Il est temps de s’affranchir du droit de timbre

Reliquat d’une époque fiscale lointaine, le droit d’émission sur capital propre reste une taxe absurde pénalisant les entreprises qui investissent, en particulier les PME. Soumise au vote le 13 février prochain, sa suppression s’impose en ces temps de pandémie, pour la prospérité de notre économie.

La suppression du droit de timbre d’émission sur le capital propre, l’un des objets des votations fédérales du 13 février prochain, est demandée depuis plusieurs années par les milieux économiques. L’heure de l’abolir semble avoir enfin sonné. De quoi s’agit-il? Cette taxe de 1% frappe tout capital nouvellement créé. Elle concerne toute société émettrice de nouvelles actions et touche ainsi directement l’outil de production des entreprises. En clair, l’investissement en capital propre dans une société se trouve amputé de ressources dont les entrepreneurs auraient bien besoin, en particulier les dirigeants de PME.

D’un point de vue strictement économique, cette taxe est contre-productive lorsqu’on prend conscience que chaque franc investi dans une start-up est nécessaire à sa croissance. Le patron d’une scale-up de la région, en pleine recherche de fonds indispensables à son développement, a dû payer au titre de cette taxe près de 700’000 francs, ce qui représente à peu près six postes de travail qu’il n’a pas pu créer. Un non-sens. Cette pratique, qui remonte au début du XXe siècle, n’existe nulle part ailleurs qu’en Suisse sous cette forme. Il est impératif de s’en affranchir au plus vite, a fortiori à une époque où les incertitudes conjoncturelles et structurelles se multiplient à l’horizon. Le Conseil fédéral lui-même considère le droit d’émission comme obsolète et néfaste à la place économique suisse.

Un frein à l’esprit d’entreprise

Ce droit de timbre constitue à l’évidence un frein à l’esprit d’entreprise. Il est particulièrement lourd pour les PME touchées par la pandémie. C’est précisément en période de crise que les firmes ont besoin d’augmenter leurs fonds propres afin de compenser leurs pertes et se montrer ainsi plus résilientes. Lorsqu’un chef d’entreprise augmente le capital propre de sa société, il prend certes un risque, mais il crée surtout des emplois. Il apparaît clairement absurde de le pénaliser par une taxe.  La suppression de ce droit d’un autre temps est d’autant plus urgente et pertinente que la pandémie complique singulièrement la vie des entreprises. Par ailleurs, les réformes fiscales prévues par l’OCDE visant à établir des taux d’imposition minimaux sur les sociétés vont contraindre la Suisse à renforcer sa compétitivité pour maintenir son rang de nation à succès.

Les opposants à cette réforme arguent qu’elle fera perdre 250 millions de recettes fiscales par an à la Confédération, soit à peine 0,35 pourcent des recettes fédérales. Cette perte sera largement compensée selon une étude de BAK Economics, publiée en juin 2019. Celle-ci conclut que la suppression du droit d’émission, couplée à une réforme de l’impôt anticipé, serait clairement rentable, y compris pour les caisses de l’État. Les experts estiment que le PIB augmenterait en outre d’environ 1,4 % sur dix ans, ce qui correspond à environ 22’000 nouveaux emplois à temps plein. Dire oui à cette suppression, c’est donc investir dans les emplois et la prospérité.

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L’ouverture sur le monde pour répondre à la pénurie de talents

Les difficultés de recrutement restent l’une des principales préoccupations des chefs d’entreprise. Pour pallier ce problème, le nouveau gouvernement allemand entend attirer des personnes qualifiées par le biais de l’immigration. Une option qu’il faut avoir le courage d’explorer.

A l’heure où les pays ont plutôt tendance à se replier sur eux-mêmes, le nouveau chancelier allemand, Olaf Scholz, a surpris son monde en lançant un programme visant à faciliter la naturalisation et à attirer 400 000 personnes qualifiées par an dans son pays. Ce chiffre, relate «Le Temps» de jeudi dernier, ne tombe pas de nulle part. Il a été mis en évidence par un institut spécialisé dans le travail comme l’une des solutions au vieillissement de la société allemande, qui engendre une grave pénurie de personnel qualifié. Angela Merkel, sa devancière, avait en quelque sorte ouvert la voie en régularisant en son temps des centaines de milliers de migrants venus de Syrie. Les pistes lancées par la nouvelle coalition au pouvoir ont reçu un accueil favorable des milieux patronaux.

