La voie bilatérale est en grand danger

En décidant hier d’enterrer l’accord-cadre avec Bruxelles, le Conseil fédéral affaiblit dangereusement notre place économique. L’avenir de nos relations avec l’UE se complique. Il s’agit désormais de se montrer inventif après ce coup de Trafalgar.

Tout ça pour ça! Même si la décision était dans l’air depuis plusieurs semaines, on peine à concevoir que le Conseil fédéral a bel et bien interrompu abruptement les discussions avec Bruxelles sur l’accord-cadre! Comme le redoutait hier dans «Le Temps» l’ancien secrétaire d’Etat Jean-Daniel Gerber, «nous risquons de nous retrouver dans une situation proche de celle de 1992 après le non du peuple à l’Espace économique européen». Durant la décennie qui avait suivi ce rejet, rappelons-le, la Suisse avait connu la plus faible hausse du PNB en Europe, juste devant l’Italie…

Mais quelle mouche a bien pu piquer le gouvernement? Cet accord, qu’il a souhaité dès le début, était censé consolider les relations bilatérales avec notre principal partenaire commercial, et permettre d’autres accords sectoriels à venir. Et là, patatras! Divisé, sans leadership, sans plan B, le Conseil fédéral a plombé nos perspectives. Les syndicats portent eux aussi une part de responsabilité dans cet échec, qui risque de péjorer l’emploi en Suisse à terme. Une première conséquence, hormis le fait de fâcher Bruxelles, va se faire sentir immédiatement: dès aujourd’hui, l’accord sur la reconnaissance mutuelle des produits médicaux tombe. Si la plupart des medtech suisses s’y sont préparées en recourant à un système de mandataires, il existe un risque de pénurie de dispositifs médicaux et de perte de compétitivité. Certaines d’entre elles seront peut-être même tentées de délocaliser leur production.

Ce n’est hélas pas tout! Des conséquences funestes pourraient toucher les domaines de la recherche et de la formation, sans parler d’autres échéances à venir concernant les produits agricoles ou encore le domaine des transports. La Commission européenne a par ailleurs fait savoir qu’un rejet de l’accord institutionnel barrait la route à un nouvel accord sur le marché de l’électricité. On le voit, à chaud, les perspectives ne sont pas très encourageantes.

Bruxelles ne nous fera pas de cadeaux

Comme l’a fait savoir hier la faîtière economiesuisse, «une relation stable à long terme avec l’Union européenne et ses États membres reste de la plus haute importance pour l’économie suisse. Préserver les avantages de la voie bilatérale doit donc rester un objectif prioritaire.» L’accord-cadre aux oubliettes, il s’agit maintenant de stabiliser les accords existants et de limiter les dommages prévisibles pour notre place économique. La tâche s’annonce ardue, car Bruxelles ne nous fera pas de cadeaux après avoir été éconduite d’une façon aussi arrogante. Berne juge-t-elle réaliste de proposer autre chose qu’une reprise du droit européen sans réciprocité?

En jetant cet accord à la corbeille, le Conseil fédéral empêche enfin la population de se prononcer sur nos relations avec l’UE. Même si ce domaine relève de la compétence gouvernementale, il me semble que les enjeux en présence méritaient largement que l’on donne la parole aux citoyens. Berne a failli sur toute la ligne.

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Les acteurs économiques en sauveurs de l’accord-cadre

Les atermoiements du Conseil fédéral sur l’accord institutionnel menacent l’avenir de nos relations avec notre principal partenaire commercial. La mobilisation de la société civile, économie en tête, sera décisive pour convaincre la population de pérenniser la voie bilatérale.

Le mauvais ballet diplomatique que le Conseil fédéral joue depuis trop longtemps avec l’Union européenne sur l’air de l’accord-cadre a de quoi laisser pantois. Le récent voyage entrepris par le président de la Confédération, Guy Parmelin, à Bruxelles n’en constitue hélas qu’un acte supplémentaire. Car voilà des années que l’accord institutionnel, censé consolider la voie bilatérale avec l’Union européenne, est traité par Berne avec un souverain mépris, pour ne pas dire un mépris du souverain. Ainsi donc, l’accord serait devenu d’un coup «déséquilibré»? Voilà qui n’est guère sérieux.

