Le télétravail peut-il nuire aux carrières féminines ?

En un an de télétravail, bon an mal an, chacun a aménagé sa place de travail à domicile et adopté de nouvelles routines.

A mesure que le monde « d’avant » s’estompe, comment sera celui « d’après » pandémie? Y aura-t-il des solutions « à la carte », des formules hybrides? Et si le choix nous est donné, qui, dans le couple, retournera au bureau?

Gare, avant de décider! Selon une récente étude française de Boston Consulting Group*, l’affaire ne se résume pas à de simples considérations pratiques (parfois tentantes), mais bien à l’impact du télétravail sur les carrières féminines.

Les auteurs soulignent en particulier la difficulté à effectuer leur travail : les femmes sont 1,3 fois moins nombreuses que les messieurs, à disposer d’un espace de travail dédié à la maison. Elles sont donc 1,5 fois plus susceptibles d’être interrompues, avec le risque accru d’erreurs, de distractions et la difficulté à se (re-)concentrer. Le télétravail offre, certes, un supplément de flexibilité dans l’organisation du temps. En revanche, il sollicite toute notre autodiscipline pour savoir où débutent et finissent le travail et le repos, et pour limiter le cumul des tâches professionnelles et privées, à l’origine de la charge mentale.

Autre aspect, à considérer : développer sa carrière c’est davantage qu’avoir bien fait son travail. Cela passe aussi par une bonne visibilité et audibilité. A quel point les femmes ont-elles pris la parole en visioconférence l’année écoulée ? 29% de moins que les hommes. Les raisons sont multiples mais en termes de carrière, en prendre conscience permet d’agir en conséquence.

Enfin, l’étude indique que le télétravail génère un sentiment d’isolement, 6% plus marqué chez les femmes. Fortes de ce constat, ont-elles cultivé leur réseau virtuel et réel? Certainement! Mais 13% de moins que les messieurs. S’agissant de gérer sa visibilité et son audibilité, développer son réseau (réel et virtuel) est une étape clef, dont les techniques s’apprivoisent.

Pour faire face aux défis des nouveaux modes de travail, l’étude préconise une prise de conscience forte à tous niveaux, et l’adoption de mesures d’accompagnement qui ont fait leurs preuves, comme le coaching, pour éviter les décrochages professionnels en particulier ceux des femmes.

Photo: Pixabay/Anrita

*Echantillon de 2002 femmes et hommes travaillant dans des bureaux, tous secteurs et types d’entreprises confondus.

L’art de remettre au lendemain

Connaissez-vous la procrastination consciente ? C’est l’art de remettre au lendemain, en toute conscience, et un acte de liberté dans un monde qui nous presse de construire carrière et famille, vite, vite, entre 25 et 40 ans, avant de basculer dans le « grand âge ». C’est le propos que la philosophe et psychanalyste Hélène L’Heuillet développe dans « Eloge du retard » (Albin Michel).

Une idée séduisante où l’on décide consciemment de remettre une obligation à plus tard, au profit d’un moment pour soi, à savourer pleinement. Car le grand malentendu consiste à penser que le procrastinateur (ou la procrastinatrice) se résume à un être désorganisé, paresseux, voire dépourvu de volonté. D’où le faible succès des injonctions qui lui sont faites de « se secouer », « se remuer », « se dépêcher » sinon…

Pour Fuschia Sirois, professeur de psychologie à l’Université de Sheffield, procrastiner n’est pas éviter une tâche mais éviter les émotions négatives qui y sont associées telles que manque de confiance en soi, sentiment d’incompétence, peur d’échouer… Au classement des tâches les plus procrastinées, outre celles qui ne nous intéressent pas, figurent celles qui sont mal définies, mal attribuées, ambiguës, impliquent un saut dans l’inconnu.

Vu sous cet angle, nous sommes tous des procrastinateurs en puissance. Savoir s’autoréguler consisterait alors à être conscients de notre manœuvre d’évitement de la tâche, à définir ce qu’elle évoque, avant de la décomposer en étapes (gérables) aboutissant au résultat.

