Le 24 février 2022 apparaitra comme l’acte de naissance des empires climato-fascistes. Ces empires ne nient pas la réalité du changement climatique en cours. Ils ne cherchent pas non plus à l’enrayer. Ils y voient bien plutôt une opportunité pour bousculer à leur avantage l’ordre, et plus exactement le désordre international, quitte à l’anticiper. Climato-sceptiques, le sont en revanche de facto les sociétés libérales : tout en reconnaissant le défi climatique, elles peinent à sortir de leur addiction aux hydrocarbures. Les cinq années écoulées du gouvernement Macron sont probantes à cet égard : de l’épisode populaire des Gilets jaunes à la condamnation du gouvernement par le Conseil d’État pour défaut climatique, l’inaction est patente. La timidité des décisions du conseil européen du 11 mars refusant l’abandon immédiat des importations d’hydrocarbures russes, alors qu’elles financent et l’armée et l’effort de guerre de ce pays, atteste encore de la difficulté à agir. Après les massacres de Boutcha, de la gare de Kramatorsk, etc., les importations de gaz russe ont toujours cours, sauf exceptions comme désormais les pays baltes, pourtant très dépendants. Nul climato-scepticisme du côté des empires, mais un climato-cynisme, à savoir une anticipation de la fragilisation des sociétés qui découlera de la déstabilisation des écosystèmes consécutive au dérèglement climatique. Concentrons-nous sur le cas russe, même s’il est d’autres candidats pour émarger à cette catégorie comme la Chine, la Turquie ou même les USA à l’avenir si la dérive trumpiste devait se poursuivre. Qu’est-ce donc, plus précisément, que le climato-fascisme ?
Revenons à l’invasion brutale de l’Ukraine par la Russie et aux raisons invoquées par les autorités russes. Un point de méthode : on ne comprend pas la guerre en cours avec ce qui précède, on rectifie bien plutôt sa compréhension antérieure de la chaîne des événements passés à partir de la guerre et des crimes qu’elle implique. La réalité de cette guerre, après six semaines, c’est la décision assumée de terroriser et d’assassiner, de détruire les conditions d’existence (eau, électricité, habitat, etc.) de tout un peuple, historiquement proche qui plus est, et ce à quelques encablures des frontières de l’Union européenne. Ajoutons qu’à la différence de ce qui s’est passé en Syrie ou ailleurs, la Russie n’intervient pas dans un désordre préalable, elle le crée, de A à Z. Nul besoin de comparer au nazisme, il s’agit d’une autre forme de nihilisme, résolument contemporaine.
A partir de ce constat, les justifications de l’invasion, qu’elles soient russes ou favorables à la Russie, sont grotesques. La dénazification de l’Ukraine si risible qu’elle paraisse est d’évidence opératoire à l’interne, pour un peuple d’une part sevré sur le plan de l’information, et entretenu d’autre part dans une atmosphère vintage depuis des décennies avec références constantes à la deuxième guerre mondiale et à la lutte contre le nazisme. La peur de l’encerclement pour un pays continental, celle de l’agression future par une Alliance militaire défensive dont on ne cesse à l’interne de décrier la faiblesse, l’OTAN, ne sont pas moins risibles. Le summum du comique étant le motif de l’humiliation du peuple russe. Si ne plus pouvoir tirer de fierté de l’écrasement constant depuis des décennies de ses voisins, si rentrer en quelque sorte dans le rang des nations est humiliant pour la Russie et les Russes, alors effectivement il n’est aucune réciprocité possible entre elle et les autres nations. Il ne reste à ces dernières d’autre horizon possible que la finlandisation, et jusqu’aux confins de l’Europe. Perspective évoquée d’ailleurs un bref moment, le 26 février, sur le site de l’Agence RIA Novosti. Curieusement, il n’est pas question de finlandisation de la Chine tout aussi limitrophe… Ne menacerait-elle pas la sécurité de la Russie ?

