Réfugiés, la face barbare de notre ordre établi

Les chiffres publiés de jour en jour sur ce qui est en train de se passer en Méditerranée projettent un panorama terrifiant de ce qui nous attend au cours de ce XXIème siècle. Aux naufragés s’ajoutent ceux – moins médiatisés – qui sont asphyxiés, ceux qui sont abandonnés en plein désert, ceux qui crèvent de faim et de soif, ceux qui tombent « par erreur » sous les tirs des gardes-frontières en presque toute impunité, les victimes de la traite, tous les réfugiés dits « internes » qui n’ont pas pu quitter leur pays… Cette réalité douloureuse du parcours migratoire de centaines et centaines de milliers de personnes claque quotidiennement à notre face avec une cruauté macabre jusqu’ici méconnue. Elle révèle l’ampleur – immense – des erreurs prévisibles et prévues de la globalisation. Comme une marche funeste, ces victimes font résonner toutes les injustices structurelles, innommables et innombrables de notre ordre établi. Elles accablent avec une profondeur jusqu’ici inégalée la validité et la légitimité politique de notre contrat social.

Il ne suffira pas de distiller de manière épisodique de l’empathie dans les discours politiques et de médiatiser quelques naufrages pour se relever la tête haute face à ce qui est en train de se passer. Les mesures prises pour l’endiguer sont si ridicules et absurdes qu’elles tendraient à nous amuser si la situation n’était pas aussi dramatique. Accroître les centaines de millions d’Euros octroyés à Frontex (l’agence européenne chargée d’appuyer les pays pour surveiller leurs frontières externes) pour capter les migrants en mer et ceux octroyés à Eurosur (le système d’échange d’informations) pour surveiller avec des instruments high tech les frontières est sur le fond une hérésie.[1] C’est oublier que la cause du problème réside dans le dispositif qui a été mis en place au début des années 2000 pour claquemurer l’Europe et pour garder à distance – avant qu’ils n’atteignent le territoire européen – tous les migrants venus du Sud. Quelles que soient les causes de leur exode, tout est fait pour les renvoyer vers des pays de transit où ils croupissent dans des camps ou sont refoulés en chaîne vers des pays qu’ils ont justement cherché à fuir à tout prix. Continuer à cautionner ce dispositif, c’est oublier que c’est bien la politique hyper-restrictive des visas combinée avec l’alourdissement des sanctions pénales pour les transporteurs qui empêchent les réfugiés d’utiliser les moyens usuels de déplacement. C’est oublier qu’à une majorité accablante le peuple suisse a voté le 9 juin 2013 pour supprimer toute possibilité de déposer une demande d’asile dans les ambassades. Et que c’est notre politique qui les oblige à faire appel aux passeurs et les contraint à prendre tous les risques pour contourner les obstacles légaux.

La donne sur l’asile a changé. Si la crise migratoire de 2011 s’est caractérisée avant tout par une arrivée importante de jeunes ressortissants maghrébins venus surtout chercher des ressources matérielles, la crise de 2014 est très largement de type humanitaire. Les chiffres 2014 du SEM ne s’y trompent pas puisque le taux de reconnaissance vis-à-vis des demandes d’asile atteint aujourd’hui un niveau record (84% d’octroi de l’asile ou d’admissions provisoires).[2] Les Syriens, les Erythréens, les Sri-Lankais et autres qui frappent aujourd’hui aux portes de nos centres d’enregistrement sont pour une écrasante majorité d’entre eux des réfugiés. Ils sont tant les rescapés des conflits qui déciment leurs pays d’origine que des voyages périlleux qu’ils ont dû entreprendre pour les fuir. Plus le monde se globalise, plus on se doit de protéger les hommes, les femmes et les enfants dans leur globalité. Ces processus de fuite étant irréversibles, nous devons arrêter de nous comporter en somnambules, reconnaître leurs besoins de protection et prendre nos responsabilités pour les accueillir avec la dignité qui s’impose.

 


[1] L'objectif du système Frontex/Eurosur est très clair : il s’agit « d'appuyer les États membres dans leurs efforts pour limiter le volume de ressortissants de pays tiers pénétrant illégalement sur le territoire de l'UE, en améliorant la connaissance de la situation à leurs frontières extérieures et en augmentant la capacité de réaction de leurs services de renseignement et de contrôle des frontières ». Cf. COM (2008) 68 final

[2] SEM, Statistiques en matière d’asile 2014, 12 janvier 2015.

 

2015 : un tournant européen pour la Suisse ?

Les dates historiques adossées aux années ne parlent jamais d’elles-mêmes. Pourtant, il est parfois possible d’y faire référence pour faire ressortir certaines évolutions. Pour la Suisse, les années ’15 en font partie, en particulier vis-à-vis de notre rapport à l’Europe.

