Connaissez-vous la personne de confiance en entreprise ? (2ème partie)

Dans mon précédent article du 29 Octobre 2019 j’abordais les devoirs, rôles et domaines d’action de la personne de confiance. Aujourd’hui voici d’autres volets du métier : 

1 – La formation 

2 – L’avis d’un avocat en droit du travail 

3 – Le coût des interventions

 

Rappel de mon article du 29 Octobre 2019 : 

Il y a 26 ans, le législateur a sommé les employeurs suisses de prendre soin de la personnalité des employés au même titre que de leur sécurité physique.*

En 2012, les juges incitent les employeurs à mettre en place un protocole permettant aux employés de signaler toute atteinte à leur personnalité, ceci auprès d’une personne de confiance. Aujourd’hui engager une personne de confiance (PC) mandatée en externe n’est pas une obligation juridique, néanmoins c’est devenu un métier à part entière, qui gagne à être connu.

*OLT 3, le 18 août 1993

 

La formation certifiante au métier de personne de confiance 

Ni le SECO, ni le Tribunal Fédéral ne font état de qualifications particulières pour exercer en tant que personne de confiance en entreprise. La plupart des PCE n’ont pas suivi d’études spécifiques.

Depuis 6 ans, une association a notamment pour vocation le développement d’une formation certifiante : l’Association Suisse des Personnes de Confiance en Entreprise.

Elle fut créée en 2014 et est référencée par le SECO pour les interventions en matière de risques psychosociaux au travail. L’Association délivre le titre de personne de confiance ASPCE® aux élèves de la formation. 

Cette formation apporte les connaissances génériques en droit du travail. Mais le cursus propose aussi des cours spécifiques comme la gestion du harcèlement.

Marc Rosset, un des co-fondateurs et responsable de l’Association, raconte :

” La formation que nous proposons inclut 10 jours sur les outils de la médiation, outils qui nous semblent essentiels en matière de technique d’entretien. Aussi nous tenons à ce que notre formation soit tournée vers la pratique. Nous faisons intervenir des PCE expérimentées qui présentent leur activité puis nous invitons des experts des métiers dits “ressources” (médecins du travail, avocats, ergonomes, inspecteurs du travail, etc.) auxquels la PCE fera appel pour le suivi de ses cas ” 

Marc Rosset m’a aussi parlé d’une sélection de dossiers des postulants. Les responsables de la formation trient les profils en fonction de la motivation et du parcours, mais aussi selon l’aptitude du candidat à rester neutre.

 

Nous refusons des candidats avec un vécu professionnel ou personnel récent qui pourraient les empêcher de rester dans une position de neutralité bienveillante. L’objectif de notre profession est de trouver comment résoudre les problèmes ensemble et pas de prendre la défense d’une partie”, conclut Marc Rosset. 

Certaines personnes ont des prédispositions personnelles excellentes, cela prime parfois sur leur formation. Malgré tout il sera demandé aux aspirants d’avoir une expérience d’au moins 8 ans en entreprise !

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 L’avis d’un avocat en droit du travail 

Maître Christian Bettex, spécialiste FSA en droit du travail, rappelle que “ce que décrit le SECO dans ses commentaires, c’est le monde idéal ! Il n’y a pas d’obligation légale à faire appel à une personne de confiance externe.

 

En cas de contrôle ou de conflit porté en justice, les tribunaux regardent uniquement l’efficacité du processus de lancement d’alerte. 

Maître Bettex précise néanmoins que “ contrairement aux risques physiques, les risques psychosociaux nécessitent que la parole soit libérée. Il est important que les collaborateurs se sentent en confiance pour oser se confier. ”

Dans l’exercice de son activité, Maître Bettex a pu voir l’évolution significative de la jurisprudence : “ le harcèlement survient beaucoup plus rapidement qu’auparavant. Aujourd’hui toute blague sexiste au travail est intolérable ”, affirme-t-il. 

Malgré cela, Maître Bettex constate auprès de ses clients que certaines petites structures préfèrent calculer la probabilité qu’une plainte ne survienne plutôt que de faire appel à une PCE. 

Si le risque est estimé comme faible, les dirigeants préfèreront s’exposer au versement d’une indemnité. En revanche, dans toutes les grandes structures pour lesquelles je travaille, le processus de lancement d’alerte passant par une PCE est bien rôdé ”, conclut-il. 

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Le prix, un argument dissuasif pour les PME

Si les PME font moins appel aux personnes de confiance c’est car elles s’imaginent que le coût d’intervention sera trop important. 

Selon Marc Rosset, les prix peuvent varier selon le prestataire et la séniorité. On peut engager une personne de confiance pour un prix allant de 3 à 10 francs par collaborateur et par an (frais de permanence), puis une facturation de 200 à 350 CHF par heure d’intervention. 

Les employeurs qui ne veulent pas de PCE craignent aussi l’absentéisme des collaborateurs. Ils pensent que les employés feraient appel à ce service de manière abusive. 

A ce sujet, Marc Rosset se veut rassurant :

“ En moyenne, nous ne sommes sollicités que par 2% de l’effectif. Cela représente deux appels par an pour 100 collaborateurs. Si c’est plus important, cela signifie qu’il y a un problème plus large qui couvre toute l’organisation. ”

Selon l’experte en santé et sécurité Lydie Lecoultre, faire appel à une PCE revient moins cher que les coûts indirects des conflits (absences, incivilité) même pour les petites structures.

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La professionnalisation de cette fonction est positive, elle permet de garantir un niveau de formation adéquat et d’assurer un suivi très qualitatif des cas de harcèlement ou de conflits dans l’entreprise.

Les professionnels RH peuvent se réjouir de cette évolution car c’est un outil de plus en plus fort au service de la santé et la sécurité ! 

 

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Sources et liens utiles : 

L’association des personnes de confiance suisses : https://aspce.ch/

Lydie Lecoultre : http://www.windsofchange.ch

Marc Rosset : https://marc-rosset.ch/

Maître Bettex : http://www.rusconi-avocats.ch/les-avocats/christian-bettex/

 

 

Cécile

J'ai exercé différentes fonctions dans les RH en entreprise, ou bien en tant que consultante. Je parle de sujets que je rencontre dans ma fonction de spécialiste RH et de coach.