J’ai « perdu mon âme » dans mon travail lorsque…

Extraits de témoignages, recueillis par Catherine Vasey. Un grand merci à toutes les personnes qui ont partagé leur expérience !

J’ai « perdu mon âme » dans mon travail lorsque…

 « Mon collègue ferme les portes arrière de l’ambulance. Je m’assois sur le siège “capitaine” à la tête de la patiente, pour surveiller ses voies aériennes. Elle est en surpoids et il nous est impossible de la mettre en PLS (position latérale de sécurité) sur notre brancard. Soudainement elle commence à s’agiter en tournant la tête à droite et à gauche. Tenant le vomibag de la main gauche, je le plaque avec force sur son visage avec la main droite vers le côté gauche, pour qu’elle ne vomisse pas partout. La jeune patiente très alcoolisée ne remarque rien de mon geste.  Moi, je regarde ma main droite bleue gantée avec effroi et consternation. Ce n’est pas ainsi que je souhaite prendre soin des personnes. Pendant que je relâche la pression, je me souviens avec soulagement que j’ai déjà démissionné de mon poste… »

« Je travaillais dans l’industrie, je dessinais des machines pour trier les carottes et les patates. L’objectif était de construire une machine qui élimine les carottes peu présentables : si ce n’est pas parfait, cela ne se vend pas ! Alors que dans ma vie, j’essaie de construire une vie responsable… au niveau écologique… »

« En tant que jeune médecin, j’avais une idée naïve de ce que mon travail serait. J’ai dû travailler à l’encontre de mes valeurs : un rythme inhumain, coupée du patient pour effectuer du travail administratif. Les procédures administratives et le rendement poussés à l’extrême. Si tu veux prendre du temps pour soigner vraiment les gens, tu dois faire du bénévolat ! »

« Dans le rural, on accorde au vétérinaire 15’ minutes montre en main pour voir l’animal et encaisser la consultation auprès du paysan ! »

« Je me dis que parfois un vétérinaire travaille mieux qu’un médecin : Avant d’administrer un antibiotique, le vétérinaire fait une culture afin de choisir le bon antibiotique, un médecin n’a plus le temps de faire une culture, il administre l’antibiotique à un enfant sans tester. La vache à un rendement économique, l’enfant n’en a pas ! »

« On me dit : Dégages cette poubelle ! Tout le monde se parle mal dans ce fast-food ! Alors je n’ai plus envie d’y aller. Je dois créer des raisons pour continuer d’y aller. Je dois développer cette attitude à créer mes bonnes raisons de travailler. »

« Quand tu es fonctionnaire dans un service publique, le patron c’est qui ? Nous sommes au service de la population mais tout le monde s’en fout ! »

« Je travaillais en librairie, on me demandait de vendre au moins 4 à 5 cartes de crédit par mois, mais sans s’assurer que le client soit solvable.  Je ne pouvais accepter l’idée que je puisse participer à cet endettement !!! J’ai alors négocié avec mon employeur, il a accepté que je ne vende que les cartes de fidélité. »

« J’ai eu l’impression de vendre mon âme au diable lorsque j’ai mis ma force et mon énergie à vendre des montres de luxe. Vendre un objet inutile, cela n’avait aucun sens finalement !!! »

« Ergothérapeute, travailler dans le « care » n’est pas valorisé, on n’apporte pas une valeur économique à la société, on coûte de l’argent ! On s’occupe de l’autre, ça ne vaut rien… »

« Ma cheffe ne sait même pas où est mon bureau… pour dire que la santé au travail c’est moyennement prioritaire dans notre usine… sauf quand il faut miroiter des chiffres ou la réalisation de projets de prévention durant les visites des grands pontes… »

« Notre entreprise a grandi, nous avons pris des risques en engageant davantage de personnel. Mais j’ai le sentiment que tout peut s’effondrer d’un jour à l’autre, que ce n’est qu’une question de temps, tout est tellement fragile car nous n’avons aucune marge. Je ne peux pas m’empêcher d’anticiper le sentiment de culpabilité et d’échec le jour où tout volera en éclat. Je crains l’avenir. Pas terrible pour un leader qui devrait au contraire donner de la confiance à ses collaborateurs et encourager son associé… Je me sens complètement prisonnier. J’ai parfois envie de tout arrêter parce que j’en ai marre, j’ai fait le tour, j’ai envie de tenter autre chose. Mais j’ai honte de penser que je serais comme le capitaine qui saute du navire et qui laisse les autres sombrer, comme l’architecte qui abandonne un chantier au milieu d’une construction. J’ai honte de penser que j’aurais préféré abandonner plutôt que de me battre jusqu’au bout. J’avais fait le choix d’entreprendre pour répondre à un besoin d’indépendance, de liberté. C’est comme si je me retrouve maintenant prisonnier de ce choix. »

 

 « Gagner ma vie sans y perdre mon âme ? »

« Cela m’évoque l’importance de trouver du sens à mon travail, de me sentir utile, de contribuer à quelque chose. Il me semble que les gens les plus heureux au travail sont ceux qui ont l’impression de bien faire les choses et qui y mettent du cœur et du soin. »