Cette préoccupation, les entrepreneurs la partagent de ce côté-ci du Rhin. Dans notre enquête conjoncturelle d’automne, plus d’un quart des répondants disent rencontrer des soucis de recrutement, une proportion qui grimpe à 40% dans l’industrie. Après une accalmie en raison de la crise du Covid-19, ces difficultés sont en recrudescence et atteignent un niveau identique à celui observé en 2018. Les types de profils principalement concernés sont la main-d’œuvre qualifiée (77%), les cadres intermédiaires (36%) et les cadres supérieurs (20%). Dans son Baromètre de l’emploi de septembre dernier, Manpower notait également que la pénurie des talents restait «un sujet d’actualité préoccupant pour de nombreuses entreprises».

Le poids de l’accord-cadre

Même si elle ne constitue qu’une solution parmi d’autres, à côté de la formation continue et du recours aux aptitudes des séniors dans certains secteurs, l’option du gouvernement allemand a le mérite de rappeler que la grandeur d’un pays se mesure aussi à son esprit d’ouverture vers l’extérieur. Où en serait l’économie suisse si notre pays n’avait pas introduit la libre circulation des personnes et conclu quantité d’accords bilatéraux sectoriels avec l’Union européenne? On voit aujourd’hui déjà les problèmes que rencontrent nos industriels à cause de l’abandon de l’accord-cadre.

Il n’est bien sûr pas question de laisser notre frontière ouverte à tous les vents. La pénurie de personnel concerne essentiellement les métiers très spécialisés pour lesquels nous ne disposons pas de filières de formation, ou alors en quantité insuffisante. Cette réalité pose avec une acuité particulière la question des contingents de ressortissants extracommunautaires, c’est-à-dire d’un pays hors UE et hors AELE. Si la Suisse entend rester compétitive, elle doit pouvoir aussi compter sur cette main-d’œuvre.

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Et si on innovait en reconnaissant les esprits novateurs?

Terre d’innovation louée loin à la ronde, la Suisse peine à reconnaître celles et ceux qui réussissent dans ce domaine. La mésaventure vécue par une biotech lausannoise, qui a conçu un test révolutionnaire pour le Covid dont le monde médical d’ici ne veut pas, illustre ce paradoxe.

On peine à croire l’histoire que relate le magazine «L’Illustré» dans son édition de cette semaine, et pourtant, elle est bien réelle! Au moment où les hôpitaux sont menacés par une surcharge due à la cinquième vague du Covid, un test antigénique révolutionnaire permettant de diagnostiquer cette infection en une minute, conçu par la biotech lausannoise Abionic, est snobé tant par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) que par les établissements de santé de ce pays. Son prix? 20 francs!

Je ne suis pas médecin, mais je peine à comprendre la réaction – ou plutôt la non-réaction – des autorités politiques et sanitaires. Le bon sens commande d’utiliser un procédé fiable, rapide et bon marché lorsque l’on sait que les examens usuels mettent bien plus de temps à fournir un diagnostic. On sait combien il est difficile de tester les enfants, alors imaginez l’avantage de disposer d’un tel outil rendant réponse en une minute à peine.

Plus déconcertant encore, Nicolas Durand, CEO de cette scale-up, a communiqué cette nouvelle au Conseil fédéral, qui n’a pas daigné lui adresser de réponse: «Au niveau institutionnel, tout le monde nous a claqué la porte au nez», s’indigne-t-il dans l’hebdomadaire. «Nul n’est prophète en son pays», pourrait philosopher ce jeune patron: d’ailleurs, sa société a vendu plus de 150 appareils de test, avoisinant 6000 francs pièce, dans le reste du monde. Imaginez la stupéfaction des clients étrangers en apprenant que les hôpitaux romands refusent d’entrer en matière pour implémenter cette technologie.

