Accéder à ses données médicales, depuis n’importe où, n’importe quand ?

Pourquoi peut-on accéder à nos données bancaires en ligne et pas à nos données médicales ?

Actuellement, vos données médicales sont stockées chez les différents professionnels de la santé qui vous ont soigné mais vous n’y avez vous pas accès. Ne devrait-on pas pouvoir accéder à nos informations médicales en ligne, comme on le fait pour nos comptes bancaires ?

Si votre médecin est absent

Il parait tout de même assez évident qu’il serait utile de pouvoir accéder à votre dossier médical si vous avez besoin de soins et que votre médecin est absent.  Votre médecin traitant ne travaille pas 24 heures sur 24, son cabinet est fermé le week-end et, en plus, il prend parfois des vacances. Si vous devez durant ces moments-là consulter en urgence, le professionnel de la santé qui vous prendra en charge ne connaitra pas vos problèmes de santé, vos traitements et vos résultats d’analyses. Est-ce encore acceptable en 2019 ?

Mieux soignés

Les études nous montrent aussi que les patients qui accèdent à leurs données médicales, par exemple à la liste de leurs diagnostics et aux rapports des spécialistes consultés, comprennent mieux leurs maladies, suivent mieux leurs traitements et sont mieux soignés. Accéder à ses données permet au citoyen d’être plus actif dans la prise en charge de sa santé.

Au-delà des données, les services

Si l’on s’inspire de ce que proposent de nombreux établissements de santé à l’étranger, aux Etats-Unis en particulier, les dossiers médicaux en ligne ne donnent pas seulement accès à vos données médicales, ils proposent en plus toute une série de services: la possibilité de prendre rendez-vous chez les professionnels de la santé qui vous soignent, un système de rappel qui vous alerte lorsque le prochain rendez-vous approche, la possibilité de faire renouveler vos ordonnances mais aussi de contacter votre médecin par courrier électronique.

Un dossier “médical” ou un dossier “santé” 

Le réel objectif ne devrait en réalité pas être un dossier médical mais un dossier santé. Formulé autrement, votre dossier ne devrait pas se limiter à lister vos diagnostics, vos traitements et vos allergies, il devrait vous aider à rester en forme. Cela pourrait prendre la forme d’un simple courriel qui vous rappelle qu’il est temps d’effectuer un examen de dépistage ou, autre exemple, de vous permettre de trouver dans votre région la liste des spécialistes qui pourront vous aider à stopper votre tabagisme. L’idée est somme toute simple, transformer un dossier médical orienté « maladies » vers un dossier « santé » qui vous aide à rester en forme.

De nouveaux métiers

Actuellement, les données médicales sont dispersées, certaines chez votre médecin traitant, d’autres à l’hôpital, d’autres encore dans votre pharmacie et à mille autres endroits. Ces données ne sont le plus souvent pas structurées, elles ne sont constituées que de textes et de chiffres. Un travail humain est donc nécessaire pour récupérer ces données médicales et les présenter dans un dossier médical que chaque citoyen pourra consulter en ligne. Il faut confier ce travail de récupération et de valorisation de vos données à des spécialistes de la gestion des données de santé, de nouveaux métiers doivent être créés.

Patient acteur

Vous pourriez ainsi, en quelques clics seulement, accéder à vos données médicales, à des conseils santé et à différents services : un tableau de bord qui vous permettrait, de « piloter » votre santé. Cet outil serait évidemment aussi bien utile aux professionnels de la santé qui vous soignent, ils auraient accès en permanence à vos données médicales complètes, mises à jour en permanence.

Intéressé(e) ?

 

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Se faire soigner par un médecin, bientôt une exception?

Grâce à la créativité de nos caisses-maladie, se faire soigner par un médecin sera peut-être bientôt une exception. Quelle option choisirez-vous, vous faire soigner par un(e) infirmier(ère), par un « spécialiste expérimenté », par un « conseiller numérique » ou par un(e) pharmacien(ne) ?

Soigné par des infirmiers et des « spécialistes expérimentés » ?

Ce mouvement a débuté il y a de nombreuses années déjà avec les services de télémédecine. En Suisse, les trois principaux acteurs sont Medgate, Medi24 et Santé24. Même si l’on peut sur le site de Medgate lire que « les médecins de Medgate Tele Clinic sont là pour vous, jour et nuit, par téléphone et vidéo », le premier contact se fait à ma connaissance toujours avec un infirmier ou une infirmière, le médecin n’étant lui appelé que pour les cas les plus complexes. Sur le site de Medi24, on apprend que « c’est une équipe interdisciplinaire composée de plus de 120 spécialistes, dont des médecins et des soignants qui vous répond ». Un médecin, je sais ce que c’est mais un soignant, ce n’est pas très précis. Il est donc possible que la personne qui vous conseille ne soit ni infirmier, ni médecin. Chez Santé24, « les conseils sont fournis gratuitement en quatre langues par des médecins et d’autres spécialistes expérimentés ». Le terme « d’autres spécialistes expérimentés » nous place dans la même situation, vous ne savez pas qui vous soigne.

Ceux d’entre vous qui lisent ce blog régulièrement connaissent la valeur que je donne à la télémédecine, je regrette cependant qu’il soit si difficile de savoir qui répond aux questions des patients qui confient leur santé à ces services.

Soigné par un « conseiller numérique » ?