L’hypothèse que je défends est celle du climato-fascisme ou climato-cynisme. La Russie de Poutine est le premier empire à prendre au sérieux l’état du monde qu’est en train de façonner le dérèglement climatique, celui que vient de rendre public le 6ème rapport du groupe 2 du GIEC sur l’état de vulnérabilité des sociétés et des écosystèmes. Non bien sûr pour accélérer la décarbonation des économies – sa puissance militaire ayant été financée par nos achats de fossiles – mais pour profiter sans attendre du désordre mondial à venir, quitte à l’anticiper quelque peu en provoquant notamment par cette guerre une pénurie de blé. Autrement dit, le dérèglement climatique et l’effondrement du vivant nous précipiteraient dans un nouvel état de nature où les rapports de force doivent l’emporter, à des fins vitales, sur tout autre considération. Entrons sans complexes dans ce nouvel « ordre » international où chaque empire aura licence de massacrer à l’intérieur comme dans sa zone d’influence. Exit les droits humains et autres conventions. L’absence de condamnation chinoise devant l’ONU est éloquente. Trump a félicité Poutine. La Russie étant par ailleurs une puissance nucléaire et un membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, cette violation de toutes les règles internationales, précédée d’aucune espèce de violation antérieure, si ce n’est l’annexion de la Crimée et d’une partie du Donbass, prend un sens tout particulier : la remise en cause frontale de l’ordre qui s’est imposé à la suite de la 2ème guerre mondiale. Fragile barrière dont le renversement nous condamne à une barbarie effrénée.

Pourquoi d’abord la Russie ? L’écrasement des nations y est un sport national depuis des lustres : Pologne et massacres de Katyn, Finlande, Pays Baltes, Hongrie, Tchécoslovaquie, Afghanistan, Ossétie, Grozny et Tchétchénie, Syrie. Ce sport n’a jamais, à la différence des Allemands avec le nazisme, plongé les Russes dans la neurasthénie, mais au contraire dans un sentiment d’humiliation (sic). L’imaginaire du goulag, celui des maîtres-caïds face aux esclaves, comme la montré Françoise Thom, y a marqué la société entière ; quand bien même il est bon d’y adjoindre une pincée de supplément d’âme orthodoxe. Enfin la Russie est un des rares pays à pouvoir tirer un temps avantage du dérèglement climatique compte tenu de ses vastes étendues de terres septentrionales.
Deux remarques à cet égard. Sur une planète délabrée, la richesse économique va devoir être partiellement remisée au magasin des oubliettes. Ce qu’a compris la Russie : nain par son PIB eu égard à sa démographie et à sa superficie, mais grande puissance militaire. Dans un monde d’affrontements brutaux sur fond de lutte pour les ressources, la puissance économique passe au second plan, elle peut même constituer une fragilité. Bref retour par ailleurs sur la campagne présidentielle rythmée pendant des semaines par le thème du « grand remplacement » : thème écran diffusé par un idiot utile de Poutine, financé par un oligarque national. Il ne suffit manifestement pas de le revendiquer pour être patriote. Il conviendrait en outre de pouvoir faire preuve d’un minimum d’intelligence. Défaut d’intelligence partagé de l’autre côté de l’échiquier politique, si l’on en croit la défense récurrente et systématique de la politique internationale de Poutine par Jean-Luc Mélenchon, de la Syrie à l’Ukraine. Il n’hésite pas à affirmer, tout en condamnant l’invasion de l’Ukraine, que l’OTAN est le responsable de l’agression. Étrange retour d’une gauche prompte à sécher le sang des dictateurs, de la terreur au goulag, de Staline à Hô Chi Minh, comme si les travaux de Lefort et de Castoriadis n’avaient jamais existé. Un réflexe en l’occurrence dérisoirement apposé à des oligarques milliardaires issus des bas-fonds de la société soviétique.

