Le nord du Mozambique mis à feu et à sang par des djihadistes

 

A peine remis du passage dévastateur de l’ouragan Kenneth en avril dernier, le nord du Mozambique, constitué essentiellement de Musulmans, et riche en gaz,  doit faire face à des djihadistes radicaux qui veulent instaurer la loi islamique. Depuis plus d’un an et demi, plus de 200 personnes ont été tuées, surtout à la machette, ou brûlées vives dans leurs cases incendiées dans des villages ou des embuscades. Jusqu’à présent, l’identité de ce groupe est restée mystérieuse.

Mais pour la première fois, à fin mai, le groupe EI (Etat Islamique) explique opérer au Mozambique : « Les soldats du califat ont pu repousser une attaque de l’armée mozambicaine des croisés dans le village de Metudi (nord). Ils les ont affrontés avec une variété d’armes tuant et blessant un certain nombre d’entre eux… Les moujahidines ont saisi des armes, des munitions, des roquettes comme butin. » La police mozambicaine a démenti ces affirmations : « Les forces de sécurité sont présentes sur tout le territoire. L’armée et la police ont nettement renforcé leur présence dans la province de Cabo Delgado (nord), région où opèrent les islamistes, pour les mettre hors d’état de nuire. Sans succès. Pour le seul mois de mai ce mystérieux groupe que la population locale appelle  « Al Shabab (les jeunes) a tué au moins 40 personnes, blessés des dizaines d’autres, et incendiés des centaines de maisons (AFP).

Les informations dans le nord du Mozambique sont très difficiles à obtenir à cause de la répression contre les journalistes par les autorités mozambicaines. Mais des experts ont dénoncé une propagande : « Il est normal d’entendre de telles revendications, a estimé Fernando Jorge Cardoso (Institut universitaire de Lisbonne), c’est bon pour l’EI de dire qu’ils s’étendent, et c’est bon pour le groupe au nord du Mozambique qui se sent faire partie d’un groupe plus important. C’est de la propagande. » Un autre expert qui ne souhaite pas dire son nom, explique : «  L’EI n’est pas au Mozambique mais il a peut-être des liens au Mozambique. Dans son communiqué, il fait une grave erreur géographique. Le village de Matudi où auraient eu lieu les affrontements se situe dans la région de Mocimboa. Or Matudi est dans le district de Quissanga à une centaine de kilomètre de Mocimboa.  En plus la date du communiqué n’est pas anodine, elle coïncide avec l’Aïd qui marque la fin du ramadan. »

« C’est vrai que depuis la disparition de son califat autoproclamé en Syrie et en Irak, l’EI essaye de montrer qu’il a des liens ailleurs et tente de compenser son absence sur internet. Ils ont toujours un site internet  et veulent montrer qu’ils sont toujours là. »,  expliquent encore les deux experts.

Il est aussi préoccupant de constater que les djihadistes essayent de s’infiltrer au Burkina Faso, et dans d’autres pays de l’ouest africain où ils sont combattus au Mali par l’armée française aidée par des coups de mains américains.  Au Mozambique ils ont l’appui des shababs de Somalie. Inquiétantes déstabilisations…

 

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.