Ainsi, 1315 consacre avec la bataille de Morgarten le tournant expansionniste helvétique. La victoire des « Suisses » inscrit désormais la poursuite d’une politique extérieure commune parmi les objectifs communs des vallées de Suisse centrale et donne le coup d’envoi à une phase d’expansion guerrière de 200 ans.

Puis, la bataille de Marignan en 1515 marque la fin de cette puissance européenne helvétique et du colonialisme territorial suisse. L’exportation de mercenaires, la participation au commerce des esclaves vers les terres du « Nouveau Monde » et la mise en place d’un réseau commercial et financier de premier plan prennent désormais le relais.

Le Congrès de Vienne de 1815 sacre quant à lui la continuité européenne de la Suisse qui devient une zone tampon entre les grandes puissances européennes et une épine dorsale stratégique des infrastructures européennes. En contre-partie, on demande aux Confédérés la neutralité face à de futurs conflits militaires.

En 1915, la Conférence de Zimmerwald annonce le renforcement des idéaux et des revendications socialistes. L’Europe devient le laboratoire des moyens de destruction massive issus du capitalisme industriel. Des socialistes et pacifistes européens, opposés à la Guerre de 1914, trouvent refuge en Suisse. Les plus déterminés d’entre-eux, dont Grimm, Lénine et Trotsky, se retrouvent à Zimmerwald pour émettre un programme révolutionnaire au cœur duquel on revendique une cessation des faits de guerre et la rupture avec les partis bourgeois.

Qu’en sera-t-il de 2015 ? Après le 9 février 2014, la Suisse se repose une nouvelle fois la question de son rapport à l’Europe. D’aucuns pensent qu’elle peut résoudre seule ses problèmes actuels (lutte contre la perte de pouvoir d’achat de la moitié des ménages, construction de logements abordables, modernisation des infrastructures, consolidation de l’AVS). D’autres estiment que sans un effort en matière de progrès sociaux, de rôle dynamique de l’Etat sur les infrastructures et les logements, d’offensive de formation professionnelle, une position pragmatique face à l’Union européenne sera impossible à tenir. En consolidant ces réformes, notre avenir européen serait assuré.

En 2015, la Suisse a les moyens de regarder son avenir en face. 

Politique migratoire de Syriza: une note d’espoir

Extrait de la déclaration programmatique de Alexis Tsipras pour une réforme en profondeur de la politique migratoire européenne: 

"The human quest for a better life is unstoppable. Border walls stop human rights – not human beings. As long as the income and prospects gap between, on the one hand, the countries of origin or the transit countries of migration and, on the other, the European Union, remains large and widening, immigration to Europe will continue unabated. The European Union should exhibit the necessary double solidarity: external, to the countries of emigration, and internal, with a just geographical allocation of immigrants in Europe. In particular, the European Union should undertake the political initiative for a new qualitative relationship with those countries, enhancing both developmental assistance and capacity-building for endogenous development with peace, democracy and social justice. In parallel, the overall institutional architecture of the European Union for immigration and asylum has to be changed. We need to ensure the protection of fundamental human rights on the entire European soil and immediately plan efficient measures to rescue migrants on the open sea, to set up reception centers at the entry points, and adopt a legal procedure and a new legal framework, which would efficiently and justly settle access of immigrants to all EU countries, in a fair and proportional fashion, taking into consideration, as far as possible, their own wishes. European Union funding should be redirected accordingly. The recent Lampedusa and Farmakonisi tragedies make clear that both the European Pact on Immigration and Asylum and the so-called Dublin II Regulation [Regulation (EC) 343/2003 and Regulation (EU) 604/2013] should be immediately revised. We reject “Fortress Europe” which only operates as a seeding ground for xenophobia, racism and fascism. We are working for a Europe that will become an impregnable fortress to the extreme right and neo-nazism."

Référence: Alexis Tsipras

Johann Schneider-Ammann : naïveté ou intox ?

La légende veut que le conseiller fédéral en charge de l’économie publique, le libéral-radical Johann Schneider-Ammann, ait été informé par le président de la direction générale de la Banque nationale suisse (BNS) de l’imminence de l’annonce de la décision de l’institut monétaire helvétique d’en finir avec la politique du taux plancher face à l’Euro, une heure seulement avant l’annonce publique de ce choix.

Si la légende était vraie, cela confirmerait que nous avons à la tête de la politique économique de notre pays un homme qui n’est décidément pas à la hauteur de sa tâche. Quelques annonces empreintes de candeur pourraient nous conforter dans cette appréciation. En effet, il est particulièrement maladroit de lancer quelques jours à peine après la décision de la BNS un débat national sur la réduction des prix et des salaires. En langage économique, cela s’appelle la politique de déflation. A l’instar du reste de l’Europe et des Etats-Unis, la Suisse a connu une période pendant laquelle des tentatives de réduire massivement les prix et salaires ont bloqué pendant des années la reprise économique tout en provoquant un chômage de masse (près de 8% en Suisse, près de 30% en Allemagne). C’était pendant la sombre crise économique mondiale des années 1930.

