard2013

 

A l’intérieur du Centre culturel de Pripyat, la razzia a eu lieu. Et pourtant, sur la scène, le piano à queue a résisté et sert parfois pour des concerts sauvages. Il est chouchouté, ripoliné, drôle de contraste. Est-il encore là aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr. Il m’a inspiré des scènes du roman. ©BernadetteRichard2013

Suite et fin demain.

Un livre 5 questions : « Dernier concert à Pripyat » de Bernadette Richard

Tchernobyl : une catastrophe nucléaire toujours d’actualité

Dans la nuit du 25 au 26 avril 1986, eut lieu dans l’ex-Union Soviétique, dans la centrale nucléaire de Tchernobyl, ville à présent Ukrainienne située à 96km au nord de Kiev, l’accident nucléaire le plus dévastateur de l’histoire. Une hécatombe qui a coûté l’existence à 200’000 personnes au moins, et péjoré la vie d’autant de survivants. Toutefois, les chiffres des pertes humaines et des conséquences de la catastrophe sur les gens ayant été maintenus secrets ou manipulés, certains scientifiques les calculent à la hausse. A l’époque, le gouvernement soviétique avait tenté de minimiser les conséquences bien que cette tragédie ait envoyé dans l’atmosphère l’équivalent radioactif de 400 fois la bombe d’Hiroshima. Les gouvernements de l’Europe dite de l’Ouest n’avaient pas été plus transparents que l’URSS. Chaque pays prétendait que le nuage radioactif était allé jouer de la balalaïka sous d’autres cieux que le leur. Ce qui n’a pas empêché, en Europe de l’Ouest, une notable recrudescence des cancers de la thyroïde. L’augmentation de ces cancers n’est pas officiellement reconnue comme étant la conséquence de l’accident de Tchernobyl, mais elle laisse tout de même perplexe une partie du personnel médical spécialisé en oncologie. Par ailleurs Bernadette Richard reprécise ” A l’époque, le politburo de Moscou avait annoncé 47 morts. Actuellement, les chercheurs indépendants et occidentaux, même les ukrainiens, pensent qu’il y a eu au moins un million de décès, sans compter les maladies diverses maladies provoquées dans tout le continent européen. Tchernobyl a transformé le monde de la santé humaine et animale”.

A Pripyat le signe du nucléaire se trouvait partout pour vanter la modernisation de l’ex-URSS. ©BernadetteRichard2013

Par ailleurs, l’on peut raisonnablement supposer que si les sangliers des Grisons sont actuellement impropres à la consommation à cause du fort taux de radioactivité qu’ils contiennent suite à l’accident nucléaire advenu en 1986, il est probable que nous soyons nous-mêmes, trente ans après, victimes de cette pollution. Certes, nous ne nous nourrissons pas de truffes du cerf à l’instar des cochons sauvages, mais nous aurions probablement des surprises si nous passions toute notre nourriture et nos objets d’usage courant au compteur Geiger. Mais qu’en est-il sur place ?

Cette jolie mousse végétale qui s’installe peu à peu dans toute la ville est hautement polluée. Lorsque l’on se rend à Pripyat, il faut absolument l’éviter si l’on ne souhaite pas recevoir un maximum de radiations. ©BernadetteRichard2013

Bernadette Richard : Dernier concert à Pripyat une bal(l)ade dans Tchernobyl

Passionnée par la question nucléaire, la journaliste et romancière Bernadette Richard nous emmène, à travers un roman, écouter un Dernier concert à Pripyat. Paru aux Éditions L’Âge d’Homme, le livre relate l’histoire de trois jeunes garçons ayant des talents de musiciens. La nuit de l’accident nucléaire, ils fuient de chez eux en compagnie d’une vieille dame. Quelques années plus tard, adolescents et un peu casse-cous, les trois compagnons deviennent *stalkers. Défiant les dangers de la contamination, ils pénétreront régulièrement dans La Zone interdite, non seulement pour l’explorer, mais aussi pour lui rendre ses lettres de noblesse à travers la musique. Au cours de leurs expéditions, ils rencontreront tous les réprouvés et désœuvrés du système soviétique. Un roman où se mélangent des moments d’une grande humanité entremêlés à la dureté d’un quotidien sordide avec, pour décor, un no man’s land envahi par une nature qui reprend doucement ses droits. Demain et après-demain, je publierai les photographies que Bernadette Richard a réalisées sur le site. Légendées par l’auteure, elle vous permettront d’entrer dans l’ambiance du livre.

