Mensonge, omission ou transparence ?

 En fin d’année, le stress des fêtes, les contraintes liées au COVID, le temps perdu dans les transports ou l’écart (de plus en plus grand) entre vos valeurs et celle de votre entreprise, vous amèneront à scruter ailleurs, le nez collé à la fenêtre. L’herbe n’est-elle pas plus verte dans le champ du voisin? Après la prise de conscience et la réflexion viendra le passage à l’acte: rédiger votre candidature, qui — encore aujourd’hui et malgré toutes les avancées technologiques — se compose en premier lieu d’un CV et d’une lettre d’accompagnement (ce terme me semble plus adéquat que lettre de motivation), sésames incontournables pour décrocher un entretien d’embauche. Décryptage.

 1. Si vous cherchez à duper le/la recruteur·se, autant s’abstenir

Lorsque vous établissez (ou remettez à jour) votre CV, sachez que le/la recruteur·se passe ses journées à en lire, l’œil affuté. À l’instar du boulanger qui, d’un seul coup d’œil, repère au sortir du four, les croissants « invendables ». Il/elle va débusquer à la fois les écarts entre le profil recherché et les éléments potentiellement dissonants. Partage de l’une de mes grilles de lecture afin d’éviter certains écueils lors de votre postulation :

  • Âge : un critère très important. Le profil recherché doit s’intégrer dans une équipe et l’équilibre des âges est un paramètre à ne pas négliger. Si l’équipe est composée majoritairement de seniors, l’objectif sera de rajeunir la team, et ce, malgré vos excellentes compétences.
  • Lieu de domicile : je corrèle cette information avec la lettre d’accompagnement. Si vous habitez à plus d’une heure de trajet, vous devez clairement indiquer votre flexibilité et la raison de votre intérêt pour le poste : « Actuellement Parisiens, nous avons comme objectif familial de nous établir en Suisse, dans la région de Montreux ».
  • Emploi actuel ou dernier emploi : pour comprendre l’adéquation à la fonction, le titre du CV et les principales réalisations doivent être clairs. Les données chiffrées n’ont pas lieu d’être à ce stade, car il est impossible de les corréler : mentionner une croissance de 50 % du chiffre d’affaires ou une réduction des coûts de 20 % demeure risqué ou aléatoire.
  • L’accroche du CV ou l’objectif professionnel : l’adéquation entre le poste et les objectifs se doit d’être cohérente : si vous écrivez « je veux me développer dans une société internationale » alors que l’annonce provient d’une PME locale, ne soyez pas surpris·e d’être recalé·e !
  • Les compétences linguistiques et la formation : le/la recruteur·se va analyser les « écarts » et vérifier dans la lettre d’accompagnement les réponses manquantes : si le poste requiert l’allemand et que rien n’indique votre niveau ou votre volonté à l’apprendre, votre dossier sera placé dans la mauvaise pile immédiatement.
  • Les «trous» ou omissions : la cohérence de votre parcours et les « trous » dans le CV s’analysent également. La transparence et la clarté des informations seront très appréciées. Une activité qui va de « 2018 à 2019 » sera examinée avec attention. En effet, elle peut signifier 24 mois ou… 2 mois ! Si la lecture du certificat de travail stipule une courte durée, le/la recruteur·se pourra croire à une tentative de manipulation de la vérité : une entrée en matière bancale.

À noter: adaptez votre CV au poste en question et ne cherchez pas à masquer ou travestir des informations. Il y a une forte probabilité que vous n’ayez jamais l’occasion de vous expliquer lors d’un entretien.

2. Si vous bâclez votre lettre, autant renoncer à postuler

Ah ! la fameuse lettre de motivation ou e-mail d’accompagnement du CV… Je suis estomaqué du peu de soin que les postulant·es prennent à rédiger ce document. Avec les sites d’emploi, le click est trop facile et beaucoup se contentent d’un CV pur et simple : « le/la recruteur·se fera le tri ». Effectivement. Il/elle aura une grande tendance à placer le CV sur la pile « négatif ». Alors, voici quelques suggestions pour y parer :