Or, pendant les années 1930 déjà, la volonté du Conseil fédéral de baisser les salaires et les prix n’a guère été suivie d’effets concrets.  Les associations faîtières du bâtiment et du commerce de gros et de détail sont convoquées à des réunions nationales sans résultats. L’« action morale » du gouvernement sur les prix comme ont la désigne à l’époque se solde par un échec. Il en devrait être de même en 2015 à moins d’introduire des instruments de contrôle véritables qui vont bien au-delà du pauvre arsenal interventionniste de « Monsieur Prix ». Cette piste est donc peu réaliste.

L’hypothèse de l’intox dont nous faisons actuellement gaillardement les frais par rapport à la concertation entre le Conseil fédéral, la direction de la BNS et probablement aussi les milieux économiques semble plus convaincante. Pour une fois, la comparaison historique peut nous être utile.

Quand le Conseil fédéral choisit en septembre 1936 de dévaluer le franc suisse, il prétend devant la presse que cette décision serait tombée comme une bombe (« ein Blitz aus heiterem Himmel »). En réalité, il s’agissait d’un pur mensonge. De fait, le gouvernement, les hauts fonctionnaires des départements fédéraux des finances et de l’économie et la direction générale de la BNS s’étaient concertés depuis longtemps pour préparer la dévaluation du franc. Comme l’admettent les gardiens de la monnaie, deux semaines après ce choix monétaire majeur : « Au cours de cette année la direction générale a mené une série de discussions avec la délégation financière du Conseil fédéral au cours desquelles ont été clarifiées entre autres des questions techniques relatives à une éventuelle dévaluation. Si la Banque nationale s’était laissée surprendre par les événements, des reproches justifiés auraient été adressés à la direction de la banque Il est cependant dans la nature de tels préparatifs qu’ils s’effectuent dans le plus grand secret. La moindre information concernant des préparatifs d’une dévaluation par la Banque nationale aurait provoqué des remous et du désarroi dans le public (…). »

L’histoire nous dira plus tard comment les événements se sont déroulés ces dernières semaines. En attendant, il s’agit de se battre avec la dernière énergie contre les tentatives de dérégulation du marché du travail, les velléités de libéralisation des services publics et autres projets absurdes de baisse de la fiscalité qu’appelle par ses vœux la droite néolibérale emmenée par l’UDC.

Ce combat passe par la mise en œuvre d’un programme de démocratisation économique et sociale. Et par une mise en œuvre euro-compatible de l’initiative contre l’immigration de masse acceptée par une très légère majorité le 9 février 2014. Au-delà de la naïveté ou de l’intox de Johann Schneider-Ammann, il en va de notre avenir à tous.

Franc suisse : (in)dépendance et intérêts

 Téléchargez ici l'édition spéciale de L'Hebdo: "Le taux plancher: Krach historique" 

La décision de la Banque nationale suisse (BNS) de cesser de défendre un taux de change (quasi) fixe avec l’Euro à hauteur d’un taux plancher de CHF 1.20 pour un Euro confronte la Suisse avec une acuité renouvelée aux contradictions fondamentales de sa politique monétaire et économique. Elle touche également le cœur de notre conception de la démocratie. Bref rappel historique et propositions de réformes.

Principes d’action de la BNS depuis 1907

Fondée en 1907 pour mettre fin à l’absence de contrôle fédéral sur la monnaie, la BNS poursuit depuis les années 1920, soit depuis près de 100 ans, une politique axée autour de trois principes fondamentaux.

Premièrement, un franc fort sert aux yeux des gardiens de la monnaie aussi bien les intérêts de l’industrie, y compris d’exportation, que ceux de la place financière. Pour l’industrie d’exportation, le franc fort est censé obliger les directions d’entreprises de veiller en permanence à investir dans l’innovation tout en maintenant des coûts de production les plus bas possibles. Ceci passe notamment par un contrôle des salaires. Le franc fort sert ainsi d’instrument pour discipliner la place industrielle suisse (« Werkplatz Schweiz »). C’est en substance ce que dit le président de la direction de la BNS, Thomas Jordan, lorsqu’il affirme que depuis la fixation d’un taux de change plancher du franc suisse face à l’Euro en 2011 « l’industrie suisse a eu trois ans et demie pour s’adapter » (NZZ, 17 janvier 2015, p. 32).

Pour les banques et autres intermédiaires financiers, un franc fort et stable est un argument de vente majeur face à la concurrence internationale. Même si avec l’internationalisation des grandes banques suisses, cet élément a quelque peu perdu de sa prépondérance absolue, il ne reste pas moins un enjeu de taille pour les banques suisses. En bref : un franc fort face à un Euro en pleine instabilité favorise la place financière suisse (« Finanzplatz Schweiz »). « La stabilité de notre situation monétaire fait du franc suisse une devise recherchée, de notre pays un des premiers pays de refuge » disait en décembre 1937 déjà un des prédécesseurs de Thomas Jordan, Ernst Weber. Curieusement, cet aspect-là a peu été mis en avant ces derniers jours. Il constitue pourtant un enjeu majeur tant pour les intérêts bancaires et financiers suisses que pour leurs porte-paroles et autres lobbyistes.