Ce « conseiller numérique » est un algorithme qui porte le nom de « MyGuide ». Proposé par la CSS, MyGuide analyse les symptômes des patients pour savoir s’ils doivent ou non se rendre chez le médecin. Comme écrit dans un autre article de ce blog, il s’agit d’une solution innovante qui donne certainement des conseils médicaux de meilleure qualité que ce qu’un patient trouve en faisant une recherche sur Internet.

Mais il existe des points négatifs. Le premier, le fait que les patients transmettent des informations sensibles à leur caisse-maladie, une attitude qui risque à terme de se retourner contre eux. Le deuxième problème est économique, quel est l’impact de ce conseiller numérique sur les coûts de la santé ? Pour cet aspect financier, nous n’avons pas de réponse. Ma crainte principale est que, par précaution, le nombre de personnes envoyées chez le médecin, ou pire aux urgences, augmentent drastiquement. Le troisième problème est le plus important, les conseils donnés par ce conseiller numérique sont-ils fiables ? Par manque d’études, le doute subsiste.

Soigné par un pharmacien ?

Le communiqué de presse date du 19 août 2019 et on peut y lire : « Le Groupe Mutuel lance un nouveau modèle d’assurance en partenariat avec les pharmacies Amavita, Sun Store et Coop Vitality ». Les patients qui souscriront à ce modèle PrimaPharma auront l’obligation de se rendre d’abord auprès d’un pharmacien, sauf, si l’on en croit cet article du Temps, « pour les urgences, pour les consultations gynécologiques, pédiatriques, ainsi que les maladies chroniques ». Je suis rassuré que pour les infarctus une exception soit prévue, je le suis plus encore pour les consultations gynécologiques.

Même si les pharmaciens jouent un rôle central dans notre système de santé, ce modèle m’interpelle. Premier point, il est limité aux pharmacies des groupes Amavita, Sun Store et Coop Vitality. Si votre pharmacie habituelle ne fait pas partie de ces chaînes, le pharmacien qui vous conseillera ne vous connaîtra pas. Pour revenir à la question principale de cet article, que sait-on de la qualité des conseils santé des pharmaciens ? Même si nous avons en Suisse des pharmaciens bien formés, médecins et pharmaciens restent des professions différentes.

J’ai pu lire dans l’article du Temps susmentionné que « PharmaSuisse souligne qu’un essai pilote en la matière mené entre 2012 et 2014 a montré que 73% des cas avaient pu être résolus dans la pharmacie », si cela continue ainsi, on va bientôt pouvoir se passer totalement de médecins.

J’ai écrit aux services médias de PharmaSuisse et du Groupe Mutuel pour en savoir plus sur ces études qui ont porté sur la qualité des recommandations médicales données par les pharmaciens. Dans leurs réponses, aucune étude qui soutienne la pertinence, et l’absence de dangerosité, de ce modèle PrimaPharma (1, 2, 3, 4, 5, 6). On ne retrouve d’ailleurs nulle part ce chiffre de « 73 % de cas résolus dans la pharmacie ».  L’étude la plus intéressante est la dernière citée (Is there potential for the future provision of triage services in community pharmacy?)  dont les conclusions sont :

Bien que peu d’études aient spécifiquement mis à l’essai des services de triage, les résultats de cette recherche indiquent qu’un service de triage en pharmacie communautaire est faisable et approprié, et qu’il a le potentiel de réduire le fardeau sur les autres services de santé. Il reste encore des questions à régler, comme celle d’assurer l’uniformité du service et de savoir si toutes les pharmacies pourraient fournir ce service.

Ce modèle PrimaPharma cumule à mes yeux les défauts : 1) Si le pharmacien est un partenaire apprécié du patient, la différence est grande entre pouvoir aller chez le pharmacien chercher un conseil ou avoir l’obligation de s’y rendre. 2) Malgré le professionnalisme des pharmaciens, aucune étude ne permet de dire que ce modèle n’aura pas de conséquences négatives sur la santé des patients traités. 3) Ce modèle exclut de très nombreuses pharmacies, obligeant les patients à se rendre dans une pharmacie qui n’est pas la leur. 4) Même pour les pharmaciens concernés, je trouve qu’il s’agit d’un cadeau empoisonné, ce système met sur leurs épaules une bien grande responsabilité.

Plutôt que de les opposer, je vois plutôt le futur comme une intensification de la collaboration médecins – pharmaciens.

Les propositions des médecins ?

On propose donc aux citoyens suisses des prises en charge dont la validité n’est pas prouvée. Ni pour ce qui est de la qualité des soins, ni pour ce qui est des économies. Au-delà de ce problème, ce qui me dérange le plus est de voir qu’au travers de ces différents modèles, ce sont les caisses-maladie qui dessinent le système de santé suisse, en tout cas la partie importante qu’est l’accès du patient aux soins.

Une chose cependant ne peut être retirée aux caisses-maladie, elles innovent. Pas forcément toujours avec pertinence, mais au moins elles innovent. Car du côté des médecins, à ma connaissance, il n’existe aucune proposition pour un meilleur tri ou une optimisation de la prise en charge des patients.

 

 

Notre système de santé doit être réinventé

Notre système de santé est complètement dépassé. Je dis parfois, en exagérant un peu, qu’à part les patients et les professionnels de la santé, tout pourrait être changé. Il est vrai que de se plaindre de l’offre de soins proposée dans notre pays, si on le compare à ce qui existe dans des endroits moins favorisés de la planète, peut paraître indécent. Il n’en reste pas moins que de profonds changements seront nécessaires si l’on espère pouvoir faire face aux défis qui attendent notre système de santé.

