MIT.nano: l’outil qui met l’infiniment petit au service de l’infiniment grand

Le MIT s’apprête à mettre en service son laboratoire de nanotechnologie. C’est là que se trouveront beaucoup de solutions aux défis du futur, environnement compris. Visite exclusive.

 

Un nanomètre est un milliardième de mètre. L’épaisseur d’un cheveu humain est de 50’000 nanomètres. Nous sommes désormais capables de voir et de manipuler la réalité à cette échelle. Et de mieux la comprendre: les chercheurs ont découvert que la matière à cette échelle se comporte de façon révolutionnaire. C’est comme si on soulevait un coin du tableau périodique des éléments et qu’on découvrait une autre version en dessous – une version qui énumère les mêmes éléments, mais avec des propriétés entièrement nouvelles. Un exemple: on connaissait le graphite, une forme de carbone qui nous est familière grâce aux bons vieux crayons. On a découvert comment créer des feuilles de graphite de l’épaisseur d’un seul atome: le graphène, le matériau le plus mince qui existe. Souple, léger et incroyablement conducteur, c’est aussi le matériau le plus résistant connu de l’humanité: 200 fois plus résistant que l’acier. Il va peu à peu remplacer le silicone. Les recherches intensives dans ce domaine nous donnent donc le pouvoir de remodeler notre monde à l’échelle nanométrique.

 

270’000 noms (d’alumni MIT) gravés dans une plaque de silicone de 20 cm

Une solution aux besoins énergétiques croissants du monde digital

Les perspectives de ces recherches sont incroyablement prometteuses. Le volume du cloud computing, par exemple, devrait être multiplié par mille au cours de la prochaine décennie. Une telle croissance nécessiterait cinquante fois plus d’électricité que l’ensemble de l’économie américaine d’aujourd’hui. La nanotechnologie a la capacité de relever ce défi – et une foule d’autres – à condition de commencer sans tarder.

 

Un embouteillage de chercheurs.

Cet enjeu crée un véritable embouteillage dans les grands centres de recherche où un nombre croissant de domaines passent désormais par le laboratoire de nanotechnologie. D’où la décision stratégique de construire le MIT.nano, un ensemble situé au cœur de l’institution (adjacent au fameux Dôme afin, comme toujours ici, de favoriser les échanges interdisciplinaires) et qui permettra dès son entrée en fonction de centraliser l’effort de recherche et de désengorger les multiples laboratoires disséminés dans le campus.

 

Vladimir Bulovic, Directeur du MIT.nano

Le labo de l’année 2019

Tout juste achevé mais pas encore investi par ses utilisateurs, le MIT.nano fait la fierté de son directeur Vladimir Bulovic (h-index 102) qui, empreint d’une bonhomie probablement due à ses origines slaves, conduit la visite. Ouvert au mois de mai, le labo a déjà reçu le prix du laboratoire de l’année aux USA. Ce bâtiment est constitué de quatre étages répartis en trois sections qui ont des fonctions distinctes:

 

 

 

Le bâtiment est constitué de quatre étages répartis en trois sections qui ont des fonctions distinctes

 

Sur la gauche du couloir, les salles les plus “calmes” de tous les Etats-Unis

L’imagerie à l’échelle nanométrique

Au sous-sol se trouve la partie la plus spectaculaire: l’espace dédié à l’imagerie à l’échelle nanométrique. Il s’agit de l’espace “le plus calme et le plus silencieux” du MIT (et probablement des USA, sourit Bulovic). Pourquoi ? Car à cette échelle, toute vibration rend l’image floue comme c’est le cas quand le sujet d’une photo bouge. Il a donc fallu concevoir des salles optimisées pour l’imagerie à faible vibration et à faible interférence électromagnétique, une technique de microscopie dont les progrès sont en partie dus au professeur suisse Dubochet et à ses deux collègues américains (Nobel 2017 de chimie). Chacune des 12 salles a coûté près de USD 20 millions… C’est là qu’on peut « voir » la matière de manière totalement nouvelle, comme cette enzyme impliquée dans la production d’ADN. (Photo de couverture)

L’entier de l’air renouvelé toutes les 15 sec.

Des salles blanches… oranges

Aux niveaux supérieurs se trouvent deux environnements quasi totalement exempts de particules. Au-dessus de chaque salle se trouve un dispositif qui en change le volume entier de l’air chaque 15… secondes. Elles sont de plus, irradiées aux rayons ultraviolets, d’où une couleur orange dominante. C’est ici que l’on travaillera à la conception et la fabrication de structures à l’échelle micro et nanométrique.

 

L’espace des “Makers”. Les futurs entrepreneurs peuvent les louer pour USD 70/jour

Nanomakers

Au dernier étage, se trouvent les espaces dotés d’outils qui permettront de traduire les idées développées dans les étages inférieurs en prototypes et en démos qui peuvent sortir du laboratoire. On tient beaucoup ici à ce que toute recherche débouche sur des implications pratiques qui « servent à la communauté ». L’idée est d’ailleurs de permettre l’utilisation de ces espaces au plus grand nombre. Il est prévu qu’ils soient mis à la disposition, pendant la nuit, le weekend ou les vacances, des ex-étudiants devenus entrepreneurs pour pouvoir gagner un ou deux ans sur le développement de leur projet. Cela pour la somme de USD 70 par jour !