Deuxièmement, l’indépendance de la BNS face à la Confédération doit être la plus forte possible. Aujourd’hui, nous nous offusquons du fait que le conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann n’ait été averti par le président de la BNS qu’une heure seulement avant la conférence de presse de notre institut monétaire. Pourtant, compte tenu de la législation en place voulue par le « bloc bourgeois » en 1907 et défendue depuis becs et ongles par les tenants du moins d’Etat et d’un libéralisme économique débridé, il s’agit d’une démarche tout à fait normale. En plus de cent ans d’existence, la BNS a été une seule fois précédée par le politique. C’était en septembre 1936, au plus profond de la grande crise des années 1930. Convoqué par le Conseil fédéral in corpore, le président de la BNS, Gottlieb Bachmann, se voyait annoncer que le gouvernement avait décidé de dévaluer le franc suisse devenu un obstacle insurmontable à la reprise. Bachmann avait alors mis son mandat en jeu et était revenu sur sa décision de démission une fois seulement après avoir été fortement prié par le Conseil fédéral de se maintenir en place. L’indignation d’aujourd’hui d’une partie de la droite prête donc beaucoup à sourire…

Troisièmement, l’indépendance du franc suisse face aux autres monnaies de référence sur le plan international constitue quant à elle le dernier pilier de la politique de la BNS. Compte tenu de la forte internationalisation de l’économie suisse depuis le XIXème siècle, le franc suisse ne saurait dépendre de l’influence prépondérante d’une monnaie particulière. Ainsi, pendant la crise des années 1930, la Suisse a défendu son franc-or malgré les dévaluations compétitives de la Grande-Bretagne en 1931 et des Etats-Unis en 1933. C’est avec réticence que notre pays a rejoint le système monétaire de Bretton-Woods axé autour du dollar américain après la Deuxième Guerre mondiale. La Suisse a d’ailleurs été le premier pays à sortir de Bretton-Woods au début des années 1970.

Partant, la décision de la BNS de jeudi passé s’inscrit parfaitement dans cette ligne. En effet, alors que la direction de la Banque centrale européenne s’apprête visiblement à intensifier massivement son soutien aux pays membres de la zone Euro par l’achat direct de la dette publique, les gardiens du franc suisse ont pris les devants afin de préserver une certaine marge de manœuvre. L’explication de Thomas Jordan le confirme : « La raison fondamentale était que les développements divergents au sein des grands espaces monétaires ont fait en sorte qu’une défense du taux de change plancher est devenue insensée et aurait seulement pu être maintenue par le biais de très grandes interventions. (…). Si la BNS avait simplement poursuivi dans la politique de défense du taux plancher (…) elle aurait risqué à plus longue échéance de perdre le contrôle sur les conditions monétaires » (NZZ, 17 janvier 2015, p. 32).

Et maintenant ? Se taire et passer à autre chose ?

La politique serait-elle donc complètement impuissante face à des décisions d’une ampleur aussi sismique que celle prise par la direction de la BNS jeudi passé ? Par principe, il ne saurait être admissible qu’un gremium de trois personnes, fusse-t-il composé de nos meilleurs spécialistes du domaine monétaire, puisse prendre en toute indépendance des décisions d’une telle ampleur et avec des impacts potentiels aussi majeurs en termes de croissance économique, de finances publiques et d’emploi. Pour atténuer la puissance de l’indépendance de la BNS, deux éléments paraissent indispensables à prendre en compte.

D’une part, il est urgent de réformer la législation sur la Banque nationale afin d’obliger celle-ci à prévoir obligatoirement une concertation concrète avec les autorités démocratiquement élues avant que ne soient prises des décisions monétaires dont la portée dépasse de loin une dimension purement « technique ». L’argument selon lequel cela ne serait pas possible car il faudrait préserver la confidentialité des débats, n’est pas une ligne tenable. Au moment du sauvetage de l’UBS, d’intenses échanges ont eu lieu entre le Conseil fédéral, l’administration des finances et les sphères dirigeantes de la BNS. Le gouvernement fédéral se doit pour sa part de donner une ligne claire en matière de mesures d’accompagnement concernant des choix monétaires majeurs (programmes d’investissement, intensification de la politique d’aide à la reconversion professionnelle etc.). En ce sens, il faut rappeler que l’indépendance de la BNS est certes consacrée tant par la Constitution que par les usages. La loi la concernant prévoit néanmoins une information réciproque et une concertation entre la Banque et le Conseil fédéral en cas de décisions « importantes » en matière de politique conjoncturelle et monétaire. Les cas sont certes rares mais ils se sont déjà produits pour des décisions d’ampleur similaire à celle de jeudi passé, notamment lorsqu’en janvier 1973, la BNS a décidé du flottement de la monnaie suisse (abandon de la fixation de sa valeur en comparaison à celle des autres monnaies).

