Débranchons le système, ou mettons-le sur des bons rails

Injections de réanimation

Le 17 septembre, le gouvernement américain a injecté des sommes importantes dans le système financier. Les gouvernements européens le font depuis des années. Selon certains, c’est une tentative de masquer la crise qui perdure depuis 2008. Si je comprends bien, de nombreuses entreprises prennent des crédits, se lancent dans la production ou dans la vente du millionième gadget, et ne vendent pas assez de leurs produits.

Dans l’industrie américaine, la production et l’utilisation des capacités sont en baisse depuis fin 2018 (the Economist).  Une très grande partie d’objets acquis aux Etats-Unis sont fabriqués en Chine. Ce pays prête de grandes sommes aux Etats-Unis pour que les Américains leur achètent leurs produits et creusent leur dette. Ce système étonnant existe depuis des années, et ils sont maintenant très endettés.

Surproduction d’objets inutiles

La production et le transport de ces objets provoquent des émissions de CO2 qui augmentent les inondations, les ouragans, les vagues de chaleur, les grêles, la foudre, les glissements de terrain…  Ainsi, ils mènent à la destruction de nos villes et de nos récoltes et mettent nos vies en danger.

Les Etats-Unis ne semblent pas du tout favoriser une production nationale ces dernières années.  Mais le problème climatique est la surproduction au niveau planétaire.

Il serait plus écologique et plus intelligent de donner un revenu minimum aux employés des usines inutiles que d’investir pour maintenir une production inutile. Un salaire pour services écologiques, plantation d’arbres ou isolation de bâtiments, tel que proposé par le Green New Deal ou le Pacte Finance-Climat, est aussi une excellente idée.

En réalité l’Etat d’urgence planétaire devrait inclure la fermeture de la plupart d’usines et de magasins, du 90% qui produisent des biens autres que l’alimentation. Les magasins pourraient être ouverts en alternance un jour par semaine, le lundi dans un quartier, le mardi dans un autre, cela suffirait encore à satisfaire presque toutes nos envies et les stocks actuels d’objets existant sur Terre suffiraient pour des années. Les constructions, très polluantes, devraient être très fortement limitées. 

Nous pourrions aussi interdire l’importation de biens causant une émission de CO2 lors de leur production ou de leur transport.

Plus délicatement, les gouvernements pourraient cesser d’injecter de l’argent dans un système basé sur l’objectif de croissance, de produire et d’acheter toujours plus d’objets polluants, qui ne fonctionne plus.

Ils pourraient aussi maintenir à flot les banques et les entreprises à condition expresse qu’ils participent au développement des produits non polluants et ne nuisant pas à nos conditions de vie. Actuellement, ils financent activement la destruction de la Planète et mettent la vie de leur citoyens en danger pour garder la façade.

Il est minuit moins cinq et il nous reste peu de temps pour sauver le Monde.  Cela doit devenir la priorité absolue de nos gouvernements.

 

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

7 réponses à “Débranchons le système, ou mettons-le sur des bons rails

  1. Je partage votre scepticisme sur les bienfaits des injections de liquidité dans le système financier. A priori, pour ce qu’il est possible d’en comprendre, cela semble aller à revers du bon sens pour la raison suivante:
    La crise financière de 2008 est le résultat d’une titrisation des dettes et de la destruction des biens garantissant ces dettes. En clair, les banques créent de la monnaie en émettant des dettes. Ne pouvant garantir toutes les dettes qu’elles ont émises, elles les ont vendues sous forme de titres. Lorsqu’une telle production de monnaie ne correspond pas à une extension de l’économie réelle, cela s’appelle une bulle spéculative. Lorsque la bulle éclate, il y a destruction de cette monnaie virtuelle et le problème s’en trouve réglé. Dans le cas de la crise de 2008, cela aurait signifié la mise en faillite des banques, ce qui n’a pas été possible. Donc, la remise à zéro des compteurs n’a pas été entièrement effectuée. Les Etats ont soutenu le secteur financier en s’endettant ce qui ne résout rien. Les sacrifices à consentir pour résorber cette crise sont si importants qu’aucun gouvernement ne peut prendre une telle décision. Pour mémoire, la crise de 1929 n’a commencé à se résorber qu’avec le New Deal, mais ce n’est que la guerre mondiale qui a véritablement permis de rebâtir un système financier sur des bases saines.
    Faudra-t-il passer par une économie de guerre pour effectuer ce New Deal tout en reconstruisant une économie compatible avec l’environnement? Vous voyez bien que cela ne pourra se faire que malgré nos gouvernants. Mais si l’on prend au sérieux les analyses faites sur le dérèglement climatique, cette nécessité semble tout simplement évidente.

