L’accord institutionnel bénéficie d’un soutien toujours plus large

Selon un sondage représentatif à l’échelle suisse, près de 60% de la population appuie l’accord-cadre avec l’Union européenne (UE). Un signal fort qui plaide en faveur de relations stables et profitables avec notre principal partenaire économique.

Le vent semble avoir clairement tourné pour l’accord institutionnel, qui doit permettre de poursuivre et de développer la voie bilatérale avec notre puissant voisin européen. Accueilli pour le moins fraîchement de toutes parts lors de sa publication à la fin de l’an dernier, ce qui a poussé le Conseil fédéral à lancer une vaste procédure de consultation dans la foulée, ce traité semble renaître avec le printemps. La plupart des partis politiques, à l’exception notable de l’UDC, apportent leur soutien à ce texte, même si quelques formations attendent encore des précisions sur certains points. Restait encore à sonder la population. C’est ce que vient de faire l’institut gfs.bern auprès de 2000 citoyens, sur mandat de l’Association des entreprises pharmaceutiques suisses pratiquant la recherche, Interpharma.

Avec près de 60% de personnes favorables à l’accord-cadre, ce coup de sonde constitue une agréable surprise, tant le scepticisme des Suisses à l’égard de l’Union européenne peut parfois sembler grand. Pour gfs.bern, ce résultat montre que «la population établit un lien clair entre des relations stables avec l’UE et la prospérité de la Suisse». Chose remarquable, le soutien s’élève à 69% pour la Suisse romande et à 58% pour la Suisse alémanique. Pour l’institut de sondage, les raisons qui poussent les personnes interrogées à se prononcer pour ou contre l’accord reposent sur une analyse économique de la situation.

Le bon sens l’emporte: la majorité de la population a compris qu’entretenir de bonnes relations avec un partenaire vers lequel partent 53% de nos exportations est une bonne option. Ainsi, près de sept personnes sur dix estiment que ce texte apportera la sécurité juridique nécessaire à l’économie suisse pour planifier ses activités. Elles sont en outre près de deux tiers à avoir constaté «l’érosion des accords actuels d’accès au marché». Les auteurs du sondage relèvent en outre que, pour la première fois depuis 2015, une majorité de la population estime que les accords bilatéraux apportent plutôt des avantages à notre pays.

«Un travail de conviction permanent»

Cette prise de conscience est réjouissante. Mais comme le souligne René Buholzer, directeur d’Interpharma, «un travail de conviction permanent est nécessaire pour souligner l’importance de relations stables avec notre principal partenaire économique». L’opinion publique est versatile, car le moindre sursaut conjoncturel peut engendrer de funestes réflexes de repli. C’est pourquoi il est indispensable de rappeler qu’un accord institutionnel vaut infiniment mieux que pas d’accord du tout. Les avantages que procurerait ce traité sont nombreux: possibilité de conclure de nouveaux accords d’accès à ce grand marché, adaptation possible des traités existants, participation au programme-cadre de recherche ou encore reconnaissance possible d’équivalence boursière.

A contrario, un rejet de l’accord-cadre aurait de lourdes conséquences pour notre pays: pas de nouveaux accords donnant accès au marché intérieur européen, pas de modifications de traités existants, pas de reconnaissance d’équivalence boursière (dès juillet 2019) ou encore rétrogradation de la Suisse dans le programme-cadre de recherche. Sans oublier l’absence d’un accord sur l’électricité avec les 27.

Dans le domaine bilatéral, le pragmatisme semble l’emporter. Le travail d’explication de ces enjeux doit toutefois se poursuivre. Et c’est notamment à cette mission que la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie s’attelle sans relâche.

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Claudine Amstein

Claudine Amstein est la directrice de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, depuis 2005. Après avoir été juriste et secrétaire générale de la Chambre vaudoise immobilière, elle en reprend la direction en 1993. Elle a été constituante au Grand Conseil vaudois, avant d’en être députée pendant dix ans. Elle est très engagée dans les associations faîtières de l'économie suisse.

5 réponses à “L’accord institutionnel bénéficie d’un soutien toujours plus large

  1. Donc selon ce sondage de la pharma (principal pilier des exportations suisses), les suisses sont d’accord de réduire leur salaire.
    Car l’accord est bien une manière contraignante d’harmoniser les salaires suisses avec ceux des pays voisins.
    Mais avec ou sans accord, les suisses seront de toute manière bien obligés de réduire leur train de vie, l’équation est simple.

    1. Il n’est aucunement question d’harmoniser nos salaires avec ceux de l’UE. Dire oui à un accord-cadre, même imparfait, relève d’un choix tout simplement pragmatique. La prospérité de notre pays a toujours passé par l’ouverture, jamais par le repli.

  2. L’Allemagne a voulu faire plier la Suisse en compliquant le passage des frontières. Résultat? Les régions frontalières suisses ont cru à un miracle économique: les frontaliers ont du louer des chambres à l’hôtel, les consommateurs ont fait leurs achats en Suisse, etc.

    Je ne dis pas que s’isoler est bien! Loin de là!!
    Mais il faut accepter le fait que la voix de la Suisse est d’une portée économique comparable à celle de l’Espagne que nous ne sommes pas un nain en Europe. Nous avons donc notre mot à dire et, en présence d’un mauvais accord, nous pouvons nous permettre d’attendre les élections européennes, le remplacement de Juncker et faire ce que nous avons toujours fait de mieux: négocier.

    Au pire, si vraiment les accords bilatéraux seraient morts, il resterait l’EEE qui impose moins d’obligations que cet “accord-card” désespérant, qui détruit les mesures d’accompagnement (=protection de nos emplois) et fait de la Suisse un contributeur-payeur nette (sans contre-parties nouvelles).

    1. Cher Monsieur,

      Loin de moi l’idée de faire de la Suisse un “nain de l’Europe”, ou de minimiser les talents de négociation de nos représentants. Notre pays a en effet maintes fois prouvé qu’il savait être diplomate et la maîtrise helvétique du compromis mérite d’être soulignée. Cependant, un accord – comme des négociations – implique obligatoirement de “se mettre d’accord” justement. Et cela également s’agissant des points de tension. L’analyse de l’accord montre que nos partenaires ont été largement dans notre direction sur des points importants, comme la manière de gérer les conflits. Vous avez raison, nous ne pesons pas “rien” dans la discussion, mais nous ne sommes toutefois pas seuls! Je le répète, l’exemple actuel de la Grande-Bretagne et du Brexit est parlant à cet égard. Ne minimisons donc pas l’importance, pour notre pays, d’un accord-cadre avec l’UE.

  3. Mon analyse est que la Suisse tient sa prospérité de ses qualités propres, bien différentes de celles de bien des pays de l’UE. Equilibre social que l’on ne trouve pas chez nos voisins, plein emploi (ou presque), démocratie exemplaire avec le pouvoir au peuple et non aux “élites” déconnectées des réalités économiques etc…: voilà quelques points forts que la Suisse ne doit pas abandonner en adoptant les critères de l’UE.
    l’UE cherche à faire rentrer la Suisse “dans le rang”; ceci est un nivellement par le bas pour la Suisse qui pourrait perdre de son attractivité si bien reconnue dans le monde.
    Bientôt, les européens vont voter et exprimer probablement ce rejet d’une Europe technocratique, sans lien avec les peuples, et qui veut tout imposer.
    Espérons plutôt que cette UE se transforme à l’image de la Suisse et non le contraire!

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