Mugabe et le Réarmement moral de Caux

Une petite histoire dans la grande histoire de la décolonisation de l’Afrique australe :

Le Réarmement moral, aujourd’hui « Initiatives et Changements », était très actif dans les années 70-80 en Afrique australe au moment des décolonisations et contre l’apartheid. En Angola, au Mozambique, en Rhodésie en Namibie, et en Afrique du Sud, il y avait des mouvements de libération soutenus essentiellement par les Russes et les Chinois dans un contexte de guerre froide.  Mais à l’intérieur de ces pays, il y avait aussi des Blancs qui luttaient pour la justice et l’indépendance.

L’apartheid était particulièrement inacceptable pour les Calvinistes suisses romands car c’était la toute puissante Eglise calviniste hollandaise sud-africaine qui, en se basant sur l’Ancien Testament, avait enraciné sa politique raciste. Le Réarmement moral de Caux (fondé à la suite de la 2e guerre mondiale) se sentait ainsi particulièrement concerné. Certains de ses membres étaient actifs à faire changer ces mentalités en Afrique du Sud, mais aussi à préparer les futurs responsables de ces pays. C’est ainsi qu’ils « coachaient » le fils de Jan Smith, Premier Ministre de la Rhodésie  (Zimbabwe ) qui avait refusé les Accords de Lancaster de Londres voulant donner l’indépendance à leur ancienne colonie. Mais Jan Smith refusa et déclara une indépendance unilatérale. Son fils Alec, qui étudiait en Afrique du sud, n’était pas du tout d’accord avec son père et menait une vie d’étudiant un peu désordonnée. C’est à lui que deux membres du Réarmement moral s’adressèrent, d’abord pour l’aider et ensuite pour lui proposer de rentrer en Rhodésie pour convaincre son père de rencontrer le « terroriste » Mugabe, qui luttait par les armes. Et il réussit. Jan Smith finit par accepter de rencontrer secrètement chez lui le «terroriste» Mugabe et ensemble ils préparèrent l’indépendance du pays.  Un des sujets délicats était de réunir les deux armées : celle de libération et celle de Rhodésie. C’est Alec Smith devenu entre temps aumônier, qui réussit cette tâche difficile.

L’auteur de ces lignes l’a rencontré quelques années plus tard à Harare alors qu’il venait d’écrire un livre « Tu seras mon frère ». Il avait beaucoup d’humour et pas trop d’illusions. Pendant quelques années, Mugabe dirigea le pays  avec compétence, mais comme presque partout dans les pays nouvellement indépendants, les groupes ethniques se firent la guerre. Mugabe fut implacable envers Nkomo et les Ndebele qui s’étaient aussi battus pour l’indépendance du pays. Il devint un dictateur qui emprisonnait ses adversaires politiques et les torturait. Le Réarmement moral n’avait pas prévu cela….    

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.

2 réponses à “Mugabe et le Réarmement moral de Caux

  1. L’Afrique ne s’en sort pas, elle sera chinoise, comme amlat, avant que tous les guignols occidentaux, les mêmes qui essaient de déboulonner mon ami Pape François, puissent faire quoi que ce soit.

    Vous verrez.
    Pauvres africains, pauvre amlat… et pauvre Europe!

  2. “Le Réarmement moral n’avait pas prévu cela….  ”
    Et c’est bien le problème… à force de nier la réalité, au profit d’un idéal moral supérieur, on se retrouve aujourd’hui à encourager la venue sur notre territoire de mafia, p. ex. nigériane, qui empoisonne nos enfants avec de la cocaïne et pire encore.

    Avoir raison mais soutenir les mauvaises personnes, c’est tout le problème de l’EPer et Cie…

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