    1. Bonjour, certes, reconstruire une économie compatible avec l’environnement semble bien logique mais c’est tout de même utopique de penser ainsi. Je m’explique: Je ne crois pas que les dirigeants actuels des pays fortement industrialisés pensent à une telle réforme, au fond si majeure. Ils veulent plutôt tous conserver le statut quo actuel malgré que le climat se dérègle graduellement sous leurs yeux. Il faudrait être aveugle et sourd pour ne pas réaliser qu’il n’y a pas de volonté réelle de combattre le réchauffement climatique de la part des gouvernants. Les marches mondiales pour le climat et Instinction Rébellion n’y changeront rien, puisque les gouvernements sont élus prioritairement pour gouverner et créer de la croissance économique avant tout !!! Comme on le sait tous, en 2008, il y avait une grave crise économique mondiale et on parlait aussi déjà de la crise climatique qui s’accentuait, et pourtant hélas, aucun pays industrialisé n’a adopté une économie compatible avec l’environnement en sortant de cette grave crise économique. A mon avis, sera pareil au sortir de la prochaine récession économique.

  2. bonjour; ce 1% de la population mondiale possédant presque toutes les richesses du monde est sans intelligence sinon de faire perdurer un système économique; ces gens ont sans doute quelque capacités intellectuelles puisqu’ils sont capables de faire tuer des populations presqu’entières pour le seul profit de leurs affaires, sans pour autant entrevoir l’avenir qu’ils laissent aux générations suivantes, ne faisant là qu’imiter là leurs prédécesseurs, et surtout en étant incapables d’ouverture d’esprit vis à vis de la lutte pour la sauvegarde du climat, invectivant la toute jeune femme, qu’est la suédoise Gréta Thinberg, plutôt que d’écouter ce qu’elle leur dit, en porte parole d’un courant de pensé désormais mondial ! leur peur de perdre leurs acquis les rend bornés, n’imaginant même pas qu’un autre monde est possible, où ils auront leur place en découvrant les valeurs que sont la solidarité, par exemple, tant pratiquée par les jeunes générations;

    1. @Serot Benoit : comme j’ai commenté pour l’article, j’ai une lecture un peu différente de la vôtre des écarts de richesse. Les 1% les plus riches sont les grands gagnants de la mondialisation, cette loterie capitaliste (assez infernale). Je ne pense que pas ce soit les principaux “coupables”, même si les méthodes de beaucoup d’entre eux sont à nos yeux au moins incompréhensibles, sinon immorales. Selon moi, la coupable, c’est l’humanité. Pour faire court, si Zuckerberg est archi-milliardaire, c’est d’une part parce que 2 ou 3 milliards d’individus utilisent facebook et donnent leur argent (plus ou moins sans le savoir, mais inconsciemment ils adhèrent) contre ce service, et d’autre part parce que les riches épargnants (du monde entier) achètent, via les fonds financiers, l’action facebook en bourse parce qu’elle rapporte de l’argent (cercle “vertueux”, ou vicieux, ça plait donc tout le monde achète). Quand les gens adhèrent à un concept mondialisé, que ce soit service ou MP (pétrole), ça rend quelques individus très riches. C’est une “inféodisation” parfaitement consentie. On est d’accord que le marketing et le battage mondialisé sur ces concepts participent à cela, mais tout le monde, les gens, les publicitaires, les médias, rentrent à pied joint dans le système. Les riches ne sont pour moi pas la cause du problème. La cause du problème, c’est l’humanité, ce qu’elle a fait de la planète, la morale qu’elle a abandonné, contre le plaisir facile. Il ne faut à mon avis pas rêver, la solidarité est avant tout l’arme des pauvres. Je pense que la pauvreté et plus généralement les épreuves rendent solidaires. Dans une société riche, les gens se replient sur soi et profitent. Nos sociétés sont riches du pétrole et des MP, c’est le problème. Peut-on sciemment et volontairement appauvrir nos sociétés ? C’est probablement difficile à faire dans le système capitaliste, et les alternatives sont trop “hasardeuses” et peu enviables pour la majorité. Le problème n’est pas facile à résoudre, il aurait fallu s’y attaquer depuis des décennies, voire des siècles (certains penseurs avaient vu le problème il y a 200 ans…).

  3. Bravo d’avoir écrit ce que les politiques « verts » n’osent pas aborder, à savoir ; se rendre à l’évidence qu’il y aura des dizaines de millions de chômeurs supplémentaires si le problème climatique est pris au sérieux, et avec détermination pour le résoudre. Ceux qui ne mourront pas asphyxier par le CO2 s’entretueraient pour manger, se soigner et se chauffer. Le revenu minimal garanti n’a pas vocation à remplacer la vie active et lucrative.