Un système fragmenté

Le monde de la santé fonctionne encore comme il y a 100 ans, lorsque la médecine n’était constituée que de rares soins aigus, le patient allait chez le médecin pour une grippe et y retournait l’année suivante pour soigner une blessure. Entre ces deux épisodes, il ne se passait rien.  Ce système qui fonctionnait pour des problèmes médicaux simples ne répond plus aux défis actuels, en particulier pour la prise en charge des patients souffrant de maladies chroniques. S’ils ont la mauvaise idée de souffrir de plusieurs maladies simultanément, c’est pire encore.

Ce système qui a déjà atteint ses limites risque d’imploser avec la quantité grandissante de données générée pour chaque patient, les informations que vous transmettez à votre médecin mais aussi les rapports des spécialistes consultés, les résultats d’analyses de laboratoire et bientôt les données génétiques.

Une offre globale

La complexité grandissante de la médecine nécessite d’abandonner un système fait de différents prestataires de soins qui communiquent plus ou moins bien entre eux en faveur d’un système intégré. L’unité ne doit plus être l’individu, le médecin, le spécialiste, l’infirmier et le pharmacien mais une structure qui les regroupe tous.

La porte d’entrée à ce système doit être constitué de centres de proximité où les patients peuvent se rendre en cas de besoin mais qu’ils peuvent aussi contacter à distance, téléphone ou vidéo, lorsque le contact physique avec le professionnel de la santé n’est pas nécessaire. Ce mariage de la médecine traditionnelle qui s’effectue dans un lieu physique donné complété par des soins à distance rendra le système plus efficient mais permettra aussi une meilleure orientation des patients.

Le patient devra aussi bien sûr pouvoir accéder à ses données santé, pour connaître et comprendre ses problèmes de santé, pour pouvoir prendre rendez-vous, faire renouveler ses ordonnances ou recevoir des conseils santé adaptés à sa situation médicale.

Il faut aussi passer du tout curatif à une offre qui donne une réelle place à la prévention. Même si la formule est facile, il ne faut plus réfléchir maladie mais santé.

Pour qui, par qui ?

Pour diriger les changements à venir, la voie à suivre est double, il faut penser aux patients mais aussi aux professionnels de la santé. L’intégration des patients dans les choix futurs est une garantie que les innovations iront dans la bonne direction. Comme déjà mentionné dans d’autres articles de ce blog, il ne faut plus faire pour les patients mais avec eux. Même si, comme l’écrit avec pertinence Bertrand Kiefer, le rédacteur en chef de la Revue médicale suisse, il est difficile de savoir qui sont exactement ces patients et comment choisir ceux qui auront le droit à la parole.

L’autre acteur à ne pas oublier est le professionnel de la santé. Si l’on veut qu’il soit capable de soigner, de conseiller et d’accompagner, il faut que son travail garde son sens. Pour lui aussi la médecine est toujours plus complexe, plus rapide, plus technologique, il faut qu’il puisse continuer à soigner l’individu unique qui se cache derrière chaque patient.

 

 

 

Vers une médecine plus efficace grâce aux patients ?

« Au Canada, l’hôpital à l’écoute des patients pour améliorer les soins ». Ce titre d’un article publié récemment sur le site Pourquoidocteur.fr a attiré mon attention.

On peut y lire : « D’après une nouvelle étude menée au Canada, demander aux patients de rapporter leur expérience dans les hôpitaux pourrait grandement aider à améliorer la qualité des soins ».

Cet article fait référence à une recherche publiée dans le Canadian Journal of Cardiology où des patients opérés du cœur ont été interviewés,  l’objectif était d’améliorer la qualité des soins en tenant compte de leurs besoins.

Avait-on vraiment besoin d’une étude pour arriver à cette conclusion ?

Je pense que non. Cette étude est cependant intéressante pour deux raisons en tout cas. La première est bien sûr que d’être convaincu d’une croyance est bien, en avoir la conformation dans une étude est mieux. La deuxième raison est de découvrir qu’il existe dans cet hôpital de l’Alberta une réelle conscience de la valeur de l’avis des patients.

Même si je pense que la grande majorité d’entre nous est d’accord pour dire que l’expérience patient est essentielle pour améliorer notre système de santé, force est de constater que peu de choses sont mises en place pour recueillir l’avis des patients dans notre pays.

Vers une co-construction

L’objectif n’est pas simplement de demander aux patients de remplir un questionnaire de satisfaction lors de leur sortie de l’hôpital, mais de mettre en place un système qui permette une réelle implication des patients.

Des chercheurs de l’Université de Toronto ont analysé toutes les études publiées sur le lien entre l’intégration des patients et l’amélioration de la qualité des soins. Ils ont identifié quarante-huit études sur ce sujet. Leurs conclusions ? Le niveau d’engagement influe sur les résultats : un engagement faible (un simple questionnaire donné aux patients) a un faible impact, les engagements plus importants (co-conception, partenariat) peuvent eux aboutir à des modifications importantes du système de santé.

Des initiatives existent

Même si elles sont encore rares, des initiatives existent : les Hôpitaux universitaires de Genève ont lancé un programme « Patients partenaires » avec l’objectif justement d’améliorer la qualité des soins. On peut lire sur le site des HUG « cette évolution implique un repositionnement des rôles : le patient sait mieux que personne quels sont ses symptômes et comment il les vit. Son regard sur l’hôpital et ses prestations est celui du client. On ne peut le soigner et progresser qu’avec lui. Le professionnel, de son côté, ne décide plus tout seul, mais cherche davantage à collaborer avec le patient ».

Une belle initiative qu’il faudra suivre pour en mesurer les réelles conséquences.