  • Il est primordial que le/la recruteur·se puisse comprendre les raisons de votre postulation, lister vos valeurs ajoutées et corréler votre parcours professionnel avec le poste à pourvoir. Ce document doit répondre à : «Pourquoi nous? Pourquoi vous?» pour inciter à une rencontre prochaine.
  • Afin de faciliter la gestion de votre dossier de candidature (fichiers .pdf), il est opportun de mentionner les principaux éléments de votre lettre d’accompagnement dans le corps de l’email.
  • Utilisez aussi ce vecteur de communication pour expliquer un élément différentiateur !
  • « Mon niveau d’allemand actuel correspond au B1, mais je suis des cours intensifs pour atteindre le C1 »
  • « Habitant actuellement à Bienne, j’ai comme objectif de déménager à Lausanne afin de résider près de mon lieu de travail »
  • « Je n’ai pas de certification PMI, mais je dispose de 15 ans d’expérience en gestion de projets, à mon sens tout aussi pertinents »

3. Si vous négligez sa préparation, autant abandonner

Vous venez de recevoir une magnifique nouvelle ! Votre candidature a passé les premiers filtres : vous avez été retenu·e pour un entretien d’embauche (en visioconférence ou en présentiel). À ce stade, quatre à huit personnes demeurent en lice. Je suis toujours frappé du nombre de candidat·e·s qui se présentent la bouche en cœur, sans aucune préparation. Est-ce un manque de motivation ? De la paresse ? Un ego surdimensionné ? De la naïveté ? Croyez-vous que le simple fait d’avoir été sélectionné·e vous dispense de tout effort pour décrocher le poste ? Voici quelques conseils pour optimiser votre temps de parole :

  • Lisez les derniers rapports annuels, faites des recherches en ligne sur la société et les personnes présentes lors de l’entretien
  • Si votre CV comporte quelques trous ou « virages », préparez-vous à avoir un discours clair et transparent
  • Inutile de cacher que vous venez de subir un licenciement. Votre interlocuteur/trice sera sûrement rompu·e aux techniques d’entretien : il/elle risque de détecter vos incohérences verbales ou gestuelles. Autant miser sur la réalité factuelle.

Gardez aussi à l’esprit que les compétences relationnelles, l’envie de travailler ensemble sont tout aussi importantes que les atouts techniques. En fin de compte, en tant qu’humains, nous privilégions l’envie de collaborer dans un environnement le plus agréable possible. Alors, autant investir le temps et l’énergie nécessaires pour construire votre prochaine étape de vie professionnelle.

Belles fêtes de fin d’année à vous !

Christophe ANDREAE [[email protected]www.jrmc.ch]

Professionnel du recrutement de cadres et de spécialistes (plus particulièrement dans les profils d’expert·e·s et de cadres ingénieur·e·s ainsi que dans le secteur informatique). Enfin, j’aime également partager mon expertise pour des missions confidentielles ou dites sensibles.

Suivez-moi en vous abonnant à mon blog: https://blogs.letemps.ch/christophe-andreae/author/christophe-andreae/

 

 

 

Christophe Andreae

Depuis plus de 20 ans, Christophe Andreae exerce le métier de chasseur de têtes, avec un accent plus particulier sur les métiers technologiques, tant pour les experts que pour les cadres. Il est en contact permanent avec des sociétés qui recherchent des talents, des candidats qui veulent faire évoluer leur carrière et des conseil d'administrations.

2 réponses à “Mensonge, omission ou transparence ?

  1. voilà bien qui démontre l’absurdité des RH qui se focalisent sur des points secondaires ( même si vous ne maitrisez pas une langue étrangère parfaitement, quelques mois avec des collègues colmateront les lacunes ) . Le candidat tiré à 4 épingles prêt à l’emploi n’est pas une garantie de succès sur le long terme (le vernis de façade finit par craqueler, quand on gratte un peu , on ne trouve rien dessous) , les conditions changent au bout de quelques années et en suivant leurs principes, il faudrait aussi renouveler le personnel presque chaque année !!!
    La question de la créativité n’est pas assez mise en évidence : les idées nouvelles, la possibilité de trouver des solutions ne se lit pas dans un CV et la psychologie des recruteurs laissent à désirer … surtout pour des postes qui requièrent des facultés intellectuelles pointues !!!
    C’est une caricature de recrutement , surtout à ne pas suivre …

    1. C’est un point de vue intéressant. On peut démontrer sa créativité dans le CV, la lettre d’accompagnement et
      l’entretien. Ce je trouve dommage, c’est souvent le peu de soin que le candidat investit dans sa postulation.
      Après …

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