Le mental du sportif blessé

Chers lectrices et lecteurs du Temps, pour mon premier billet j’ai décidé d’évoquer la gestion mentale d’une blessure sportive.

Sportive depuis mon enfance avec un parcours allant de la danse classique au volley-ball, en passant par l’athlétisme, le ski, la gymnastique et même l’escrime durant mes années universitaires, la course à pied a toujours été un fil rouge dans ma vie quotidienne et sportive. Depuis trois ans, j’ai augmenté la distance et suis passée à la discipline que l’on appelle l’ultra-marathon (distances supérieures au marathon traditionnel de 42 km). Au mois d’octobre dernier j’ai participé à l’ultra marathon de la Voie lycienne dans le Sud de la Turquie. Durant six jours, j’ai couru 250 km en transportant mes vêtements et ma nourriture. Vous pouvez retrouver le récit de cette aventure (en anglais) sur mon blog www.runcora.com.

Pour avoir porté des chaussettes inappropriées, j’ai terminé la course… avec une fracture de fatigue ! Qui dit mauvaises chaussettes pensent immédiatement cloques. Et lorsque la course dure plusieurs jours d’affilée, les conséquences deviennent rapidement importantes. Les lésions à chaire vive ont rendu impossible la pose du pied de façon naturelle et correcte. L’articulation de la cheville a été un peu trop sollicité et crac, fracture de fatigue.

Pour la petite histoire, une fracture de fatigue n’est pas une réelle cassure mais plutôt un œdème dans l’os. Une telle blessure nécessite généralement trois à quatre mois de guérison, alors qu’une fracture réelle nécessite un mois. Je ne m’en sors donc finalement pas si mal, puisqu’il m’aura fallu trois mois pour que ma cheville soit à nouveau totalement fonctionnelle. Même si je fais du sport depuis mon plus jeune âge, j’ai été très rarement blessée : ces trois mois durant lesquels j’ai dû freiner mon activité sportive ont été une bonne opportunité de développer certaines stratégies pour revenir au sport plus rapidement sans connaître la baisse de moral que les sportifs blessés vivent en général.

J’aimerais donc aujourd’hui partager ces stratégies pour vous permettre aussi de gérer au mieux une possible période de blessure et de récupération.

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Stopper l’activité sportive. Si vous sentez une douleur, la toute première chose à faire est de vous arrêter. Imaginez que vous êtes en train de faire votre longue sortie de 30 km hebdomadaire : au douzième kilomètre, alors que vous courrez à allure modérée, une douleur surgit. Vous continuez quelques minutes, mais la douleur ne disparaît pas. Aucun autre choix que de vous arrêter, marcher et retourner chez vous. La plupart du temps, appliquer de la glace sur la partie douloureuse vous fera du bien. Ensuite, aller chez le médecin.

Beaucoup de sportifs ne veulent pas entendre les signaux émis par le corps et ne s’arrêteront pas. Continuer l’effort dans la douleur aggravera la situation. Une douleur ressentie n’est rien d’autre que le signal nerveux envoyé par un membre afin de signaler au cerveau que cette partie du corps est endommagée et doit être réparée. De la même manière que le pneu d’une voiture doit être réparé avant de pouvoir continuer, la blessure devra être soignée.

Apprenez quelle est votre blessure. Allez chez le docteur, apprenez de quoi vous souffrez et comment vous soignerez votre blessure. Ce sont généralement les orthopédistes qui sont le mieux à même de traiter les blessures dues au sport. Si possible, demandez conseil pour trouver le bon docteur. Vos amis sportifs ont eux aussi très certainement et malheureusement été victimes de blessures et ils seront de bons conseils. Une fois un docteur trouvé, écoutez-le attentivement et posez-lui toutes les questions que vous aurez. Comprendre de quoi vous souffrez et vous imaginer le plus réellement possible la blessure sont essentiels pour accepter la blessure et la guérir.

Visualisez votre guérison. Si vous souffrez d’une fracture, passez cinq ou dix minutes à visualiser la guérison de l’os. Imaginez dans votre esprit les globules rouges approvisionnant la partie endommagée de l’os pour faciliter la réparation de l’os. Il n’y a pas de preuves scientifiques garantissant l’accélération de la guérison, mais tentez l’expérience et vous pouvez être sûrs que vous vous sentirez prendre le contrôle de votre guérison et de façon générale, vous gagnerez en positivisme.