Un petit côté schizophrénique

Cette mésaventure, a priori incompréhensible, illustre une réalité regrettable: nous mettons en place des programmes de soutien pour favoriser le démarrage de jeunes entreprises sous forme de start-up. Puis, au moment où leurs produits arrivent sur le marché, nous délaissons ces sociétés innovantes locales au profit de firmes étrangères ou de produits traditionnels, imaginant que «c’est mieux là-bas». Il y a là un petit côté schizophrénique. Membre du conseil d’administration d’Abionic, Eric Cornut relève dans le magazine que «d’une manière générale, on est plutôt réfractaire à l’innovation en Suisse. En particulier dans le domaine de la santé. Peut-être sommes-nous trop gâtés, ce qui réduit l’appétit pour le développement. Il y a une foule d’endroits où l’on serait ravi de profiter d’une méthode de diagnostic performante.»

La Suisse n’a pas de pétrole, mais elle a des idées, et même d’excellentes! Sachons mettre en valeur nos atouts, en particulier à une époque qui requiert plus que jamais que nous nous serrions les coudes.

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La résilience de notre économie n’est pas acquise

Les trois faîtières de l’économie suisse lancent un appel en faveur d’«une cure de revitalisation» de notre pays. Leur constat est clair: la reprise actuelle ne fait pas oublier que les conditions-cadres en place ne sont pas à la hauteur des nombreux défis post-Covid qui pointent à l’horizon.

Les chiffres actuels en attestent: l’économie suisse demeure plus que jamais résiliente, y compris et surtout dans le canton de Vaud. Pas plus tard qu’hier, la Commission Conjoncture vaudoise a mis en exergue le «redémarrage de l’activité, soutenue par un affermissement de la demande étrangère et de la consommation intérieure». Les entrepreneurs du Canton font toutefois preuve d’un optimisme mesuré en ce qui concerne l’évolution à venir, estimant que les incertitudes restent nombreuses et que les perspectives de croissance doivent être considérées avec précaution.

Ces inquiétudes, economiesuisse, l’Union patronale suisse et l’Union suisse des arts et métiers les partagent. Les trois faîtières de l’économie ont d’ailleurs adopté la semaine dernière un agenda de politique économique commun, qui vise l’après-crise sanitaire. Pour elles, «la reprise actuelle ne doit pas faire oublier que le cadre de la politique économique en place n’est pas à la hauteur pour affronter la période post-Covid. Elles estiment que la capacité d’adaptation de l’économie suisse est compromise.» A la lumière de l’évolution actuelle, il est clair que la résilience de notre économie n’est pas acquise.

Les entreprises font partie de la solution

L’un des aspects problématiques a trait au fait que les autorités se focalisent sur la durabilité environnementale, à l’image du canton de Vaud et de son Plan climat. La durabilité passe aussi par une économie dynamique, qui assure la cohésion sociale. Les entreprises font partie de la solution puisqu’elles disposent d’outils pour diminuer leur consommation d’énergies fossiles via des conventions d’objectifs, s’équipent de panneaux solaires et développent des technologies innovantes permettant de réduire leur empreinte carbone et celle des consommateurs. La protection climatique reste une préoccupation majeure, mais elle ne doit pas constituer un frein au développement des entreprises. Il faut ainsi veiller à garantir des conditions-cadres favorables à l’innovation et à la recherche. Car oui, la transition énergétique et la numérisation constituent des opportunités pour l’économie.

Le monde se complexifie et les défis s’annoncent gigantesques, également en ce qui concerne les relations internationales. Au rang de nos priorités politiques figurent le rétablissement de bonnes relations avec l’Union européenne, qui reste notre marché principal, et la prise en compte des incidences de l’application d’un taux d’imposition minimum de 15% aux entreprises multinationales, à compter de 2023. Il est grand temps de penser «out of the box», c’est-à-dire de sortir des schémas habituels. Les réflexions sur une vraie politique industrielle ne doivent pas constituer un tabou, même si la tradition libérale de notre pays ne nous y a guère habitué.