« Nous n’avons pas à « gagner notre vie » car elle coule déjà en nous. Il y a toutefois un parcours intérieur nécessaire pour passer du mode survie dans lequel nous sommes enlisés, à la vie dans son entièreté. Certes, sur le chemin de retour à son âme, les résistances intérieures peuvent être fortes, en lutte tantôt avec l’extérieur, tantôt contre une partie de nous-même. Cette peur de manquer, en l’occurrence d’argent, qui nous pousse à aller jusqu’à l’épuisement, le reniement de soi, de nos aspirations. »

« La notion de « travail » est fausse, dans notre société, travail sous-entend travail-rémunéré. Ingénieur agronome devenue femme de paysan, si je suis à la maison, j’élève mes 4 enfants, je ne travaille donc pas ? Je n’ai rien à répondre à la question : « Que fais-tu dans la vie ? ». Ce n’est pas valorisé dans notre société… »

« Il y a un écart générationnel qui se crée… Les jeunes se posent la question de pourquoi travailler autant ? Avant on travaillait et on pouvait s’offrir des choses, des beaux voyages… Maintenant tu travailles pour payer l’essence pour aller travailler ! »

« On se rend compte qu’on augmente la qualité de vie en diminuant le travail. Finalement, on n’est pas né pour travailler, on est né pour vivre. L’économie devrait servir l’humanité, actuellement c’est l’inverse ! Je donne de la valeur à quoi ? Dans la productivité ? »

« Je me rappelle encore très bien me sentir agressée en tout temps, par le monde extérieur, les devoirs, les tâches à accomplir mais aussi par moi-même, mon intérieur. Pas à pas je découvre, je lâche prise, j’accepte, j’avance et je ME découvre. Le fait d’avoir à peine l’argent pour vivre et de s’en sortir malgré tout m’a enseigné que je n’avais pas besoin d’autant de choses. D’accepter de recevoir sans pouvoir le rendre à cet instant.  D’avoir eu la chance d’avoir été entourée de quelques personnes qui chacun à sa manière m’a beaucoup aidée et que remplie d’une gratitude et d’une reconnaissance sans fond je remerciais. Je n’ai pas encore trouvé ma réponse définitive à la question “comment gagner (financièrement) sa vie sans perdre son âme ?” Mais je continue à suivre mon chemin, sur lequel je découvrirai peut-être une réponse qui sera en accord avec moi. »

« Je pars travailler en gardant en tête que “je suis la priorité ». De ce fait, je respecte mes heures de travail, et les journées au travail sont courtes ! Terminé ou pas, je pars (de toute façon, même avec un pourcentage plus conséquent, je ne parviendrais pas à le réaliser à la hauteur de ce je souhaite !). Aussi j’ai retrouvé du temps en fin de journée à la maison et je l’apprécie !! Cette attitude me permet de prendre davantage de distance avec les éléments qui arrivent et sur lesquels je n’ai pas prise. »

Pour terminer cette série de témoignages, un extrait du discours de départ d’une jeune stagiaire :

« Comme vous le savez, c’est avec grande nostalgie que je quitte mes fonctions de stagiaire-esclave. Je ne sais toujours pas quel nom exact porte le rôle que j’ai pu accomplir (alors un cahier des charges ou des objectifs… n’en parlons pas !) mais après tout ce temps, j’ai compris qu’il n’a jamais été question de tâches, mais de personnes. De tout ce que j’ai pu faire, c’est vous soutenir qui m’a plu le plus ! »

Comment gagner ma vie sans y perdre mon âme ? (1er épisode d’une série d’articles publiés sur ce thème écrits par différents auteurs). N’hésitez-pas à partager vos expériences, questionnements, remarques ou « coups de gueule » en commentaires de ce blog, cela alimentera notre série d’articles sur ce thème…

Catherine Vasey

Les 5 regrets au seuil de la mort…

Actuellement, beaucoup d’entre nous vivons une sensation de saturation dans les activités quotidiennes, cela s’exprime avec l’impression : « je n’ai pas assez de temps pour moi » ou « je passe à côté de ce qui m’est vraiment important » ou « lorsque j’aurais terminé toutes ces obligations, je pourrais enfin être libre de… ».

Nous sommes immergés dans un environnement qui, si nous n’y prenons pas garde, risque de nous distraire de l’essentiel, à devoir effectuer des tâches et des activités qui nous prennent du temps, de l’énergie mais qui ne nous nourrissent pas !

La perspective de la mort nous éveille à être vivants… Les personnes mourantes expriment une sorte de lucidité et de conscience de ce qui leur aurait été réellement important… Sagesse pour nous qui sommes vivants, il n’est pas trop tard…

 

Les 5 regrets au seuil de la mort… *

(*Bronnie Ware, infirmière australienne en soins palliatifs, a consigné les paroles des mourants dans un livre : « The Top Five Regrets of the Dying »)

  1. J’aurais aimé avoir le courage de vivre en accord avec moi-même au lieu de mener la vie qu’on attendait de moi. *

Oui, nous réalisons que notre chemin de vie est unique et que l’existence nous offre des opportunités et un potentiel à explorer. Qu’est-ce qu’il faudrait que nous ayons vécu pour nous dire à notre mort : « J’ai fait une belle vie » ? Et comment nous rapprocher de cette aspiration intérieure dans les actions de notre quotidien ? Quels choix ou changements avons-nous à faire dès maintenant ?

