Préserver l’environnement, une question de survie

Un vent de fraîcheur et de renouveau a soufflé sur le canton de Genève il y a une dizaine de jours, lors des élections cantonales. Alors que les partis populistes buvaient la tasse, les Verts gagnaient cinq sièges au législatif, passant à 15 députés.

Ce résultat n’est que la suite logique d’un mouvement de fond à l’œuvre depuis plusieurs années en Suisse romande. Lors des élections cantonales fribourgeoises de 2016, les Verts ont doublé leur députation au Grand Conseil, avec trois nouveaux élus. Rebelote en avril 2017 à Neuchâtel et Vaud, avec respectivement cinq et deux députés supplémentaires aux législatifs cantonaux. Et le constat est le même lors des élections communales : pratiquement partout, tant en zones urbaines que rurales, les Verts progressent.

Pour tenter de comprendre ce phénomène, commençons par un constat. Depuis sa création dans les années 1980, les Verts ont toujours placé un thème bien avant tous les autres dans leur programme politique. Ce thème, c’est celui de la défense de notre environnement.

Reconnaissons-le: pendant longtemps, beaucoup ont considéré cette problématique comme réservée aux rats de laboratoires, aux bobos ou aux hippies en Birkenstock. On estimait qu’on avait d’autres chats à fouetter et qu’il y avait plus urgent que de se préoccuper du bien-être des poissons ou des sauterelles.

Le terrible accident nucléaire de Fukushima, en mars 2011, a sans doute amorcé un tournant dans les mentalités. Cette catastrophe n’a pas empêché les électeurs de bouder les Verts lors des élections fédérales, sept mois plus tard. Le parti avait alors perdu quatre sièges au Conseil national. Mais quelque chose s’était mis à germer dans les esprits. Une graine qui n’allait cesser de se développer, amenant notamment le peuple suisse, en mai 2017, à accepter la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération, qui prévoit la sortie du nucléaire.

Une catastrophe comme celle de Fukushima a l’avantage, si l’on peut dire, d’être parfaitement concrète, visible et immédiatement compréhensible. Un tel évènement, violent et soudain, frappe infiniment plus les esprits que, par exemple, le réchauffement climatique. Celui-ci constitue pourtant l’une des principales menaces qui pèsent sur l’humanité. Il induit des conséquences catastrophiques et pour certaines d’ores et déjà perceptibles, comme l’afflux dans notre pays de réfugiés climatiques. Mais malgré tout, ce phénomène a quelque chose de trop lent, impalpable et global pour que le commun des mortels s’en soucie vraiment. Difficile d’intégrer qu’une augmentation progressive de la température de deux degrés puisse avoir des répercussions gigantesques sur notre vie quotidienne.

Tandis qu’un tsunami qui dévaste une centrale nucléaire, ça frappe non seulement l’esprit, mais surtout les tripes. Comme peut également le faire la disparition des abeilles (en réalité, ce sont toutes les populations d’insectes qui s’effondrent) ou le déclin des oiseaux. Un printemps sans gazouillis, voilà quelque chose qui parle à tout le monde.

Grâce à cette prise de conscience collective, les grands médias relaient plus volontiers les mises en gardes des scientifiques, qui trouvent davantage d’écho auprès de leurs lecteurs. Et les mises en garde, ces derniers mois, n’ont pas manqué.

En novembre dernier, plus de 15’000 scientifiques de 184 pays publiaient une tribune pour alerter l’opinion sur la dégradation sans précédent de l’environnement et la menace que cela fait peser sur l’humanité. Leur conclusion est on ne peut plus claire: « Afin d’éviter une misère généralisée et une perte catastrophique de la biodiversité, l’humanité doit adopter des pratiques alternatives plus durables pour l’environnement qu’elles ne le sont à l’heure actuelle. (…) Bientôt, il sera trop tard pour dévier de cette trajectoire vouée à l’échec, et le temps presse. »

Mais ce n’est pas tout. Fin mars, une centaine d’experts de l’IPBES, le «GIEC de la biodiversité», tiraient à leur tour la sonnette d’alarme par rapport à une dégradation inquiétante des sols de notre planète. Avec là encore des répercussions concrètes  : 50 millions de personnes pourraient être contraintes de migrer d’ici 2050. Et ce ne sont là que deux exemples parmi tant d’autres, puisque de nombreux scientifiques affirment que nous vivons actuellement la sixième extinction de masse, la première dont les causes ne sont pas naturelles.

Or malgré l’évidence de la nécessité d’agir, et d’agir vite, les décideurs, d’ici ou d’ailleurs, traînent trop souvent les pieds. Le 15 avril dernier, lors de la longue interview télévisée du président Macron par les journalistes Jean-Jacques Bourdin et Edwy Plenel, la question de l’écologie n’a pas été ne serait-ce qu’effleurée. Quant à son homologue américain Donald Trump, à la tête de la première puissance mondiale, il se soucie autant des questions environnementales qu’un plant de patate se préoccupe de physique quantique.

Ces atermoiements sur cette problématique capitale, les citoyens n’en veulent plus. Raison pour laquelle ils se tournent de plus en plus massivement vers les Verts, qui regardent la réalité en face et proposent des solutions. Car il ne sert à rien de se battre pour le social ou pour quoi que ce soit d’autre si on ne peut ni respirer, ni manger. Aujourd’hui, relever les défis environnementaux qui se présentent à nous, ce n’est pas uniquement améliorer notre qualité de vie. C’est, à plus ou moins long terme, une question de survie.

Céline Vara

Avocate indépendante à Neuchâtel, Céline Vara exerce la politique depuis près de quinze ans au sein des Verts. Après une législature au législatif puis une seconde à l’exécutif de sa commune, elle siège actuellement comme députée au Grand Conseil et préside la section cantonale depuis août 2016. Depuis une année, elle est maman d'une petite Mathilde.