D’autre part, nous devons enfin prendre conscience que notre (inter-)dépendance avec l’Union européenne et son économie rend la prétendue voie souveraine helvétique (« Alleingang ») chaque jour plus irresponsable. Une courte majorité des votants a estimé le 9 février 2014 qu’il était possible de jouer avec le feu en voulant prendre nos distances avec l’Union européenne. Le fait que la BNS ait dû prendre les devants face à l’imminence d’un choix monétaire majeur des pays membres de la zone Euro illustre bien la forte relativité de notre indépendance monétaire.

 

Textes de références :

Patrick Halbeisen, Margrit Müller, Béatrice Veyrassat (éds.), Wirtschaftsgeschichte der Schweiz im 20. Jahrhundert, Bâle 2012.

Tobias Straumann, Fixed Ideas of Money. Small States and Exchange Rate Regimes in Twentieth-Century Europe, Cambridge 2011.

Philipp Müller, La Suisse en crise (1929-1936). Les politiques monétaire, financière, économique et sociale de la Confédération helvétique, Lausanne 2010.

NZZ du 17 janvier 2015, p. 32, entretien avec Thomas Jordan, président de la Banque nationale suisse.

Aux larmes citoyens

 

Il est des journaux qui vous accompagnent au cœur de l’intime. Tout en accomplissant leur mission d’information, ils savent vous affranchir l’esprit de vos certitudes et vous délivrent une respiration indispensable. Toutes vos convenances sociales, vos codes de conduite, votre prêt-à-penser politique y sont malmenés avec une tendresse bienveillante pour vous donner envie de plus de liberté. Une respiration de l’esprit face à tout ce qui peut ressembler à une autorité, une bienséance ou une institution et qui fait ébranler vos certitudes pour vous émanciper. Cet esprit libertaire et frondeur, qui alimente régulièrement certains d’entre nous depuis notre jeunesse tous les jeudis, raisonne plus largement au cœur de tous ceux qui ont l’espoir de faire changer le monde, qui croient aux forces de progrès et qui pensent que l’homme a cette incroyable capacité à dépasser ses propres déterminismes. 


C’est toute cette intimité-là, entretenue semaine après semaine et partagée par des milliers de lecteurs, qui a été assassinée mardi dernier. Ces dernières années, l’islamisme radical et l’extrême droite catholique étaient devenus leurs principaux ennemis. Mardi dernier, le temps s’est arrêté. En disparaissant de notre réalité, les journalistes et dessinateurs de Charlie nous laissent un héritage inestimable pour la démocratie. Les anti-barbelés, les ennemis de la répression qui sont « pour le cul et contre les cons qui gagnent tout le temps parce qu’ils sont trop » ont tenu leur manifeste de liberté jusqu’au bout. C’est pour défendre notre liberté d’expression – celle de la presse, celle des politiques, celle des citoyens –, pour que cette liberté ne soit pas étouffée, ni même conditionnée par les fondamentalistes religieux qu’ils sont morts. Leur gai mariage d’antimilitarisme, d’anticléricalisme et de porno irrespectueux résonne encore de façon si bouffonne qu’il caractérise de manière monumentalement imbécile et absurde le carnage de leurs assassins.

Le retour à la raison

L’ampleur du rejet de la votation sur l’initiative «Ecopop» donne un signal clair: la grande majorité de la population est hostile à toute expérimentation hasardeuse dans le domaine migratoire. Après les ondes de choc provoquées par la courte victoire du oui à l’initiative dite «contre l’immigration de masse», la limpidité du résultat de ce dimanche remet prudemment les pendules à l’heure. Le oui du 9 février s’explique en effet notamment par un vote protestataire assez large et ne saurait être interprété comme une volonté majoritaire de mettre un terme à la libre circulation des personnes avec l’Union européenne. Autrement dit, il y a moins d’un an, il s’agissait pour une partie de la population de donner un avertissement à la Confédération afin que le Conseil fédéral et les Chambres se préoccupent davantage d’accompagner les effets de la libre circulation par des mesures adéquates: mesures de revalorisation des travailleurs résidents, politique active en matière de constructions de logements à loyer abordable, renforcement des infrastructures dans le domaine des transports publics, augmentation du revenu disponible de cette moitié de la population active qui a vu sa situation se péjorer.