  1. Si seulement je n’avais pas travaillé autant. *

Ce regret nous pose la question de l’équilibre de vie que nous souhaitons réellement vivre. Si nous ne choisissons pas, la sphère professionnelle (ou les devoirs à accomplir) risque bien de prendre le pouvoir en nous absorbant entièrement… Tout l’investissement d’énergie, de temps et d’attention dans le travail se fait toujours au détriment des autres sphères de notre vie (notre couple, nos enfants, notre famille, nos loisirs, notre disponibilité intérieure).

  1. Si seulement j’avais eu le courage d’exprimer mes sentiments. *

Nous développons des stratégies et des contraintes émotionnelles par peur de décevoir, de fâcher ou pour apaiser les relations avec les autres. Nous réagissons, nous nous contrôlons ou nous adaptons, nous faisons des compromis avec nous-mêmes afin d’entrer dans le moule des attentes sociales. Mais finalement, exprimons-nous l’entier de notre potentiel de vie ? Ou étouffons-nous certains sentiments ou ce qui nous est important par peur de déranger les autres ? Exprimer nos sentiments nous demande du courage car cela nous expose davantage que de tout garder pour soi ou d’anesthésier nos émotions.

  1. Si seulement j’avais gardé le contact avec mes amis. *

« Les gens expriment souvent d’amers regrets de ne pas avoir consacré aux amitiés le temps et les efforts qu’elles méritaient. Ils se sont laissé prendre dans l’engrenage de la vie et, avec les années, ont laissé filer des amitiés en or ». *

Parfois notre quotidien nous donne l’impression d’être bien entourés car nous ne sommes pas en contact avec ceux qui manquent : (sur)investis dans la carrière professionnelle, nous ne souffrons pas de moins voir notre famille ou nos amis ; vivre dans une relation de couple fusionnelle et se combler mutuellement ne donne plus envie de cultiver des liens amicaux ou de passer du temps avec les collègues…  Comment cultivons-nous des liens nourrissants avec les personnes importantes à nos yeux, nos proches, notre famille, nos amis, nos voisins, nos collègues ? Quelle espace-temps accordons-nous afin de développer de nouveaux liens ?

  1. Si seulement je m’étais autorisé à être plus heureux. *

« De nombreuses personnes ne comprennent pas jusqu’au dernier moment que le bonheur est un choix. Elles se sont obstinées à suivre une logique dépassée et leurs vieilles habitudes. » *

Être vraiment heureux nous demande de prendre des risques, de sortir de notre zone de confort, nous pouvons nous sentir dans une vie sécure et satisfaisante mais est-ce vraiment suffisant pour nous sentir heureux ? Quelle place donnons-nous au déraisonnable dans notre vie ? Un bébé apprend à marcher en prenant le risque à chaque pas de tomber, et quel bonheur de vivre il démontre !

 

Je vous souhaite une vie animée par ce qui vous est essentiel… ce qui vous touche le cœur… sans distraction et sans compromis !

 

Mode d’emploi pour les HPI qui se respectent

 Efficacité de penser, curiosité intellectuelle, soif d’apprendre, hypersensibilité émotionnelle permettent une vie riche et passionnante. Ce fonctionnement original des HPI (=haut potentiel intellectuel) peut aussi créer des difficultés au quotidien et être la source d’une réelle souffrance au travail (voir article précédant). Dans ce cas, il n’existe aucun médicament ni aucune méthode miracle ! Pour retrouver et maintenir l’équilibre de santé et un climat intérieur serein, vous pouvez développer une stratégie construite sur mesure, en respectant certaines règles :

  • Cultivez votre originalité et préservez-vous du regard des autres !

La définition du HPI est d’avoir une intelligence « hors norme », cela signifie que les autres ne fonctionnent pas de la même façon que vous ! Vous mettre la pression d’être quelqu’un d’autre ou entrer en conflit avec vous-mêmes s’avèrent enfermant et stressant. Autorisez-vous de faire des choix de vie opposés aux attentes sociales. Le piège serait de vous sur adapter constamment, d’essayer de correspondre à un moule social ou à ce qu’on attend de vous et d’être à l’envers de vos propres besoins. Entraînez-vous à vous accepter tel-le que vous êtes !

Le jugement des autres ou le regard critique de votre entourage risquent de contaminer votre climat intérieur. Préservez-vous de toute comparaison intempestive, car cela peut éroder la confiance en vous. Dans certaines situations ou dans certains milieux, il peut être utile de porter une « tenue de camouflage », c’est-à-dire de ne pas dévoiler le fond de votre réflexion afin de vous préserver de conséquences relationnelles négatives (incompréhensions, rivalités, résistances, conflits). Fuyez les situations d’injustice ou détournez le regard (votre attention) si ce n’est pas possible de réellement fuir.

  • Revenez au corps le plus souvent possible !