Soyez tristes. Oui. Donnez-vous le droit d’être triste. Ne refoulez pas vos sentiments. Pour un sportif, être blessé est une situation triste. Pour guérir plus rapidement, l’athlète doit accepter la blessure et vivre et ressentir ses émotions.

Ne vivez pas dans le monde du rêve et de l’utopie. Vous êtes blessé et vous devrez rester éloigner des terrains d’entraînement, renoncer à participer à plusieurs courses ou peut-être même à disputer une saison entière de championnat. Lorsque vous consultez les résultats d’une course à laquelle vous auriez dû participer, ne vous dites pas « Si j’avais pu courir, j’aurais terminé en x minutes » ou encore « Si j’avais participé, c’est clair que j’aurais terminé au troisième rang. » Utilisez plutôt votre énergie pour soigner votre blessure plutôt que spéculer sur des performances et des événements auxquels vous ne pouvez pas participer.

Gardez un rôle actif durant la guérison. Mettez la même énergie dans votre rééducation que celle que vous mettiez pour vous entraîner. Investissez-vous totalement dans votre traitement de physiothérapie. Si votre médecin vous prescrit des exercices, faites-les. Cela paraît simple, mais beaucoup de sportifs renoncent à les faire par paresse ou alors parce que par rapport à leur entraînement habituel, ces exercices paraissent faciles. Un peu comme ils ont tendance à sauter les étirements après leur entraînement. Nous ne sommes pas dans le domaine de la performance, mais dans celui de la rééducation. Oubliez votre égo et faites vos devoirs.

Passez du temps avec amis sportifs et coéquipiers. Allez assister aux courses, voir les matches. Peut-être pourrez-vous vous rendre utile d’une autre façon. Par exemple, en étant bénévole aux points de ravitaillement d’une course à pied ou responsable des médias sociaux pour votre équipe. Pour beaucoup sportifs, les coéquipiers ou leurs concurrents le temps de la course sont aussi des amis. Si vous vous éloignez du milieu sportif lorsque vous êtes blessés, vous perdez en même temps le contact avec vos amis. Or vous aurez plus que jamais besoin de soutien et d’attention durant cette phase.

Continuez de vous entraîner. Si votre blessure vous permet de continuer une partie de votre entraînement, faites-le ! Je me permets d’évoquer ici ma propre expérience : pour soigner ma fracture de fatigue au pied gauche, je devais porter une attelle sous la forme de botte. Mon médecin m’a demandé de continuer de m’entraîner en portant mon attelle. Évidemment, pas de sauts, mais j’ai pu continuer le quatre-vingts pour-cent de mon entraînement musculaire. Et pour conserver ma condition, j’ai choisi de nager. Au final, je n’ai pas seulement conserver ma condition, je l’ai améliorée et me suis rendue compte qu’ajouter de la natation à mon plan d’entraînement habituel était bénéfique. Je l’ai adapté pour pouvoir y ajouter deux sessions de natation hebdomadaires après avoir guéri de ma blessure. Bien sûr, chaque cas est différent et avant de continuer de vous entraîner lorsque vous êtes blessés, parlez-en avec votre médecin.

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Blessée, attelle au pied, l’entraînement continue.

Fixez-vous de nouveaux buts et des objectifs réalistes. Les succès que vous atteindrez durant votre période de guérison seront différents. Marcher sans béquilles sera peut-être votre première victoire. Et la seconde ne plus ressentir de douleurs. Un beau jour, vous courrez à nouveau deux kilomètres (alors que normalement votre distance d’entraînement est de 30 km). Chaque progrès sera un succès en soi et devra être fêté comme tel. Vous devrez totalement oublier vos anciens objectifs.

Et lorsque vous pourrez faire votre retour, fixez-vous alors un objectif réaliste mais qui sort du commun. Une course à l’étranger ou une randonnée sac au dos de plusieurs jours. Il ne s’agira pas seulement d’un défi sportif, mais d’une organisation qui vous occupera et apportera une motivation supplémentaire à votre entraînement.

Soyez patients. Ne brûlez pas les étapes. Il ne sert absolument à rien de vouloir recommencer deux semaines plus vite que prévu. Il est important que votre blessure soit totalement soignée avant de reprendre l’entraînement. Si vous n’attendez pas suffisamment, vous courrez le risque que votre blessure devienne chronique. Allez-y lentement, mais arrivez au but plus vite !

