Nous obliger à faire de la couture.
Recevoir des « points handicaps » quand on jouait contre une équipe de garçons au foot.
Entendre qu’ « ils sont comme ça» lorsqu’on se plaint de mains baladeuses.
Voir sa mère dépressive à la maison et son père dans sa bulle de travail.
Plus tard, subir trop souvent le ton condescendant et paternaliste.
Voir dans les médias les hommes forts, intelligents, puissants.
Nous représenter lisses, douces, effacées.
L’injustice violente et inacceptable d’un congé paternité inexistant, ainsi que toutes les injustices économiques.
L’énergie toujours renouvelée pour ETRE RESPECTEE COMME UN ETRE HUMAIN A PART ENTIERE
… fait de moi une femme en colère et en combat intérieur en permanence !
M.
Je suis une femme privilégiée et je ferai la grève le 14 juin prochain. Privilégiée car j’ai un travail, un toit, de quoi manger, une couverture d’assurance maladie et que je me sens en sécurité chez moi.
Un travail à temps partiel, ce qui me permet beaucoup de libertés et une présence pour mes enfants. Ce qui veut aussi dire que ma prévoyance vieillesse est toute relative. Et que mes fins de mois ne sont équilibrées que grâce à la solidarité de mon compagnon.
La sécurité à la maison : ça ne fait que trois ans et demi que je me suis sortie de mon enfer. Le système continue à ne pas aider, ni moi, ni mes enfants, malgré les déclarations d’intention. Violences et viols conjugaux sont encore tabous mais bien plus répandus qu’on ne le croirait. Heureusement qu’il y a des associations qui soutiennent les femmes dans ce genre de situation.
Je fais la grève, mais pas au détriment de mes enfants, ni d’autres femmes. Il n’est pas question de les laisser… à une autre femme qui de toute manière ne peut pas se libérer parce qu’elle doit s’occuper de ses propres enfants ?!
J’arrangerai mes horaires, comme toujours, afin de pouvoir concilier mes obligations et mes revendications et envies. Ne pas me mettre en dernière place, même s’il faut jongler avec beaucoup d’éléments. Ça aussi, c’est une raison de faire la grève.
Je fais la grève pour cette amie qui a vécu sans papiers pendant des années, qui tremblait même quand elle a eu un permis B, puis C. Qui n’est tranquille que depuis qu’elle a pu être naturalisée Suisse.
Je fais la grève pour les femmes qui ne peuvent pas la faire, que leur employeur le leur interdise, que leurs finances ne le leur permettent pas, ou que leur situation légale les retienne ; contre toutes les déclarations du genre : « mais oui, les femmes ont droit au même salaire, mais oui elles ont droit à choisir librement leur profession » qui ne sont pas suivies.
Je fais la grève pour les femmes que d’autres femmes piétinent sur le chemin de leur indépendance.
Je fais la grève parce qu’il y a encore et toujours des hommes bienpensants qui paternalisent les femmes, sous un discours d’égalité, qui fait bien dans le débat.
Je fais la grève pour les filles et les femmes qu’on bouscule, dénigre et maltraite parce qu’on en a pris l’habitude. Je fais la grève pour celles qui sont touchées dans leur intégrité morale et physique du fait de faire partie du « sexe faible ».
Je fais la grève pour que les femmes aient vraiment le droit de décider de ce qui concerne leur corps, que ce soit au lit ou chez le médecin.
Je fais la grève pour les filles et les garçons d’aujourd’hui, qu’ils apprennent qu’ils ont une responsabilité commune, des qualités et des compétences qui ne sont pas liées à leur genre de naissance. Qu’ils sont différents, mais qu’ils ont les mêmes droits.
A.