L’après 30 novembre donne aux autorités fédérales l’occasion d’avancer de manière cohérente sur deux plans. Premièrement, en répondant adéquatement aux attentes des habitants du pays dans le domaine des mesures d’accompagnement. Deuxièmement, en menant sereinement et de façon déterminée les négociations avec l’Union européene afin de trouver une solution eurocompatible au oui du 9 février passé. Il ne s’agit pas alors de passer outre la volonté populaire, mais d'interpréter le message donné ce jour-là. Le non à «Ecopop» est rassurant car il signifie avant tout un retour au pragmatisme. Le Conseil fédéral et le Parlement ont maintenant deux ans pour transformer ce signal en une politique acceptable aussi bien pour l’Union européenne que pour la majorité raisonnable de nos concitoyens.

Les « juges étrangers » : une diatribe populiste mensongère pour saper l’Etat de droit

Les rapports entre politique et justice n’ont jamais vraiment été au beau fixe. De tous temps, les hommes politiques ont cherché à remettre en cause la légitimité,  l’indépendance et le pouvoir de la justice. Plusieurs instruments ont été mis en œuvre pour faire en sorte que la fonction d’interprétation de la loi ne soit plus admise. Pour marquer le caractère usurpateur des juges, la dénonciation contre le « gouvernement des juges », soit une ingérence du pouvoir judiciaire dans le terrain politique, était déjà féroce durant la Révolution française. Par le passé, tous les grands hommes de pouvoir (De Gaulle, Jefferson, Roosevelt, etc.) y sont allés de leur diatribe pour contrer l’interprétation des lois par les juges, surtout lorsque celles-ci touchent à la constitutionnalité. Aujourd’hui, ce sont surtout les populistes qui cherchent depuis 2004 à imposer leur loi. Ils cherchent en particulier à faire appliquer des règles d’automaticité pour le renvoi des délinquants étrangers qui anéantisse tout pouvoir d’appréciation des juges. Dernière volonté en date pour imposer l’automaticité des renvois : une initiative pour faire prétendument primer le droit « national » sur le « droit international » qui cherche à éradiquer la Convention européenne des droits de l’homme et ses juges.

Face à ces attaques contre la Cour européenne des droits de l’homme et le pouvoir judiciaire en général, il convient de relever plusieurs points.

D’abord, il est faux de laisser croire que la Cour européenne des droits de l’homme s’acharne sur la Suisse et dire qu’elle est systématiquement condamnée. Entre 1974 et la fin 2013, seules 1.6% de l’ensemble des requêtes enregistrées contre la Suisse ont abouti à un constat de violation. Par ailleurs, lorsqu’une affaire est déclarée recevable (ce qui est très rare), la Cour parvient dans 83% de ces cas  à un constat de violation. Dans le cadre des affaires suisses, seules 60% des affaires considérées comme recevables aboutissent à un constat de violation.

Ensuite, la Suisse n’est nullement menacée dans sa souveraineté par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette Cour n’est ni « réformiste », ni « cassatoire », elle est juste « violationniste », c’est- à-dire qu’elle se contente de constater une violation de la CEDH lorsqu’elle l’observe et laisse les cours nationales faire le nécessaire. Elle n’a pas vocation à jouer la « 4ème instance ». Dans le domaine des renvois d’étrangers, la Cour européenne des droits de l’homme n’a délivré qu’une infime minorité d’arrêts concernant la Suisse et certains ont été rendus pour des raisons d’absence de garanties procédurales uniquement.[1] Concernant le récent arrêt Tarakhel c. Suisse du 4 novembre 2014 qui demande à la Suisse des garanties pour les transferts Dublin vers l’Italie, il faut relever que la Suisse pourrait s’éviter certains rappels à l’ordre de Strasbourg si elle mettait en place un renforcement du contrôle judiciaire du Tribunal fédéral sur le Tribunal administratif fédéral. Ceci permettrait non seulement de limiter le nombre de recours gagnés par des justiciables à Strasbourg contre la Suisse mais aussi de corriger des situations qui posent un véritable intérêt digne de protection. Les restrictions de l'accès au Tribunal fédéral sur des décisions du Tribunal administratif fédéral posent des problèmes ponctuels grandissants. Il y a actuellement des litiges de principe qui sont directement portés devant la Cour EDH parce que l'application correcte de l'article 3 ou 8 CEDH est, par exemple, contestée. Il ne semble guère satisfaisant que de tels cas (bien souvent sous la responsabilité d’un juge unique du TAF !) ne puissent pas être soumis dans un premier temps à la plus haute instance judiciaire nationale, au moins lorsque le cas ne semble pas dénué de chances de succès devant la Cour EDH et que celle-ci pourrait donner raison au recourant.[2]

Enfin et plus généralement,  il importe de reconnaître l’importance considérable des juges et de certaines de leurs jurisprudences pour la vie des Etats démocratiques modernes. En Suisse, le retard par rapport aux autres Etats européens dans l’introduction du droit de vote des femmes a été causé par la démocratie directe, et en particulier par le refus d’introduire le suffrage féminin au plan fédéral en 1959. Une fois introduit en 1971, le Tribunal fédéral va finir par contraindre le demi-canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures à appliquer le suffrage féminin. Les électeurs de ce canton avaient en effet massivement refusé en 1959 et confirmé ce refus en 1990 au plan cantonal.