Que la chose soit claire, en nous empêchant de faire front à des problèmes globaux qui exigent une coopération internationale minimale, ce fascisme climatique nous conduit tout droit à l’extinction de l’espèce. Réduire nos capacités réflexives à un couplage de notre cerveau reptilien à nos capacités de calcul nous précipite vers l’abîme. Tout se passe en effet avec cette logique impériale comme si nous incarnions ce que les biologistes nomment une impasse évolutive : une espèce dotée de capacités dont le surdéveloppement menace sa propre survie. Nos capacités cognitives surdéveloppées, détachées de nos autres aptitudes, à commencer par nos aptitudes morales et sociales, par leurs conséquences techniques, industrielles et militaires fragilisent de plus en plus nos conditions d’existence sur Terre. Il n’en va désormais ni de notre liberté, ni de notre existence, mais du lien indissoluble entre les deux. Par la concentration du pouvoir qu’elles permettent, les dictatures autorisent le pire de ce dont nous sommes humainement capables. L’idéal démocratique d’autolimitation du pouvoir est la seule barrière, certes fragile, qu’il soit possible d’opposer à cette funeste tendance. Le Contr’Un de La Boétie n’a pas pris une ride. A quoi s’ajoute que nous ne pourrons mener ce combat qu’en réduisant les inégalités, et ce pour deux raisons : ce sont les plus riches qui détruisent la planète et, ni solidarité ni victoire sans réduction des inégalités.
Article initialement publié dans AOC le 17 mars 2022 et légèrement modifié.
Les Russes voient des nazis à l’Ouest.
L’Ouest voit des fascistes en Russie.
Et si on commençait par utiliser un dictionnaire et user des bons termes ?
Bon visionnage:
https://m.youtube.com/watch?v=q5597F0CLQA
Ce sont les bons termes. “Nazi” garde son sens historique compte tenu de l’originalité de la doctrine racialiste nazie. “Fasciste” a depuis longtemps un sens bien plus large que celui attaché à ses origines historiques : est “fasciste” un régime politique qui interdit le pluralisme politique et affiche à l’interne comme à l’externe le recours sans complexe à la violence, avec des justifications idéologiques variables. Le régime Poutine est authentiquement fasciste, l’application “nazie” à l’Ukraine est aussi sérieuse que le doctrine Poutine.
Bien sûr qu’il n’y a pas de nazis en Ukraine, qui est victime d’une guerre illégale d’agression.
Et bien sûr que la Russie est gouvernée par un parti attrape-tout et belliciste. Mais pas fasciste.
Les mots ont un sens. Mal les nommer ajoute aux malheurs du monde. Dire cela n’est pas soutenir le camp des agresseurs Dire cela c’est rester objective et attachée aux faits.
Le parti Akira pense comme vous.
https://www.instagram.com/tv/CUBB3y-g1xU
Ce sont les seules.
Merci de votre commentaire. Je reprends ma réponse précédente, il n’y a pas de liberté quant à l’imposition des mots aux choses discrètes, mais une grande liberté quant à la relation entre les mots et les concepts, vieille différence chère à Pascale. Avec le qualificatif “fasciste” un usage libéré de son ancrage historique initial s’est imposé assez tôt. J’entends par là le refus des 3 principes constitutifs des démocraties libérales (assujettissement des gouvernants comme des gouvernés à la loi, respect des droits humains qu’il conviendrait d’enrichir avec les droits de l’humanité et de la nature, principe du suffrage universel avec occupation délimitée dans le temps des lieux de pouvoir), et donc le refus du pluralisme politique, le recours à la violence policière à l’interne et guerrière à l’externe. Et ce dans le cadre fondamentalement nouveau de la déstabilisation en cours des sociétés en raison du dérèglement climatique.