Le plus grand danger pour les HPI est de surinvestir le niveau intellectuel au détriment du corps. Lorsque vous travaillez plusieurs heures d’affilée sans mouvements physiques, le risque de « dérapage cognitif » (les pensées s’accélèrent, s’emballent et deviennent ingérables) apparaît, d’autant plus lorsque votre mental est passionné ! Lorsque vous revenez aux sensations corporelles par des exercices d’équilibre, d’activités manuelles ou d’intensité physique et de décharge de stress, vous désamorcez un éventuel surinvestissement cognitif. Soyez très prudent si vous utilisez des béquilles comme l’alcool ou d’éventuelles drogues pour débrancher votre tête, ou des somnifères, l’addiction peut rapidement s’installer. Le fonctionnement cognitif est souvent froid et exigeant. Vous pouvez revenir à votre cœur, à ce qui vous donne de la joie ou un sentiment de gratitude, aux « petits bonheurs » du jour. Posez-vous la question tous les soirs : « Qu’est-ce qui m’a touché le cœur aujourd’hui ? ».

  • Faire le vide de vos pensées ? Un sans-issue !

La fonction de notre cœur est de battre, la fonction de notre mental est de penser, réfléchir, planifier. Lorsque vous avez l’impression que vos pensées s’emballent et que vous en perdez le contrôle, il ne s’agit pas de tenter de « faire le vide mental », il s’agit plutôt de ne pas vous accrocher à chaque pensée et/ou de débrancher la prise émotionnelle de certaines situations qui envahissent votre esprit (je capte l’information sans le « son » émotionnel). Vous pouvez cultiver le « désintéressement sélectif ». Vous avez identifié certaines pensées comme inutiles voire même toxiques ; faites comme si vous les connaissiez par cœur, il n’y a rien de nouveau ni d’intéressant à s’y accrocher, vous les voyez et vous les laisser passer !

  • Prudence pour ne pas vous disperser

Votre curiosité insatiable et la peur de vous ennuyer sont les pièges qui régulièrement vous font faire des choix qui risquent de vous surcharger sur un moyen terme et votre potentiel est vaste. Lorsque de nouveaux projets se présentent, il peut être utile d’avoir une stratégie pour discerner ce qui vous est essentiel. Un filtre personnel pour dire non vous sera utile. Accordez-vous un instant pour vous donner l’occasion d’apprivoiser le sentiment d’ennui sans forcément passer tout de suite à du nouveau. Le rien, le vide et l’ennui peuvent donner accès à une disponibilité plus profonde, terrain propice pour cultiver votre vie intérieure et vos idées créatives.

  • Cultivez la « sensation » de confiance en soi

Le manque de confiance en soi est très fréquent pour une personne HPI. Tenter d’améliorer la confiance par des solutions mentales comme les pensées positives est moins efficace que de construire une « sensation de confiance » : vous la renforcerez, par exemple, dans une posture physique stable et enracinée qui favorisera une attitude intérieure plus sûre.

Le « syndrome de l’imposteur » pris à la lettre en vous remettant en question à chaque fois est un désastre pour la confiance en vous. Lorsque vous avez l’impression que les autres vont se rendre compte que vous n’êtes pas si formidable, considérez cet orage de doutes comme un baromètre : « Ce climat intérieur m’alerte que je suis en déséquilibre, c’est le moment de revenir à moi et à mes besoins ».

  • Votre méthode de mise en action des mesures de prévention

Inutile de développer davantage de savoir sur la prévention. Le grand challenge pour préserver ou rétablir votre équilibre de santé est d’agir : expérimenter, explorer, faire des essais et des erreurs, ajuster le tir, répéter et intégrer les bonnes mesures de prévention dans votre quotidien. Le cerveau prend du temps pour sortir des habitudes de penser (d’une semaine à 28 jours), l’important est de garder le cap du changement souhaité, persévérer dans le temps, mettre en place des rappels réguliers. Imaginez ce qu’il se passerait si vous mettiez votre intelligence au service de votre équilibre de santé, si vous activiez votre curiosité et votre créativité afin d’explorer les différentes façons de répondre à vos besoins quotidiens, à appliquer les bonnes mesures de prévention, à renforcer votre équilibre. Cela vous permettrait de changer avec intelligence et de façon durable !

  • Revenez au réel humblement

Les HPI sont simplement hors norme, ni moins bons ni meilleurs ! Etre HPI n’est pas la bonne excuse pour subir passivement la frustration et l’incompréhension du monde comme une fatalité. Et à l’inverse, la vivacité d’esprit, le potentiel qui se déploie, le côté extra-terrestre sont parfois interprétés comme de l’arrogance : à côté d’un HPI les autres peuvent se sentir rabaissés. Vous pouvez trouver votre propre voie, révéler le potentiel qui vous habite tout en restant humble dans votre ambition, accepter les limites du réel et de votre entourage (différent de la vision idéalisée et illimitée du mental !).

 

Le message essentiel à retenir pour vous préserver est que mis à part la période de « lune de miel » d’un nouvel emploi, le travail n’est jamais extraordinaire, il peut être intéressant mais il ne suffira jamais à vous satisfaire entièrement car il ne vous sollicitera pas suffisamment dans tout votre potentiel intellectuel et créatif. Cultivez et nourrissez votre vivacité cognitive indépendamment des défis professionnels, ne misez pas tout sur votre sphère professionnelle !

