L’impact de la réforme 2020 sur l’AVS en images

La réforme prévoyance 2020 va nettement renforcer l’AVS pendant 15 ans, et la hausse des rentes a un impact modéré, qui ne justifie pas la focalisation du débat sur cet aspect.

Le paquet de la réforme prévoyance 2020 est un ensemble complexe et ambitieux, et la documentation détaillée fourni par l’OFAS est particulièrement bienvenue pour y voir plus clair. Elle présente entre autres l’impact sur l’AVS de manière détaillée, alors que la hausse des rentes du premier pilier est un point central de l’argumentaire des opposants.

Un assainissement durable

Les graphiques ci-dessous présentent les trajectoires futures de la fortune de l’AVS et de son résultat (recettes – dépenses + rendement de la fortune) dans le régime actuelle (lignes rouges) et avec la réforme (lignes bleues). Le constant est on ne peut plus clair. Alors que l’AVS va bientôt commencer à manger son capital dans le système actuel, la réforme retarde cette échéance de 10 ans. Durant cette période la fortune se renforcera et demeurera substantielle en 2035, quand bien même le résultat de l’AVS sera négatif.

Evidemment, ces graphiques montrent que la réforme ne règle pas la situation une fois pour toutes, et qu’il faudra remettre l’ouvrage sur le métier. Notons quand même trois points. Premièrement, les projections faites dans le passé ont eu tendance à être pessimistes, et il est tout à fait possible que les choses se passent mieux que prévu (bien sûr, cela reste à voir). Deuxièmement, la réforme repousse substantiellement le moment où l’AVS sera en situation délicate, ce qui n’est pas rien. Enfin, l’AVS pourra être pérennisée dans le futur relativement facilement, un point sur lequel je reviens en fin d’article.

La réforme affecte avant tout les revenus de l’AVS

Les chiffres de l’OFAS permettent de cerner la manière dont l’AVS est renforcée. Le graphique ci-dessous décompose l’impact de la réforme sur le résultat entre les recettes, les dépenses, et le rendement de la fortune. Nous voyons clairement que la hausse du résultat (ligne rouge) reflète une hausse des recettes (ligne verte). Le rendement de la fortune augmente également (ligne bleue), la hausse de la fortune de l’AVS ayant là un effet bénéfique. Ces rentrées supplémentaires sont en partie compensées par la hausse des dépenses (ligne violette).

La hausse des dépenses reste modérée et ne représente dès lors par un fort vent contraire qui nécessiterait de fortes recettes supplémentaires.

D’où viennent les recettes supplémentaires ? Essentiellement de la hausse de la TVA (ligne violette ci-dessous), et également de la hausse des cotisations (ligne rouge). Les versements de la Confédération à l’AVS (ligne bleue) apportent en outre une petite contribution.

La hausse des rentes a un impact modéré

Les dépenses supplémentaires proviennent, sans surprise, de la hausse des rentes (les fameux 70 francs mensuels), laquelle est indiquée par la ligne rouge dans le graphique ci-dessous. Cette hausse est substantiellement compensée par le relèvement de l’âge de la retraite pour les femmes (ligne bleue) lequel réduit les dépenses.

Comme indiqué plus haut, la hausse des dépenses est modérée par rapport à celle des recettes. Il est intéressant d’examiner les projections pour les dépenses. La figure ci-dessous contraste les dépenses entre trois scénarios : le système actuel (ligne rouge), la réforme (ligne bleue), et le système actuel plus la hausse des rentes (ligne verte), ou en d’autres termes la réforme sans la hausse de l’âge de la retraite.

Il est frappant de constater combien les trois scénarios sont proches (les lignes seraient très difficile à distinguer si l’échelle verticale partait de zéro). Ceci montre bien que la réforme ne représente pas un « arrosage » massif au profit des bénéficiaires de l’AVS. Le haro des opposants sur la hausse des rentes n’est pas justifié par les chiffres.

L’AVS n’est de loin pas condamnée

Les projections de l’OFAS montrent que l’AVS peut être remise durablement sur les rails avec des mesures assez simples. Certes, il faudra faire un effort supplémentaire d’ici à une quinzaine d’année, mais la tâche n’est de loin pas insurmontable (par exemple la hausse d’une année de l’âge de la retraite pour une moitié de la population suffit à dégager 1 milliards de francs). Il n’y a pas de raison d’adopter une attitude catastrophiste et déclarer la mort du premier pilier.

Cédric Tille

Cédric Tille est professeur d'économie à l'Institut des IHEID de Genève depuis 2007. Il a auparavant travaillé pendant neuf ans comme économiste chercheur à la Federal Reserve Bank of New York. Il est spécialiste des questions macroéconomiques, en particulier des politiques monétaires et budgétaires et des dimensions internationales comme les flux financiers.

2 réponses à “L’impact de la réforme 2020 sur l’AVS en images

  1. Le financement des assurances sociales se fera de plus en plus dans les décennies à venir par la taxation des robots. Cette réforme est parfaitement inutile.

    1. Cher Monsieur,
      Peut-être un jour pourrons-nous nous contenter de taxer les robots pour financer les dépenses publiques, mais je suis très sceptique quant à une telle solution “miracle”. De toute façon, ceci serait à un horizon éloigné et n’est pas pertinent pour la réforme de nos retraites aujourd’hui.
      Meilleures salutations
      Cédric Tille

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