[1] Cour EDH,  arrêt Dembele c. Suisse, du 24 septembre 2013, requête n° 74010/11 ; Cour EDH, arrêt Udeh c. Suisse du 16 avril 2013, requête n° 12020/09 ; Cour EDH,  arrêts EMRE c. Suisse des 22 mai 2008 et 11 octobre 2011, requêtes n° 42034/04 et n° 5056/10 ; Cour EDH,  arrêt Hasanbasic c. Suisse du 11 juin 2013, requête n° 52166/09 ; Cour EDH,  arrêt A. A. c. Suisse du 7 janvier 2014, requête 58802/12.

[2] Cf. en particulier Cour EDH, arrêt Tarakhel c. Suisse du 4 novembre 2014, requête n°29217/12 ; Cour EDH, arrêt Agraw c. Suisse du 29 juillet 2010, requête n° 3295/06.

 

ECOPOP ou l’éloge de la domination au XXIème siècle

A un mois de la votation sur ECOPOP, bien des arguments ont déjà été avancés pour démontrer que cette initiative est une profonde ineptie. Au plan économique et social, une limitation du solde migratoire à 0,2% par an, soit 16'000 personnes par an (solde actuel : plus de 90'000 personnes env.) est suicidaire tant pour nos emplois que pour nos assurances sociales. Un taux d’immigration élevé se révèle notamment propice à l’AVS car la charge d’assainissement se répartit sur un plus grand nombre et permet de désamorcer les problèmes de financement sur le court et moyen terme.[1]

 

Au plan environnemental, il est établi que le texte ne propose aucune mesure concrète d’amélioration de l’environnement. La détérioration de notre espace n’est pas causée pour l’essentiel par l’augmentation de la population mais bien par la surconsommation des ressources de la part des pays développés, la suburbanisation et la surconsommation (étalement urbain, mitage du paysage, hausse des surfaces de logement par personne, mise en œuvre laxiste de la loi sur l’aménagement du territoire).  La croissance démographique n’a jamais nuit par principe à l’environnement.[2]

 

Au plan migratoire, il importe de rappeler que les migrants constituent un facteur clé du développement humain que nous devons accompagner non seulement par des instruments de gouvernance qui doivent être développés (mesures d’accompagnement, aménagement du territoire, politique du logement, mesures relatives aux infrastructures, etc.) mais aussi par une défense stricte des droits fondamentaux des migrants. En ce sens, ECOPOP contient une atteinte profondément choquante aux droits de ces derniers en opposant les droits de la nature à ceux de l’être humain (protection de la vie privée et familiale, droit au mariage et liberté de procréer).

 

Atteinte sans précédent aux droits sexuels et reproductifs des femmes

Au plan féministe, il importe de relever qu’Ecopop préconise l’encouragement de la « planification familiale volontaire » dans le cadre de la coopération au développement pour atteindre une limitation de la population dans les pays en développement et préserver ainsi durablement les ressources naturelles. Plusieurs problèmes sont ici à signaler. Les initiants réduisent de manière inacceptable la planification familiale à un moyen pour limiter la croissance démographique dans les pays du Sud et non comme un élément constitutif des droits de l’être humain et de santé des femmes. Pour toute femme, le droit de procréer comprend le choix d’avoir des enfants, le choix de rester fertile et le droit de fonder une famille (art. 8, 12 CEDH, art. 14 Cst.).[3] Comme tout droit de l’homme, il est essentiel que ce droit fondamental à procréer soit consacré en tant que tel et sans le faire dépendre d’un objectif spécifique prépondérant. De même qu’il serait choquant que le droit à ne pas être torturé soit conditionné par des objectifs politiques supérieurs, le droit de procréer doit se concevoir de manière autonome et sans arrières pensées. Promouvoir activement l’avortement et la stérilisation pour des motifs « dépopulationnistes » pose des problèmes insurmontables de proportionnalité. Tôt ou tard, se poserait la question de l’efficacité des mesures face aux objectifs à atteindre. La tentation de mettre en place des mesures plus coercitives de limitation de la population comme en Chine ou en Inde ne serait pas très éloignée.