Pour celles et ceux qui ont besoin d’aller plus loin, participez à une démarche active de prévention du burn-out spécifiques aux HPI (suivez ce lien).

Article de blog précédent : les HPI en danger de burn-out

Protéger la santé du personnel sanitaire de la crise du covid-19

“Nous nous organisons pour faire tourner la maternité avec du personnel parti en renfort ailleurs mais nous allons quand même essayer d’éviter les semaines de 60 heures sachant que les horaires sont déjà sur 13h/24h, histoire de pouvoir survivre sur la durée” (parole d’une infirmière sage-femme dans un hôpital de zone de la région lémanique, 22.03.2020).

Les soignants, médecins et professionnels de santé sont au front pour faire face à la pandémie. Comment s’engager “corps et âme” pendant des mois tout en préservant sa santé ?

Le Conseil Fédéral a ordonné un blocage partiel de la loi sur le travail alors que ces règles garantissent une protection essentielle : le droit aux pauses et les périodes de repos sauvegarde le temps de récupération indispensable. Voir les informations du Syndicat des services publics.

Cette période de crise extrême va durer de longs mois pour le personnel de santé, les périodes de repos et les mesures de protection de la santé au travail doivent être respectées afin de garantir un système de santé durable…

Chaque professionnel a une responsabilité personnelle pour se préserver au mieux. Voir mon article qui apporte quelques “modestes éclairages” de mesures individuelles pour récupérer.

Chaque institution hospitalière s’organise afin de préserver la santé de ses collaborateurs :

“Nos plans d’urgence élaborés avec tous nos professionnels solidaires font que les normes légales sont dépassées, les lever est nécessaire pour éviter encore que l’on se fasse taper sur les doigts parce que nous nous sommes organisés pour tenir la route. Ayez aussi confiance que les managers ne sont pas tous des affreux et que nous sommes aussi au front à réorganiser pour que nos équipes tiennent dans la durée. Malgré le nombre d’heures qui s’accumulent, nous faisons en sorte que chacun ait des soupapes et tentons de prévenir tout épuisement. La solidarité qui se dégage de toutes les équipes est loin des discours de révolte qui ne vont qu’amener angoisse au sein de nos blouses blanches. Un peu de confiance et de calme les amis on en a besoin sur les lignes de front !” (Précisions d’une infirmière cadre en milieu hospitalier dans le canton de Vaud, 22.03.2020).

Dans cette crise de pandémie, notre pays doit absolument prendre toutes les mesures pour préserver nos professionnels du domaine sanitaire.

Mais sur un long terme, lorsque le danger sera dépassé, engageons-nous à soutenir notre système de santé. Notre gratitude et nos remerciements chaleureux envers le personnel hospitalier devront évoluer à l’avenir vers des conditions de travail qui respectent réellement l’intégrité et la santé du personnel ainsi qu’une revalorisation fondamentale du secteur sanitaire en Suisse.

 

La gestion de stress des astronautes

Entretien avec Claude Nicollier,  astrophysicien et spationaute suisse de l’Agence spatiale européenne. Il devient en 1992 un des premiers européens dans l’espace.

 

Avez-vous été fidèle à votre rêve d’enfant, devenir astronaute ?

« On a marché sur la lune » de Tintin a été publié lorsque j’avais 10 ans. Le ciel noir avec les étoiles, l’équipage coloré, la fusée magnifique, Tintin, Milou, le Capitaine Hadock, les passagers clandestins ! Tout cela me faisait rêver. C’était pour moi une source d’inspiration extraordinaire. Le rêve d’être astronaute était dormant car c’était à l’époque encore impossible. J’avais beaucoup d’affection pour le ciel et les étoiles, j’étais curieux de tous les phénomènes naturels, j’ai fait des études de physique et par la suite d’astrophysique. Un rêve réalisé, en parallèle, celui de devenir pilote dans les forces aériennes. Mon grand bonheur est de faire quelque chose qui a un sens, avoir des responsabilités, s’entraîner, aller dans l’espace réparer le télescope qui nous a donné des images absolument fantastiques de l’espace où il y a une telle richesse. C’est un immense privilège d’avoir été impliqué dans ces actions profondes.

 

Vous qui avez réalisé des missions dans l’espace dans des conditions d’exigence extrême, comment vivez-vous le stress au travail ?

Il y a les périodes tranquilles où le niveau de pression est nul : j’ai tout le temps, je réféchis, j’écris, j’évalue, je peux rêver. Des activités où il faut produire, par exemple donner un cours, je le prépare, durant la délivrance du cours, je reste concentré pour ne pas faire trop d’erreurs, pour assurer un niveau de confiance auprès des étudiants. Il ne faut pas briller, mais il faut faire le choses correctement. C’est un niveau moyen de pression. Un engagement dans une mission militaire, il faut attaquer une cible précise par mauvais temps, dans la montagne, c’était un niveau de pression plus élevé. Il y a du danger. Quand je donne un cours, il n’y a pas le risque physique, il y a un petit risque mental de ne plus être respecté par les étudiants si on se trompe complètement. Mais ce n’est pas un risque physique. Certain de mes collègues militaires ne sont pas revenus, tout simplement.

