Le paquet Prévoyance 2020 a donc été renvoyé à l’expéditeur par une majorité du peuple suisse. Une nouvelle fois, une réforme – partielle ou complète – de notre système de prévoyance a échoué en votations fédérales. La fédération des oppositions l’a emporté sur la réalisation, alors que, tôt ou tard, il faudra procéder à des ajustements, et que personne ne pourra se soustraire à la pression démographique.
Remettre l’ouvrage sur le métier ne doit pas se limiter à reprendre les diverses composantes du paquet et à en renégocier les conditions. Il s’est écoulé huit ans entre les fondements de la réforme et son rejet le 24 septembre dernier. A l’échelle de l’évolution de notre société, c’est beaucoup. En 2009, pour rappel, ni Instagram, ni WhatsApp, ni Snapchat – les principaux canaux numériques d’échange d’information et de conversation des « millenials » – n’existaient encore, et Twitter était embryonnaire. On ne parlait pas beaucoup de crowdfunding ni de coworking, deux terminologies qui occupent de plus en plus l’espace économique.
L’impression de calme et de lenteur que peut dégager la société suisse ne doit tromper personne. Ici aussi, les grandes tendances qui s’observent dans les pays développés modifient le rapport au travail, les attentes des jeunes générations et les comportements, individuels et collectifs. Pour élaborer la réforme de notre système de prévoyance, il est impératif de tenir compte de ces nouvelles réalités. Trois éléments devraient ainsi être retenus.
De nouvelles réalités à considérer
Première évolution, la généralisation du travail à temps partiel – ou, plutôt, de la réduction partielle du taux d’activité. Celle-ci ne se limite plus aux femmes qui entrent dans le marché du travail, ou y reviennent après une interruption due à une grossesse, un schéma classique qui commence à être battu en brèche. Les hommes sont de plus en plus nombreux à choisir un travail à 80%, voire moins. Soit pour disposer de plus de temps « pour eux », mais souvent pour le consacrer à une autre activité qui donne du sens à leur vie, et qui n’est pas toujours rémunératrice ou rentable financièrement.
Cette multiplication des sources de revenus, très inégaux, constitue la deuxième tendance forte. Elle s’inscrit aussi dans une individualisation du travail, qui implique une hybridation des statuts, où une même personne peut cumuler un état d’employé d’une structure publique, de salarié d’une entreprise et d’indépendant.
Cette souplesse s’inscrit enfin dans le temps : les carrières bifurquent plus souvent qu’à leur tour, les reconversions sont fréquentes, soit par choix, soit par nécessité, dans un monde très compétitif où les situations acquises se raréfient.
Même si ces tendances restent émergentes, c’est aujourd’hui que les réponses se préparent, pour qu’au moment où ces actifs arriveront à l’âge de la retraite, le système puisse répondre à leurs besoins. Outre la flexibilisation de l’âge de la retraite, qui paraît une évidence, la création d’un taux de cotisation unifié dans le 2e pilier, quel que soit l’âge des cotisants, pourrait être un axe de réflexion intéressant pour faire avancer l’indispensable réforme de la prévoyance.
Effectivement, il faut mettre d’urgence en place cette réforme en deux tranches distinctes : l’AVS et son financement par la TVA de 0,5 points / et flexibilisation de l’âge de la retraite dans un premier temps, et pour le 2ème pilier, cette unification de cotisation sociale sur un montant fixe quel que soit l’âge du salarié, et sans suppression du montant de coordination. Les autres réformes viendront ensuite…