Notre économie creuse la dette environnementale: une initiative des Jeunes Vert·e·s entend y remédier

C’est une des premières choses que l’adulte responsable apprend en grandissant: gérer son budget et ne pas vivre au dessus de ses moyens. On n’en attend pas moins d’un service étatique ou d’une entreprise: qu’ils gèrent et respectent les limites budgétaires.

On devrait, en toute logique, s’attendre à ce que notre civilisation respecte les ressources que la terre lui alloue. Or, c’est exactement le contraire que prône notre système capitaliste basé sur une économie “court termiste” qui favorise l’accumulation du capital et des biens matériels. En terme de ressources, les Suisses consomment l’équivalent de près de 3 planètes et le reste du monde nous emboîte le pas.

La capacité de renouvellement de notre planète n’est pas infinie. Conceptualisée en 2009 puis actualisée en 2015 par un groupe de chercheurs·euses internationaux·ales, la notion de limites planétaires définit les seuils à ne pas dépasser dans neuf domaines pour que la Terre reste durablement viable pour l’humanité. Une nouvelle initiative populaire des Jeunes Vert·e·s nous invite donc à respecter ces limites planétaires.

 

4 limites planétaires déjà dépassées

Quels sont les 9 domaines de ces limites planétaires? Il s’agit de 1. réchauffement climatique, 2. érosion de la biodiversité, 3. acidification des océans, 4. diminution de l’ozone stratosphérique, 5. charge en aérosols atmosphériques, 6. perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, 7. (sur)consommation mondiale d’eau douce, 8. changement d’usage des sols et 9. pollutions chimiques.

Limites planétaires selon le rapport de Rockström et al. publié dans Nature en 2009. Les zones en rouge représentent l’état actuel estimé et le cercle vert définit les limites estimées.

 

Ces domaines peuvent paraître lointains ou abstraits. Toutefois, ils sont les garants d’un environnement planétaire permettant la vie et l’épanouissement des sociétés humaines. Or, à l’échelle mondiale, au moins quatre limites ont déjà été dépassées (climat, biodiversité, cycles d’azote et de phosphore et utilisation des sols).

C’est dans ce contexte que les Jeunes Vert·e·s Suisse viennent de lancer une initiative populaire « Pour une économie responsable respectant les limites planétaires (initiative pour la responsabilité environnementale) ». Cette initiative demande que l’économie nationale respecte les limites planétaires les plus facilement quantifiables en Suisse, rapportées à l’échelle de notre pays. Ces limites concernent les domaines du climat, de la disparition des espèces, de la déforestation et de la pollution de l’air, de l’eau et du sol.

 

Une dette environnementale croissante

On l’a déjà dit, si la population mondiale consommait autant que la moyenne suisse, il faudrait près de trois planètes Terre pour garantir cet équilibre essentiel entre consommation des ressources et capacité de renouvellement de la nature. L’initiative exige que l’impact environnemental de la Suisse se réduise, dans les dix ans, de manière à respecter ces limites planétaires définies scientifiquement. Elle demande également que cet objectif soit atteint d’une manière socialement acceptable.

L’article 73 de notre Constitution fédérale pose certes déjà le principe de développement durable et insiste sur l’importance de la capacité de renouvellement de la nature. L’article 2 de cette même Constitution définit les buts de la Confédération et cite à son alinéa 4 le fait de s’engager « en faveur de la conservation durable des ressources naturelles ». Le principe de durabilité est donc au cœur de notre Constitution. Toutefois, lorsqu’il s’agit de véritablement le mettre en application au quotidien, les aspects écologiques sont trop souvent laissés au second plan au profit du développement économique à court terme.

Tant que nos activités économiques ne tiendront pas compte des limites planétaires, nous continuerons à creuser une dette environnementale toujours plus grande sur le dos des générations futures. Et sur le dos des populations des pays les plus pauvres qui subissent déjà, encore plus fortement que nous, les conséquences de cette crise environnementale alors qu’historiquement elles n’ont que très peu contribué à la détérioration des écosystèmes et du climat.

Signer l’initiative « Pour la responsabilité environnementale » c’est donc aussi opter pour plus de justice environnementale.