Un changement culturel

Notre système de santé fait face à un certain nombre de défis auquel il faudra répondre par des changements multiples, humains, technologiques et organisationnels. Ces changements ne seront utiles que s’ils intègrent les besoins et les attentes des patients. Il ne faut plus faire « pour les patients » mais avec eux. Cela nécessite un profond changement au sein de notre système de santé.

 

A lire aussi sur ce sujet :

  • Sur ce blog : Le médecin décide, le patient obéit, sur la relation médecin patient et plus particulièrement sur la nécessité d’évoluer vers une relation de partenariat.
  • Sur le site de la Revue médicale suisse : Patients : sujets avant d’être partenaires, écrit par Béatrice Schaad, Céline Bourquin, Francesco Panese et Friedrich Stiefel. On peut y lire : les patients, leurs proches comme les professionnels de la santé souffrent d’un processus de dé-subjectivisation alimenté par la place grandissante des technologies et la standardisation des prises en charge. Ils éprouvent d’abord le besoin d’être reconnus comme des sujets avant de pouvoir envisager de devenir des partenaires. Un éclairage essentiel.
  • Sur le site du Figaro santé, Vers une médecine plus efficace grâce aux patients. A lire absolument. En espérant que son auteur me pardonne d’avoir copié le titre de son article.

 

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Me faire soigner à distance ? Moi, jamais !

Pourquoi se faire soigner à distance alors que le contact humain est si important ? Pourquoi recourir à la téléconsultation alors que le médecin doit souvent vous examiner ? Pourquoi accepter cette déshumanisation des soins ?

Très développée en Suisse

La téléconsultation est déjà une réalité en Suisse, moins souvent utilisée qu’aux USA mais plus fréquemment que dans la plupart des pays européens.  Les acteurs historiques sont liés aux assureurs, leurs services sont réservés aux assurés des caisses affiliées, certains patients ayant l’obligation de les contacter avant de prendre rendez-vous chez un médecin. Les centrales téléphoniques de Medgate, Medi24 et Santé24 reçoivent entre cinq et six mille appels par jour.

Plus récemment sont apparus de nouveaux acteurs, à l’image de Tondocteur.ch, qui annonce sur son site, au moment d’écrire ces lignes, « 78 docteurs en ligne et dispos pour téléconsulter via webcam ! ». Il est aussi désormais possible de se faire soigner à distance pour des situations particulières, l’envoi d’une photo de votre peau permet par exemple aux médecins de derma2go ou de OnlineDoctor de répondre à vos problèmes dermatologiques. A signaler aussi l’initiative originale d’une diététicienne qui a développé avec son site Coeurnutrition.com une solution permettant une prise en charge diététique à distance.

Les Hôpitaux universitaires de Genève viennent quant à eux de lancer HUG @ home , une solution de soutien des soins à domicile par vidéo qui permet aux personnels soignants faisant face à un problème aigu de recevoir les conseils d’un médecin des HUG, évitant ainsi un déplacement du patient aux urgences.

De nouveaux projets vont être lancés prochainement à l’image de Soignez-moi qui a comme objectif la prise en charge à distance de nombreux problèmes de santé en un temps maximum d’une heure.  Les créateurs de Soignez-moi publieront les algorithmes utilisés pour la prise en charge des patients, un effort de transparence à saluer.

Les atouts

De prime abord, nous avons tous le sentiment qu’une consultation chez le médecin est préférable à des soins à distance. Les avantages de la téléconsultation sont cependant plus nombreux que ce que l’on pourrait imaginer.

Même si une analyse complète des atouts de la consultation dépasse le cadre de cet article, on peut tout de même citer :

  • L’accès aux soins pour des personnes isolées (habitat éloigné, vacances à l’étranger, prison, etc.) ou peu mobiles (handicapés, parent avec enfants, personnes âgées).
  • Le gain de temps, pour le patient et pour le professionnel de la santé.
  • L’impact écologique positif puisque la téléconsultation permet d’éviter des déplacements.
  • Une plus grande disponibilité, la téléconsultation permet souvent l’accès au système de santé en dehors des heures d’ouverture des cabinets médicaux.
  • La téléconsultation peut aussi être utile pour le suivi des patients souffrant de maladies chroniques, les soins à distance en alternance avec des consultations présentielles permettant un rapprochement soigné – soignant.

Enfin, un atout potentiel de la téléconsultation est sa fonction de triage : elle permet de définir qui peut être soigné à distance, qui doit consulter et avec quel degré d’urgence. Même si la comparaison avec la petite Helvétie est difficile, des études faites au Canada montrent que les services de santé électroniques évitent bien des visites inutiles chez le médecin et génèrent une valeur importante pour le réseau de la santé.

Pour ce qui est de l’impact économique, il est probablement aussi à ranger du côté des atouts même si cette affirmation ne s’appliquera certainement pas à toutes les solutions de télémédecine.

Téléconsultation, les limites

Le premier danger est celui de la qualité des soins. La téléconsultation a besoin de professionnels de la santé bien formés, des professionnels qui devront à mon avis être spécifiquement formés aux particularités des soins à distance.

Même avec des professionnels de la santé expérimentés, il est possible que certaines situations engendrent des soins de moins bonne qualité lorsque la consultation n’a pas lieu dans le cabinet du médecin. Une étude réalisée aux Etats-Unis montre par exemple que les enfants soignés à distance pour des infections ORL reçoivent trop d’antibiotiques ou parfois des antibiotiques non adaptés.