  4. Je partage tout à fait votre avis, mais attention à quelques points. La position des BC (banques centrales) et gouvernement est d’éviter le chaos. Les injections de liquidité depuis 2008 ont surtout financé les prêts aux états, donc aux personnes, et aux entreprises, pas aux banques (qui sont des intermédiaires). En 2008 en France, l’Etat a prêté aux grandes banques à court terme pour éviter la crise de liquidité (panique des marchés), mais s’est fait remboursé avec intérêt. Contrairement à ce qui se dit, l’Etat a *gagné* de l’argent sur les grandes banques. Sauf sur Dexia, banque qui prêtait aux collectivités (communes), qui a été démantelée et qui a coûté quelques Milliards d’euro aux contribuables. Conclusion : de mon point de vue ce sont surtout les états qui profitent des QE, pas les banques (le mécanisme de prêt doit passer par les banques, les BC n’ont ou n’avaient pas le droit d’acheter directement des émissions d’Etats). Les bulles spéculatives concernent autant les particuliers (immobilier) que les entreprises, mais je ne pense pas que ce soit le problème. C’est réellement un problème de croissance. Le problème est je pense légèrement différent de celui que vous décrivez : les politiques SAVENT qu’une politique qui s’attaque au climat et à la biodiversité est (fortement) récessive, au moins à court terme (planter des arbres ne remplacera pas la fabrication, le transport, la vente ad nauseam de biens éphémères) et causera une grave crise financière et économique. La formule du journaliste à Haroun Tazieff à la fin des années 70 résonnent encore aujourd’hui : “mais vous êtes en train de paniquer la population !” La finance est basée sur la confiance des investisseurs (en la croissance), donc des consommateurs. Si les consommateurs ne consomment plus, c’est l’effondrement du système. Ce que redoute plus que tous les financiers, certes, les politiques, certes, mais surtout le peuple ! Je fais partie de ceux, peut-être comme vous, qui pensent que cette remise en cause du capitalisme, donc cet effondrement, est préférable à la fuite en avant (vers des limites qui causeront à mon avis un effondrement au moins aussi brutal, avec en plus une planète bien mal en point et des perspectives d’avenir assombries pour des siècles). Le principal frein à cette remise en cause du système, ce ne sont finalement pas les banques ou les politiques, mais les “gens”. Les collapsologues disent qu’il faut accompagner la décroissance et la crise, de toute façon inévitable. Qu’une crise maitrisée et acceptée sera mieux qu’une crise climatique, écologique et économique. Je suis bien d’accord ! Mais qui est là pour écouter/croire les scientifiques ? Qui peut assurer qu’il y aura effondrement si le système perdure ? (les gens ont une pensée magique, que quelque chose finira par sauver la planète et l’économie). Des climato-écolo-sceptique qui prétendent que les écologistes sont catastrophistes aux gens peu informés et méfiants qui ne souhaitent qu’une hausse de leur pouvoir d’achat, voyez-vous l’immense défi en court ? Seules les plus jeunes générations pourront un jour changer ce que les (jeunes) adultes addicts à l’énergie et aux matière premières pas chères perpétuent. Aujourd’hui, parmi les jeunes (>10 ans) autour de moi, je pense que la plupart ne sont pas prêt à refuser le luxe dans lequel ils ont été élevés. J’élève mes enfants dans le respect de l’environnement, les activités bas-carbone, la science, la patience etc, mais c’est très exigeant (beaucoup plus que les jeux videos et les gadgets dont nous sommes inondés, et qui sont fait pour plaire aux humains !). Je n’ai pas l’impression que ce soit le mode de vie de tous les jeunes ! Cela se comprend, si l’humanité en est arrivée là, c’est que ça lui plat. La vie consiste à la base en une conquête du pouvoir, de la richesse, des plaisirs. Je pense qu’il y a une grande question de morale et d’éducation (éducation au sens des choses, aux limites et au respect de la nature), mais qui souhaite transmettre ce message ? Qui peut le recevoir ? Au prix de tels renoncements aux plaisirs immédiats… Les ingénieurs ont utilisé la science pour rendre la vie facile aux hommes, je crois qu’hélas cela condamne la planète. Je suis très pessimiste !

  5. Je partage l’avis que tout le monde à joyeusement et sérieusement participé à la dégradation de nos conditions de vie et à la menace de notre propre extinction.

    Prenons l’avenir avec humour et optimisme. La Vie un phénomène ingénieux et incroyablement drôle !

    Pensez à tous ces milliardaires qui se sont fait cryogéniser sans penser une seule minute au réchauffement climatique !

    Et ce Karl MARX faisant la critique du système de production comme conditionnant l’histoire et énonçant prolétaires de tous pays unissez-vous, avait encore plus raison qu’il ne le croyait !

    Mais aucun, pas plus que nous jusqu’aux années 70, n’a pensé, le pétole, la machine, les problèmes matériels que notre propre confort engendre ni de la difficulté sociale à revenir à des situations viables !

    La roue de la Vie continuera à tourner pour ceux qui sauront s’en tenir aux réalités qui s’imposeront alors (et qui s’investiront dans ce qui ne peut pas disparaître et ne peut que se renforcer à ce moment là); les autres vivront la Chute de l’Eden, péniblement, tenaillés par la faim et la maladie, et peut-être quelques déchirements épisodiques entre communautés.

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