Après cette énième pantalonnade, la Commission de politique extérieure du Conseil national (CPE-N) a demandé fermement au gouvernement, lundi, de poursuivre les négociations et de se montrer créatif concernant les trois points qui achoppent encore, à savoir les aides d’Etat, la libre circulation des personnes et le niveau de salaires des travailleurs détachés. Ce coup de gueule parlementaire fait du bien et montre que les partis, même s’ils paraissaient avoir renoncé à conclure un tel accord, prennent la mesure de son importance pour l’avenir de nos relations avec notre principal partenaire commercial. Ce ne sont pas les medtechs, suspendues à la réactualisation du règlement sur les dispositifs médicaux d’ici au 26 mai, qui diront le contraire.

Les cantons entrent en jeu

A cette foucade bienvenue s’ajoute l’adoption, par cette même CPE-N, d’une motion du Conseil des États demandant que le parlement, le peuple et les cantons soient consultés lors de la mise en œuvre éventuelle de l’accord institutionnel avec l’Union européenne, comme le relate «24 heures» de ce mercredi. Ces mêmes cantons ont par ailleurs demandé à être officiellement consultés sur le sujet et à obtenir des informations supplémentaires sur l’état actuel du dossier. Porte-parole du Conseil fédéral, André Simonazzi a confirmé la chose cette semaine, sans donner plus de précisions.

Ce frémissement ravive l’espoir de voir l’accord-cadre sortir des limbes dans lesquelles il se trouve. A ce stade, il paraît pourtant clair que le collège gouvernemental, vu les dissensions qui règnent en son sein, aura bien de la peine à jouer les porte-drapeaux de cette cause, tant il a perdu de crédibilité. Depuis des mois, ce sont bel et bien les milieux économiques, ainsi que le monde de l’éducation et de l’innovation, qui défendent avec conviction cet accord. Pour d’excellente raisons qui ont pour nom continuité et prospérité. Ces messages, acceptons-en l’augure, vont bien finir par convaincre une majorité des vertus d’une voie bilatérale consolidée.

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Les accords bilatéraux ne tiennent qu’à un fil

Les tergiversations du Conseil fédéral autour de l’accord institutionnel avec l’Union européenne (UE) pourraient sonner le glas des bilatérales. Déjà durement impactée par la pandémie, l’économie se passerait volontiers de cette sombre perspective.

«Il faut que la Suisse se réveille.» Le constat de Philipp Hildebrand, dans les colonnes du «Temps», sonne comme un sérieux avertissement. Vice-président du fonds d’investissement BlackRock et candidat malheureux au poste de secrétaire général de l’OCDE, le banquier bernois assiste avec dépit à la perte d’influence de notre pays sur la scène internationale. Il explique d’ailleurs son retrait de la course à l’OCDE par le manque de soutien provenant des membres de l’Union européenne. «Si l’accord-cadre entre la Suisse et l’UE n’est pas signé, la situation va s’aggraver», prophétise-t-il.

Ce sombre tableau n’a hélas rien d’une vue de l’esprit. Voilà des mois, pour ne pas dire des années, que le Conseil fédéral tergiverse à propos de l’accord institutionnel, qui doit permettre de consolider nos relations économiques avec notre premier partenaire commercial. Il s’est montré incapable de fédérer autour d’un texte qui, faute d’un large soutien, risque de finir dans les poubelles de l’histoire pourtant riche de nos relations avec notre grand voisin européen. Le conseiller fédéral, Ignazio Cassis, a eu beau répéter lundi devant les caméras que les discussions avec Bruxelles se poursuivaient, l’espoir de parvenir à une entente paraît ténu, d’autant que les partis politiques semblent eux aussi résignés. Ce qui est certain, c’est que les conséquences d’un abandon seraient lourdes et immédiates pour l’économie suisse.