Monsieur, ce que vous publiez ici appelle quelques précisions: Il ne suffit pas d’alarmer les foules un jour d’élections au 1er tour dans un pays voisin en titrant avec le mot Noir, ne serait-ce sur un blog abrité par le moins mauvais quotidien suisse d’expression française, pour dorer le blason de l’écologie. L’amalgame que vous opérez – fascisme et écologie – est pour le moins anachronique. Auriez-vous l’obligeance de vous référer aux historiens Emilio Gentile et Renzo De Felice, à moins de répéter les approximations de Hannah Arendt en matière de fascisme tel qu’il est né, hélas, et a proliféré en Italie, puis en Europe? Par ailleurs, vous en appelez, légitimement, à plus d’intelligence politique et moins de consommation. Cela fait des siècles que la cause est exprimée ET entendue. Ce soir, je vous pose une question toute simple: qu’avez-vous fait pour que soit élu en France le candidat le plus proche de vos recommandations… et, pour revenir à hier matin, qu’avez-vous entrepris pour limiter l’armement de la Confédération helvétique en termes de préservation de l’humanité et des biotopes au moment même où les délires des dictateurs anéantissent tout projet raisonnable de vivre dans la dignité ? Merci de votre attention.
Pour la première partie de votre propos sur l’usage du mot “fascisme”, j’ai déjà répondu. Pour la deuxième partie j’ai fait ce que peut faire n’importe quel citoyen, avec en prime un accès à l’écrit. Pour la troisième, désolé, je ne comprends pas ce que vous voulez dire : en quoi y aurait-il des siècles qu'”intelligence politique” et “consommation moindre” sont entendues ? Nous devons pas vivre sur la même planète.
Vous écrivez:
“La dénazification de l’Ukraine si risible qu’elle paraisse est d’évidence opératoire à l’interne, pour un peuple d’une part sevré sur le plan de l’information, et entretenu d’autre part dans une atmosphère vintage depuis des décennies avec références constantes à la deuxième guerre mondiale et à la lutte contre le nazisme.”
Si la population est sevrée d’information par un pouvoir qui s’est assuré le contrôle quasi complet des media, et l’est d’autant plus qu’elle vit éloignée des centres urbains et de l’accès direct aux sources d’information, si l’opposition, fragmentée, dispersée et désorganisée, a été réduite à peau de chagrin, en revanche comment expliquez-vous qu’à une exception notoire près, celle du président de l’académie d’économie et d’administration publique (l’ENA russe), dans sa quasi unanimité le collectif des recteurs des universités russes, pourtant peu suspects d’être privé d’accès à l’information, ait lancé un appel en mars dernier pour soutenir la politique du président Poutine et son intervention en Ukraine?
Ceci ne rappelle-t-il pas l’abdication lâche des universités allemandes face à la montée du nazisme? De plus, le régime nazi étant à l’origine des lois parmi les plus développées en matière de protection des animaux et de la nature, inscrites dans le cadre de sa politique raciale – la pureté de la race dépendant de celle du biotope – l’Allemagne nazie n’était-elle pas un modèle d’écologie? Hitler, qui était aussi vegan avant la lettre, avait fait diffuser à grande échelle une carte postale le montrant en train de caresser son chien, avec ces mots: “Le Führer aime les animaux”. Il n’a pas moins ordonné le massacre systématique en masse des humains, traités comme du bétail.
Et l’élite universitaire du pays – pas seulement les trusts financiers et industriels sans l’appui desquels le petit caporal moustachu et sa clique de mercenaires prêts à vendre leur peau plus cher qu’elle ne valait ne seraient jamais arrivés au pouvoir -, a suivi et l’a laissé faire. Les universitaires russes ont leur Heidegger retourneur de veste et les industriels pro-Kremlin leur Krupp, Opel, Siemens, IG Farben and Co. Ont-il jamais été menés à rendre compte de leur complicité avec le régime?
A cet égard, le fait que les pays européens aient, comme par hasard, oublié de soumettre aux sanctions le pétrole, le gaz et le charbon russes, dont les revenus servent d’abord à financer la machine de guerre de Poutine et de sa clique, ne ressemble-t-il pas à une farce stalinienne, version occidentale?