 

Christophe Clivaz

Christophe Clivaz est le premier conseiller national vert valaisan. Il a été auparavant député (2013-2016) et conseiller municipal à Sion (2009-2019). Politologue de formation (Dr. en administration publique), il s'est spécialisé dans l'étude du tourisme alpin. Il est professeur associé à mi-temps à l'Institut de géographie et durabilité de l'Université de Lausanne, sur le site de Sion.

18 réponses à “Notre économie creuse la dette environnementale: une initiative des Jeunes Vert·e·s entend y remédier

    1. Pas de pénurie d’électricité si l’on économies l’énergie et si l’on met enfin le turbo sur le développement des énergies renouvelables, le solaire en premier lieu (en bonne voie avec l’adoption à la session d’automne de l’initiative parlementaire de mon collègue Bastien Girod: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20190443).
      Par rapport aux limites planétaires, objet de mon billet, on ne peut pas mettre la tête dans le sable et faire comme si elles n’existaient pas…

      1. C’est clair qu’en hiver, quand il fait nuit 15h par jour le solaire c’est au top… surtout que c’est bien connu, les gens recharges leur voiture électrique uniquement la journée…

  1. Encore à côté de la plaque ! Si vous considériez la surpopulation humaine pour changer votre disque rayé à force de le repasser !!!
    Quand on doit nourrir et loger 8 milliards d’habitants , il faut bien que l’économie tourne à plein régime !
    Vous ne proposez aucune solution !

    1. La surpopulation est sans aucun doute un problème sérieux et immédiat. Avez-vous une solution M. Giot? Pour le moment, une petite partie de l’actuelle population terrestre consomme les ressources de manière disproportionnée et indécente. N’est-il pas aussi nécessaire de s’attaquer à ce problème, en attendant que la population terrestre se stabilise à un niveau permettant un mode de vie plus durable? Ne pensez-vous pas que trouver des solutions pour répartir les ressources de manière plus équitable et durable aujourd’hui nous amènerait un peu de répit pendant que la courbe de la population, avec l’inertie d’un pétrolier rempli à ras bord, continue de frôler avec les sommets, et ceci pour encore un certain temps?

      1. Ce sont les pays émergeants qui ont la plus forte natalité et qui consommeront beaucoup plus que nous dans la deuxième moitié de siècle ! L’Inde a quintuplé sa population depuis l’indépendance , si on cumule les 3 pays d’origine !
        En théorie , c’est simple : pas plus d’un enfant par femme …

  2. Si la planète avait notre densité de population, elle serait invivable. Il serait temps que les écolo propose de ne plus accueillir d’entreprises sauf celles qui n’ont pas besoin de beaucoup de travailleurs, ou pour remplacer des partantes. L’urgence est de stabiliser la population suisse, sinon quid de la biodiversité, de nos ressources (eau, …).

    La Terre, c’est comme un gâteau, plus la population augmente, plus la tranche est fine, et ce n’est pas l’Europe et ses 500 millions d’habitant qui va avoir une influence (ou peu) par rapport au 10 milliards d’humain. Qu’est-ce qui joue le plus dans le gâteau Terre, le rapport de population de 1/20 ou du 3/1 (pseudo scientifique) de consommation ?

    Il faut mieux consommer, c’est clair, mais les écolos doivent définir des priorités. La première qui met en danger la biodiversité, …, et le bien être, c’est cette dérive économique qui pousse la Suisse vers 10, 15, 20 millions d’habitants.
    Si vous voulez évitez que des initiatives partent à l’échec automatique, préoccupez-vous des gens. La surpopulation, la densification qui construit des quartiers à délinquance, deviennent un sujet important, et le point centrale est écolo : Comment stabiliser la population de la Suisse ?

    1. Ne vous en faites pas, la stabilisation et même l’effondrement démographique est en bonne voie et pas seulement en Suisse. En fait, il y a déjà un moment que nous n’assurons même plus la simple relève à terme des générations, avec pour conséquence un vieillissement des populations qui va poser de plus en plus de problèmes. Car si la population continue globalement à croître, et va le faire encore un certain temps sur la lancée du siècle passé, c’est essentiellement par “défaut” de décès des personnes “âgées”, du fait d’un doublement de l’espérance de vie par rapport au début du 20ème siècle, plus que par excès de naissances. La dénatalité va d’ailleurs devenir LE problème crucial au siècle prochain. La chute brutale du taux de natalité a commencé dans les pays occidentaux qui sont, et de loin, les plus consommateurs de ressources et pollueurs, dans ce sens s’était donc plutôt une bonne chose, mais elle s’étend maintenant au monde entier. Défaut de décès et baisse de natalité vont conduire à une inversion catastrophique de la pyramide des âges comme on le voit déjà maintenant en Chine; avez-vous déjà essayé de faire tenir en équilibre une pyramide sur sa pointe?!