Pour moi l’aviation militaire était une magnifique leçon de gestion du stress. Pour quelqu’un qui aime voler, c’était une forme de vol extraordinaire, un avion à réaction de 10 tonnes, on peut faire de l’acrobatie, des évolutions en formation, pour un pilote c’était fabuleux ! En même temps, nous avions des scores à faire dans les tirs. On nous contrôlait, nous essayions de faire au mieux, il n’y avait aucune distraction, nous étions complètement focalisés. La gestion du stress est venu automatiquement avec la passion du vol et la responsabilité. Les avions coûtaient 2 millions de francs, chaque vol était cher : une dizaine de milliers de francs pour chaque vol.

Pour éviter le niveau de stress négatif, il faut se préparer, y compris à des situations inattendues mais auxquelles on a déjà pensé, « what if ? ». En se posant beaucoup de questions de ce type, nous réfléchissons aux mesures à prendre de façon à pouvoir accomplir la mission. C’est une responsabilité que nous avons, si nous ne pouvons pas l’accomplir, nous essayons au moins de nous en sortir et de ramener le vaisseau spatial sur la piste en une seule pièce !

Les sorties en scaphandre, c’est intense ; il faut  vraiment se concentrer pour ne pas faire d’erreur. L’absence de pesenteur rend les choses beaucoup plus dificiles car il faut à chaque geste toujours s’accrocher à la structure, sinon détaché, il ne reste plus que le filain de sécurité. Mais nous l’avons tellement entraîné dans la piscine que c’est automatique. Le téléscope fait 16 mètres de haut, j’ouvre des portes, et c’est le même mécanisme, je sais que cette poignée est relativement dure, il faut utiliser les outils motorisés pour desserer les boulons, tout cela je l’ai déjà vécu en simulation.

C’était la joie de faire quelque chose qui avait un sens, pour laquelle j’avais été préparé, nous étions obsédés de réussir chaque sortie extra véhiculaire qui nous avait été confiées. Nous avons dû changer l’ordinateur principal et introduire une caméra grande comme un piano à queue dans le télescope. Ce n’était pas le bonheur de voir les étoiles et la terre, c’était la joie de faire ce qui avait du sens. Le sentiment de responsabilité est très fort. On nous avait confié cette tâche difficile, relativement dangereuse, nous la faisions au mieux. Préparé, je me focalise, 8 heures dehors, sans pause. Nous avions un sac à eau dans le scaphandre, uniquement de l’eau, pas de nourriture. A la fin de la sortie, il n’y avait pas eu assez d’eau et j’avais les lèvres complètement sèches et déshydratées.

 

Comment réagit un astronaute lorsqu’il fait une erreur ?

Nous sommes très soutenu, généralement nous savions ce que nous devions faire mais les coéquipiers nous rappelait toujours les procédures avec une voix calme. Nous n’élèvons jamais la voix, tout est tranquille, chacun fait son travail, le temps est limité, donc une pression sur le temps. Pour chaque sortie, le « time line » était contrôlé par le sol, ils entendaient toutes les communications, connaissaient toutes les données télémétriques, y compris l’ECG qui enregistre en permanence la fréquence cardiaque. Lorsque nous étions un peu en retard par rapport au « timeline », nous sentions la pression sur nous pour ne pas continuer d’être en retard. C’était du bonheur, le bonheur de faire un travail qui était rigoureux et très exigeant.

Si nous faisions une erreur, il fallait d’abord corriger la conséquence de l’erreur, pour rétablir la normalité. Ensuite il faut mettre cela derrière nous, sans se laisser perturber. Lors d’une sortie extra-véhiculaire, si un astronaute réalise que le filain de sécurité est détaché, c’est une erreur majeur. Il le dit, tout le monde le sait, c’est arrivé. Dans ce cas-là, il rattache tranquillement le filain de sécurité, il rétablit la normalité, il met tout cela imméditement derrière. Il reprend le travail avec une performance à 100%. Il n’y a pas de conséquences directes. Les erreurs doivent servir à minimiser la probabilité qu’elles se produisent à nouveau dans le futur. Par la suite, dans le débrifing nous discutons de pourquoi c’est arrivé sans jamais avoir l’idée de critiquer qui que ce soit. C’est un respect de qui nous sommes, nous sommes des être humains qui font de temps en temps des erreurs. Nous en tirons des leçons pour que cela n’arrive plus. Les choses embarassantes ne sont jamais masquées, elles sont mises sur la table car cela évite à d’autres que de mêmes circonstances se produisent pour eux.

 

Vous avez effectué 4 missions dans l’espace, comment récupériez-vous après le stress et l’effort intense d’une mission ?

Généralement, nous n’étions pas désignés pour la prochaine mission qui devait avoir lieu une année plus tard. Il y avait quelques heures d’entraînement une à deux fois par semaine et le reste du temps, nous avions un job où nous collaborions avec des ingénieurs sur un problème, améliorer la pilotabilité du bras articulé par exemple. Nous pouvions aussi être engagés comme soutien à une mission en cours, comme communicateur dans la salle de contrôle, assis juste à côté du directeur de vol. C’est un niveau de pression relativement bas. Dès que nous sommes désigné pour la prochaine mission, tout bascule dans l’entraînement intensif. Les astronautes sont complètement intégrés dans le projet, c’est notre mission, non seulement parce qu’on nous l’a confiée mais parce que nous l’avons créée, en même temps de s’y entraîner. La satisfaction au travail est énorme, c’était magnifique et extraordinaire ! La première mission sur hubble n’avait jamais été faite avant, il fallait tout imaginer.

