Chine: Quand la femme adultère est lapidée par Jésus…

 

La Chine et le Vatican se sont entendus pour prolonger l’accord historique provisoire conclu en 2018. Ce texte permet à Rome et à la Chine de se mettre d’accord sur la question ultrasensible de la nomination d’évêques dans un contexte actuel  durcissement du pouvoir chinois. Il utilise cependant les mêmes termes qu’en 2018. La question de nomination d’évêques peut paraître technique, mais ce qui importe pour Rome, est l’unité des catholiques chinois et l’évitement d’un schisme. En effet, depuis une dizaine d’années, les autorités désignaient elles-mêmes les évêques, parallèlement à ceux clandestins par Rome. Par deux fois les autorités chinoises avaient affirmé leur volonté de les nommer, une quarantaine, en dehors de l’approbation de Rome, ce qui aurait rendu difficile une reconnaissance postérieure. Aujourd’hui, Rome a une sorte de veto et s’engage à ne plus nommer des évêques clandestins.

Une première : en novembre 2019, plusieurs négociateurs venus de Rome avaient reçu l’autorisation de célébrer une messe dans la cathédrale de Pékin, un évènement suivi, en février 2020, d’une rencontre entre le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi et son homologue au Vatican Mgr. Paul Richard Gallagher, avec l’ordination possible de deux nouveaux évêques.

Mais tout cela se produit dans le nouveau contexte de durcissement chinois. Il y a l’importante critique du cardinal Joseph Zen, ancien évêque de Hong Kong. Il estime que cela peut amener à « l’anéantissement de la vraie Eglise » chinoise. D’autres critiquent aussi le fait que cet accord reste secret ce qui permet aux autorités chinoises de pouvoir toujours se prévaloir d’une caution du Vatican pour mener ses actions. Des catholiques chinois pensent que cet accord ne conduit pas au respect de la liberté religieuse.

Ce qui a fait sursauter le ministre américain des Affaires étrangères Mike Pompeo en visite ces jours au Vatican après sa tournée au Moyen Orient et en Méditerranée, c’est l’interprétation du « catéchisme chrétien » chinois où Jésus doit se fondre dans l’idéologie chinoise : « La femme adultère est lapidée par Jésus », obéissant ainsi aux lois de son pays Israël. Jésus est ainsi mis au service de la culture politique chinoise. Une sorte de win-win…

Mais le Père Antonio Spadaro reste malgré tout positif. Cela permet de passer d’une Eglise clandestine à une Eglise officielle. La revue jésuite Civiltà Cattolica a aussi la permission de publier les messages du pape François en chinois, et utilise aussi le réseau Wechat, très prisé. Une manière d’entretenir un lien entre Pékin et Rome. Ce n’est pas l’avis de Trump évidemment, ni de Mike Pompeo, ni d’un ancien cardinal Carlo Maria Vigano qui avait osé demander la démission de François aussi pour d’autres raisons. Mais au Vatican, on parle du « martyre de la patience »…

 

 

 

 

 

 

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.

Une réponse à “Chine: Quand la femme adultère est lapidée par Jésus…

  1. Bonjour Madame Christine Von Garnier,
    Vous êtes inquiète de l’attitude des autorités chinoises face à la religion chrétienne et je le suis aussi. Toutefois on pourrait aussi écrire que la pratique religieuse chrétienne en Chine est plus importante qu’en Europe et que le plus grand éditeur de Bible dans le monde est une entreprise chinoise. Ce développement de la religion chrétienne en Chine est surtout présente chez beaucoup d’entrepreneurs chinois et dans le monde universitaire. Cette diffusion de la religion chrétienne dans la population chinoise est bien connue des autorités politiques qui essaie de la maitriser maintenant non de la détruire comme dans la période maoiste.
    Cordialement

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