    2. La Suisse a de mon point de vue une fiscalité trop attractive qui a amené et amène nombre d’entreprises à venir s’installer pour payer moins d’impôts. Ceci amène plein d’emplois et des revenus mais aussi les problèmes de mobilité et de logement que vous soulevez ainsi que l’importation de main-d’oeuvre étrangère car le marché du travail local ne peut pas répondre à la demande. Oui la démographie fait partie de l’équation à résoudre comme les modes de production et de consommation. C’est pourquoi je remets en cause dans mes interventions publiques le dogme de la croissance, le toujours plus n’est pas tenable. Quant à l’initiative “Pour la responsabilité environnementale”, si on prend au sérieux les limites planétaires, la question de la démographie ne pourra pas être éludée…

      1. Vous voulez réduire la population résidente en Suisse ? Avec quelles incitations?

        L’UDC hurle “les Sarasins dehors”.

        Quel est votre slogan?
        “Ne faites pas d’enfant?”,
        “L’enfant unique?”,
        “Les riches dehors?”,
        … ?

        1. Pour préciser: l’enjeu prioritaire est clairement de réduire l’empreinte écologique par personne en Suisse afin que celle-ci soit compatible avec les ressources à disposition et les limites planétaires.
          La question de la démographie vient en second lieu mais se posera avec d’autant plus d’acuité si nous ne réussissons pas à réduire notre empreinte écologique de manière significative. C’est cependant une question difficile à traiter car elle touche à la sphère intime et privée. Je n’ai pas de solution toute faite mais je pense qu’on doit aussi tenir compte de cet aspect, même s’il est encore un peu tabou de l’évoquer.
          Enfin, je n’ai pas parlé de réduction de la population en Suisse mais dit que la croissance continue de la population, due au dynamisme de notre économie et non à un taux de natalité élevé, ne me semble pas tenable à long terme.

          1. Merci pour votre réponse.

            Vous savez… un jour, il faudra dire à vos électeurs les conséquences réelles du programme de décroissance de votre parti.

  3. Sur les 9 domaines que vous citez, nous pauvre Suisse ne peut infléchir que 1 millionième de toutes les valeurs citées par le Vert ! ON ne représente rien à l’échelle de la planette ! On regarde notre nombril sans utiliser les leviers que notre économie et notre nation peut lever contre les puissances et les industries pollueuses!
    Pour info une ferme de Bitcoin au US utilise plus d’énergie en une année que toute la Suisse !
    Encore une initiative pour taxer et pénaliser le citoyen Suisse !
    Pourquoi ne pas boycoter les JO de Pékin 22 et fédérer les autres nations contre ce pays pollueur pour essayer de marquer notre préoccupation ? Pourquoi ne pas surtaxer les produits que vos jeunes verts achètent à tour de bras sur internet ? pourquoi ne pas favoriser exclusivement notre production locale de légumes et fruits ? (le jeune vert ne mange jamais de fraise en hiver ?) pourquoi ne pas favoriser la production locale d’énergie par de petite centrale thermique ou de production d’hydrogene vecteur d’électricité ?
    Essayer d’avoir des idées avant de punir et pénaliser le citoyen Suisse !
    Et arrêtez de vouloir nous faire croire que les centrales à gaz sont moins polluantes !!!

    1. En quoi une initiative qui vise à adapter notre système socio-économique pour qu’il respecte les limites de l’écosystème punit et pénalise le citoyen?
      Je ne suis pas d’accord avec le sempiternel argument que nous ne pouvons rien faire car la Suisse est trop petite au niveau mondial. Avec un tel raisonnement on est sûr de finir dans le mur… alors que nous avons des compétences en termes par ex. de recherche ou de diplomatie qui peuvent contribuer à trouver des solutions valables aussi dans d’autres parties du monde.