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Un nouvel élan économique pour une nouvelle législature

En mars prochain, Vaud renouvellera ses autorités cantonales. A l’approche de cette échéance capitale, les organisations économiques faîtières, dont la CVCI, publient des recommandations qui doivent permettre le maintien d’un tissu économique diversifié, compétitif et performant.

Quatre mois à peine nous séparent du renouvellement des autorités cantonales. A la veille de cette nouvelle législature, la CVCI, la Fédération patronale vaudoise, la Chambre immobilière et Prométerre formulent, comme elles l’ont fait en 2017, des recommandations concrètes, «Impulsions 2027». Les propositions qui figurent dans cet opuscule ont pour ambition de contribuer à la préservation et au développement des conditions-cadres garantissant la compétitivité de l’économie vaudoise. Celle-ci se porte bien depuis une quinzaine d’années grâce, en particulier, à son dynamisme et à sa diversité. Le contexte mondial actuel, pour le moins incertain, révèle toutefois un effritement de notre attractivité. Ce constat vaut même en comparaison intercantonale. Pour toutes ces raisons, les futures autorités doivent entendre les besoins de l’économie afin de garantir l’emploi et la prospérité du canton, de même que le bien-être de la population.

L’Etat n’a pas vocation à résoudre tous les problèmes de la société, et doit donc se concentrer sur ses missions principales. La pandémie a certes montré le rôle central des autorités dans les moments de crise aiguë. Mais même dans notre pays, où la démocratie s’exprime régulièrement, le pouvoir exécutif est tenté, à travers les nombreux moyens dont il dispose, de limiter la capacité de contrôle des contre-pouvoirs. Ce fait a amené nos faîtières à porter un regard critique sur les aspects de gouvernance qui posent problème, lesquels figurent dans un nouveau chapitre «Rôle, fonctionnement et gouvernance de l’Etat». Un exemple? Dans le Canton, les procédures de consultation relèvent du bon vouloir des départements concernés. Ce n’est pas sain.

Fiscalité trop élevée

Les défis, à l’évidence, ne manquent pas, qu’il s’agisse de fiscalité, de formation, d’infrastructures, d’aménagement du territoire, d’énergie, d’environnement, de santé, de social ou encore d’agriculture, soit autant de thèmes que nous avons thématisés. L’imposition, en particulier celles des personnes physiques, constitue l’une de nos priorités: la pression fiscale doit impérativement être revue à la baisse, sans quoi nous risquons de voir s’exiler des contribuables importants.

L’augmentation exponentielle des dépenses dans le domaine social constitue également un sujet de préoccupation majeure, et cela à double titre: cette croissance non maîtrisée se fait en premier lieu au détriment des autres secteurs de l’Etat, qui voient leurs budgets diminuer. Corollaire: le monde du travail ne parviendra pas à financer éternellement un Etat toujours plus lourd alors que les entreprises doivent entamer leurs transitions numériques et climatiques.

En 2017, les organisations économiques faîtières vaudoises avaient publié «Impulsions 2022». Au regard des besoins que nous avions détaillés, force est d’admettre que les efforts entrepris par le Canton sont demeurés assez modestes. Il ne s’est manifestement pas attaqué à l’essentiel, ce qui justifie à nos yeux de remettre l’ouvrage sur le métier. La multitude de défis qui nous attendent doivent pousser nos futures autorités à entreprendre les réformes qui s’imposent, plutôt que de procéder à des adaptations législatives cosmétiques. Nos «impulsions 2027» leur montrent la voie à suivre si l’on entend pouvoir perpétuer la bonne santé de notre économie.

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Vaud doit baisser l’imposition des particuliers

La fiscalité vaudoise des personnes physiques demeure élevée en comparaison intercantonale. Les mesures annoncées par le Canton la semaine dernière ne constituent qu’un rattrapage. L’Etat doit s’attaquer avec vigueur au barème d’impôt, à la fois sur la fortune et sur le revenu.

