Al-Farazdaq : une poésie de transition

Al-Farazdaq : satiriste et libertin

Dans la poésie arabe, al-Farazdaq constitue, avec al-Akhtal et Djarir, le trio de poètes les plus célèbres, de la fin du VIIe et du début du VIIIe siècle. Avec eux, al-Farazdaq a échangé des diatribes restées célèbres. Chez al-Farazdaq, la satire est violente, grossière et même, souvent, obscène ce qui parfois ne plaît pas à tout le monde. Le titre du poème ci-dessous Nuit Libertine ne laisse aucun doute quant à la capacité du poète à irriter certaines instances politiques ou religieuses.

 

Al-Farazdaq : un poète constamment attaqué

Hammam ibn Ghalib surnommé Al-Farazdaq, ce qui signifie « visage semblable à un grand morceau de pâte » sans doute parce qu’il a le visage très rond, naît au Yamāma en l’an 641. Son grand-père est un bédouin de grande réputation. Son père Ghalib qui a suivi le même mode de vie est réputé pour sa générosité et son hospitalité.

Par son talent, très jeune, al-Farazdaq attire à l’attention de sa tribu. Toutefois, à quinze ans, il décide de se consacrer à l’étude du Coran. Très vite, il recommence à refaire des vers. Il entame une longue carrière de panégyriste et de satiriste dont les péripéties seront nombreuses. Ses satires lui valent beaucoup d’ennuis. Constamment attaqué, le poète est obligé de fuir. Il se réfugie à Médine où il est bien accueilli. Il y reste environ dix ans pendant lesquels il écrit des satires sur les tribus tout en évitant les politiques urbaines.

Mais sa vie dispendieuse et ses vers amoureux conduisent à son expulsion. Il retourne à Bassorah. Une grande partie de sa poésie est maintenant consacrée à ses affaires matrimoniales. En effet, il a profité de sa position pour épouser sa cousine Nawar contre son gré. Elle cherche vainement de l’aide auprès de la cour de Bassorah et de diverses tribus mais tous craignaient les satires du poète. Enfin, elle se réfugie à La Mecque d’où elle demande de l’aide mais son mariage est reconfirmé. Les querelles recommencent. Al-Farazdaq prend une deuxième femme et, après sa mort, une troisième, pour énerver Nawar. Finalement, il consent au divorce . Al-Farazdaq devient le poète officiel du calife omeyyade Al-Walid à qui il dédie un certain nombre de panégyriques. Mais il a un don certain pour se faire détester. Le poème qu’il prononce à La Mecque, en colère, contre l’émir, l’amène à faire un séjour en prison qui contribuera largement à sa célébrité. Il meurt à Bassorah entre 728 et 730.

L’œuvre poétique d’al-Farazdaq est importante et compte de très nombreux panégyriques adressés à ses successifs protecteurs. La langue d’al-Farazdaq est vigoureuse, riche, sans jamais tomber dans la recherche ni rebuter par de trop grandes difficultés. Ces caractéristiques, ajoutées aux qualités qui marquent ses poèmes et le traitement des thèmes, fait d’al-Farazdaq l’héritier de la grande tradition bédouine qui donnera naissance à une poésie d’une inspiration et d’un langage plus modernes. Son œuvre témoigne de la transition entre la vieille poésie du désert et celle qui naîtra bientôt dans les villes d’Iraq.

Sources :

-La Poésie arabe, anthologie traduite et présentée par René R. Khawam, Editions Phébus, 1995

-Universalis.fr, article de Jamel Eddine BENCHEIKH

-Encyclopédie Larousse

-Le corps du poète dans la poésie arabe médiévale, d’après l’œuvre d’Ibn Ḫafāǧa par Brigitte foulon

-Wikipédia