Utilisez ce que vous avez appris par le sport dans la vie de tous les jours. Pour être un athlète de bon niveau, vous avez depuis des années fait preuve de motivation et détermination, vous avez appris à gérer votre temps, à faire des sacrifices. Utilisez ces qualités hors du commun dans la vie de tous les jours et votre vie quotidienne.

Quoiqu’il arrive, soyez positif. La pensée positive accélère le processus de guérison et diminue la douleur émotionnelle que vous ressentez. Quand vous entrez dans une phase de négativisme, vous ralentissez le processus de guérison, vous péjorez votre moral et tout cela aboutira au fait que vous sentirez encore plus mal. C’est entre vos mains. Évitez tout simplement la pensée négative, elle n’apporte rien de bon.

En cas de besoin, demandez de l’aide. Si vous vous sentez déprimé, que vos habitudes alimentaires changent ou que vous souffrez de trouble du sommeil, demandez de l’aide de la part d’un professionnel car cela signifie que votre propre énergie n’est pas suffisante pour surmonter la douleur émotionnelle provoquée par la blessure. Avoir recours à un psychologue n’est pas un signe de faiblesse, mais plutôt de force.

Chers lectrices et lecteurs, n’oubliez pas qu’avant de gagner, d’accumuler les succès, le premier but du sport est d’être en bonne santé. Ecoutez-vous, ayez du plaisir lorsque vous faites du sport et courrez le sourire aux lèvres !

Je vous souhaite à toutes et à tous une belle fin de semaine placée sous le signe du sport.

Coraline Chapatte

Bloggeuse, spécialiste des médias sociaux, chroniqueuse pour plusieurs sites internet turcs et étrangers, coach sportive, conférencière et motivatrice.

18 réponses à “Le mental du sportif blessé

    1. Bonjour Mark,

      Merci pour votre commentaire et heureuse que vous ayez aimé l’article.

      Je vous ai envoyé un mail, l’avez-vous reçu ?

      Meilleures salutations.
      Coraline

  1. Merci Corinne !

    Souffrant moi-même d’une fracture de fatigue (péroné fissuré) depuis le 25/10/2015, il est vrai que le moral est tombé bien bas en fin d’année…

    La frustration de ne pas atteindre son objectif (marathon de La Rochelle) était grande.
    Mais comme tu le dis si bien, il faut savoir prendre son mal en patience désormais.

    L’utilisation de ton attelle m’a interpellé. Où se situait ta “fracture” ?

    Après 5 mois, je ressens toujours une douleur à la cheville et désormais au dessus du pied. Je dois me rendre chez mon médecin du sport demain pour une consultation.
    Est ce que toutes tes douleurs ont disparu après tes 3 mois de repos ?

    Je m’excuse d’avance pour toutes ces questions mais je n’ai pas l’impression de voir le bout du tunnel 🙁

    Bonne continuation.

    1. Bonjour Willy,

      Tout d’abord je souhaite que vous vous remettiez le plus rapidement possible. Comme je le disais dans mon article, il vaut mieux attendre 2 ou 3 semaines de trop que de recommencer rapidement.

      Ma fracture se situait sur le coup du pied à l’extérieur (os cuboïde).

      Mes douleurs ont disparu assez rapidement, je dirais après 2 mois environ, mais chaque fracture et chaque organisme est différent. J’ai la chance d’être suivi par un médecin qui est lui-même un sportif et qui me pousse à recommencer l’exercice dans la mesure du possible rapidement.

      Le fait de penser positivement et de visualise ma guérison m’a beaucoup aidé.

      Je vous souhaite un retour plus fort que vous l’étiez avant votre blessure.
      Meilleures salutations.
      Coraline

  2. Actuellement en convalescence (alitée) après un grave accident de ski, je lis votre billet avec bcp d’intérêt. La dimension mentale est tellement importante dans le processus de guérison… Je suis de nature optimiste mais j’avoue ne pas avoir encore récupéré mentalement. Je vais suivre vos conseils…

    1. Bonjour Catherine,

      Je vous souhaite tout d’abord la meilleure convalescence possible et espère que vous êtes bien entourée.

      Oui la dimension mentale est très importante. Pour moi cela m’a beaucoup aidé. Laisser exprimer les émotions, visualiser la guérison, se réjouir de chaque petit progrès.