Le canton de Vaud traîne toujours en fond de classement au niveau de la fiscalité des personnes physiques. C’est la conclusion que l’on tire en lisant le «Baromètre fiscal vaudois», établi par KPMG et la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie (CVCI). Il consiste en une comparaison intercantonale systématique de l’attractivité fiscale du canton de Vaud, notamment avec ses voisins. S’agissant de l’imposition des entreprises, le Canton figure actuellement parmi ceux affichant un taux d’impôt légèrement inférieur à la moyenne suisse, mais il reste clairement à la traîne en matière de fiscalité des particuliers.

La réforme de la fiscalité des entreprises, introduite en 2019 et en 2020, avec – notamment – un taux d’impôt sur le bénéfice de 14% et différentes mesures favorisant la R&D ainsi que l’innovation, a eu un effet positif. Par rapport à la dernière présentation du «Baromètre fiscal», en 2018, notre canton a ainsi amélioré son classement, passant de la 21e à la 13e place. Avec l’introduction prochaine d’un taux d’imposition global minimum de 15%, décidé par le G20, le taux d’impôt sur le bénéfice ne sera plus un facteur de différenciation entre Etats. Les cartes seront donc rebattues et face à ce nouveau contexte, le Canton et la Suisse devront plancher sur de nouvelles mesures, fiscales et non fiscales, pour maintenir leur attractivité.

Personnes physiques lourdement taxées

Le tableau est moins rutilant en ce qui concerne la taxation des personnes physiques, qui n’a que peu changé ces dernières années. La situation s’est même péjorée dans certaines catégories de revenus. Le canton de Vaud connaît une des impositions les plus élevées de Suisse, avec un taux maximal de 41,50%. Seuls les cantons de Genève (44,97%) et de Bâle-Campagne (42,22%) font pire. Conséquence: tant le revenu que l’outil de travail demeurent trop lourdement taxés. Les baisses fiscales annoncées la semaine dernière par le Conseil d’Etat ne constituent en fait qu’un rattrapage, et ne suffiront donc pas à alléger suffisamment une taxation qui demeure trop élevée.

Une évidence s’impose: seule une petite proportion des contribuables assure une grande partie des revenus fiscaux. Ainsi, 7,5% des assujettis vaudois déclarent un revenu imposable de plus de 150 000 francs et contribuent ainsi à plus de 41% aux recettes de l’impôt sur le revenu. Ce petit nombre de personnes fournit une large part du substrat fiscal, c’est pourquoi il est capital de les garder dans notre canton. Vaud figure également en queue de peloton en matière d’impôt sur la fortune. Pour les contribuables fortunés, la charge fiscale y est ainsi six fois plus élevée que dans les cantons les moins gourmands.

La prospérité vaudoise ne tombe pas du ciel: elle repose sur le dynamisme et l’attractivité de notre tissu économique, ainsi que sur de bonnes conditions-cadres. Le maintien de notre compétitivité commande donc de s’attaquer au barème d’impôt, à la fois sur le revenu et sur la fortune. C’est pourquoi la CVCI demande au Canton de prendre ce thème à bras-le-corps. Elle suivra avec une grande attention les prochains développements dans ce domaine.

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La loi Covid-19 a fait ses preuves

Les débats relatifs à la loi Covid-19, sur laquelle nous nous prononcerons le 28 novembre prochain, se cristallisent autour du certificat sanitaire introduit par le Conseil fédéral pour juguler la pandémie. Certains voient dans ce document une discrimination, alors qu’en réalité, cet instrument contribue à une reprise à peu près normale de nos activités dans l’attente de l’immunité collective.

L’enjeu de ce vote ne se résume pourtant pas à ce seul document et à son QR code, car ce texte induit toute une série d’aides financières dont bénéficient des milieux qui n’ont pas été ou trop peu soutenus jusqu’ici. Le Parlement a modifié la loi Covid-19 à plusieurs reprises pour mieux protéger les personnes et les entreprises. La modification de mars 2021 étend l’aide économique, qui est cruciale, et comble des lacunes en matière de soutien. La loi permet ainsi l’extension de l’aide pour cas de rigueur à des entreprises ayant dû fermer temporairement ou ayant subi un important recul de leurs affaires, l’extension des allocations pour perte de gain des indépendants ayant observé un recul du chiffre d’affaires de 30% (avant 40%), l’extension des indemnités en cas de réduction de l’horaire de travail (RHT) et la prolongation des indemnités chômage à 24 mois. Une bonne partie de l’économie a besoin de ces aides pour passer le cap d’une crise dont nous ne sommes pas encore sortis.

