L’éléphant indien en Afrique

                                         

Le continent africain, malgré son insécurité due à des rebelles dangereux dans plusieurs pays, attirent les investisseurs étrangers grâce à ses énormes potentialités économiques et au dynamisme de ses habitants qui sont plus d’un milliard. Les Chinois s’y sont installés durablement depuis deux décennies, pas trop aimés de la population africaine qui ne voit pas vraiment les retombées de leurs investissements. Ils profitent surtout aux cadres que les Chinois ont corrompus et au développement de la Chine. Et voilà maintenant les Indiens, qui, à vrai dire, sont là depuis longtemps sur la côte Est et en Afrique du Sud que Gandhi avait vus au début du XXe siècle.   Il y a entre eux un lien important, celui d’avoir été colonisés et non-alignés.

Le Premier ministre indien Narenda Modi veut que son Etat  se fasse une place plus grande sous le  soleil africain. En 2015 à New Delhi lors du sommet Inde-Afrique, l’Inde avait déjà promis d’accorder aux pays africains des prêts concessionnels de 10 milliards de dollars ainsi qu’une aide de 600 millions de dollars sur cinq ans, auxquels s’ajouterait un nouveau fond de développement Inde-Afrique en discussion. L’Exim Bank of India qui a financé jusqu’ici des projets d’infrastructures à l’Est et au Sud, a aussi ouvert des bureaux à Abidjan et Dakar avec des antennes à Johannesburg et Addis Abeba. En plus des 29 ambassades qu’elle a déjà, elle en a ouvert de nouvelles qui permettront de consolider les liens avec la diaspora indienne établie dans plusieurs pays africains.

Le ministre indien du commerce, Seresh Prabhu, estime que « l’Inde et l’Afrique gagneraient à négocier un accord de libre-échange pour renforcer les échanges commerciaux bilatéraux qui demeurent en deça de leurs potentiels » (voir Hebdo3, 6.04).  Il a aussi exhorté les pays africains à utiliser le régime préférentiel indien de franchise de droits pour les pays les moins avancés (DFTP), qui pourrait faire passer les échanges commerciaux de 53 milliards en 2017 à 150 milliards d’ici cinq ans.

Il est important de noter que dans le cadre du 1er sommet de l’Alliance solaire internationale ((ASI), le gouvernement indien a annoncé l’octroi d’un milliard de dollars à 13 pays africains (Bénin, Burkina Faso, Mali, Togo, entre autres) pour financer des projets d’énergie solaire. Imaginée par l’Inde et la France lors de la Cop21, l’ASI est destiné à diminuer le coût de l’énergie solaire. En effet, les panneaux solaires seront fournis par des entreprises indiennes dont les prix sont plus bas que les chinois !

Pour renforcer son implantation sur le continent africain, le gouvernement indien s’est allié au Japon pour lancer une initiative commune baptisée Asia African Growth Corridor (AAGC), la route de la croissance Asie-Afrique. Elle est surnommée la « Route de la Liberté », car considérée  comme une alternative au projet chinois pharaonique de la Route de la Soie (One Belt, One Road). La riposte indo-nippone au projet chinois a été annoncée une dizaine de jours seulement après le premier sommet international sur la Route de la Soie organisé à Pékin en 2017.  On ne peut que se réjouir de ces initiatives indo-niponnes qui cassent le monopole chinois sur l’Afrique.

  

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.

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