Dernier Concert à Pripyat : extraits

« Nous prenions des photos à l’insu des dealers de métal et nous entêtions à fureter du côté des chantiers où se déroulaient les mises à sac des villages enfouis et autres cimetières de véhicules. Nous secourûmes un truand égaré dans un marécage. Sans nous, il se serait enlisé dans la boue contaminée. Il nous relata les péripéties du trafic le plus rentable : sur les huit millions de tonnes de métal essaimés dans la Zone – c’était une estimation – des milliers de tonnes rejoignaient chaque semaine le marché mondial, notamment en Chine, où ces matériaux, mal décontaminés, subissaient une mue et retrouvaient une pernicieuse virginité : boîtes de conserve, outils, pièces de moteurs, ustensiles de cuisine, jouets, etc. qui arrosaient l’Europe et les États-Unis.

Au cours de ses pérégrinations, Boris avait moult occasions de s’entretenir avec la nouvelle faune qui squattait la région prohibée : psychopathes, fossoyeurs en tout genre, mercenaires tchétchènes et kosovars, putes abruties de drogues, criminels, agents secrets, braconniers, réfugiés économiques, collectionneurs d’objets contaminés ou de crânes d’animaux.

Au cœur de ce capharnaüm, les scientifiques – biologistes, écotoxicologues, géologues, hydrobiologistes, géophysiciens, botanistes, rudologues et autres ingénieurs et techniciens en chimie, physique nucléaire, analyses de l’air et des sols – nous valurent des amitiés qui perdurent au cours du temps. Les universités du monde entier envoyaient leurs chercheurs, mais manquaient de moyens pour mener des enquêtes rigoureuses. Biologistes et vétérinaires s’y étaient risqués dès les premiers mois qui avaient suivi la catastrophe. Les animaux qui n’avaient pas été abattus par la milice après le départ des habitants étaient nés avec des handicaps et de graves malformations, comme de nombreux enfants. Les bêtes étaient tuées, les enfants cachés, effacés de la liste des survivants afin de ne pas affoler la population ».

Dernier concert à Pripyat : entrevue avec Bernadette Richard

Bernadette Richard, dans quelles circonstances êtes-vous allée dans la zone contaminée de Tchernobyl ?

J’étais à Kiev pour représenter SOS-CHATS Noiraigue qui aide un refuge ukrainien. Les animaux sont persécutés en Ukraine, c’est un combat terrible pour leurs protecteurs, eux-mêmes agressés sans cesse. Un véritable état de guerre. Bien qu’il soit difficile d’entrer dans la Zone, la responsable de ce refuge m’a organisé ce séjour à Tchernobyl en deux temps trois mouvements. J’ai toujours été passionnée par la question nucléaire… j’ai un Pluton à l’ascendant pour ceux qui connaissent l’astrologie ! J’avais écrit en 1996 une pièce de théâtre qui donnait la parole aux Hibakushas, les rescapés des bombes américaines et à Oppenheimer, le papa de la bombe atomique. J’ai donc pu entrer avec une traductrice, un journaliste spécialisé dans le nucléaire et une historienne. J’ai interviewé plusieurs personnes versées dans le domaine de la catastrophe, dont des physiciens et la conservatrice du Musée de Tchernobyl, qui elle-même a récupéré des objets témoins et les a décontaminés. En 2013, aucune loi n’interdisait d’y rester le temps désiré. Seul le compteur Geiger nous indiquait les zones dangereuses à éviter. J’ai longuement arpenté Pripyat, la ville martyre de l’atome. C’était très émouvant, le silence rompu par le bruit de la rivière et le chant des oiseaux, parfois les pas d’un animal. Il y avait des arbres fruitiers aux fruits très appétissants, mais le compteur me rappelait à l’ordre. J’ai été marquée par la fameuse grande roue, aujourd’hui symbole de la ville, l’hôpital dont on ne peut s’approcher tant il dégage de rayons dangereux, par des classes et appartements à l’abandon, des jouets éparpillés ici et là, les vitraux d’un ancien bistro, les interventions anonymes d’artistes de rue, un piano qui devait encore servir aux stalkers, dont je parle dans le roman, la nature qui reprend ses droits, les immeubles qui résistent. Hors Pripyat, le paysage évoque une après-apocalypse (oui oui, je vois trop de films de science-fiction !) La nature est prodigieuse, d’une beauté sauvage, comme pour défier les hommes qui l’ont polluée.