A propos de mercenaires, Dmitri Outkine, le sinistre chef du groupe Wagner, l’officieux et encombrant fer de lance de Poutine, affiche haut et fort son idéologie nazie. Selon l’article “Groupe Wagner” de Wikipedia, “Néonazi et admirateur du Troisième Reich, Dmitri Outkine, ancien parachutiste des forces spéciales russes et ancien lieutenant-colonel du renseignement militaire, se donne comme nom de guerre “Wagner”, en hommage à Richard Wagner, le compositeur préféré d’Adolf Hitler. Une photo diffusée en 2020, montre notamment Outkine arborant des tatouages nazis.” Ceci ne le confond-il pas avec le régiment ukrainien Azov et son chef, dont le nazisme est assumé jusqu’au plan politique? Au fond, qui sont les vrais nazis?
Seule certitude: le mépris complet pour la vie humaine est égal de part et d’autre.
A contrario, Poutine accuse son homologue ukrainien Zelenski, qui n’est de loin pas un modèle de vertu, lui non plus, de nazisme, alors que celui-ci est Juif et que ses trois oncles ont été assassinés par les nazis. L’exception ne confirme-t-elle pas la règle?
Quant aux références à la Deuxième Guerre Mondiale et à la lutte contre le nazisme, dont les Russes ont payé le prix le plus fort en vies humaines, j’ai eu l’occasion d’en discuter avec un ancien combattant allemand, participant à l’Opération Barbarossa, qui me décrivait ainsi ses souvenirs du champ de bataille: “Les Russes ne comptaient pas leurs hommes. Ils les envoyaient se faire faucher devant nos mitrailleuses par vagues entières.” Il ajoutait – ce qui avait quelque peu surpris l’ingénu que j’étais alors: “Es war interessant…” (C’était intéressant…). Je ne pouvais en effet comprendre qu’on puisse trouver “intéressant” le massacre industriel et systématique de ses semblables.
Et je ne le comprends toujours pas, tout en partageant votre vision hélas trop lucide de la montée des climato-fascismes et de leurs répercussions, qui font froid dans le dos.
Je dois être resté bien naïf.
“Définition du naïf dans le monde moderne: individu qui soutient des idées qui ne rapportent rien.” – Denis de Rougemont
Merci ce votre riche commentaire. Le défaut d’information est une des conditions qui favorise l’adhésion à la politique de Poutine, mais vous avez raison, ce n’est qu’une condition. L’exemple des universités que vous donnez est aussi clair qu’affligeant.
En revanche, attention pour le nazisme : la Tierschutzgesetz et la Naturschutzgesetz n’ont pas été conçues par les nazis, ils les ont simplement trouvées et adoptées, sans en tirer d’ailleurs les conséquences, à leur arrivée. Les Nazis étaient au contraire des modernisateurs technicistes sans scrupule. Je vous renvoie là aux travaux de Johann Chapoutot et de Jeffrey Herf.
Ce que vous dites de Barbarossa avec le témoignage rapporté vous montre le mépris de la vie humaine des deux côtés. Et c’est le problème, les soviétiques ont payé au prix fort le maintien d’un régime totalitaire aussi meurtrier que le nazisme.
Triste humanité.
Merci à vous pour votre réponse. Vous avez bien sûr raison et je me suis mal exprimé. Les nazis ne sont en effet pas à l’origine des lois sur la protection des animaux et de la nature. La loi du 24 novembre 1933 promulguée par le Reich est en fait le résultat de longues concertations initiées en 1927 sous la direction du juriste Fritz Korn, sous le gouvernement de la République de Weimar. J’aurais dû m’en souvenir d’autant plus que j’avais lu le livre de Johann Chapoutot et Jeffrey Herf et d’autres ouvrages (dont les écrits que Jules Ferry a consacrés à ce thème), qui ne laissent en effet aucun doute à cet égard. Merci de me l’avoir rappelé.