La loi Covid-19 est, rappelons-le, temporairement en vigueur. L’extension de l’obligation de produire un certificat sanitaire est limitée au 24 janvier 2022, mais le Conseil fédéral pourra la lever plus rapidement en fonction de la situation sanitaire et de la charge des hôpitaux. Les chances de voir cette hypothèse se réaliser seront plus élevées si la vaccination progresse encore. Les référendaires se trompent à l’évidence de combat! Rejeter ces dispositions ne supprimera pas les mesures de confinement, de fermeture ou d’obligation de porter le masque. Ces dernières relèvent de la loi sur les épidémies. Il est donc vain de penser qu’un refus de ce texte de loi Covid provoquera un retour plus rapide à «la vie d’avant». C’est en réalité l’inverse qui se produira.

Un vote protestataire irréfléchi

Un mot encore sur le certificat Covid: force est d’admettre qu’il facilite les déplacements à l’étranger et vers la Suisse, car il est reconnu au niveau international. Il revêt par conséquent une grande importance pour les milieux touristiques et pour l’économie d’exportation, sans parler de la possibilité qu’il offre aux particuliers de goûter de nouveau aux voyages d’agrément. Jeter cette loi dans les catacombes ne permettrait plus, dès le 19 mars, la reconnaissance des certificats Covid suisses par l’UE, et inversement.

Un vote protestataire, irréfléchi à mon sens, engendrerait nombre de désavantages économiques, de nouvelles restrictions et son lot d’incertitudes. La gestion responsable de la pandémie, telle qu’elle a été conduite jusqu’à présent, deviendrait pratiquement impossible si le référendum était accepté. Le système actuel, qui a fait ses preuves quoi qu’en disent ses adversaires, serait alors privé de son fondement. L’économie a besoin de la plus grande sécurité juridique possible, a fortiori en temps de crise. C’est pourquoi je dirai oui avec conviction à la loi Covid-19.

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L’industrie reste un pilier de notre prospérité

Une analyse d’Avenir Suisse montre comment les entreprises s’adaptent avec succès aux mutations du secteur industriel. Il reste que les défis posés par la numérisation, la nouvelle fiscalité internationale et la transition énergétique nécessiteront un débat sur notre politique industrielle.

La Suisse ne se désindustrialise pas, elle se tertiarise – y compris dans l’industrie, où les activités de services augmentent, notamment grâce au numérique. C’est la thèse que défend le Think Tank Avenir Suisse dans son analyse intitulée «Perpétuer le succès de l’industrie suisse».  «Contre toute attente, les changements structurels n’ont pas mené à une hausse du chômage, mais ont permis une réaffectation des emplois», expliquent les auteurs. Cette enquête montre comment notre pays peut s’adapter avec succès aux mutations du secteur industriel, et ce, sans politique dirigiste.

Avenir Suisse observe certes que ce secteur a perdu en importance pour la place économique suisse depuis les années 1970. Cela étant, ces vingt-cinq dernières années, avancent ses experts, «le nombre d’employés est resté stable, à environ 730 000, alors que la valeur ajoutée a augmenté de manière significative et que les exportations ont doublé».

La récente étude de la CVCI, «De la crise des subprimes à celle du Covid: le miracle vaudois», relevait également qu’entre 2005 et 2020, le nombre d’équivalents plein temps avait progressé dans l’industrie manufacturière, la chimie-pharma, naturellement, mais aussi dans l’industrie des machines et l’horlogerie, ainsi que dans l’industrie alimentaire, grâce, notamment, au succès rencontré par Nespresso.