Les sociétés œuvrant dans le domaine des technologies médicales seraient les premières à être pénalisées, car sans accord-cadre, l’accord de reconnaissance mutuelle entre la Suisse et l’UE viendra à échéance le 26 mai prochain. Passé ce délai, nos medtech devront recourir à des représentants présents sur le marché européen, une contrainte qui occasionnera des coûts estimés à près de 100 millions de francs. Des sommes qui seraient plus utiles si elles étaient investies dans le recherche. Un sujet diffusé lundi sur la RTS en détaille les enjeux.

La Suisse reléguée au rang d’Etat tiers

Au-delà du cas particulier des medtech, une renonciation à l’accord institutionnel aurait des conséquences dramatiques pour l’ensemble de notre économie, puisqu’elle signifierait à terme la mort des bilatérales. Peu à peu, les accords tomberaient, faute d’être adaptés à l’évolution du droit communautaire. La Suisse se verrait ainsi graduellement reléguée au rang peu enviable d’Etat tiers. Pour un pays comme le nôtre, dont 51% des exportations sont destinées à l’UE, ce serait assurément un coup de massue qui entraînerait un lent déclin de notre industrie d’exportation.

Sans ce cadre institutionnel, par ailleurs, les milieux scientifiques suisses assisteraient depuis le dernier rang de l’auditoire à la mise en place du programme Horizon Europe 2021-2027, le plus important programme international de recherche et d’innovation du monde. En outre, faute d’accord dans le domaine de l’électricité, notre pays n’aurait pas accès au marché européen, ce qui pénaliserait les milieux concernés. En résumé, en l’absence d’accord-cadre, il ne nous resterait plus qu’à adapter l’accord de libre-échange conclu en 1972 avec la CEE d’alors, comme l’a fait la Grande-Bretagne au lendemain du Brexit. Bonjour les tracasseries douanières et, accessoirement, adieu la libre-circulation des personnes. Est-ce vraiment ce que nous voulons? Le Conseil fédéral est-il capable d’un ultime sursaut pour sauver ce qui peut encore l’être? C’est vraiment le dernier moment!

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S’adapter à un environnement complexe pour mieux rebondir

En pleine pandémie, les jeunes éprouvent de grandes difficultés à se projeter dans la vie professionnelle. Face à des perspectives floues, ils doivent absolument rester actifs pour ne pas être déconnectés. Quand l’économie redémarrera, ils seront les premiers à être engagés.

La crise du coronavirus affecte sévèrement le monde professionnel, et n’épargne guère les jeunes de 18 à 25 ans. Ces derniers sont touchés de plein fouet par les conséquences de cette pandémie. Entre un marché du travail qui s’est brutalement refermé, des cours à distance compliqués à suivre et la diminution drastique des petits boulots, leurs perspectives se sont notablement assombries.

Les entreprises, durement touchées elles aussi, ne sont pour la plupart pas en mesure d’engager des jeunes actuellement. L’urgence consiste pour elles à survivre à la crise et à conserver leur main-d’œuvre. Intégrer des jeunes dans le marché du travail reste ainsi une préoccupation à moyen terme. A ce propos, les entreprises qui passent la crise sans trop de difficulté doivent songer à s’investir davantage dans la formation afin de garantir des compétences à l’avenir. L’appel est lancé.

Lorsque l’économie redémarrera pleinement, les sociétés auront besoin de ces aptitudes, a fortiori à un moment où les baby-boomers s’apprêtent à quitter massivement le monde du travail. Aussi il est crucial que les jeunes maintiennent une activité si nous ne voulons pas nous retrouver face à un manque de main-d’œuvre qualifiée dans quelques années. Les crises passées ont montré que les jeunes profitent, dans une mesure supérieure à la moyenne, des phases de reprise économique.

Une bonne nouvelle à signaler dans le marasme ambiant: les aides vaudoises en faveur de l’apprentissage, à savoir 16 millions issus du fonds de lutte contre le chômage, ont permis une hausse de 1,3% du nombre d’apprentis en 2020. Il reste que former ces jeunes gens à l’heure du télétravail n’est guère évident. Un apprenant ne peut acquérir ni le métier ni la culture de l’entreprise depuis son domicile. A la CVCI, nous avons instauré un tournus en présentiel pour nos trois apprentis afin de pouvoir continuer à les former au mieux.