Pour revenir à votre propos, que Poutine cherche à profiter de la crise climatique pour déstabiliser davantage l’Europe et, de manière générale, les régimes démocratiques et parlementaires, qu’il abhorre, n’a rien de surprenant si l’on connaît son obsession quasi pathologique d’un retour anachronique à une “Grande Russie” fantôme de l’époque tsariste. Son admiration pour Nicolas 1er, dont il garde le portrait dans l’antichambre de son bureau du Kremlin, n’est-elle pas révélatrice à cet égard? La politique expansionniste du dernier des autocrates, responsable du désastre de la guerre de Crimée (1853-56) n’avait-elle pas déjà pour théâtre l’Ukraine, alors sous la botte de l’empire ottoman?
Vous faites aussi allusion au “zeste” d’orthodoxie qui viendrait se greffer, comme une rondelle de citron sur un verre de vodka, sur ce tableau déjà bien assez tragique en soi. En réalité, le facteur religieux a jusqu’ici été trop occulté dans le contexte de cette guerre insensée, à mon avis. Le rôle et l’influence du patriarche de Moscou Cyrille 1er, ancien agent du KGB comme Poutine, ne sont en particulier plus à démontrer depuis que ce saint James Bond en chasuble, amateur, entre autres, de Mercedes et d’appartements de luxe (celui qu’il occupe sur les bords de la Moskova est évalué à 3 millions de dollars), a apporté le 6 mars dernier son soutien officiel à la guerre de Poutine, qu’il qualifie de “métaphysique”.
Quant à son ouaille kagébiste, en manque idéologique depuis la chute de l’URSS, le patriarche de toutes les Russies fantômes et des oligarques dit de sa croisade contre l’Occident corrompu qu’elle est un “miracle de Dieu”. N’en-a-t-il d’ailleurs pas dit autant quand il a expliqué que le COVID-19 était aussi voulu par Dieu pour punir l’humanité de ses penchants à la surconsommation?
Après tout, Ronald Reagan (“In Go(l)d We Trust”) n’avait-il pas déjà attribué le SIDA à l’intervention divine?
Jusqu’où les délires de ces mégalomanes nous mèneront-ils?
Grand merci cher Monsieur de ces compléments !
Intéressant article même si j’aurais aimé avoir un avis qui inclus l’appropriation des ressources ukrainiennes par la Russie (qui a commencé par la Crimée et le gaz en mer noire et qui continue avec cette invasion qui semble cibler particulièrement les régions qui ont des réserves inexploitées).
Auriez-vous d’ailleurs un avis à ce sujet? J’ai trouvé quelques sources mais malheureusement c’est un sujet assez opaque et le manque de pluralité de ces dernières, bien qu’elles me paraissent faire beaucoup de sens et expliquer bien mieux l’invasion russe qu’une potentielle alliance à l’OTAN, me force à les considérer avec des pincettes… (en particulier en tenant compte du pic pétrolier russe qui aurait été atteint en 2016)
Merci de cet intéressant commentaire. Oui, manifestement, à creuser et à suivre !
Merci de m’avoir répondu. Jean-Jacques Rousseau a bien vécu au XVIIIe siècle? Si le terme “Écologie” n’existe pas encore de son temps, ses livres et principes sur la Nature ont inspiré des causes récentes, ou je me trompe? Quant au siècle dernier, le fascisme italien, tristement inauguré en 1922, il n’a pas été que militariste et répressif, il s’est tôt accompagné d’un programme de santé Mare e Montagna pour les enfants, afin que ceux-ci pussent apprendre à respirer le bon air et les valeurs du pic-nic frugal mais si bon pour la santé… Ça s’est appelé Operazione Nazionale Balilla. Je crois que nous vivons sur la même planète mais peut-être équipés d’outils méthodologiques d’appréciation différents, en terme d’histoire des concepts et d’anthropologie.
