Voyants au rouge : le sperme humain est en berne
Dans la mythologie et les textes fondateurs, et ce jusqu’à récemment, la stérilité était considérée comme une affaire presque exclusivement féminine. Dans mon enfance l’on disait encore « ELLE ne pouvait pas avoir d’enfant » en parlant de voisines ou de grands-tantes qui auraient désiré une grossesse à une époque où l’on ne faisait pas encore d’examens médicaux pour détecter cette problématique. De l’Antiquité et jusqu’au deux tiers du XXe siècle, on imputait la stérilité du couple aux manquements de la femme, à sa faible constitution, à sa mélancolie, à son manque de sommeil, à sa luxure, à sa maigreur ou à son obésité, mais aussi à sa laideur ou à son extrême beauté. Toutefois, il est à présent prouvé, qu’en cas d’infertilité d’un couple, les hommes en sont la cause dans 40% à 50% des cas. D’autant que la qualité du sperme est en chute libre.
Depuis les années 1990, une trentaine d’études menées auprès d’une population variée ont été réalisées dans divers laboratoires du monde. Le constat est toujours le même : la qualité du sperme humain est en baisse. La concentration des spermatozoïdes est souvent insuffisante pour fertiliser la femme. Leur mobilité ou leur morphologie présente des anomalies. Des recherches identiques ont été faites dans le monde animal. Le bilan est tristement le même : le sperme des animaux, notamment celui des chiens, baisse de manière significative et brutale.
Vidéo réalisée par l’INSERM : Le fonctionnement du testicule.
Un livre pour mieux comprendre l’infertilité masculine
Pour que chacun et chacune puisse mieux appréhender cette problématique, le professeur Stéphane Droupy, urologue spécialiste de l’infertilité, et la journaliste Brigitte-Fanny Cohen, spécialiste des questions médicales, ont écrit Demain tous infertiles ? Comprendre, prévenir et traiter l’infertilité masculine paru chez First Éditions. En effet, un couple sur sept consulte parce qu’il ne parvient pas à mettre un bébé en route et, une fois sur deux, cela provient de l’homme. Cet ouvrage permet de comprendre ce qui peut fragiliser la fertilité masculine tout en apportant des conseils pour l’optimiser. Le livre aborde également les nombreuses possibilités d’accompagnement et de traitements : médicaments, chirurgies, assistance médicale à la procréation, mais aussi coaching nutritionnel, compléments alimentaires, modification du mode de vie… Les textes du livre, écrits pour un large public, sont soutenus par de nombreux tableaux et dessins qui en facilitent encore plus l’intelligibilité.
Ce qui péjore la fertilité
Je ne me pencherai pas sur ce qui nécessite un jargon strictement scientifique. Je ne relèverai, ici, que quelques unes des multiples causes qui altèrent la qualité du sperme.
Le sport intensif
Plus de cinq heures de vélo par semaine peuvent altérer la qualité de sperme. Idem pour la course à pied et d’autres sports pratiqués de manière intensive. Mais après quelques semaines d’activité plus modérée les choses reviennent à la normale. Cependant la sédentarité, ainsi que l’obésité qu’elle peut entraîner, est toute aussi nocive.
Les ondes électromagnétiques
Le sujet est certes polémique mais, que ce soit in vitro ou in vivo, les recherches sur l’homme et l’animal concluent à une dégradation de la qualité du sperme lors d’exposition prolongées aux ondes des téléphones cellulaires ou de Wi-Fi.
Les polluants organiques
Les polluants organiques, difficilement biodégradables, peuvent se transporter sur de longues distances dans l’eau ou dans l’air. Parmi eux : les pesticides, les dioxines, les PCB et les hydrocarbures. Tous sont rejetés dans la nature par les activités humaines et tous influencent négativement la fertilité.
Vidéo réalisée par l’INSERM : La régulation du cycle ovarien.
L’alimentation
Tant de choses et de facteurs polluent notre alimentation, compromettant ainsi la fertilité de l’être humain, qu’il est impossible de les énumérer de manière exhaustive dans un article. Toutefois, parmi les désignés coupables par ce livre, figurent les fruits et légumes traités aux pesticides. Une consommation modérée d’autres aliments est également fortement conseillée : produits laitiers, abats, poissons, café, boissons sucrées… La liste des produits néfastes et les suggestions pour bien s’alimenter font l’objet de longues pages. Il est quand même intéressant de relever que les hommes qui mangent, plus de deux fois par jour, des fruits et légumes issus des cultures biologiques, ont un nombre total de spermatozoïdes plus de deux fois supérieur à ceux qui n’en mangent qu’une fois.
Le travail
Les personnes qui exercent des professions où l’on manipule des produits phytosanitaires, des produits chimiques et des solvants sont davantage exposées aux perturbateurs endocriniens. Donc plus susceptibles d’être infertiles si les moyens de protection mis à disposition s’avèrent peu adaptés. Il en va de même pour tous les métiers qui exposent à la chaleur : pizzaiolo, boulanger, cuisinier, les métiers du textile, pompier, ouvrier suivant les ateliers…
Le mode de vie en général
Certains des éléments qui peuvent dégrader les capacités reproductrices chez l’homme sont difficilement évitables car invisibles. Nous n’avons aucun pouvoir sur eux. D’autres dépendent du mode de vie. Même si les produits suivants semblent logiquement perturbants pour la fertilité, il est peut-être bon de rappeler lesquels : l’alcool, le tabac, le cannabis, la cocaïne, l’héroïne et toutes les drogues qu’elles soient de synthèse ou non, beaucoup de médicaments notamment ceux contre l’acné, les antibiotiques, les antidépresseurs, les antidouleurs, le paracétamol, énormément de cosmétiques et les crèmes solaires…
L’une des nombreuses illustrations du livre Demain tous infertiles ?
Sources :
- Demain, tous infertiles ? Comprendre, prévenir et traiter l’infertilité masculine, Professeur Stéphane Droupy et Brigitte-Fanny Cohen, First Éditions, octobre 2020, 287 pages.
- Bibliothèque de la Ville de La Chaux-de-Fonds.