Entretenir sa soif d’apprendre

Les étudiants des Hautes écoles entrevoient pour leur part un horizon professionnel bouché. Dans l’attente d’un vrai redémarrage de l’économie, cette génération doit se montrer inventive et entretenir sa soif d’apprendre. Des solutions existent, comme reprendre ou poursuivre des études, suivre un stage pour acquérir de nouvelles compétences, se perfectionner ou, pourquoi pas, se réorienter. Les jeunes doivent prendre conscience qu’ils changeront plusieurs fois de métier au cours de leur carrière. Il leur faudra donc d’adapter à un monde professionnel en perpétuelle mutation, où la digitalisation prendra toujours plus d’importance.

En ce sens, la pandémie actuelle stimule l’inventivité et la faculté à s’adapter à un environnement complexe. L’expérience montre qu’une formation professionnelle solide a une incidence directe sur la santé de l’économie. De nombreuses études l’attestent. Aussi dure qu’elle soit, cette crise pourrait ainsi révéler des opportunités insoupçonnées à celles et ceux qui sauront les saisir. Pour mieux rebondir.

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Favorisons l’accès des jeunes au marché du travail

La pandémie et la récession qui s’ensuit compliquent l’arrivée des jeunes dans le monde professionnel et pourraient avoir de graves conséquences à long terme. Une étude sensibilise les entreprises à cette problématique. Bon à savoir: le délai pour trouver une place d’apprentissage a été prolongé au 15 novembre.

Les derniers chiffres du Secrétariat d’État à l’économie (SECO) sur la situation du marché du travail donnent la mesure d’un phénomène inquiétant: le chômage des jeunes (de 15 à 24 ans) explose en ces temps de pandémie. Il a ainsi augmenté de 2446 personnes (+13,7%), passant à 20’341 à fin août. Par rapport au même mois de l’année précédente, on dénombre 7199 personnes supplémentaires (+54,8%). La baisse du produit intérieur brut (PIB) due à la pandémie actuelle rend clairement l’accès au monde professionnel plus difficile pour cette catégorie de personnes.

Une récente étude de l’Observatoire suisse de la formation professionnelle a pris la mesure de l’impact de la récession sur l’insertion professionnelle des jeunes en début de carrière. Ces chercheurs ont mis en évidence les mécanismes selon lesquels un départ difficile dans la vie active a un impact négatif à long terme sur le parcours professionnel. Ils en concluent que les employeurs devraient être sensibilisés à cette problématique, et qu’ils devraient embaucher davantage de personnes, même sans expérience professionnelle. Pas toujours évident pour des entreprises encore chahutées par la crise; il faut toutefois garder à l’esprit qu’il peut s’agir d’un investissement pour l’avenir.

Mesures en faveur de l’apprentissage

Se préoccuper des jeunes entrant sur le marché du travail, c’est aussi s’intéresser aux apprentis. A ce propos, signalons que le canton de Vaud a prolongé les délais pour trouver une place d’apprentissage au 15 novembre. L’Etat a en outre décidé, à la demande des associations économiques, au rang desquelles figure la CVCI, de prendre en charge le versement du ½ salaire durant la première année d’apprentissage, de même que pour les apprentis qui ont perdu leur place pour raison économique et qui sont engagés dans de nouvelles entreprises formatrices pour terminer leur formation.

En mai dernier, déjà, j’exhortais les chefs d’entreprise à engager des apprentis à l’heure de la reprise. Même si les perspectives économiques restent floues, le moment est venu de passer à l’acte. L’expérience montre qu’une formation professionnelle solide a une incidence directe sur la santé de l’économie. De nombreuses études l’attestent. Soutenir l’apprentissage, c’est plus que jamais assurer la relève de demain.