La diversification est l’une des clés

Directeur romand du laboratoire d’idées libéral, Jérôme Cosandey s’est plu à mettre en évidence, vendredi dernier sur les ondes de La Première, «la bonne santé industrielle de la Suisse». Pour lui, cette évolution repose avant tout sur la diversité de notre industrie et sur des produits de niche à forte valeur ajoutée. Il a insisté sur la nécessité, pour nos entreprises, de pouvoir accéder à la main-d’œuvre européenne très qualifiée, mais aussi au-delà. Il a ainsi plaidé pour «un changement des contingents rigides» relatifs aux pays tiers.

Cette analyse tombe à point nommé pour rappeler la nécessité de continuer à diversifier notre tissu économique et de pérenniser, voire de développer, les accords commerciaux conclus avec nos divers partenaires. A cet égard, la réactivation de nos relations avec l’Union européenne demeure indispensable, car près de la moitié de nos exportations prend cette direction. La Suisse doit aussi poursuivre sa politique de formation – professionnelle et académique – dans les domaines qui font l’excellence de notre pays.

Les options dirigistes et volontaristes de nombreuses nations européennes ont certes abouti à une désindustrialisation, à l’exemple de la France et de la Grande-Bretagne. Il n’empêche que la donne a changé, avec l’arrivée prochaine du taux unique d’imposition décidé par le G20, les gros investissements à effectuer dans le domaine de la numérisation et de la transition énergétique. La Suisse ne pourra pas s’éviter un débat sur la définition d’une politique industrielle, notamment en vue d’aider les PME et les start-up au niveau de la recherche et du développement.

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Le télétravail constituerait un frein à l’innovation

Selon une étude américaine, le travail à domicile réduirait la capacité des entreprises à innover. En cause: la diminution des interactions entre collègues, notamment ceux avec lesquels on entretient des liens moins forts, qui peuvent pourtant amener d’autres perspectives.

Les intervenants de la Journée de la Trust Valley, réunis lundi au Rolex Learning Center de l’EPFL, l’ont rappelé à l’unisson: la pandémie de Covid-19 a accéléré la digitalisation des entreprises, et par voie de conséquence, le télétravail. Pendant cette période aussi compliquée qu’inédite, et en marge des inquiétudes liées à la cybersécurité, il n’est venu à l’esprit d’aucun chef d’entreprise de remettre en cause cette nouvelle manière de travailler. Cependant, expérience faite, il s’avère que le travail à domicile n’a pas que des vertus sur la durée.

Si de nombreux employés travaillant à la maison ont pu exploiter leurs réseaux relationnels internes à l’organisation, il apparaît que ces mêmes réseaux ont cessé de se développer et se sont même «rigidifiés» au risque de freiner l’innovation, selon une étude Microsoft Research citée par le site ICTJournal. «Le passage au télétravail à l’échelle de l’entreprise, écrivent les auteurs de cette étude, a amené les employés à consacrer une plus grande partie de leur temps de collaboration à leurs liens plus forts, mieux adaptés au transfert d’informations, et une plus petite partie de leur temps à des liens faibles, qui sont plus susceptibles de donner accès à de nouvelles informations.»

Ces résultats s’appuient sur les données de plus de 60’000 employés américains de Microsoft (appels audio/vidéo, e-mail, chat, calendrier, etc.) recueillies durant le premier semestre de l’année dernière. Ce cloisonnement, cette sorte de chaînon manquant au niveau de la communication, tout cela aurait contribué à limiter les échanges et l’émulation entre les employés. C’est pourquoi les auteurs de cette enquête suggèrent aux chefs d’entreprise de tenir compte de ce constat dans leurs projets de travail hybride. Pour eux, le télétravail ne se mesure pas qu’en termes de productivité individuelle.

Les limites du numérique

La crise pandémique nous a donc montré les possibilités étendues du numérique, mais elle a aussi fait apparaître ses limites. L’exécution des tâches et le suivi des projets souffrent et nécessitent une énergie démultipliée dans un contexte déjà complexe. Chacun d’entre nous a pu mesurer combien l’échange, les interactions et le relais d’informations sont absolument  indispensables pour maintenir la dynamique d’une entreprise. Rien ne saurait remplacer les échanges directs avec les collègues, pas même les pauses café, qui contribuent à leur échelle au renforcement de l’esprit d’équipe.

