Marie Neuser : « Délicieuse » une jalousie dévorante à éprouver à la plage

Délicieuse : dans l’enfer d’une femme trahie

De toujours, les sempiternelles histoires de cocuages s’emparent des arts, aussi bien de la littérature que du théâtre, du cinéma, de la peinture et j’en passe… Un thème assaisonné à toutes les sauces : de la comédie à la tragédie, de l’innocence à la perversion. Un sujet repris par l’auteure de romans noirs Marie Neuser dans « Délicieuse ». Un récit qui, à sa parution, connut un joli succès. Je l’ai lu à ce moment-là. J’avais songé à en parler dans cet espace mais je m’étais abstenue. Pourquoi ? Parce que ce livre m’avait beaucoup agacée. Parce qu’il dépeint ce que je déteste et combat : la jalousie, la possessivité, la vengeance. Parce que même si son héros est une héroïne, si on le lisait au masculin, il représenterait l’une des choses qui m’horripile le plus dans le patriarcat : considérer que l’autre nous appartient. Certes, quand le père de son fils lui annonce, après vingt ans de vie de couple, qu’il est amoureux d’une autre femme, plus jeune, plus fraîche, plus rigolote, en un mot plus délicieuse qu’elle, le trouble de Martha est typiquement féminin. Après avoir donné vingt ans de sa vie et un enfant à cet homme, il lui reproche d’être fade et fatiguée. Un coup de massue qui l’oblige à ne plus voir d’elle et de sa vie que l’image vieillissante, que le corps avachi et la monotone routine du couple dont Raph est aussi largement responsable. Une responsabilité qu’il n’assume pas, évidemment. Suite au choc causé par cette nouvelle, Martha tente de régater avec la belle jeunesse de l’amante ; met tout en œuvre pour récupérer « son homme ». Peine perdue.

Obsédée par cet abandon, rongée par le dépit, elle s’enferme dans son courroux et utilise tous les moyens à sa disposition pour échafauder sa vengeance : faux profil sur Internet, filature, se lier d’amitié avec sa rivale. Tout cela en ressassant ses sentiments sur presque 500 longues pages qui parfois donnent envie de lâcher le livre. Mais on continue de le lire. Ne serait-ce que parce que le plus sage d’entre nous a, un jour, éprouvé les ravages de la jalousie. De plus, dans mon cas, parce que dès les premières lignes j’en ai deviné la fin. Or, j’avais envie de savoir comment Martha en arriverait à cet extrême. D’autant qu’elle est psychologue dans des prisons ou elle rend visite à de grands criminels, et qu’il m’est difficile d’admettre qu’une personne supposée avoir travaillé un minimum sur elle-même et dont le métier consiste à connaître un tantinet les mécanismes de l’être humain, se laisse emporter par des sentiments aussi primaires et banals.

Cependant, je ne déconseillerai pas la lecture de Délicieuse. C’est un pavé idéal à emmener à la plage. Un livre qui décortique par le menu toutes les pensées, les angoisses, les tristesses et les rages engendrées par la jalousie. En particulier, celles qui peuvent mener une femme à commettre le pire.

Délicieuse de Marie Neuser : extrait

Marie Neuser : biographie

Née en 1970 à Marseille, Marie Neuser est enseignante dans les lycées les plus problématiques de cette ville. Pour écrire, elle préfère les terrasses des cafés plutôt que son chez elle. Son premier roman, Je tue les enfants français dans les jardins (L’Écailler, 2011), s’inspire de son expérience de professeure de collège et a été nominé pour plusieurs prix (Grand Prix de la Littérature Policière, 2012 ; prix SNCF du Polar, 2012). Un petit jouet mécanique (L’Écailler, 2012) a été récompensé par le Prix littéraire des lycéens et apprentis de la région PACA, et par celui de Corse en 2014. Elle a collaboré au recueil de nouvelles Marseille Noir (Asphalte, 2014). Prendre Lily (2015), Prendre Gloria (2016) et Délicieuse (2018) tous les trois parus chez Fleuve Éditions, ont reçu un bel accueil à la fois public et critique. Tous ses ouvrages sont repris chez Pocket dont Délicieuse.

 

Sources :

  • Délicieuse, Marie Neuser, Fleuve Noir Éditions, ou en poche chez Pocket.
  • Lisez, le site d’actualité des maisons d’édition du Groupe Editis