 

Une cellule solaire à base de jus de framboise et de crème solaire…

Les principales avancées

Actuellement, les recherches dans le domaine de la nanotechnologie visent à accélérer le traitement de l’information. Le graphène et le gallium sont plus rapides et plus puissants que le silicium. Une équipe du MIT a utilisé l’arséniure d’indium et de gallium, pour développer le plus petit transistor jamais construit à partir d’un équivalent en silicium, d’à peine 22 nanomètres de long. On envisage aussi des systèmes de propulsion nano-alimentés pour satellites de la taille d’un Rubik’s cube. On parle aussi de calcul optique qui calcule en utilisant la lumière plutôt que l’électricité. Si l’électronique a alimenté l’ère moderne, la nanotechnologie alimente l’avenir de l’électronique. Enfin, l’univers numérique – les données que nous produisons – double tous les deux ans et atteindra 44 billions de gigaoctets d’ici 2020, mais notre capacité de stockage ne suit pas le rythme. Des chercheurs du MIT tentent de combiner les propriétés magnétiques et électriques des oxydes de fer afin de rendre les dispositifs de stockage de données plus petits, plus denses et plus éco-énergétiques.

 

Le MIT.nano va se remplir de ses utilisateurs d’ici à la fin de l’année. Le Professeur Bulovic les attend avec impatience. En attendant, il prépare l’un de ses cours pour la rentrée intitulé Nanomakers, tout simplement. Il commencera par leur montrer comment on fabrique une cellule solaire avec du jus de framboise et un peu de dioxide de titanium que l’on trouve dans la crème solaire…

 

 

 

Christian Jacot-Descombes

Christian Jacot-Descombes a exercé successivement les métiers de neuropsychologue, animateur et journaliste de radio, journaliste de presse écrite et responsable de la communication d’une grande entreprise. Il voyage beaucoup parce qu’il pense que ça ouvre l’esprit et aussi parce que ses différentes expériences professionnelles lui ont démontré qu’il vaut toujours mieux voir par soi-même.

5 réponses à “MIT.nano: l’outil qui met l’infiniment petit au service de l’infiniment grand

  1. Vous me paraissez plutôt sympathique, ami Christian, jacouille,
    mais franchement, vous croyez vraiment à toutes ces sornettes ou vous êtes un lobbyiste?

    1. Cher Olivier,
      Je me permets de vous appeler ainsi car nous avons le même âge et comme vous je ne vis plus en Suisse mais bien plus près que vous, en Bretagne. Je lis régulièrement vos commentaires car nous lisons les mêmes articles. Je ne partage pas votre esprit caustique mais j’ai l’impression que ce n’est qu’une façade et que vous vous souciez vraiment de l’avenir de notre pays.
      Pour en revenir aux nanotechnologies, je suis ingénieure en informatique et ces techniques me font rêver depuis leurs débuts. Je ne vois pas où se cache le lobbyisme dans l’enthousiasme du directeur de ce nouveau département du MIT et je lui souhaite un bel et fructueux avenir.

  2. Hello Olivier,

    Merci du compliment. Je ne sais pas si je suis sympathique mais je suis un indécrottable optimiste et – depuis la nuit du 21 juillet 1969 sans doute – j’ai l’intime conviction que nous sommes capables du meilleur. L’histoire donne raison à mon optimisme: recul de la pauvreté, de la faim, de l’illettrisme. Partout dans le monde, le progrès avance. Il n’y a que dans la vieille Europe que le moral recule. Ce continent subit une grosse dépression probablement liée à l’échec des idéologies de gauche qui fait le lit de l’hystérie climatique actuelle.
    La question n’est pas pour moi de “croire”, cher Olivier, mais de “voir”. C’est pourquoi, je voyage et essaie de découvrir ce que le monde réserve aux prochaines générations. Et croyez-moi, ça sera fantastique: beaucoup de challenges à relever (la science et la technologie s’en chargeront en grande partie) et des perspectives incroyables en termes de connaissances et de savoir.
    J’envie beaucoup les prochaines générations. Et je me réjouis pour elles.

    1. @ Sylvia & @ Christian, vous me faites trop d’honneur de commenter mes “conneries”.

      Vous avez raison d’être optimistes, peut-être que les “nanos” ramèneront les papillons dans mon cul du monde et sans doute l’aurai-je déjà quitté!

      Je n’ai jamais su discerner entre optimisme et réalisme ou encore la méthode Coué, d’où, sans doute, mon pessimisme (ou ma causticité)?
      🙂 suerte

  3. En santé humaine , il y a Nanobiotix qui a reçu en 2019 un marquage CE POUR TRAITER LE cancer avec sa nanoparticule ! les résultats obtenus sont hors norme ! des patients qui en avaient encore pour quelques moisà vivre sont en rémission !

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