Dernière réponse. Ce que vous rapportez du fascisme italien est très intéressant, merci. Mais cela n’a rien avoir avec l’écologie et les atteintes au système-Terre. Nous sommes du côté du corps sain qui est effectivement un thème fasciste. Pour le fascisme et la nature je publierai dans quelques mois une traduction intéressante de Marco Armiero dans La Pensée écologique, revue en ligne.
Merci! Dernier commentaire aussi de mon côté: le poids des marchandises transporté dans le monde par voie maritime (90%) est de 300 tonnes par seconde. Je viens de vérifier, il existe un compteur sur les sites planetoscope et armateurs. Combien de tonnes de carburant? Un plein pour un cargo de 400m, ça coûtait avant pandémie 7mio€ ! Hausse considérable des tarifs Panama et Suez dès mars 2022. En 2021, toutes les données de la consommation sont en hausse. Je me limite et m’arrête là. Alors peut-on qualifier un régime de “fasciste” dès lors qu’un maximum de populations y adhèrent? La question ne serait-elle pas: *de combien de marchandises as-tu besoin?* entendu qu’aucune tablette ou ordinateur ne pousse dans un jardin bio de proximité? Thks for att. Over.
Merci de ces informations. Une adhésion avec une information totalement contrôlée et verrouillée me paraît sujette à caution.
Vous voulez le son du fascisme ?
Écoutez les cris de 25 millions d’habitants d’une ville qui a faim et le drone qui leur dit qu’il faut fermer les fenêtres et ne pas “chanter” 😱
https://mobile.twitter.com/patrickmadrid/status/1512600420610363394
Drone:
https://mobile.twitter.com/aliceysu/status/1511558828802068481
Et il n’est plus possible de taper Shanghai food sur les réseaux sociaux en Chine et avoir un résultat…
https://www.reuters.com/world/china/shanghai-widens-covid-testing-other-chinese-cities-impose-curbs-2022-04-08/
Une autre forme effectivement. Et comme vous le savez la Chine qui massacre ses Ouïghours est aussi la plus fidèle alliée de la Russie de Poutine.
Ce post est trompeur en faisant mine d’attaquer le régime de Poutine en réalité sa principale cible est les pays occidentaux démocratiques et libéraux.
Mais revenons sur l’accusation de fascisme climatique contre le régime de Poutine. Même si M. Bourg adapte la définition du fascisme, celle-ci “Dans son acception la plus large, le terme est employé pour qualifier l’ensemble de l’extrême droite.” (https://fr.wikipedia.org/wiki/Fascisme) ni dans ses variations historiques (Ernst Nolte: “Facisme et Totalitarisme”). Le régime russe tire sa nature dictatoriale de son passé soviétique. Sa propagande, sa justice et son armée continuent d’en utiliser les méthodes soviétiques sans aucun doute possible. Quant aux motifs de la crise climatique, l’Ukraine n’a pas d’hydrocarbure et la Russie est devenue le 1er exportateur mondial de blé avec le dérèglement climatique. C’est le seul lien ténu en le climat et la guerre d’invasion.M. Bourg est bien en peine d’en trouver d’autres dans les commentaires de ce post (voir le commentaire de Vik).
(…) La réponse est ailleurs. La 2e accusation de climato-cynisme contre les démocraties libérales parait être la véritable motivation de ce post lancé entre les deux tours de l’élection présidentielle française dont les résultats ont certainement déplu à l’ancien candidat de Génération Écologie en 2019. M. Bourg utilise une rhétorique qui fait penser à celle du philosophe de gauche Sartre avec « les salauds et les lâches ».
La motivation de ce post pourrait bien être l’élection présidentielle française et en ricochet la capacité des pays démocratiques européens à se défendre face à leur plus grave crise politique depuis 1945.
(…) : passage injurieux supprimé. Pour le reste je ne me sens pas concerné, le propos critiqué, des intentions présumées, n’étant pas le mien.