Beaucoup de nouvelles préoccupantes nous sont parvenues du côté de l’Union européenne (UE) ces derniers mois. Mais il y en a aussi de bonnes. Preuve en est l’annonce faite le 8 septembre par le Parlement européen de la désignation de Guy Verhofstadt en tant que représentant de l’assemblée pour mener les discussions avec le Royaume-Uni concernant sa sortie de l’UE.Trois raisons principales justifient que l’on se réjouisse de cette nomination.
En premier lieu, l’ancien Premier Ministre belge n’a cessé de prôner la tenue d’une position sévère de l’UE envers le Royaume-Uni en cas de Brexit. Ainsi, il l’a déclaré très fermement le 1er septembre dernier lors d’un débat à Bruxelles[1] : «Le Brexit aura lieu, il n’y aura pas de deuxième référendum»[2]. Il a également insisté sur la nécessité de la part des «chefs d’Etat et de gouvernement d’obliger les Britanniques à annoncer l’utilisation de l’article 50 et à commencer les négociations»[3]. Par ailleurs, ces dernières devront se terminer par «un accord de libre-échange» ou alors sous forme de «statut associé qui donne uniquement accès au marché intérieur, dont toutes les conditions devront néanmoins être respectées»[4]. En effet, selon lui, la seule possibilité pour la Grande-Bretagne de rester dans le marché intérieur est d’appliquer «les quatre libertés dont la libre circulation des personnes»[5]. Car ce principe est, pour Guy Verhofstadt, «nécessaire parce qu’on est libre et parce qu’on est en Europe. C’est ça la normalité (…) et non pas de se faire arrêter aux frontières»[6].
Cette vision de l’Europe nous amène à la seconde raison de se réjouir de la nomination du député européen: sa vision pour l’UE de demain. Ainsi, l’homme qui ne cache pas son penchant pour le fédéralisme, est convaincu «que nous devons saisir l’opportunité d’une discussion autour du Brexit. Nous avons là une occasion unique de remodeler l’Union en profondeur»[7]. Cependant ce qui préoccupe le plus Guy Verhofstadt, ce n’est pas «la réaction des Britanniques, mais celle des 27 autres. Ils devraient se dire qu’ils sont enfin débarrassés de certains obstacles. [Or,] ce que je vois ce sont des chefs d’Etat et de gouvernement qui ne disent rien du tout à part qu’il ne faut pas aller trop vite. C’est le moment ou jamais de faire changer l’Union qui n’en est pas une!»[8]. Il voit ainsi en cette nouvelle configuration européenne une «chance extraordinaire de mettre fin à la politique de déminage et de rafistolage qui caractérise l’Europe depuis le traité de Rome en 1957»[9].
Pour mettre en place ces changements, et c’est la troisième raison de mon soutien, Guy Verhofstadt ne se contente pas de critiquer la situation actuelle en Europe, il propose également des solutions réalistes. Selon lui, «le problème actuellement est que nous sommes incapables de voir la réalité»[10] et que «ceux qui sont au pouvoir manquent de vision».[11] Or, de nombreuses solutions existent pour parvenir à une Union européenne telle que celle voulue par les Pères fondateurs. Parmi elles se trouve par exemple la mise en place d’une armée européenne, d’un budget européen, d’une politique d’immigration commune, d’un service de renseignement européen, d’un marché numérique commun, d’une union bancaire à part entière, d’une meilleure mobilité d’emploi en Europe, d’une révision du système institutionnel[12], et j’en passe. En outre, le Belge estime qu’il faut «créer un lien direct entre les citoyens et l’UE.(…) Les votes doivent avoir lieu au niveau européen, car c’est là que se trouve la vraie échelle de nos possibilités et de nos défis»[13]. Enfin, la nouvelle Europe ne se fera pas sans les jeunes car ce sont eux qui «vont faire basculer l’UE. C’est par les jeunes que va arriver la révolution, la révolte»[14]. Une révolution de la jeunesse qui pourrait bien se faire à travers les réseaux sociaux qui offrent «une possibilité de créer une communauté de millions de citoyens qui peut changer les choses»[15].
Alors, certes, ce ne sont que des paroles pour l’instant, qu’il s’agira de mettre en œuvre. De plus, une difficulté majeure résidera certainement dans le fait de convaincre Michel Barnier et Didier Seeuws, qui représenteront respectivement la Commission et le Conseil lors des négociations avec le Royaume-Uni, du bien-fondé de ces idées. Mais c’est déjà un premier pas décisif que le Parlement a choisi de faire par la nomination de Guy Verhofstadt: celui vers une «autre» Europe, plus unie, plus fédérale et surtout… plus européenne.
[1] Voir le débat « Guy Verhofstadt et Sandro Gozi – Brexit: Et Après? » en intégralité : https://www.youtube.com/watch?v=0LQiYKVTmYY (consulté le 9.09.2016)
[2] Cf. Débat mentionné ci-dessus.
[3] Op.cit.
[4] Guy Verhofstadt, «Le mal européen », Bruxelles, Editions Plon, 2016. P. 315.
[5] Op.cit.
[6] Op.cit.
[7] Op.cit. P. 314.
[8] Cf. Débat «Brexit: Et après?».
[9] Cf. Guy Verhofstadt, «Le mal européen », 2016. P. 314.
[10] Cf. Débat «Brexit: Et après?».
[11] Op.cit.
[12]Ces solutions sont expliquées en détail dans l’ouvrage « Le mal européen ».
[13] Cf. Débat «Brexit: Et après?».
[14] Op.cit.
[15] Op.cit.