 

Une question personnelle, on dit que le paradis est dans le ciel, alors ?

Il y a une beauté stupéfiante de l’espace, cela m’a profondément touché : voir tout le ciel étoilé qui se déplaçait rapidement. Les levers d’Orion à l’Est, les vues de la Terre. En considérant que l’extrême beauté nous rapproche du divin, alors, dans ce cas-là, je me suis rapproché du divin, oui. En regardant dehors, nous avons l’impression d’une extraordiaire pureté que nous ne trouvons jamais sur terre. L’atmosphère est un écran qui nous empêche de voir les étoiles pendant le jour car il y a la diffusion de la lumière du soleil dans toutes les molécules d’oxygène. Sortis de cet écran, nous avons une visibilité sur l’univers, sans obstacle, rien ne nous empêche de voir le lointain. En dehors de l’atmosphère, la vison est si claire et les univers fabuleux. Ce qui m’a ému, c’est l’extraordinaire pureté. Le divin et la pureté sont des choses qui se rapprochent. Pour apprécier la véritable saveur et la grandeur, la splendeur du vol spatial, il faut y passer des jours ou des semaines, voir les couchers de soleil, la nuit voir toutes les lumières des villes qui se déplacent rapidement.

 

Quels sont vos 3 leviers pour être en santé au travail ?

La passion pour ce que je fais, la rigueur et la discipline, et l’exercice physique.

 

Extrait du livre : “La boîte à outils de votre santé au travail”, C.Vasey, éd. Dunod 2020

Le coût humain de la rentabilisation du domaine social

Comment préserver la santé des professionnel·le·s du secteur médico-social dans un contexte d’optimisation des tâches et d’accélération ? Le temps de voir émerger des changements organisationnels et politiques qui soutiennent la santé au travail, chacun·e est amené·e à prendre des mesures de prévention au quotidien.

Les métiers du secteur médico-social sont en pleine métamorphose. En effet, rentabiliser les prestations génère de nouvelles exigences en matière d’immédiateté et d’attentes collectives. L’objectif est « d’économiser », chaque année « des drames humains », des complications ou de réduire la longueur des hospitalisations. L’indicateur de performance a pour but d’optimiser l’efficacité des prises en charge en fonction du budget attribué mais il a tendance à dénaturer le sens du travail, chaque tâche devenant un objectif à atteindre coûte que coûte dans un temps donné.

L’effet secondaire de ce système économique est l’augmentation des tâches administratives pour justifier l’investissement des moyens financiers. Ce travail se fait au détriment du temps passé auprès des bénéficiaires, les professionnel·le·s ont tendance à se mettre la pression pour réussir à satisfaire les exigences des financeurs et maintenir, malgré tout, la qualité d’accompagnement en moins de temps.

Pour les travailleuses et travailleurs de terrain, formés à avoir des initiatives pour le bien de la personne, la mue du sens au travail est radicale. Aujourd’hui, ils ne peuvent plus se fier uniquement à leur expertise pour prendre des décisions adaptées à chaque situation. Ils se doivent d’atteindre des objectifs chiffrés décidés par d’autres avec des moyens formatés par des budgets pré-établis.  De plus, la logique de performance et de rentabilité encourage l’action à court terme, alors que, par exemple, l’accompagnement d’une famille dysfonctionnelle, la prise en charge d’une personne en situation de handicap ou le maintien d’une personne âgée à domicile sont des processus longs et complexes. Il n’y a souvent aucun résultat significatif rapidement.

Comment préserver la santé des professionnel·le·s du secteur médico-social dans un contexte que certaines interprètent comme une « zone sinistrée » ? Le temps de voir émerger des changements organisationnels et politiques qui soutiennent la santé au travail, chacune et chacun est amené à prendre des mesures de prévention au quotidien.

La nécessité de prendre soin de soi en priorité

Dans un avion, les directives d’urgence pour sauver un bébé sont : « le parent prend d’abord de l’oxygène avant de mettre le masque sur son enfant ». Le parent est prioritaire et c’est vital pour lui comme pour son petit. De façon similaire, un travailleur social dont le rôle est d’aider des personnes vulnérables en souffrance, doit d’abord prendre soin de lui. Impossible de soigner ou d’accompagner les gens de façon adéquate sans veiller scrupuleusement à sa santé physique et psychique !

Comprendre ce qu’est le burn-out

Plus les travailleuses et travailleurs médico-sociaux sont informés et plus ils pourront être vigilants. Le burn-out n’est pas un état qui apparaît subitement. Généralement, l’épuisement s’installe au-delà de 6 mois de stress chronique. Ce processus s’entraîne de lui-même : le stress permanent augmente la tension, le corps se fatigue, le sommeil est perturbé, la récupération est difficile, l’efficacité au travail diminue, les heures supplémentaires augmentent pour compenser, ce qui crée davantage de fatigue.