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Tous ces pas qui font avancer la parité salariale

Les entreprises qui emploient au moins 100 personnes sont tenues d’effectuer dès aujourd’hui une analyse de l’égalité salariale. Cet instrument n’est pas la panacée, d’autres moyens permettent d’y tendre. Deux objets soumis aux urnes cet automne, par exemple.

 On le sait, le législateur doit veiller à l’égalité salariale pour un travail égal ou comparable. La loi sur l’égalité, qui date de 1996, a fait l’objet d’une récente révision, qui entre en vigueur en ce 1er juillet: les entreprises employant au moins 100 personnes sont désormais tenues d’effectuer une analyse de la parité salariale. Pour y parvenir, la Confédération met à disposition une version modernisée de son outil d’analyse standard de l’égalité salariale (Logib), sous la forme d’une application web.

Légiférer dans ce domaine est a priori louable, mais cela ne suffit manifestement pas à faire avancer cette cause. D’après une enquête sur la structure des salaires réalisée par l’Office fédéral de la statistique (OFS) en 2016, la part inexpliquée de l’écart salarial entre femmes et hommes s’élève en moyenne à 7,7%. Cela représente 642 francs par mois. C’est pourquoi je reste convaincue que cette question ne sera pas résolue dans notre pays tant et aussi longtemps que le problème de l’accueil des enfants ne sera pas réglé à satisfaction. Une femme doit pouvoir travailler suffisamment pour disposer des ressources lui permettant de financer la garde de sa progéniture, et ainsi pouvoir évoluer dans son cursus professionnel et accéder à des postes dirigeants.

Plafond de verre pesant

Selon l’OFS, 59% des femmes et 18% des hommes travaillent à temps partiel. La maternité et la situation familiale sont les facteurs qui poussent ces dernières à opter pour ce modèle de travail. L’interruption du parcours professionnel est doublement pénalisante pour les femmes, car elle les prive à la fois d’un revenu et de l’ancienneté dans l’entreprise. Celles qui connaissent des arrêts liés à la maternité sont perdantes dans ce système, qui doit absolument évoluer. D’autant que le départ programmé des baby-boomers créera un grand besoin de main-d’œuvre. Ces postes à responsabilité, les femmes sont parfaitement en mesure de les assumer. A côté de la flexibilisation du travail, la formation continue doit aussi leur permettre de briser ce pesant plafond de verre.

Deux objets fédéraux soumis au scrutin populaire en septembre permettront d’apporter de nouvelles pierres à l’édifice de la parité salariale: l’augmentation de la déduction fiscale des frais de garde de 6500 à 10’000 francs pour chaque enfant mineur, en apprentissage ou en études. Cette élévation favorisera l’égalité des chances professionnelles pour les femmes et leur évolution de carrière, tout comme le congé-paternité de deux semaines. Financé sur le modèle de l’assurance maternité, via les allocations pour perte de gains (APG), un tel congé posera certes des défis organisationnels à de nombreuses PME. Le fait que ces dix jours soient modulables en journées fractionnées sur six mois doit toutefois permettre une application flexible.

L’économie s’engage pour davantage de places d’accueil de même que pour l’aménagement des horaires de travail. Des incitations fiscales permettraient de renforcer ce trend, car c’est bien l’addition de ces efforts qui contribuera à faire avancer l’égalité salariale.

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L’innovation sera l’une des clés pour sortir de la crise

La pandémie du Covid-19 va durablement impacter notre économie. Pour poursuivre leurs activités, les entreprises de notre pays devront s’adapter et, surtout, innover. Disposer de bonnes conditions-cadres favorisera aussi le redémarrage.

Sans mauvais jeu de mots dans le contexte du coronavirus, aujourd’hui, c’est bel et bien l’économie qui est au creux de la vague. Les aides fédérales et cantonales ont certes permis à beaucoup d’entreprises de surmonter le choc de la pandémie, mais l’incertitude demeure en raison d’un manque de visibilité à terme. Et toutes les sociétés ne parviendront hélas pas à s’en sortir.