Le principal argument évoqué contre la téléconsultation est que « le médecin a besoin de m’examiner ». Cette affirmation doit probablement être fortement nuancée, l’analyse de 500 dossiers médicaux de patients ayant consulté leur médecin traitant pour une infection aiguë des voies respiratoires montre que 63 % des patients inclus auraient pu être traités de façon appropriée sans déplacement au cabinet. Cet exemple est certainement valable pour de nombreux problèmes médicaux.

Un risque de fragmentation des soins ? 

Des chercheurs ont interrogé les utilisateurs d’un système américain de téléconsultation par vidéo pour connaître leurs motivations et leurs craintes. Nonante pourcents des personnes interrogés ont répondu avoir choisi la vidéoconsultation en raison de son aspect pratique, près de 50 % disant ne pas avoir obtenu de rendez-vous auprès de leur médecin. La téléconsultation permet donc un accès facilité aux soins mais les auteurs de cette recherche insistent dans leurs conclusions sur un danger, celui d’une fragmentation des soins en raison d’une mauvaise communication des services de téléconsultation.

Il est à ce titre très surprenant que les géants de la téléconsultation que sont Medgate et Medi24 n’envoient, après avoir pris en charge un patient, aucune information à son médecin traitant. Pour éviter que la téléconsultation n’aboutisse à une fragmentation des soins, les solutions qui me paraissent les plus prometteuses sont celles qui, en plus d’offrir des soins de qualité, auront comme priorité de s’intégrer au système de santé traditionnel.

La question actuelle n’est donc pas consultation présentielle ou consultation à distance mais comment tirer le meilleur de ces deux mondes. Il faudra veiller à ce que les deux approches se complètent harmonieusement, pour le bien des patients.

 

NB : Téléconsultation, télémédecine, téléexpertise: aidez-moi à répertorier la liste des solutions de télémédecine existants en Suisse.

 

Docteur, votre système est génial !

J’exerce la médecine depuis plusieurs années et je vous promets que ce n’est pas très souvent que mes patients me font de telles déclarations. Un patient, deux patients, dix patients, les messages positifs se répètent. Mais qu’est-ce qui justifie un tel enthousiasme ? Un nouveau traitement, un nouveau test diagnostique ? Non, un simple système de prise de rendez-vous par Internet…

La prise de rendez-vous en ligne

Mes patients peuvent depuis quelques semaines prendre rendez-vous à ma consultation par Internet. Le système que j’utilise me permet de choisir les heures de consultation mises à leur disposition et celles gérées uniquement par mon assistante. J’ai fait le choix de libérer les plages de consultation du matin, celles de l’après-midi sont gérées par mon assistante, notamment pour les urgences.

J’ai longtemps hésité à utiliser un tel système même si, comme présenté dans un autre article de ce blog, je savais que la prise de rendez-vous par Internet était un service très apprécié des patients. J’ai pour finir fait le pas en me disant que moi patient je souhaiterais pouvoir disposer d’un tel système, il n’était donc pas logique d’en priver mes patients.

« Super votre système de réservation en ligne »

Une patiente m’a envoyé un courrier électronique pour savoir si elle devait venir en consultation pour les problèmes digestifs qu’elle avait ramenés d’un voyage à l’étranger. Je lui ai répondu en lui donnant la liste des symptômes de gravité qui nécessitaient une consultation rapide, en lui précisant que si elle devait venir me voir, elle pouvait prendre rendez-vous par mon nouveau système de prise de rendez-vous en ligne. Sa réponse ? « Merci docteur, je n’ai pas ces symptômes, je n’ai pas besoin de venir vous voir tout de suite, je viendrai vous voir si mes problèmes ne se règlent pas tout seuls ». En post-scriptum : « Super votre système de réservation en ligne » !

Ce système offre de nombreux avantages : il est bien sûr possible de l’utiliser en dehors des heures d’ouverture du cabinet, le soir ou le week-end par exemple, mais il peut aussi être utile quand l’assistante du cabinet est occupée et ne peut pas répondre au téléphone. Un autre avantage auquel on ne pense pas de prime abord, le patient voit par ce système toutes les plages disponibles, pas uniquement le jour et l’heure proposée par l’assistante au téléphone. Pour terminer, même si cela varie certainement d’une solution à l’autre, le système que j’utilise envoie un mail de confirmation dès que le rendez-vous est pris et un SMS de rappel 24 heures avant la consultation.

L’accès aux soins est une faiblesse de notre système de santé, les solutions de prise de rendez-vous par Internet constituent une partie de la solution.

Aussi utile pour les professionnels de la santé

Une expérience vécue récemment me fait dire que ce système me serait aussi très utile à moi médecin lorsque je veux adresser l’un de mes patients chez un collègue, chez un spécialiste par exemple. J’ai envoyé un mail et un fax (pourquoi les deux, un pressentiment ?) à un collègue en lui demandant de recevoir à sa consultation un de mes patients « dès que possible ». J’ai téléphoné à l’assistante du spécialiste après quelques jours en lui disant être surpris que mon patient n’ait toujours pas de rendez-vous. Sa réponse ? « Le fax ne fonctionne plus et le médecin ne regarde pas ses mails, il faut lui envoyer votre demande par la poste ». Même si la technologie ne va pas résoudre les problèmes d’incompétence, un système de prise de rendez-vous entre professionnels de la santé faciliterait la continuité des soins.

Le futur

Le futur sera probablement celui d’un service global qui réponde aux besoins réels des patients, constitué de différentes offres en fonction de la gravité du problème de santé du patient et de la disponibilité de son médecin.

