Macron et l’abolition des partis politiques

En 1942, la philosophe et mystique Simone Weil rédigeait une Note Générale sur l’Abolition des Partis Politiques (*). Elle partait de l’observation du « free vote » concédé dans certaines rares circonstances par les dirigeants des partis politiques des pays de tradition anglo-saxonne aux députés de leur propre parti. Elle en tirait donc comme conclusion que, hormis ces circonstances, souvent liées à des questions de société, les députés n’étaient pas libres mais au contraire tenus de suivre les consignes émanant des « whips », les chefs de groupe, ceux-là mêmes qui brandissent le fouet.

Weil prônait donc un système où les députés ne seraient tenus par aucun parti mais au contraire voteraient au cas par cas sur les différents sujets proposés à l’assemblée parlementaire en fonction des engagements pris envers leurs électeurs. La vraie démocratie était à ce prix, estimait-elle.

A la connaissance de La Ligne Claire, il n’existe pas de pays où le système politique avancé par Simone Weil ait jamais été mis en œuvre. En général, la vie politique s’organise par partis, les électeurs votent en fonction des programmes mis en avant par ces partis et le ou les partis gagnants sont invités à former le gouvernement qui s’appuiera sur ces mêmes partis.

On peut, il est vrai, reconnaître un certain mérite à l’exercice des partis politiques, celui de simplifier le débat et de réduire les opinions de plusieurs centaines de députés à une demi-douzaine ou une douzaine de programmes. Cependant, La Ligne Claire juge que cet argument avait davantage de poids au XIXe siècle, lorsque s’est mis en place la démocratie parlementaire, que de nos jours où les opinions et informations circulent librement sur internet.

Or, dans la foulée de l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence, se pose la question de la constitution d’une majorité à l’Assemblée Nationale lors des élections législatives prochaines. Il se peut donc que, soit par nécessité, soit par dessein, on assiste en France à l’émergence d’un système politique où les élus seront enfin comptables de leurs électeurs sur chacun des sujets sur lesquels ils seront amenés à voter. La Ligne Claire l’appelle de ses vœux.

(*) Soulignons aussi la traduction en anglais qu’en a faite Simon Leys, un des rares auteurs a écrire et être publié dans une langue autre que sa langue maternelle. Joseph Conrad en était un autre.

Dominique de la Barre

Dominique de la Barre est un Belge de l'étranger naturalisé suisse, amateur d'histoire et du patrimoine culturel européen, attaché aux questions liées à la transmission.

2 réponses à “Macron et l’abolition des partis politiques

  1. on peut très bien garder les partis politiques tout en changeant le système électoral par loterie:
    les candidats devraient être certifiés comme n’importe quel professionnel et choisis au hasard pour siéger dans un parlement. Ensuite, régulièrement , le couperet populaire éliminerait les élus les moins engagés , peut-être 50% tous les 4 ans. De même, ceux ou celles qui auront échappés à l’élimination au moins deux fois pourraient se présenter au gouvernement.
    Cela éviterait les magouilles partisanes et mettraient en valeur les plus capables.
    On aurait en tout cas plus de chance qu’avec les systèmes présents qui permettent de mettre au pouvoir des Trump & Co !!!

  2. Le système d’Hubert Giot me paraît très intéressant.

    La seule question qui se pose est celle-ci: par qui, comment et sur quels critères, se ferait la “certification”? C’est là le hic. Si le tri est fait par des porte-paroles des loges, ou par des diplômés ès sciences politiques gavés au politiquement correct, bonjour les dégâts.

    Je propose une autre réforme, un peu dans l même esprit: Suppression pure et simple du parlement. Les citoyens débattent librement et proposent des lois rédigées en termes généraux, qui sont soumises au référendum obligatoire. Les propositions de loi qui sont acceptées sont peaufinées – dans l’esprit des initiants – par une commission mixte composée des initiants et d’experts de l’administration. Les textes peaufinés sont proposés au peuple une deuxième fois. S’ils sont acceptés ils entrent en vigueur, sinon on les repeaufine et on les repropose au peuple, jusqu’à qu’ils soient acceptés. On pourrait aussi permettre aux initiants de proposer des textes entièrement rédigés: une possibilité intéressante qu’avait retenue la constitution de 1999 et que les partis politiques, sans doute pour préserver leur pouvoir, nous ont proposé d’abandonner, ce que nous avons bêtement accepté. Pour les propositions de loi entièrement rédigées, un seul vote populaire suffira à les adopter ou refuser définitivement.

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