La Nouvelle-Zélande est déjà confrontée au changement climatique

Les inondations

En janvier 2023 la Nouvelle-Zélande a subi des fortes pluies.  L’océan alentour était touché par une vague de chaleur marine qui a élevé sa température bien au-dessus des normales.  Un mois de pluies sans précédent a provoqué quelques inondations. Puis le 27 janvier,  la plus grande ville de Nouvelle-Zélande,  Auckland était frappée par les flots à un niveau exceptionnel dans l’histoire du pays (Guardian, Wikipédia).

En février , le Cyclone Gabrielle a porté les destructions à un niveau supérieur. Il a dévasté le Nord de la Nouvelle-Zélande et touché Vanuatu et l’Australie.

A Vanuatu, les pluies torrentielles ont déclenché des glissements de terrain, contaminé l’eau potable et détruit les champs.

En Nouvelle-Zélande, des milliers de maisons ont été inondées ou sapées, les toits des bâtiments arrachés par le vent et de nombreux glissements de terrain ont paralysé l’île Nord. Des milliers de personnes ont été évacuées, d’autres ont fui sur les toits de leurs maisons et des glissements de terrain ont détruit les routes. Les flots charriaient d’immenses troncs arrachés qui rasaient la forêt et tout le reste sur leur passage.  Un état d’urgence national a été déclaré. Le gouvernement a déclaré qu’il s’agissait d’un événement sans précédent en Nouvelle-Zélande (guardian).

Les causes climatiques

Le cyclone s’est formé au-dessus de la mer de Coral dont la température dépassait 30°C, après trois années de la Nina qui favorisent ce type de phénomènes dans cette région. Il a déversé l’équivalent de mois de pluie en un seul jour. Il s’agissait d’un événement sans précédent, de la plus grande catastrophe du siècle dans ce pays (nzherald).

Selon l’article actuel de World Weather Attribution, les études d’attribution au changement climatique ont relevé que les précipitations étaient extrêmement abondantes, et qu’elles ont touché des régions montagneuses vulnérables aux inondations. Les modèles climatiques prévoient une exacerbation des pluies intenses d’environ 30% à l’heure actuelle, ainsi qu’un accroissement futur, ce qui rend les inondations plus probables.  Cependant, les modèles n’anticipaient pas le déluge qui s’est déversé sur la région, les mesures des stations météorologiques montrent des changements plus importants que ceux prévus par les modèles (WWA). Cela pourrait alors être un phénomène exceptionnel, isolé, ou alors les conséquences du changement climatique sont plus importantes que prévu. Cette dernière explication s’est révélée vraie dans de nombreux endroits dans le monde, le GIEC et l’ONU disent que les effets sont plus graves que prévu. Si c’est le cas, ils pourraient bien s’amplifier aussi plus vite.

Selon le climatologue Kevin Trenberth, les pluies inhabituellement intenses sont dues au réchauffement de l’océan, dont la température était de 3°C au-dessus de la normale.  Des telles vagues de chaleur marines ont aussi causé les inondations du Pakistan en été 2022, ainsi que celles de Californie en janvier.  Ses travaux confirment que les températures des océans changent à cause du réchauffement global (publi). Il a aussi observé que les régions humides le deviennent plus, la pluie s’y accroît. Il souligne aussi que des précipitations de 10% plus importantes suffisent pour déborder les aménagements existants et pour causer des dégâts (Trenberth).

Dégâts et solutions

Ce cyclone a causé les destructions le plus coûteuses de l’hémisphère Sud, estimées à plus de huit milliards de dollars américains.  Bien sûr, de nombreuses maisons individuelles ont été sapées par les flots. La majorité, 70% , appartenait à des indigènes maoris. Ceux-ci ont relevé que les événements météorologiques deviennent de plus en plus cataclysmiques et qu’ils devront quitter leurs terres pour éviter de disparaître dans les tempêtes. Ils ont invoqué l’aide de l’ONU. Les Maoris estiment que leurs droits ne sont pas respectés. Ils besoin de plus de financement et de plus de liberté pour choisir de nouvelles terres et y fonder des agglomérations durables.

L’adaptation au changement climatique dans ce pays devrait inclure des cas de retraite organisée, où les communautés et les biens sujets aux aléas sont déplacés.  Elle est en retard, certains subissent déjà des catastrophes climatiques. Le leader du parti Vert Nouveau-Zélandais appelait récemment à accélérer l’adaptation, à dépasser les clivages des partis politiques pour réagir face à ces dangers qui les dépassent (lien). Le gouvernement a alloué environ trois-quarts de milliard de dollars américains dans la réparation des routes, des ponts et des écoles pour permettre au pays de reprendre les activités normales.