Le premier niveau ne devrait en fait même pas nécessiter le recours au système de santé : pour les situations bénignes, le patient devrait pouvoir trouver sur Internet des informations qui lui permettent de se prendre en charge lui-même, une aide qui devrait ressembler aux conseils que pourraient vous donner votre pharmacien.

Le deuxième niveau devrait permettre de prendre rendez-vous chez son médecin ou, en dehors des heures de consultation, chez un médecin d’urgence. Le patient devrait pouvoir choisir pour une consultation présentielle ou, si la situation médicale le permet, pour une téléconsultation.

En attendant ces développements futurs, l’adoption rapide par mes patients, y compris pas les seniors, de ce nouveau système de prise de rendez-vous, montre qu’il répond à un besoin.

 

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L’électrocardiogramme de l’Apple Watch: une app utile ou uniquement angoissante ?

L’histoire de la dernière série de l’Apple Watch et de son app ECG est passionnante.

Vous pourrez lire sur le site Apple: “L’Apple Watch Series 4 vous encourage à mener une vie plus saine en vous aidant à contrôler tous les aspects de votre quotidien, du stress aux calories dépensées. En parallèle, elle surveille votre rythme cardiaque et vous alerte si elle détecte quelque chose d’anormal”. 

L’objectif de cette application “électrocardiogramme” est de détecter des arythmies, en particulier une irrégularité du rythme cardiaque qui porte le nom de fibrillation auriculaire. L’objectif est louable puisque cette anomalie peut passer inaperçue et avoir d’importantes conséquences, les plus graves étant une insuffisance cardiaque ou un accident vasculaire cérébral.

Cette application a reçu aux Etats-Unis l’autorisation de la FDA pour sa mise sur le marché et en Europe le marquage CE, une reconnaissance qui démontre qu’il s’agit bien d’un dispositif médical.

Une nouvelle façon de pratiquer la médecine

Apple a obtenu la reconnaissance de son app ECG en un temps record, trente jours, alors qu’il faut habituellement plusieurs mois pour obtenir une telle certification de la FDA. Cet accord est tombé comme par magie la veille de l’annonce mondiale de l’Apple Watch Série 4. Le Dr Ivor Benjamin, président de la Société américaine de cardiologie, présent lors du show Apple, a déclaré « enregistrer en temps réel des données sur le cœur d’un patient change la façon dont nous pratiquons la médecine ».

La reconnaissance de la FDA américaine et en Europe l’obtention du marquage CE nous laissent penser que cette application est un dispositif médical fiable et utile. La réalité est un peu plus compliquée.

 

Vidéo. Apple Watch Series 4. Comment faire un ECG (vidéo de 36 secondes).

 

Ce qui disent les études

Deux études ont évalué la performance de l’Apple Watch pour la détection de la fibrillation auriculaire (FA). La première a porté sur 588 personnes dont la moitié souffrait d’une FA, la recherche a comparé le tracé de la montre Apple avec un électrocardiogramme classique composé de 12 pistes, le même que vous pourriez avoir chez votre médecin. L’application ECG n’a pas réussi à interpréter 10 % des tracés, ce qui est ennuyeux. Sur les 90 % restants, la sensibilité de l’app ECG a montré de très bons résultats avec une détection d’arythmie de plus de 98%.

Il y a malheureusement un problème : les possesseurs actuels de l’Apple Watch ont entre 30 et 50 ans, un âge où la fibrillation est rare. Cette faible prévalence de la maladie péjore grandement la performance de l’app ECG : dans cette tranche d’âge, près de la moitié des alertes ne correspondent à aucune arythmie.

Une deuxième étude a porté sur les enregistrements de 226 personnes classées par l’application comme ayant un rythme cardiaque irrégulier. Les résultats vont dans la même direction que ceux de la première étude : dans un article publié dans la Revue médicale suisse, le Dr Patrick Meyers, médecin au sein du service de chirurgie cardiaque du CHUV écrit « le taux de faux positif serait de 95 %, 19 personnes sur 20 avec un tracé pathologique sur l’Apple Watch n’auraient pas d’anomalie ».

Au vu de ces résultats, savoir que cette app a reçu la reconnaissance de la FDA et le marquage CE font planer de grands doutes sur la signification de ces reconnaissances officielles.

Une app utile ou uniquement angoissante ?

Si l’on veut que la détection d’une anomalie par l’Apple Watch corresponde vraiment à une arythmie, il faut donc que la montre soit portée par une population chez qui la fibrillation auriculaire est fréquente, c’est-à-dire au-delà de 80 ans. Chez les plus jeunes, les fausses détections d’arythmie risquent de provoquer passablement d’inquiétudes mais aussi de générer d’importants coûts pour des contrôles cardiologiques inutiles.

La technologie au service des professionnels de la santé et des patients ?

La technologie de l’Apple Watch et de son app ECG est impressionnante et il est possible que la montre de Cupertino devienne à l’avenir un dispositif médical utile. Cette merveille technologique est cependant représentative d’un grand nombre d’outils de la santé numérique actuelle, peut-être fiables mais pas forcément utiles: la validité de l’application est un pré-requis nécessaire mais insuffisant. Les technologies n’existent que dans l’usage : si innovation il y a, elle ne provient pas tant de la technologie en elle-même que de son utilité.

 

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Coûts de la santé : les politiciens se moquent de nous

Je me demande si nos politiciens à Berne ne seraient pas incompétents. Ou alors sous l’influence de lobbies ? Ou les deux ? Il est vrai, pour prendre leur défense, que la question des coûts de la santé est complexe, mais tout de même, leurs dernières propositions sont effrayantes.

