Coco : égérie transgenre de l’underground helvétique
Coco était belle, charismatique, talentueuse. Née dans un corps assigné masculin, dans les années 1980-1990 elle fut l’une des reines de la scène underground helvétique. Le photographe Olivier Fatton en tomba amoureux et la suivit avec son appareil durant quelques années. Ces photographies, à la fois fashion et d’un troublant naturel, se voient à présent réunies dans un livre d’art qui raconte l’histoire d’amour entre un photographe et son modèle. La vidéo ci-dessous nous en révèle quelques-unes.
Coco : mode et passion
Coco vivait pied au plancher, toujours percutante, survoltée par la perspective de multiples projets. Transgenre, ne pouvant vivre de son talent, elle travaillait dans une clinique psychiatrique en tant que femme de ménage, mais consacrait ses loisirs à ses passions : la mode – elle était mannequin pour Marianne Alvoni – les performances, le happening, le show.
Coco : vivre vite et mourir jeune
Elle rencontra le photographe dans un club gay, à Berne, en 1989. Elle avait vingt ans et lui trente-deux. Coco, née Marc-Patrick, demanda à Olivier de faire un travail documentaire sur sa transition d’homme à femme. Depuis l’âge de 13 ans elle prenait des hormones, qu’elle achetait au marché noir, et s’apprêtait à subir une opération chirurgicale de réassignation. Le photographe accepta. Leur pacte se transforma rapidement en une brûlante relation sentimentale. L’homme vivait au rythme et au service de sa dame, réalisait des portraits d’elle, souvent personnels et touchants, dans des lieux divers : à la maison, à la montagne, lors de défilés de mode, durant les spectacles. Des clichés qui montrent les multiples facettes d’une femme superbe, mystérieuse et mélancolique.
Coco vécut vite et mourut jeune. La drogue, qui s’immisça dans la vie du couple, anéantit la relation amoureuse. D’autant plus qu’au début des années 1990, les personnes souffrant d’incongruence du genre n’étaient guère soutenues. Elle ne vit jamais l’an 2000 mais laissa un souvenir impérissable aux personnes qui la côtoyèrent.
Coco eut une vie romanesque dont elle se serait probablement passée. Reste le mythe, des photos magnifiques et les mots – notamment une émouvante lettre d’amour d’Olivier, insérée entre le pages – pour rendre un hommage posthume à celle dont l’existence fut d’une enflammée et tragique poésie. Cioran écrivait « La mélancolie ? Être enterré vivant dans le cœur d’une rose ». Peut-être l’impression d’ensevelissement qu’éprouvait Coco qui, malgré son talent et sa beauté, ne sut jamais être en accord avec son corps.
Au travers des photos d’Olivier G. Fatton et d’un récit intimiste de Dunia Miralles, le livre « Coco » – Edition Patrick Frey, Zurich, 2019 – raconte la mode, le spectacle, l’amour, l’exaltation, les peines et la souffrance. La splendeur et la chute d’un ange.
Le livre, dont le texte en français est également traduit à anglais, a déjà commencé son cheminement en Allemagne et aux Etats-Unis. On peut le commander chez l’éditeur ou dans toutes les librairies.
Signatures
Olivier G. Fatton et Dunia Miralles dédicaceront le livre Coco à La Chambre Noire, vendredi 1ermars. Adresse: rue César-Roux 5, Lausanne. Horaire: 17h-20h.
Sources :
-Olivier G. Fatton
–Edition Patrick Frey, Zurich
-Cioran « Le Crépuscule des pensées »
Un merci à Stéphanie Pahud pour ses publications poétiques.