Le père vaut-il la mère?

La femme au foyer

Mon blog précédent parlait des femmes au foyer. Je précise qu’il m’a été inspiré par un sondage récent. L’enquête révélait que nombre de jeunes filles suisses aimeraient être femmes au foyer, auprès d’un mari plus efficace et plus âgé (lien). Ce sondage a provoqué plusieurs éditoriaux qui se lamentaient sur l’abandon des voies de carrière par les femmes et leur refus de se réaliser dans leur profession. Ils me semblaient très biaisés. 

 J’ai donc expliqué des évidences, que la carrière professionnelle n’est pas une voie semée de roses mais confine parfois à l’esclavage dans l’entreprise, que toute la famille bénéficie du travail domestique, et que les enfants profitent beaucoup de la présence de leur mère.  J’estime que devrions faire un effort conscient pour reconnaître autant les personnes au foyer que les ‘project managers’ et autres ‘executive assistants’.  Elles devraient être valorisées de façon pécuniaire, pourraient peut-être obtenir des diplômes d’éducatrice ou autres, etc. Il ne s’agit pas d’empêcher de travailler les personnes qui le désirent, mais de respecter le choix de celles qui préfèrent rester à la maison.  Et je concluais en écrivant que dans la situation climatique actuelle, c’est vraiment souhaitable.

Nous allons vers des catastrophes plus graves, des évacuations, des interruptions de transports et des confinements. Une diminution du nombre de personnes en emploi, d’heures de travail totales en Suisse, serait une bonne solution pour limiter les émissions de carbone. Elle limitera les destructions dans le pays et devrait être encouragée financièrement.  

La vie de la mère au foyer inclut pour moi des longs moments de jeu ou de temps dans la nature avec l’enfant, la préparation à la maison d’aliments bio, des moments pour mes activités préférées, par exemple des expositions de peinture. En théorie, il devrait être plus facile d’avoir des loisirs en supprimant huit ou dix heures de travail quotidien du planning, cela devrait nous donner plus de liberté. En pratique, le bébé pleure quand la mère sort et elle y renonce souvent.  Cette période d’attachement  passe après quelques années. 

Le bébé et la mère 

Je reviens sur le point de la présence de la mère ou du père auprès du bébé. La question est assez complexe.  De très nombreuses études ont été faites sur ce sujet. 

Il n’est pas du tout évident que le père est équivalent pour un bébé.  Chez les animaux mammifères, la mère s’occupe spontanément des petits, ne les quitte quasiment pas, risque sa vie pour les défendre.  Il semblerait qu’elle imite en partie les soins reçus dans sa petite enfance,  parce que les guenons qui ont eu des mauvaises mères, ou en étaient séparées, ne veulent pas toujours s’occuper de leurs petits. 

Bien sûr, dans notre société, nous suivons des règles d’éducation: couche, biberon, petits habits, et le père peut appliquer celles-ci aussi bien que la mère.  Les petits humains seraient donc aussi bien soignés par le père.  Mais l’important est le point de vue de l’enfant. Est-il aussi sécurisé par la présence du père?  Ou a-t-il le sentiment d’être abandonné et peur?  Le nouveau-né reconnaît beaucoup sa mère à l’odeur, tourne la tête pour chercher des phéromones, messages chimiques dans son parfum, dont certaines indiquent l’allaitement. Il réagit plus à la voix de sa mère. Ce fonctionnement est important la première année. Un allaitement maternel de six mois permet d’établir une relation saine avec la mère.  Les enfants qui en ont bénéficié sont plus chaleureux, plus coopératifs,  et moins capricieux et colériques (lien).  Vers l’âge de huit mois – un an, période d’attachement maximal, un bébé se réfugie souvent vers sa maman, et s’ouvre beaucoup aux autres vers deux ans.

Une revue rappelle que le contact physique avec sa mère est perçu et améliore le bien-être du bébé de plusieurs façons. Il déclenche des changements hormonaux mesurables chez l’enfant  « Des études sur le contact physique prolongé entre une mère humaine et un nourrisson né à terme ont démontré des effets positifs dans plusieurs domaines. Pour les nourrissons, il s’agit notamment de l’organisation du sommeil, de la régulation de la température et du rythme cardiaque, de la réponse comportementale, des pleurs/coliques, du développement socio-émotionnel, de la qualité de l’attachement, des possibilités de développement de la parole et des interactions mère-enfant (lien).

Par ailleurs, une étude suisse récente montre que la crèche, surtout à plein temps, augmente le risque d’hyperactivité, d’angoisses, de dépression et de mauvais comportements. Une autre établit que le le niveau de cortisol, marqueur de stress est plus élevé en garderie, ce qui réduit le développement des zones du cerveau impliquées dans la stabilité émotionnelle, augmente le risque d’obésité et de cancer, conduit à des comportements agressifs et à des problèmes relationnels (lien) .  Une troisième montre aussi des différences dans la structure du cerveau liées à l’attachement à la mère, à sa présence pendant les premières années (lien) . 

Je tombe encore sur une recherche qui, pour sa part, montre que les interactions avec le père sont importantes. Un enfant qui partage une activité ( joue avec un jouet) régulièrement avec son père à l’âge de deux ans s’exprime mieux à l’âge de trois ans (lien). Ce même effet est observé lors du jeu avec une éducatrice.

Je n’ai pas fait parcouru tous les articles à ce sujet, il sont très nombreux, et je n’ai pas tellement le temps ces jours-ci, je cours dans tous les sens avec des flyers ‘oui pour la loi climat’.  Il reste que le grand psychiatre français Cyrulnik, expert du domaine dit qu’une bonne relation avec la mère pendant les deux ou trois  premières années est importante pour la formation d’une personnalité épanouie. Il parle précisément de la mère.  Il faudrait peut-être faire une nouvelle étude, constituée de familles de pères au foyer, de très bons pères, pour vérifier si leur présence apporte une sécurité équivalente.  Dans le cas de couples lesbiens, la mère reconnue par l’enfant est celle qui l’a porté pendant la grossesse, une  connection particulière se crée.  Cette importante période d’attachement va jusqu’à l’âge de trois ans, après l’autonomie se développe.    

Si je poursuis la comparaison avec les animaux, en général les femelles veulent s’occuper de leurs petits et les mâles ne le font pas. Cela peut recouvrir un fonctionnement biologique, ces envies indiqueraient des talents différents et la personne qui veut être avec l’enfant pourrait ensuite déployer des capacités innées dans ce domaine. Un enfant qui veut marcher ou courir  le sait ensuite spontanément, sans cours, et de même une femme qui veut s’occuper de son enfant saura le faire. Il est possible que plusieurs comportements soient codés dans nos gènes, qu’ils viennent spontanément aux mères face au bébé. Cela dit, l’autre personne peut évidemment adopter des règles d’éducation équivalentes. 

Je trouve que nous avons aujourd’hui des carrières, des fortunes, des réputations  mais nous ne nous offrons plus les conditions de vie que nous assurons à nos animaux domestiques  ou qui sont nécessaires pour l’ouverture d’un zoo (alimentation, calme, sommeil, promenade, affection). L’absence de liberté de mouvement et de gestion de son temps, et la séparation du petit de la mère constituent les principales différences. Personnellement, j’estime que la présence de la mère auprès du bébé les trois premières années fait partie des besoins essentiels de l’être humain. Le monde du travail devrait permettre un développement optimal de l’enfant, par des encouragements financiers ou des facilités d’embauche.