Les entreprises ont donc tout intérêt à établir une charte pour cadrer les modalités du travail à distance, tout en privilégiant le présentiel. Il doit s’agir d’une réflexion managériale, en collaboration avec les employés. Les organisations économiques de Suisse romande, dont la CVCI, ont d’ailleurs mis sur pied une «Convention de télétravail» qui constitue un modèle, adaptable en fonction des spécificités de chaque entreprise. Une vraie solution clé en main.

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L’économie vaudoise reste dynamique malgré les crises

La pandémie du Covid n’y a rien changé: le tissu économique du Canton continue de démontrer une vitalité réjouissante au gré des soubresauts conjoncturels. Une étude, cosignée par la CVCI, en explique les ressorts. Ce dynamisme n’est toutefois pas acquis: il faudra améliorer les conditions-cadres pour continuer de prospérer.

«Vaud – Le tigre discret», étude que la CVCI cosignait en 2016, montrait déjà l’aptitude de l’économie vaudoise à résister aux crises économiques. Cinq ans après, en pleine pandémie de Covid-19, la CVCI, l’Observatoire BCV de l’économie vaudoise et l’Institut CREA se sont réunis pour refaire le point sur la santé du tissu économique du Canton.

Publiée hier, l’étude «De la crise des subprimes à celle du Covid» ne constitue  en rien une vue de l’esprit, et cela malgré la rudesse de la crise sanitaire qui continue de déployer ses effets dans le monde. En dépit des difficultés rencontrées par certains secteurs, mais grâce à la flexibilité et à la diversité de ses entreprises, de même qu’aux différentes aides fournies par les autorités fédérales et cantonales, le canton de Vaud a ainsi pu traverser cette crise comme les précédentes, sans trop de dommages.

Entre 2005 et 2020, les entreprises du Canton sont parvenues dans leur globalité à résister, à rebondir, voire à prospérer malgré les subprimes, la crise de la zone euro, l’abandon du cours plancher de l’euro, la guerre commerciale ou la crise du coronavirus. Cette résilience se solde par une hausse du PIB de 41,9% et un nombre d’emplois en progression de 31% en quinze ans, des chiffres notablement plus élevés que ceux de l’ensemble de la Suisse (PIB: +29,7%, emploi: +19,9%). Le positionnement de l’économie vaudoise, basé en particulier sur le développement d’activités à haute valeur ajoutée, a permis à celle-ci de montrer sa robustesse au gré des soubresauts conjoncturels de ces dernières années.

L’essor de la chimie-pharma a largement contribué au développement de l’économie vaudoise au cours des quinze dernières années. Sa valeur ajoutée a été multipliée par 6, et les emplois qu’elle représente par 1,9. Les autres domaines de l’industrie manufacturière ont évolué diversement. La production de denrées alimentaires s’est développée alors que l’industrie des machines et la fabrication d’instruments de précision ont rencontré des vents contraires ces dernières années. Le principal moteur de la croissance entre 2000 et 2020 aura toutefois été le secteur tertiaire, qui a contribué à hauteur de trois quarts à la hausse du PIB sur cette période.

Un État trop gourmand

Un fait doit toutefois nous interpeller: le personnel des secteurs public et parapublic a connu de fortes progressions en une décennie et demie. Trois tendances se dégagent: la croissance du système éducatif, le développement du système de santé et la hausse des dépenses sociales. Cette évolution n’est pas tenable, car qui peut garantir que l’Etat disposera des moyens de ses ambitions à l’avenir? L’Etat devrait observer une prudence certaine dans la gestion de ses effectifs.

Le dynamisme de l’économie vaudoise n’est ainsi pas acquis. Un certain nombre de conditions doivent être réunies pour permettre à celle-ci de continuer à prospérer, parmi lesquelles figurent au premier rang une fiscalité juste et attractive. Nos relations avec l’Union européenne suite à l’abandon des négociations sur l’accord-cadre, l’accès facilité à une main-d’œuvre qualifiée, la digitalisation ou encore l’écosystème d’innovation sont autant de thèmes auxquels nous devrons également consacrer toute notre énergie.

Photo de couverture: Zuzanna Adamczewska-Bolle