Afrique du Sud: on veut se débarrasser de Jacob Zuma

Pendant que la RDC s’enfonce encore plus dans la dictature du clan Kabila, qu’Obama essaye de convaincre le Kenya, pays de son père, d’éviter les violences ethniques pendant les élections pour construire un pays vraiment démocratique, que le président Kagame au Rwanda vient de gagner lui-même les élections avec 98 % de voix, le Parlement sud-africain examine aujourd’hui 8 août une motion de défiance contre leur président Jacob Zuma à la tête du pays depuis 2009.

Cette initiative est la quatrième contre le président sud-africain dont le second mandat expire en 2019. Il est embourbé dans des myriades de scandales dont celui du limogeage du ministre des finances Pravin Gordhan, grand pourfendeur de la corruption, cette plaie du continent africain. Cette situation affaiblit considérablement le Congrès national africain (ANC) à deux ans des élections en 2019 (voir Le Monde 7.08.)

De l’avis des vétérans de l’ANC, dont plusieurs ont combattu aux côtés de Nelson Mandela, « l’Afrique du Sud est le témoin d’un vol à grande échelle qui laisse le pays appauvri et aux mains d’un gouvernement de criminels (parmi lesquels la puissante famille d’origine indienne les Gupta). La motion de défiance est la conséquence de tous les scandales dans lesquels il s’est malheureusement empêtré ».

Même son de cloche du côté du parti communiste qui a toujours joué un rôle important dans la lutte contre l’apartheid. L’évêque Tutu, compagnon de lutte de Mandela, cofondateur de la Commission Vérité et Réconciliation, a quitté l’ANC depuis longtemps, quand il a appris que les cadres de l’ANC ont des mines de diamants en République Centre Africaine, un pays aussi dans un état larvé de conflits intérieurs.

Remarquons que cette mainmise sur les richesses d’un Etat par un clan familial est ce qui se passe en République Démocratique du Congo. Là les institutions démocratiques ne fonctionnent plus comme en Afrique du Sud et les emprisonnements, les tortures, les assassinats sont devenus monnaie courante. C’était l’Eglise catholique qui s’était efforcée de jouer les médiateurs, mais elle a jetté l’éponge. Aujourd’hui, des églises sont vandalisées et des prêtres assassinés. Idem au Nigeria qui a engendré Boko Haram…

Cette motion de défiance ne devrait pas passer, selon certains observateurs, parce que le parti majoritaire, l’ANC, a 249 élus sur 400. Mais la présidente du Parlement Baleka Mbete, a décidé que la motion de défiance se fera à bulletin secret et non à main levée. Ce qui pourrait encourager les députés de l’ANC encore fidèles aux valeurs de la nouvelle Afrique du Sud de se débarrasser définitivement de leur président.

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.