Le droit des citoyens : payer

Je vais essayer de résumer :

  • Chaque automne, nos primes de caisses-maladie augmentent et étranglent une part grandissante de la population. Depuis l’entrée en vigueur de la LAMal, la participation aux coûts de la santé par les ménages a augmenté de 111% alors que les salaires nominaux n’ont connu qu’une augmentation de 23.6%.
  • Les primes sont tellement chères qu’un Suisse sur quatre doit recevoir de l’aide pour pouvoir les payer (un système où 25 % des cotisants n’ont pas les moyens de payer est par définition déjà un échec).
  • L’augmentation des primes incite les habitants de ce pays à choisir des franchises élevées, augmentant de facto le pourcentage de personnes qui renoncent à consulter pour des raisons financières, entre 10 et 20 % selon les sources.

Les dernières propositions de nos parlementaires

Comme un lapin sorti du chapeau d’un magicien, la dernière idée génialissime de nos parlementaires était d’augmenter de 50 francs la franchise minimale de l’assurance maladie. Cette idée est tellement fantastique que l’on se demande pourquoi nous n’y avions pas pensé plus tôt.

Non sérieusement, c’était quoi cette idée ? Faire payer plus pour limiter la hausse des primes ? Mais payer les primes ou payer la franchise, c’est toujours payer. Non, en fait, je suis critique mais le but était que les patients consultent moins. On peut lire dans cet article du journal Le Temps les déclarations de deux politiciens :

« Le nouveau mécanisme renforcera la responsabilité individuelle des assurés et la prise de conscience des coûts, a mis en avant Joachim Eder (PLR/ZG) pour la commission. Grâce à ce système, les assurés ne devraient plus aller chez le médecin pour chaque petit bobo, a abondé Erich Ettlin (PDC/OW) ».

Merci à eux pour ces explications. Il y a donc entre la franchise actuelle de 300 francs et la franchise de 350 un seuil, à 300 francs les gens vont chez les médecins pour n’importe quoi mais à 350, prise de conscience immédiate, ils ne consultent plus.

Cette mesure était d’autant plus injuste qu’en comparaison internationale les Suisses consultent peu.

S’il devait y avoir chez certains patients un recours exagéré aux soins, ce serait évidemment ceux qui ont dépassé leur franchise et qui ne payent plus que le 10 % des coûts. Pour eux, l’augmentation de 300 à 350 francs n’aurait rien changé.

Cette proposition n’a pour finir pas été votée par le Parlement grâce à une inhabituelle alliance gauche – droite. L’UDC et le PDC, qui ont soutenu durant toute la session cette révision de loi, ont subitement changé d’avis. Ils se sont peut-être dit que d’être responsable de l’augmentation des franchises n’était pas une super idée en année électorale.

Les mauvais malades

La palme de l’inventivité revient cependant à Philippe Nantermod. Ce parlementaire libéral radical a déposé une motion « Maladies chroniques. Favoriser les patients qui se conforment au traitement prescrit » : « Le Conseil fédéral est chargé de proposer une modification de l’assurance obligatoire des soins qui prévoit la suppression de la participation aux coûts pour le traitement des maladies chroniques dès lors que la preuve est apportée que les personnes concernées se conforment au traitement qui leur est prescrit ».

Même si l’idée peut de prime abord paraître pertinente, elle est stupide pour trois raisons en tout cas. Premièrement, définir avec exactitude ce qu’est une maladie chronique sera impossible. Deuxièmement, apporter la preuve que les personnes se conforment au traitement prescrit » sera aussi impossible. Mais c’est la troisième raison qui montre que cette proposition est stupide : penser que les malades qui ne suivent pas leurs traitements ont toujours tort et qu’ils doivent être punis.

Inutiles et insultantes

Les propositions de nos parlementaires sont donc à la fois inutiles et insultantes. Inutiles car elles n’ont aucun impact sur les coûts de la santé, insultantes car le citoyen payeur n’est vu par ces politiciens que comme un individu qui abuse du système et qu’il faut surveiller.

 

Maladies chroniques : quel est l’impact du numérique sur la vie des patients ?

Quel est l’impact des technologies numériques sur la vie des patients atteints de maladie chronique ? C’est la question à laquelle a voulu répondre le collectif d’associations de patients ICA, en partenariat avec des chercheurs de la chaire réseaux sociaux et objets connectés de l’Institut français Mines-Télécom.

L’objectif de cette étude était de mieux comprendre comment les personnes vivant avec une maladie chronique utilisent les technologies numériques mais aussi de connaître l’impact de ces technologies sur leur qualité de vie et leurs comportements santé. Plus de 1000 patients ont répondu de manière complète au questionnaire établi par les chercheurs.

Maladie chronique et numérique

Quels usages pour quelles technologies ? Premier enseignement, Internet est une source d’informations fortement sollicitée par les personnes vivant avec une maladie chronique, plus particulièrement lors des premiers temps qui suivent le diagnostic. Internet est utilisé par une majorité de patients, seuls 2,4% d’entre eux déclarent ne jamais y avoir recours dans ce cadre.

Les chiffres montrent néanmoins une hétérogénéité dans la régularité de l’utilisation d’internet : 59,4% des répondants se décrivent comme des utilisateurs réguliers (au moins une fois par semaine) tandis que 38,1% ont une utilisation plus rare (moins d’une fois par semaine) voire très exceptionnelle (moins d’une fois par mois).