Les soutiens financiers sont une condition nécessaire, mais pas suffisante pour permettre un redémarrage. Pour espérer aller de l’avant, l’économie aura besoin, encore plus que par le passé, de conditions-cadres favorables. De ce point de vue, la mise en œuvre rapide de la RFFA dans les cantons permettra aux entreprises de profiter des nouvelles mesures fiscales visant à promouvoir l’innovation (déduction pour la R&D, patent box), pour peu, évidemment, qu’elles soient en mesure de payer des impôts. L’octroi de ressources supplémentaires pour la recherche compétitive, par le biais d’Innosuisse, notamment, donnerait également des perspectives aux entrepreneurs innovants. La participation au programme-cadre européen de recherche (Horizon Europe) constituerait elle aussi un vecteur de rebond important pour certaines entités.

Préserver le secteur R&D

A côté des conditions-cadres, l’innovation reste le principal moteur du développement économique en Suisse. L’étude «Vaud innove», cosignée par la CVCI et dont la version imprimée vient de sortir de presse, montre que l’écosystème d’innovation du canton a favorablement évolué ces dernières années. Les branches à forte composante technologique, comme la pharma, ont connu une progression réjouissante. Cette orientation vers des activités à haute valeur ajoutée constitue un atout pour l’économie vaudoise, et elle a contribué à la rendre moins sensible aux aléas de la conjoncture. Il n’en demeure pas moins que cette situation enviable est loin d’être acquise. D’autant plus, comme le conclut l’étude, que la crise actuelle pourrait voir le flux d’investissements quelque peu fléchir, provisoirement du moins. Aussi, à l’heure de revoir leurs budgets, les entreprises devront se garder de couper dans la recherche et le développement.

Confrontés aux grandes difficultés actuelles, les entrepreneurs devront donc se montrer inventifs et prendre des risques. Les modèles d’affaires devront être repensés, de nouveaux produits et des processus plus efficaces devront émerger. Réactives, beaucoup d’entre elles se sont adaptées rapidement et ont déjà intégré les nouvelles pistes de développement que la pandémie a révélées, comme l’accélération de la numérisation, les changements de consommation et de production, le développement de la créativité, de nouvelles organisations de travail ou, encore, la simplification des procédures.

Innover rime plus que jamais avec opportunité.

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Il faut continuer de former des apprentis!

Les conséquences économiques de la pandémie actuelle font peser de lourdes menaces sur le domaine de l’apprentissage. La période habituelle de recrutement entre avril et août est fortement entravée. Il y a pourtant urgence à soutenir aujourd’hui la relève de demain.

Faillites d’entreprises formatrices, chômage et licenciements, incertitudes quant à l’avenir, priorités financières et organisationnelles revues dans l’économie: la crise sanitaire n’incite guère aux investissements, en tout cas dans un avenir proche. Elle pourrait ainsi pousser plus d’une entreprise à renoncer à engager des apprentis pour 2020-2021. Ce serait pourtant un bien mauvais calcul, car renoncer à former la relève aujourd’hui aura un impact fâcheux dans les prochaines années. Disposer de personnel qualifié est l’une des conditions nécessaires à la reprise économique et à sa consolidation dans la durée. En outre, l’apprentissage joue un rôle central dans l’insertion sociale et économique des jeunes, et limite en cela les risques de les voir glisser vers une situation de rupture.

L’expérience montre qu’une formation professionnelle solide a une incidence directe sur la santé de l’économie. De nombreuses études l’attestent. C’est pourquoi, lors de chaque fléchissement conjoncturel, des initiatives visant à relancer l’apprentissage ont être prises tant au plan fédéral que cantonal. Ce fut en particulier le cas en 1997, puis en 2009. Les collectivités publiques ont pris des mesures d’aides et de soutien dans différents domaines pour lutter contre les effets de la crise sanitaire actuelle. Celui de l’apprentissage ne doit pas faire exception.