Identifier les signaux d’alerte

Concrètement, chacune et chacun doit être attentif à son état physique, émotionnel et mental. Les signaux qui devraient alerter sont : une fatigue de tension, une irritabilité accrue, des inquiétudes, une démotivation mais également la rumination de soucis professionnels qui envahissent la vie privée et empêchent de se changer les idées et de bien dormir. Le stress chronique provoque une vision systématique des difficultés et non des solutions ce qui développe un sentiment de ras-le-bol ou d’impuissance. Dépasser les limites, entrer dans une zone à risque, est habituel pour des travailleurs engagés. L’important est de s’en rendre compte et de mettre en place des mesures de protection au bon moment.

Kit de survie en zone de danger

Si les signaux d’alerte se sont installés, la priorité consiste à se ressourcer davantage. Pour ce faire, protéger son sommeil est primordial. Se défouler et se changer les idées est aussi prioritaire. Au travail comme dans la vie privée, il est conseillé de se concentrer sur les situations où il est possible d’agir plutôt que se focaliser sur les difficultés. Un des points qui fait une grande différence est de cadrer les ruminations toxiques, surtout dans la vie privée.

Maintenir une vie privée solide et sortir du rôle d’aidant

Le plus grand danger ? Les préoccupations professionnelles mangent peu à peu la vie personnelle et les opportunités de se ressourcer s’amenuisent. Notre pouvoir de récupération tient en priorité à la vie hors travail : veiller à avoir une vie privée enrichissante et à « déconnecter » complètement du rôle d’aidant.

Evacuer ses émotions sainement

Assurer une attention constante et bienveillante implique d’être en bonne santé physique et psychique. La résonnance émotionnelle est l’outil principal pour travailler avec empathie et assurer une présence humaine. L’hygiène émotionnelle est vitale pour les professionnels du secteur médico-social ; il s’agit d’évacuer régulièrement ses émotions, se défouler, bien connaître son fonctionnement, être conscient des problématiques susceptibles d’entrer en résonance avec son propre vécu et savoir poser des limites.

Garder le sens de son travail vivant

La première étape indispensable est de ne pas subir mais d’accepter les indicateurs de performance qui constituent le nouveau paysage du secteur médico-social. Entrer en opposition, résister, signifie investir et gaspiller son énergie dans un gouffre sans fond ! Il s’agit d’adopter une attention sélective : injecter du sens chaque jour dans les actes du quotidien, garder à l’esprit les indicateurs précis qui montrent la qualité du travail social en fonction des valeurs professionnelles. Recueillir l’auto-évaluation de l’aidé et valoriser une stratégie des « petits pas ».

Entretenir une ambiance d’équipe positive et bienveillante

Etre en équipe ou partager avec des pairs contribue à ventiler le stress et permet d’échanger sur des situations, que ce soit de manière formelle ou informelle. Le rire aide à dédramatiser et à relâcher les tensions. Il est possible de « vider son sac » mais cela doit être fait avec conscience, en avertissant l’autre et en respectant ses limites pour ne pas contaminer les collègues par une humeur plaintive ou de découragement systématique. Les supervisions permettent de questionner le fonctionnement d’une personne ou d’une unité, puis d’implémenter des changements durables et encourageants. L’échange de pratique permet de « débriefer » les émotions tout en bénéficiant de conseils pour s’améliorer. Les supervisions aident également à repérer les travailleurs sociaux en souffrance et à examiner avec eux les mesures à prendre.

Travailler avec l’humain nécessite des garde-fous

Le challenge actuel dans le secteur médico-social est de trouver le juste équilibre entre la logique économique, le respect des valeurs professionnelles et les besoins spécifiques de l’humain en situation de souffrance. Privilégier systématiquement la quantité et la rapidité au détriment de la qualité des prises en charge crée des conflits internes chez les travailleuses et travailleurs médico-sociaux : ils sont tiraillés entre ce qui leur est imposé de faire avec les moyens limités à disposition et ce qu’ils souhaiteraient pouvoir faire face aux besoins particuliers d’une personne en détresse sur le terrain.

Les meilleur·e·s professionnel·le·s sont les plus exposé·e·s dans leur santé : engagé·e·s dans leur travail, elles et ils ont des exigences de qualité élevées selon leurs valeurs professionnelles, n’abandonnent pas face à une situation difficile. Un bon professionnel épuisé en arrêt de travail prolongé coûte cher à l’institution, son absence aura des répercussions sur ses collègues et l’efficacité des équipes. Le coût humain en sera élevé et contre-productif dans une logique de rentabilité et d’efficacité sur un moyen terme.

La responsabilité de la santé au travail est partagée, les professionnel·le·s mettent en place des mesures de protection individuelle au quotidien et le système institutionnel soutient et respecte les choix spécifiques des travailleurs. Des mesures conjointes, individuelles et organisationnelles, permettront d’augmenter l’efficacité, la rentabilité et la qualité des prises en charge sur un moyen à long terme. Une grande réflexion de société est ouverte : le secteur médico-social doit-il être absolument rentable au même titre qu’une entreprise commerciale ? Quels sont les garde-fous que nous souhaitons voir établis pour préserver la qualité de la relation d’aide dans notre pays ?