Actuellement, la Zone est devenue un but touristique, celui de la désolation. Je suis profondément opposée à ce genre de tourisme qui me fait penser aux visites organisées dans les camps de concentration. Foutez la paix aux martyrs.

 – Quelle sensation éprouve-t-on lorsqu’on arrive dans un endroit qui a été le théâtre d’un tel désastre et, dont on sait qu’il restera pollué pour plusieurs milliers d’années ?

 Dans le cadre de mon boulot de journaliste, j’ai visité d’autres lieux d’horreur, notamment en Irak. Le sentiment qui domine est toujours le mépris de l’humain pour la vie, son inconséquence, ses incompétences, sa cruauté. Ensuite le silence qui prend aux tripes, alors que ce sont des lieux de fracas. Bien que les médias et les politiques cherchent à rassurer les populations depuis que le nouveau sarcophage a été posé au-dessus du 4ème réacteur, le danger demeure. Si les milliers de tonnes de matière fissile qui traînent sous le 4ème réacteur étaient rejointes par la rivière, lors d’un tremblement de terre par exemple, il n’y aurait plus d’Europe. Ce n’est pas moi qui l’affirme, mais des scientifiques ukrainiens.

– Certaines personnes ont continué à vivre dans la zone contaminée sans être, à première vue, atteintes par les radiations. Dans votre livre les habitants parlent « de foi », persuadés que leur terre ne saurait les trahir. A-t-on des explications plus scientifiques ?

Il n’y a aucune explication. Le corps humain reste mystérieux. Certains êtres ont résisté aux radiations sans que nul n’en comprenne la raison. Je pense au photographe Igor Kostine, qui est monté dans les hélicoptères qui larguaient des sacs de sable dans la bouche béante de l’enfer afin de stopper l’incendie. Les pilotes avaient des malaises alors qu’ils survolaient la centrale. Aucun n’a survécu. Kostine les a accompagnés pour témoigner. La radioactivité était si élevée que ses photos étaient intégralement noires. Un seul cliché a pu être sauvé, qui montre la centrale quelques heures après l’explosion, il a fait le tour du monde. Kostine aurait dû mourir dans les jours ou semaines suivants. Il a poursuivi son travail de photographe à travers la Zone, il est décédé en 2015.

-Sur huit millions de tonnes métal essaimés dans la zone, des milliers de tonnes rejoignent chaque année le marché mondial. D’autres objets hautement radioactifs (œuvres d’art, petite brocante, pierres ou animaux) sont-ils également répartis dans le monde à travers ces filières ?

Œuvres d’art, je l’ignore. Pripyat était une ville champignon, poussée en quelques années pour abriter les travailleurs de la Centrale dont elle est distante de quelques km à peine. Je n’ai pas entendu parler d’œuvres d’art. Par contre, oui, des fétichistes morbides sont toujours très friands d’articles arrachés à la Zone, poupées désarticulées, objets de la vie quotidienne, cordes de piano, morceaux de verre, etc. Le métal récupéré et revendu constitue un trafic juteux, de même, de plus en plus, la chasse. Les animaux sauvages se sont adaptés et résistent apparemment mieux à la Zone qu’à la relation aux humains, même s’ils vivent moins longtemps. Du coup, la chasse est rentable et finit dans les assiettes des consommateurs.

©BernadetteRichard2013

– Généralement, je demande à toutes les personnes de lettres à quel personnage littéraire elles pourraient s’identifier. Comme je vous ai déjà posé cette question lors de la parution de votre polar « Du sang sous les acacias », cette fois-ci je vous demande : quel livre d’un auteur ukrainien ou russe auriez-vous voulu écrire ?