 

En ressuscitant une politique de contrôle des naissances digne de l’époque coloniale, ECOPOP constitue un recul inadmissible pour les droits des femmes. La promotion des mesures incitatives de planning familial (éducation sexuelle, droit à la contraception et à l’avortement) se conçoivent comme un instrument de mise en œuvre des droits de l’homme, de lutte contre la pauvreté, d’abolition des inégalités et d’autodétermination des femmes. Les grossesses non désirées chez femmes sont, outre le manque de moyens de contraception, la discrimination sexuelle, les violences sexuelles et le mariage forcé. C’est pourquoi les mesures incitatives sur les moyens de contraception doivent s’accompagner d’investissements massifs de la part des collectivités dans la formation des filles et dans l’accès à l’emploi, dans la lutte contre la discrimination et les violences sexuelles, l’interdiction des mariages forcés et une éducation sexuelle globale. En fixant les parts de financements attribués aux moyens de contraception, ECOPOP renie le caractère global et subtil de l’ensemble des mesures de planification familiale.[4]

 

Aujourd’hui, il n’est pas question de renoncer à ces acquis obtenus de longue lutte par les femmes. De tous temps, le patriarcat a cherché à influer sur les forces productrices et reproductrices des femmes.  En cherchant à contrôler le ventre des femmes des pays en développement pour des motifs de confort des populations des pays riches, ECOPOP est une illustration de plus de ce phénomène. En visant les femmes précarisées des pays du Sud, la domination patriarcale des pays riches trouve ainsi réunies les conditions de son plein exercice dans un monde globalisé, dominé par les inégalités.

 

Après l’échec du 9 février dernier, il est essentiel de ne pas considérer cette votation comme acquise et de nous mobiliser pour la faire échouer.


[1] Stefan Moog, Veronica Weisser, Bernd Raffelhüschen, Prévoyance veillesse : Report du fardeau sur les générations futures. Bilan intergénérationnel de la Suisse, Publications UBS, avril 2014.

[2] Alexandre Flückiger, Limiter la population pour protéger l’environnement et garantir une occupation rationnelle du territoire, AJP/PJA 2/2014, pp. 165 à 184.

[3] Sur ces points, cf. Alexandre Flückiger, Limiter la population pour protéger l’environnement et garantir une occupation rationnelle du territoire, AJP/PJA 2/2014, pp. 165 à 184, spéc. pp. 178 ss.

[4] Sur ces questions, cf. Santé sexuelle Suisse, Prise de position du 7 mai 2014.

 

L’après 18 mai : défendre le revenu disponible

«Changer son fusil d’épaule», c’est ainsi que l’on peut qualifier l’impératif de la lutte contre la pauvreté après le résultat cinglant de la votation fédérale du 18 mai sur l’initiative syndicale pour un salaire minimum en Suisse. En effet, malgré ce refus d’avancer dans la bonne direction, les centaines de milliers de salariés qui doivent vivre chaque mois avec un salaire insuffisant continueront à se lever tôt pour exercer une activité lucrative qui ne leur permet pas de nouer les deux bouts à la fin du mois.

Face à cette réalité, il y a deux attitudes possibles. La première est celle de la droite économique qui considère que la victoire du 18 mai grave dans le marbre le refus de la population suisse de voir l’Etat jouer un rôle de régulateur dans le domaine salarial. La seconde attitude est celle prônée par les socialistes, les syndicalistes et un éventail somme tout assez large de milieux politiques divers qui revendiquent un renforcement du revenu disponible des ménages suisses moins bien lottis sur le plan financier.

Trois mesures concrètes pourraient et devraient être rapidement mises en place.

D'abord, la hausse des allocations familiales. Aujourd’hui, un enfant engendre des coûts de l’ordre de 1'000.- francs par mois. Or, l’allocation familiale mensuelle minimale est de 200.- francs. Par une hausse de ce plancher légal à 250.- francs d’ici trois ans et à 300.- francs d’ici 2020, la Confédération donnerait un puissant signal en faveur de la politique familiale.

Ensuite, la gratuité des primes d’assurance-maladie pour les enfants et la montée en puissance des subsides à l’assurance-maladie pour les familles de la classe moyenne inférieure. Aujourd’hui, nombreux sont les ménages qui doivent consacrer en Suisse bien plus que 10% de leur revenu disponible aux primes d’assurance-maladie. Or, il y a quelques années de cela, le Conseil fédéral lui-même a failli faire de ce taux de 10% un objectif concret. Aujourd’hui, sa réalisation passe par la gratuité des primes pour les enfants de moins de 16 ans et le renforcement des subsides pour le reste des personnes afin de toucher au moins un tiers de la population active.

Enfin, l’introduction de prestations complémentaires pour les familles (PC Familles) de travailleurs pauvres (« working poor »). Alors que les deux premières mesures touchent respectivement l’intégralité des familles (allocations) voire la classe moyenne inférieure (primes), les PC Familles sont un puissant instrument permettant aux ménages pauvres proches de l’aide sociale de s’en affranchir ou de ne pas devoir envisager d’y recourir. Complémentaire au revenu salarial d’un ménage, cette aide permet également de mieux faire face aux frais liés à l’accueil de jour ou aux dépenses imprévues (facture dentaire par exemple) qui poussent encore trop de familles vers l’aide sociale aujourd’hui. Les cantons qui ont introduit les PC Familles (Tessin et Vaud) ont pu constater un tassement du taux d’aide sociale quelques années après le versement de la première prestation.