Des mesures concrètes

Dans ce contexte, les associations économiques vaudoises, dont la CVCI, ont adressé la semaine dernière une lettre au Conseil d’Etat par laquelle elles demandent des mesures complémentaires ou subsidiaires à celles mises en œuvre par les autorités fédérales. Une initiative en faveur de la formation des jeunes figure en bonne place sur la liste: les entreprises qui engagent un apprenti en août 2020 devraient bénéficier, à titre exceptionnel, de la prise en charge de 50% du salaire de l’apprenti durant la première année d’apprentissage. Nous attendons impatiemment la réponse du Château.

La Confédération, de son côté, a rapidement empoigné le problème. Elle a mis sur pied, jusqu’à la fin de l’année, une «Task Force Perspectives Apprentissage 2020», qui sera chargée de promouvoir le recrutement d’apprentis et l’embauche de titulaires d’une formation professionnelle. Partie prenante, l’Union patronale suisse soutient cette initiative et ses objectifs. La task force ambitionne de pourvoir les plus de 15’000 postes d’apprentissage encore vacants.

Engager des apprentis et les embaucher autant que possible après leur formation devrait être l’une des préoccupations des chefs d’entreprise à l’heure de la reprise. Octroyons-leur les moyens de remplir cet objectif gage d’avenir.

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Le redémarrage économique demandera de l’audace et du courage

Surmonter la pandémie actuelle constitue un défi majeur pour nos entreprises. Reprendre confiance dans un contexte aussi incertain exigera une prise de risques à laquelle notre pays n’est pas forcément habitué. C’est pourtant l’une des clés pour sortir de cette situation hors norme.

La crise sanitaire que nous vivons depuis bientôt trois mois s’est rapidement doublée d’un blocage de l’économie sans précédent. Les mesures d’aides urgentes et vigoureuses décidées par le Conseil fédéral, à l’image du chômage partiel, ont permis à une majorité d’entreprises d’encaisser le choc de cette première phase de la pandémie. Au moment où le déconfinement se met graduellement en place, un nouveau défi de taille attend l’industrie et le commerce: redémarrer pleinement les activités dans un environnement incertain d’où le Covid-19 n’a pas disparu. Le respect strict des consignes sanitaires est une condition sine qua non de la reprise. Il s’agit donc de garder ce virus à l’œil pour que l’économie puisse repartir.

Ce redémarrage, c’est certain, exigera du courage et de l’audace. Portée vers l’exportation, l’économie suisse gagne un franc sur deux à l’étranger. Même si les marchandises circulent, la demande mettra probablement des mois pour repartir. Et il paraît probable que le marché indigène redécollera lui aussi doucement. Le récent sondage que la CVCI a réalisé auprès de ses membres sur les effets de cette crise sanitaire montre que les entreprises, fortement impactées, comptent sur un retour à la normale au deuxième semestre. Dans ce contexte, reprendre confiance et regagner celle des consommateurs et des investisseurs ne sera pas une mince affaire. A cet égard, le maintien de conditions-cadres favorables demeure primordial.

S’inspirer de cette expérience

Les entrepreneurs devront se montrer persévérants – ils le sont par essence -, inventifs et prêts à prendre des risques. Ce dernier trait de caractère, il faut bien l’admettre, n’est pas forcément inscrit dans l’ADN des Suisses, au contraire des Anglo-Saxons qui en ont fait une marque de fabrique. C’est pourtant bien dans ce registre que les chefs d’entreprise d’ici pourront trouver matière à résoudre l’équation complexe qui se dresse devant eux. Notre sondage sur les effets du Covid-19 montre que cette crise a fait émerger nombre d’effets positifs dont il pourrait être judicieux de s’inspirer. Je veux parler notamment de l’accélération de la numérisation, des changements de consommation et de production, du développement de la créativité, du télétravail et des nouvelles organisations de travail, du retour à une production locale et de la simplification de certaines procédures.

Les incertitudes, qu’elles soient d’ordre sanitaire, économique ou politique, sont certes encore nombreuses. La situation inédite que nous vivons devrait pourtant être considérée comme une opportunité et servir de base à une réflexion sur nos modes de fonctionnement. Les valeurs humanistes, que l’on a sans doute un peu trop négligées ces dernières années, devront elles aussi être prises en compte dans ce nouveau départ. La CVCI et ses services seront à vos côtés pour vous accompagner dans ce monde où beaucoup reste à réinventer.