En 1969, Venedikt Erofeïev publie en ex-Union soviétique, sous forme de samizdat (il le restera jusqu’à la fin des années 1980) le récit d’une monstrueuse beuverie qui se déroule dans un train, « Moscou – Petouchki ». Un roman considéré comme intraduisible, qui sera pourtant traduit dans des dizaines de langues. Il paraît en France en 1976 et fait un tabac comme sur sa terre d’origine, devenant un classique de la littérature. L’histoire est simple : un jeune Moscovite veut rejoindre sa fiancée à Petouchki. Le récit est aussi hilarant que sombre et se termine mal. Entre Moscou et la fin tragique, l’ode à l’alcool se mue en acte de rébellion, de résistance au système, ancré dans une pluie d’hommages à la littérature, personnages politiques, célébrités de l’Antiquité… et à l’alcool. Audacieux, grossier autant que divin, provocateur, ce roman est celui que j’aurais voulu écrire. Il rivalise avec l’autre classique que je regrette de n’avoir pas écrit : « Le Quatuor d’Alexandrie » du Britannique Lawrence Durrell.

Biographie de Bernadette Richard :

Bernadette Richard a deux passions : la littérature et les animaux qui l’accompagnent depuis l’adolescence. Son existence se résume difficilement autrement qu’au travers de quelques chiffres: née à La Chaux-de-Fonds un  1er mai, 5 professions dont 38 ans de presse à ce jour, 1 mariage, 1 enfant, 1 divorce, 1 petite-fille, 58 déménagements dans 7 pays sur 3 continents – elle rêve que son 59ème puisse l’emmener au bord de l’océan -, une vingtaine de romans et nouvelles, 1 biographie, 3 livres pour enfants, 4 pièces de théâtre, 4  participations à des spectacles et performances. 260 textes littéraires ou essais sur les arts plastiques parus dans des médias et anthologies, 28 discours pour des vernissages d’expositions. N’utilise que l’un de ses 12 stylo-plumes pour écrire. Travaille sur 2 Mac et un PC. S’est trouvée à 5 reprises sur des lieux de prises de pouvoir politique ou attentats meurtriers, dont le 11 septembre 2001 à New York. A vécu dans 8 mégapoles ou très grandes villes. Actuellement dans une ville horlogère à l’agonie. A passé 2 ans dans une forêt, entourée de 17 chats, 4 chiens, 3 cochons laineux, 3 pogonas, 3 paons, 5 mygales, 10 serpents, 3 hamsters de Podorovski, 20 rats et plus, 1 chèvre, 5 poules, 2 coqs, 2 perroquets, 2 inséparables, 3 lapins et autres bestioles sauvées de la maltraitance. Vit actuellement avec 5 chats. En travail : 2 romans en cours, ainsi qu’un livre pour enfants. Et toujours le travail pour 2 médias.

L’un des nombreux chiens errants de Pripyat. Quand les visiteurs les appellent pour les nourrir, ils accourent. Celui-ci à inspiré l’auteure. On le retrouve dans le livre sous une forme fictionnelle. ©BernadetteRichard2013

*Stalker : visiteur clandestin qui explore la Zone interdite de Tchernobyl.

Interview réalisée par Dunia Miralles

Sources :

  • Dernier concert à Pripyat, Bernadette Richard, éd. L’Âge d’Homme 2020
  • Le Nouvelliste
  • RTS
  • France culture
  • Wikipédia
  • L’OBS

 