Les réseaux sociaux sont le premier type de sites visité, les malades chroniques utilisent donc davantage le web 2.0 que les sites web ou les forums. Les recherches des malades chroniques sur Internet sont donc caractérisées par une approche communautaire, les contenus privilégiés sont ceux élaborés par d’autres personnes malades chroniques. Intéressant.

Cette étude confirme aussi que l’utilisation d’applications de santé et d’objets connectés reste encore aujourd’hui minoritaire voire marginale dans le cadre de la maladie chronique.

Nouvelles technologies et empowerment : vers un nouveau patient plus autonome ?

Les réponses des malades chroniques montrent que plus la fréquence d’utilisation d’Internet augmente, plus ils se sentent autonomes et s’autorisent à s’impliquer et à prendre part aux décisions concernant leur santé et la prise en charge de leur maladie.

Les auteurs de cette étude insistent sur un point qui est pour moi essentiel : les technologies numériques opèrent une transformation effective des patients vers une autonomisation qui se révèle être un allié pour le renforcement de la relation patient – médecin. Ils insistent aussi sur la nécessité pour le patient de relever les défis et dangers de l’Internet santé : la qualité variable des informations retrouvées, les risques d’erreur d’auto-diagnostic et l’équilibre émotionnel face au rappel de la maladie.

Alors, utile ?

Les résultats de cette recherche mettent en avant deux éléments du point de vue des malades. D’une part, que l’usage des technologies numériques dans le cadre de la gestion et du suivi de la maladie chronique n’est pas délétère à leurs motivations et leurs comportements liés à la santé, ni à la confiance qu’ils peuvent avoir envers leur médecin. D’autre part, qu’il permet d’augmenter l’empowerment, ce qui contribue à l’amélioration de la qualité de la relation et des échanges avec le médecin, notamment au sentiment d’être plus engagé et de vouloir maintenir cette relation, déterminante pour la qualité de vie des malades chroniques.

Bravo à eux

Au-delà de ces résultats, ce qui me réjouit le plus est de voir que ce sont désormais les patients eux-mêmes qui mènent des recherches sur les sujets qui les concernent. Bravo à eux.

 

NB: si vous n’avez vraiment plus de livres à lire et que la santé numérique vous intéresse, vous trouverez la totalité des articles publiées sur ce blog sur cette page.

 

Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac

Si vous ne trouvez pas normal que la publicité encourage les jeunes à fumer, prenez 2 minutes pour signer l’initiative populaire fédérale « Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac », Vous trouverez sur le site de l’initiative le  formulaire de signature à imprimer, pour 3 ou 10 signatures.

L’initiative

En résumé, l’initiative a pour but d’empêcher la publicité pour les produits du tabac qui cible les enfants et les jeunes. Concrètement, l’objectif est d’interdire la publicité pour les cigarettes par voie d’affichage dans les lieux publics de tous les cantons suisses. La publicité au cinéma ou via les petites annonces, le parrainage de festivals et la publicité en faveur du tabac sur Internet seraient aussi prohibés.

Le tabac dangereux ?

Même si vous connaissez tous la réponse, quelques chiffres permettent de se rendre compte de l’ampleur des dégâts : en Suisse, près de 9500 personnes décèdent chaque année des conséquences de la consommation de tabac. Si l’on reporte ce chiffre au canton de Vaud, 950 décès par année, près de trois chaque jour. Dans le monde, 1 milliard de personnes sont décédées des conséquences du tabac au 20ème siècle.

Des morts et des maladies

Avant de mourir, les gens sont malades. Je suis sûr que vous ne connaissez pas la moitié des maladies provoquées par le tabagisme. Vous trouverez cette funeste liste en lisant l’article «Dois-je vraiment arrêter de fumer ?» que j’ai publié sur ce blog en 2017.

Derrière ces maladies se cachent des êtres humains. La semaine dernière j’ai vu à mon cabinet sur la même journée : un homme de 58 ans qui a eu un accident cérébro-vasculaire (tabac et hypertension), un homme de 52 ans qui a eu un cancer de la gorge, qui a été traité par rayons et qui ne peut plus s’alimenter que d’aliments mixés (tabac), une femme de 66 ans qui est essoufflée à la moindre montée (tabac) et un homme de 49 ans qui souffre d’impuissance (tabac).

L’inaction de nos politiciens

L’objectif de cette initiative est aussi de contre balancer l’inaction de nos politiciens qui parlent à longueur d’année de l’importance de la promotion de la santé tout en laissant la Suisse avec l’une des lois les plus permissives du monde.

Si vous voulez en savoir plus sur les liens entre le monde politique et l’industrie du tabac, regardez l’émission Temps présent du 6 septembre 2018 intitulé « Attention, ce parlement peut nuire à votre santé ». On y voit dès la 6ème minute la retransmission des débats du parlement lors d’une session consacrée à la loi fédérale sur les produits du tabac. Vous pourrez y entendre un politicien neuchâtelois clamer à la tribune « la publicité pour le tabac n’a pas pour objectif d’inciter à fumer mais est simplement un instrument de concurrence essentiel et légitime entre les acteurs du marché ». Il faut que les citoyens de ce pays sachent que pour nos politiciens les enjeux économiques sont plus importants que leur santé.

Protéger les enfants et les jeunes

Est-ce trop demander à ce pays qu’il protège sa jeunesse ? Puisque les politiciens ont de la peine à prendre les bonnes décisions, il faut les aider : 2 minutes et une feuille suffiront. Vous trouverez toutes les informations sur le site http://enfantssanstabac.ch.

Merci.