Le naufrage moral de l’UDC

Si notre monde présente un grand nombre de défauts, il procure néanmoins l’avantage de nous livrer des informations dont nous ressentons immédiatement la gravité. Depuis plusieurs mois et où que nous allions, des journalistes et des photographes nous alertent sur ce qui est en train de se passer aux portes de l’Europe, de la frontière tuniso-libyenne jusqu’à la gare de Munich, en passant par l’île grecque de Lesbos et la Turquie. Des centaines de femmes, d’hommes et d’enfants trouvent la mort à nos frontières. Plusieurs milliers de réfugiés en détresse y sont aujourd’hui affamés, emprisonnés et entassés dans des conditions insoutenables.

 

Les politiques ont le devoir d’agir. En Suisse, la collaboration avec l’Europe doit encore s’intensifier pour mettre en place le plus rapidement possible des quotas humanitaires par Etat. Le Parlement a quant à lui d’ores et déjà franchi ces jours-ci une étape importante avec la restructuration du domaine de l'asile qui est à présent sous toit, grâce à une majorité constructive composée des partis de droite comme de gauche. A l'avenir, les procédures d'asile seront plus courtes et, grâce au droit à un conseil juridique gratuit, plus justes. Il y aura également une augmentation importante des places d’accueil.

 

Un seul parti s’est opposé à cette amélioration des procédures d'asile, l’UDC. Cette droite dure à l’extrême, qui fait feu de tout bois, est manifestement plus soucieuse de soigner sa campagne électorale xénophobe que de trouver des solutions dans l'intérêt du pays et des personnes concernées. Dans ce débat, l’UDC s’est bornée au rejet de toute discussion et a cherché à utiliser la tribune du Parlement, à grands renforts de mensonges, comme tremplin en vue des élections fédérales d’octobre. Sourds face à la réalité tragique de milliers de destinées humaines, tous les députés UDC ont été jusqu’à réclamer une fermeture des frontières par l’armée et proposer un moratoire en matière d’asile qui aurait été aussi inefficace qu’inhumain.

 

Afin de savoir où mènerait la politique d’asile voulue par l'UDC, il suffit de se tourner vers la Hongrie. Son gouvernement a fait ériger des murs de barbelés à sa frontière, viole les droits fondamentaux des réfugiés, attise un climat de xénophobie et, enfin, enfreint le droit européen. Cette situation génère de grandes souffrances humaines, un véritable chaos ainsi qu’une réprobation internationale. Si l'UDC s’inspire de Viktor Orban, ce n’est pas le cas du Parlement qui a fait le choix d’une politique d'asile humaine et efficace. Une politique à la hongroise, aussi cruelle qu’insensée, ne doit jamais trouver de majorité en Suisse. Avec ce qui se passe à nos portes, fermer les frontières et refuser le statut de réfugié revient à se rendre complice d’une véritable boucherie.

Celsa Amarelle

Professeure de droit à l'Université de Neuchâtel, Cesla Amarelle enseigne actuellement le droit constitutionnel, les droits humains et le droit de la libre circulation des personnes. Elle est également conseillère nationale (PS/VD), membre de la Commission des institutions politiques et de la Commission des finances (présidente de la sous-commission en charge de la santé), et vice-présidente des Femmes socialistes suisses.