Mikhaïl Boulgakov : de drogué à censuré, de censuré à la postérité

Mikhaïl Boulgakov : médecin morphinomane

Se promener avec, dans une poche ou un sac, un livre léger et vite lu est une friandise proposée par la collection Folio2€ avec ses ouvrages à moins de 5 francs. Cela permet, également, de lire quelques grands auteurs auxquels nous n’avions pas eu le courage de nous attaquer, d’en découvrir quelques nouvelles ou un roman court. Chaque fois que j’entre dans ma librairie, je me laisse tenter par trois ou quatre de ces livres et, pour la modestie du prix, peu importe si je suis déçue ou si je les abandonne en cours de lecture. D’une certaine manière, cela en vaut toujours la peine. Comme dans mon travail d’écriture je me penche souvent sur les addictions, en particulier celles induites par les drogues, je n’ai pas su m’empêcher de ressortir de chez mon dealer de bouquins avec Morphine de Mikhaïl Boulgakov. Écrite d’une manière simple et efficace, conçue comme un journal, cette nouvelle raconte la descente aux enfers d’un jeune médecin. Déçu par son ancienne maîtresse il est affecté, juste après la Révolution russe, à un poste dans une clinique rurale. Tout y est : les rigueurs de l’hiver, un nouvel amour délaissé pour la drogue, l’euphorie des premières prises, les douleurs et le vide ressentis lors du manque, les magouilles pour obtenir sa dose, la culpabilité… Un thème que Mikhaïl Boulgakov maîtrise parfaitement. Il a exercé la médecine, entre 1916 et 1920, dans des conditions très similaires à celle de son personnage et lui aussi a été morphinomane. Inapte au service militaire, il a dirigé un hôpital de campagne. Isolé pendant deux ans, il devient dépendant mais, contrairement à son protagoniste, il se désintoxique grâce Lubov Belozerskaya, l’une de ses épouses.

Extraits de Morphine

« En injectant une seringue de dilution à 2%, il s’établit presque instantanément un état de quiétude qui tourne immédiatement à l’extase bienheureuse. Cela dure seulement une à deux minutes. Ensuite tout disparaît sans laisser de traces, comme si cela n’avait jamais été. Commencent alors les douleurs, l’angoisse, le noir… »

« Une seringue est posée sur un morceau de gaze, à côté d’un flacon. Je la prends et, après avoir négligemment enduit d’iode ma hanche toute marquée de piqûres, je plante l’aiguille dans la peau. Aucune douleur, oh ! non, au contraire : je jouis d’avance de l’euphorie qui va se manifester ».

« Moi, l’infortuné docteur Poliakov, atteint de morphinomanie depuis février, je mets en garde tous ceux à qui il adviendra de subir le même sort que moi : n’essayez pas de remplacer la morphine par de la cocaïne. La cocaïne est un poison on ne peut plus ignoble et insidieux. Hier, c’est à peine si Anna a réussi à me récupérer à force de camphre, et aujourd’hui je suis un mort-vivant… »

« Tempête, pas de consultation. Ai lu pendant mes heures d’abstinence un manuel de psychiatrie, il m’a produit une impression terrifiante. Je suis fichu, plus d’espoir. J’ai peur du moindre bruit, je hais tout le monde quand je suis en phase d’abstinence. Les gens me font peur. En phase d’euphorie, je les aime tous, mais je préfère la solitude. »

Mikhaïl Boulgakov : une vocation littéraire précoce

Connu sur les cinq continents pour son œuvre Le Maître et Marguerite, Mikhaïl Boulgakov naît le 3 mai 1891 à Kiev, en Ukraine, qui faisait alors partie de l’Empire russe. Ainé d’une fratrie composée de deux garçons et quatre filles, il est le fils d’un prêtre, professeur d’histoire et critique des religions occidentales. Sa mère est enseignante. Durant son enfance, il se passionne pour le théâtre. Il écrit des comédies que ses frères mettent en scène.

L’amour précoce du jeune Boulgakov pour la lecture le conduit à connaître à fond l’œuvre de ceux qu’il considérera toujours comme ses maîtres : Nicolas Gogol, Anton Tchekhov et Mikhaïl Saltykov-Chtchedrine.

Mikhaïl Boulgakov : un médecin frustré

Il obtient son diplôme de médecine en 1916 à l’Université de Kiev. Envoyé à l’hôpital du district, il commence à écrire. Installé à Viazma en 1917, il revient à Kiev l’année suivante accompagné de Tatiana Lappa, sa première épouse. Il ouvre un cabinet médical de phytopathologie des dermatoses. Cependant, très vite, il commence à envisager l’idée de quitter la médecine. Fonctionnaire, il se sent subordonné au pouvoir politique. Pendant cette période, il est le témoin direct de la guerre civile russe et d’au moins dix tentatives de coup d’État.