      Je vous souhaite beaucoup de courage et vous envoie plein de belle énergie.

      Coraline

  3. Bonjour, en 2015, me suis fixé un pari un peu fou / courir pour le Téléthon et de ce fait, parti-ciper à mon 1er marathon puis un 2ème / total des km pour le Téléthon : 220km. L’entraîne-ment s’est déroulé avec quelques douleurs en début d’année et arrive le jour J / marathon de Genève. Super pour une 1ère – pas trop de douleur. Mais le lendemain, un simple éternue-ment me bloque au sol. Le nerf sciatique s’est réveillé. Commence une guérison d’environ 2 mois. Reprise de l’entraînement 1 mois 1/2 après mais avec moins de sensations. J’ai pu par-ticiper à 2 semi-marathon et arrive le 2ème marathon (Nice-Canes) tout s’est bien déroulé. Mais en décembre, commence les douleurs au dos et ce qui arrivera – arrivera, une hernie discale pour la nuit de la St. Sylvestre. Arrêt total durant 1 mois 1/2 – j’ai repris l’entrainement mi-février en trottinant et là, je ressens que la motivation et le physique revient. J’ai dû lors de ma convalescence renoncer au Marathon de Genève alors que l’inscription a été faite et par-ticiper au 10km à la place. Il est vrai que durant la guérison, le moral en prend un coup. Mais je garde espoir de participer d’ici 1 à 2 ans à un autre marathon.

    1. Bonjour Pascal,

      Tout d’abord, je vous souhaite un rétablissement le plus rapide possible mais comme je le disais, il ne faut pas brusquer les étapes. Et revoir les objectifs fait également partie du retour à la compétition (10 km au lieu d’un marathon). Après discussion avec votre docteur, essayez peut-être de varier les sports (natation, vélo, marche, etc.) pour faire travailler les muscles de différentes manières.

      Bonne chance!

  4. L’astuce est de prendre une ou deux pointure(s) de plus afin d’insérer de deux semelles de ski dans les runnings pour bien absorber tous les chocs.
    Vraiment c’est important car les semelles de standards ne valent rien.
    Je trouve que les trails sont top car ils sont renforcés surtout pour les talons.
    A propos, avez-vous essayé la mésothérapie pour speeder votre rétablissement?

  5. Bonsoir Coraline,
    Peut-être votre prochain billet sera dédié aux assouplissements et étirements car c’est une science qui m’intrigue.
    Vu comme vous un vrai niveau de pro, vos conseils seront édifiantes.
    Bref, on dit il faut s’assouplir avant l’effort et s’étirer après mais les Kenyans ne s’étirent jamais et les sprinteurs contractent leurs muscles après l’effort en faisant de la cryothérapie (bains glacées).
    Si je suis trop raide après l’effort, je laisse quelques heures voir lendemain ou surlendemain pour une séance “pure player” d’assouplissement et étirements.
    Kimon

    1. Merci pour votre commentaire. Pour les étirements, je préfère personnellement les effectuer après l’effort avec les muscles encore chauds. Bon entraînement.

  6. Bonjour Coralie

    Je viens de lire votre (ancien) article sur les blessures et cela m’a fait du bien. Bientôt 3 mois que je suis arrêtée a cause d’un croisé détruit dans une avalanche. Je souffre psychologiquement de ne pas faire les courses que j’avais prévues. Je me fais du souci pour la suite …. Je fais du ski alpinisme. Je n’ai pas envie de me faire opérer. J’ai confiance en mon corps. C’est ma première blessure. On verra…
    Merci pour ces billets toujours intéressants.
    Gene.

    1. Bonjour Gene, merci pour votre message. Tout d’abord, je vous souhaite une excellente et rapide convalescence. Le mental et sa gestion sont primordiales pour récupérer, se retaper et revenir (plus fort qu’avant). Soyez patiente, essayez de relativiser et faites confiance en l’adage disant que tout arrive toujours pour une raison. Essayez de trouver cette raison. Peut-être que cette période sera l’occasion de faire un autre sport (ex. la natation) qui permettra d’améliorer des compétences dont vous avez besoin dans le ski alpinisme. Ou peut-être c’est simplement un moyen qu’à la vie de vous faire prendre conscience que vous avez peut-être eu beaucoup de chance de vous en tirer “qu’avec un ligament croisé déchiré” en conséquence de cette avalanche. Soyez patiente. Bon courage. Coraline

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