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L’économie vaudoise se défend bien dans un environnement morose

En dépit des nuages qui s’accumulent à l’horizon, une bonne partie des entreprises du canton de Vaud restent confiantes quant aux perspectives conjoncturelles. Par ailleurs, le développement durable fait peu à peu son nid au sein des sociétés.

Les perspectives économiques pour la Suisse demeurent sombres pour la fin de cette année, selon le centre de recherches conjoncturelles KOF de l’École polytechnique fédérale de Zurich. À fin septembre, le baromètre économique de ce dernier a atteint son niveau le plus bas depuis 2015. En dépit de ces présages, rien ne semble devoir entamer la foi des entrepreneurs vaudois en leurs affaires. Les résultats de l’enquête conjoncturelle semestrielle de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie (CVCI), publiés hier, montrent que les chefs d’entreprises restent globalement confiants quant à l’évolution économique à moyen terme. Le constat vaut également pour le secteur industriel, bien qu’il soit davantage dépendant des aléas des marchés mondiaux.

S’agissant de 2019, notre enquête montre que la marche des affaires est jugée satisfaisante ou positive par 85% du panel, tant dans le secteur secondaire que dans le tertiaire. Les excellents résultats de l’an dernier ont favorisé une hausse sensible des salaires en début d’année, puisque près de 60% des entreprises ont accordé des augmentations de l’ordre de 1,2%. La dynamique demeure favorable en matière d’emploi: plus d’un quart des répondants ont augmenté leurs effectifs, aussi bien dans l’industrie que dans les services. Cette tendance devrait se poursuivre, puisqu’un répondant sur cinq prévoit d’embaucher l’an prochain. Seuls 7% d’entre eux s’attendent à devoir réduire leur personnel.

Un pic a été atteint

Si les prévisions à moyen terme paraissent favorables, le pic semble toutefois avoir été atteint. Les industriels, en particulier, relèvent quelques signaux tempérant le climat conjoncturel actuel, ainsi qu’un manque de visibilité à plus long terme. Ceux-ci sont d’ailleurs globalement moins satisfaits du niveau de leurs marges d’autofinancement que l’an dernier. En outre, 37% des entreprises ont procédé à des investissements cette année (contre 38% en 2018), un pourcentage qui devrait encore baisser l’an prochain, à 35%.

L’alarmisme n’est pourtant pas de rigueur. La croissance, même à la baisse, reste pour l’heure positive. Les fondamentaux de notre économie demeurent consistants. Il convient toutefois de rester vigilant et réactif. Les réformes doivent être poursuivies, de même que les efforts pour garantir des conditions-cadres solides. Il s’agira surtout de clarifier et de régler rapidement un dossier majeur: celui de nos relations avec l’Union européenne. Il est en outre primordial de pérenniser une formation de haute qualité pour faire éclore les talents dont notre économie aura besoin pour maintenir sa prospérité.

En marge de son enquête semestrielle, la CVCI a également demandé à ses membres s’ils avaient mis sur pied des projets liés au développement durable ces deux dernières années. Quatre répondants sur dix déclarent avoir réalisé des actions ou des projets dans le but d’améliorer la performance économique de leur entreprise, tout en intégrant des enjeux environnementaux ou sociaux. Il ressort enfin que 29% des entreprises ont déjà mis en place des plans de mobilité. Davantage concernées par cette problématique, les sociétés de plus de 100 collaborateurs sont plus nombreuses à avoir franchi le pas (56%). Les mesures instaurées consistent principalement en des encouragements à l’utilisation des transports publics (61%) et, pour près d’un répondant sur deux, en services aux collaborateurs (crèche, restaurant d’entreprise, télétravail, vidéoconférence, etc.). La CVCI organise depuis plusieurs années des séminaires pour accompagner les entreprises dans l’établissement de plans de mobilité, et va poursuivre ses actions de sensibilisation.

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