Récemment, la route côtière Napier -Wairoa était remise en service, trois mois après sa destruction par le Cyclone Gabrielle (lien). Mais la semaine passée, la métropole d’Auckland était de nouveau inondée, et un état d’urgence a été déclaré.

Je dirais que les Maoris ont raison. Ils ont bien compris ce que l’avenir nous réserve.  Les catastrophes se répéteront, s’amplifieront et ils ont raison de quitter les zones menacées pour des lieux plus sûrs. Les côtes des océans sont menacées partout et les vallées de montagne suisses pourraient rencontrer les mêmes problèmes.

Les canicules des dernières années ont aussi eu des graves conséquences sur les écosystèmes de Nouvelle-Zélande. Elles ont apporté des vagues de chaleur marine et fait fondre la moitié des glaces des Alpes du Sud depuis 1950. Historiquement, l’eau atteignait de telles températures une fois en quelques centaines d’années, mais maintenant ces extrêmes se sont succédés plusieurs fois en quelques années.  Les petits penguins korora ont souffert de ces changements. Ils ne peuvent pas s’alimenter dans ces conditions nouvelles et succombent à la faim, ce qui a entraîné une forte mortalité lors des années El Nina et des vagues de chaleur marine précédentes. Des millions d’éponges sur les côtes ont blanchi, ce qui signifie une très grave maladie, ou la mort de ces animaux (Victoria U).     Les températures très élevées de l’océan en 2023 pourraient bien causer plus de pertes dans ces écosystèmes.

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

5 réponses à “La Nouvelle-Zélande est déjà confrontée au changement climatique

    1. Je sais que 1) les pluies intenses qui augmentent avec le réchauffement climatique favorisent les glissements de terrain, en Nouvelle -Zélande ils en ont justement eu plusieurs, en Californie 600 lors des inondations, Au Sri Lanka une centaine aussi lors de pluies intenses. Ce sont surtout des petits glissements de terrain de terre en surface.
      2) Cet article de la rts mentionne que la montagne bouge de plus en plus vite au cours de l’ère du réchauffement https://www.rts.ch/info/regions/autres-cantons/11883600-menace-par-la-montagne-un-village-grison-risque-de-disparaitre.html
      Ces deux points indiquent que le glissement pourrait être dû au climat. A plusieurs endroits, la montagne dégèle, il y a de l’eau qui s’infiltre et fait glisser plusieurs couches.
      En général, les vallées de montagne sont très menacées, plusieurs devront être évacuées.
      3) Le climat n’est pas une idéologie. L’utilisation ce terme nie les faits observés.
      4) Là au début de l’émission Einstein un spécialiste dit que les pluies intenses augmentent le glissement : https://www.rts.ch/play/tv/einstein/video/emission-101–un-village-sur-la-mauvaise-pente?urn=urn:rts:video:11835118

    2. Je vois aussi une interview rts du géologue cantonal valaisan Mayoraz qui dit que le glissement de terrain de Brienz n’est pas dû au réchauffement parce qu’il n’y avait pas de permafrost. Par contre, le géologue dans l’émission Einstein dit que ce n’est pas lié au permafrost mais à des pluies plus intenses. Il me semble que Mayoraz n’a pas inclus ce deuxième point dans sa réflexion. Il est peut-être plus spécialisé dans les risques immédiats, dans la prévision d’évacuations, ce qu’il fait bien, et non pas dans l’étude des causes. Ce serait mieux de demander à un professeur d’université, une vraie étude scientifique prend une année de travail d’env. 3 personnes. Nous savons qu’à cause du réchauffement il y aura des pluies torrentielles qui causeront plus de glissements de terrain dans les montagnes.

  1. Merci, Dorotea, pour ce très intéressant article sur l’hémisphère sud. Je n’avais aucune idée de l’ampleur des problèmes auxquels sont confrontés les populations exposées aux intempéries. C”est juste impressionnant: que vont faire tous ces peuples domiciliés sur des îles ou des côtes au raz des flots …. cela ne préoccupe apparemment pas grand monde…
    Il faut être soi-même dans l’angoisse à se demander à chaque tempête “est-ce que ma maison va tenir?” pour comprendre cette situation…
    J’espère – et je pense que je ne suis pas la seule – , que vous allez pouvoir continuer votre blog malgré les réticences (si j’ai bien compris…? ) du Temps.
    Good luck !

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