En 1919, il est envoyé dans le Caucase du Nord pour travailler comme médecin militaire et commence à écrire comme journaliste. Malade du typhus, il survit miraculeusement. L’année suivante, il abandonne sa carrière de médecin pour de s’adonner à la littérature.

Après avoir traversé le Caucase, il se rend à Moscou avec l’intention d’y rester. Il peine à trouver un emploi. Finalement, il décroche un travail de secrétaire de la section littéraire du Comité central de la République pour l’éducation politique.

Mikhaïl Boulgakov : censuré par le régime soviétique

En 1925, Mikhaïl divorce de sa première femme. Il épouse Lubov Belozerskaya. La censure s’acharne sur son travail et lorsque ses œuvres parviennent à voir le jour, malgré le bon accueil du public, il reçoit des critiques négatives de la part de La Pravda. En 1926, l’auteur ukrainien publie Morphine qui raconte, à travers le Dr. Poliakov, sa consommation de stupéfiants pendant la Première Guerre mondiale. Deux de ses pièces sont jouées à Moscou. Le public est enthousiaste mais la critique l’étrille.

En 1929, la carrière littéraire de Boulgakov subit un coup dont l’écrivain ne se remettra jamais. La censure gouvernementale empêche la publication et la mise en scène de toutes ses pièces. Il n’avait jamais quitté l’Union soviétique. Sa fratrie vit en exil à Paris. Il écrit au gouvernement de l’URSS en demandant la permission de partir à l’étranger. Deux semaines plus tard Staline le contacte. Il lui refuse la possibilité de s’expatrier mais lui propose de travailler au Théâtre d’art académique de Moscou. Boulgakov accepte.

Mikhaïl Boulgakov : son épouse l’inspire pour Le Maître et Marguerite

Ayant également quitté Lubov, en 1932 il se marie avec Elena Sergeevna Bulgakova, qui lui inspirera Marguerite dans son œuvre la plus célèbre, Le Maître et Marguerite, commencée en 1928. Dans les années qui suivent, Mikhaïl continue à travailler sur Le Maître et Marguerite, tout en se consacrant à de nouveaux drames, histoires, critiques, livrets et adaptations théâtrales de nouvelles. Cependant, la plupart de ses œuvres, ne seront jamais publiées. Les autres sont mises en pièces par la critique.

Mikhaïl Boulgakov : persécuté par la censure

À la fin des années 1930, il collabore avec le Théâtre du Bolchoï en tant que librettiste et consultant. Il le quitte quand il réalise qu’aucune de ses œuvres n’y sera jamais produite. Sauvé de la persécution et de l’arrestation grâce au soutien personnel de Joseph Staline, Boulgakov se sent quand même en cage. Aucun de ses écrits n’est publié. Ses récits sont systématiquement censurés. Lorsque Batoum, sa dernière œuvre qui dépeint pourtant un tableau positif des premiers jours de la révolution stalinienne, est interdite avant même les répétitions, il demande à nouveau la permission de quitter le pays. On la lui refuse une fois de plus. Sa santé se détériore.

Boulgakov consacre les dernières années de sa vie à l’écriture. Son humeur, cependant, est très changeante. Des moments pleins d’optimisme, qui l’amènent à croire que la publication de Le Maître et Marguerite est encore possible, alternent avec des chutes dans la dépression la plus sombre, où il perd tout espoir. En 1939, dans des conditions précaires, il propose une lecture privée à son petit cercle d’amis de Le Maître et Marguerite. Le 19 mars 1940, à moins de cinquante ans, Mikhaïl Boulgakov meurt à Moscou emporté par une néphrosclérose. Son corps est enterré dans le cimetière Novodievitchi.

Actuellement, Boulgakov est mondialement considéré comme l’un des écrivains les plus remarquables du XXe siècle.

Sources :

 – Morphine, Mikhaïl Boulgakov, Gallimard, collection Folio2€

 – Lecturalia

 – Biografiaonline

 – Wikipedia

 – Biografie