  4. Nous devrions commencer par des mesures radicales plutôt que de mettre des taxes sur tout. Les surexploitations des sols et des eaux, menacent nos ressources naturelles et la qualité de vie des riverains des domaines viticoles comme on peut le voir en Valais et dans le canton de Vaud.
    Les VERTS ne font rien et n’ont jamais rien faire contre ce scandale sanitaire qui touche notre population, la faune, la flore, la biodiversité … L’eau des fontaines publiques n’y est plus potable dans presque tout le Lavaux !
    Pourquoi ? Parce qu’ils s’accoquinent avec les lobbys du vin ? de la grande distribution d’alcools ?
    La vigne occupe des surfaces inadaptées à la culture, mais compte tenu des subsides accordés, on en plante dans des pentes à plus de 75% ! On ne peut mécaniser ces innombrables parcelles, alors on déverse des quantité de désherbants, de sulfates et autres produits dangereux pour la santé humaine et le reste de la biodiversité ! Plus simple et plus rentable!
    Les hélicoptères font des ravages sur les arbres et les ruisseaux censés être protégés par des distances légales d’épandage! Des dizaine de milliers de litre de kérosène sont utilisés sur ces régions! Des sulfateuses qui polluent par des dizaines de traitements par années sur toute les parcelle, autant la biodiversité et le citoyen par un stress d’emissions auditives polluantes.
    Est-ce que les VERTS ont déjà essayer de régler ce problème ? NON on ne trouve aucune trace de combat pour faire valoir le droit à la santé du citoyen !
    Autre sujet, pourquoi Syngenta produit des quantités de tonnes de pesticides en Suisse, dont plusieurs totalement interdit en Suisse pour des raisons évidentes de sécurité sanitaire mais exportées dans les pays qui n’ont pas les moyens de défendre leur population par des lois. Que font les VERTS ? RIEN.

    1. Qui parle de taxe?
      Je vois que vous connaissez bien mal le combat des Vert.e.s contre les pesticides. A part notre engagement pour les deux initiatives qui ont malheureusement été refusées en juin dernier, voici quelques exemples d’interventions parlementaires récentes au niveau fédéral (et il y en a beaucoup faites aussi dans les cantons):
      Produits chimiques nocifs. Pourquoi le Conseil fédéral tolère-t-il dans les denrées alimentaires la présence de résidus de produits phytosanitaires interdits?: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20203351
      Connaître l’effet des produits phytosanitaires sur la santé des agriculteurs, viticulteurs et arboriculteurs ainsi que des riverains grâce à la mise en place d’un système de monitorage: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20214217
      Garantir des conseils indépendants aux utilisateurs professionnels de produits phytosanitaires en Suisse: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20213776
      Pesticides perturbateurs endocriniens. Quels critères d’évaluation pour quelle efficacité?: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20213786
      Résidus multiples de pesticides dans les denrées alimentaires: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20204177
      Pesticides de synthèse. Tumeurs cérébrales et maladies respiratoires des enfants: https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft?AffairId=20204166

  5. Merci pour ces éclaircissements sur les actions politiques des Verts Suisse.
    Pour une fois (!) à la lecture de votre réponse, je suis surpris et d’accord avec vos actions ou les tentatives de faire bouger les choses au niveau politique. Je comprends que ce n’est pas simple de faire bouger les mentalités politiques mais est ce que vos actions se concrétises ?
    Ne devriez-vous pas faire des actions plus percutantes avec les gouvernements cantonaux concernés pour ce qui à trait à la culture ultra polluante des vignes ? Ou des actions coup de poing sur la région pendant les épandages d’hélicoptère par exemple ?
    Il est vrai que la culture de la vigne sur les coteaux escarpés du Lavaux ou du Valais n’est plus adaptée à la dure réalité du marché actuel compte tenu du fait qu’on entretient artificiellement cette culture à grand coup de subventions car elle est ultra polluante.
    Pourquoi ne vous intéressez-vous pas à des cas comme Le Lavaux qui est protégé par l’UNESCO pour de multiples raisons, mais sont-elles encore pertinentes ? Les eaux sont polluées, les murs de vignes en pierres sèches sont progressivement remplacer par des murs en béton, des constructions de villa pharaonique comme à Bossières sur Lutry sont autorisées, les petites rivières sont régulièrement aspergées par les hélicoptères, les forêts ou zone de biotope aussi, l’utilisation de Rundup est autorisée proche des écoles et des villages, etc… etc…

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