Procrastiner ne rime donc pas automatiquement avec lambiner. A la fin d’une bonne journée de procrastination, un procrastinateur zélé peut avoir réorganisé ses dossiers ou ses armoires par codes couleurs, et ce, à la perfection. Comme «LA» tâche n’aura pas avancé d’un pouce pour autant, le zélé sera, au choix, frustré, coupable, stressé, irritable, saturé de grignotage, etc. Et bien décidé à se lever une heure plus tôt le lendemain!

Je peux me tromper mais quand je me surprends à ranger frénétiquement , je “m’autorégule” en observant en quoi cela contribue à LA tâche qui m’attend. Et parfois, le rangement sert à trier mes idées, canaliser le stress, dompter la peur. Tout l‘art de la procrastination consciente consiste alors à savoir en sortir au bon moment.

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De l’opportunité d’organiser le grand fourre-tout de l’âge

La société nous range par tranches démographiques : enfants, adolescents, adultes actifs, retraités… Elles lui permettent de nous compter, de s’organiser, de définir les prérogatives, obligations et prestations pour chaque catégorie, etc. Reconnaître l’existence de ces catégories génère, par la même occasion, de la valeur économique. Comment ? En développant des métiers et des produits adaptés à chaque catégorie. Tout le monde y trouve ainsi son compte. La preuve par l’exemple de l’adolescence.

Qui, de nos jours, pourrait concevoir une société occidentale sans adolescence? Il s’agit d’un concept, somme toute, récent, lié à l’allongement de l’espérance de vie. Autrefois, la puberté propulsait directement l’enfant vers l’âge adulte, sans escale.
En officialisant l’existence de l’adolescence, la société a reconnu les spécificités de cette population «entre deux âges », ses caractéristiques, ses droits, ses obligations, etc. L’économie en a bénéficié par l’émergence de métiers spécialisés (dans la crise d’adolescence, l’éducation, l’orientation professionnelle, etc), sans parler de secteurs aussi lucratifs que la musique, le cinéma, le sport, la mode, les soins pour adolescents…

N’est-il pas grand temps de faire de même en mettant de l’ordre dans le grand fourre-tout de la période “post-âge-officiel-de-la-retraite”? Dans les faits, une fois franchi ce seuil symbolique séparant les actifs des rentiers, les sexagénaires côtoient les centenaires, soit un écart de deux générations! Or, qui songerait à s’adresser avec le même vocabulaire et les mêmes services à un public d’enfants, d’adolescents et d’adultes? Pourquoi le faire avec les 60-100 ans ?

Au vu de l’allongement de l’espérance de vie, nous continuons à devenir officiellement vieux sensiblement au même âge que lorsque les retraites modernes ont été conçues avec pour conséquence que nous allons finir par être à la retraite en milieu de vie. Comme pour l’adolescence en son temps, reconnaître l’émergence de catégories démographiques spécifiques au sein de la population plus âgée est une question de réalisme. Face à cette reconnaissance officielle, l’économie saura créer des opportunités dans lesquelles le public cible pourra se reconnaître.

Je peux me tromper mais pour finir d’officialiser toute catégorie émergente, rien de tel que de trouver une étiquette attrayante. Tout comme pour l’enfance, l’adolescence et le stade adulte, l’étiquette en question ne doit pas automatiquement faire référence à l’âge, d’ailleurs!

Le concours d’idées est lancé : à vous de jouer.

 

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Y a-t-il une obsolescence programmée des collaborateurs?

Diversité : le mot est dans l’air du temps. Il émaille les discours tandis que certains employeurs en font un argument de recrutement.

Que ce soit dans les entreprises, dans les moyens de transports empruntés à l’heure de pointe, la vie active reflète la réalité de la diversité de notre société : genres, croyances, cultures, préférences, voire tatouages (des avant-bras ou des sourcils).

Une catégorie de cette diversité est en voie de raréfaction dans le monde du travail. Je vous donne trois indices :

  • elle représente un pourcentage considérable de la population active
  • sa part augmente de jour en jour
  • elle nous concerne tous, tôt ou tard!

La bonne réponse est … les plus de 45 ans, également appelés « seniors ». Dans cet océan de diversité, où sont-ils? Combien y en a-t-il autour de vous?

Allons faire un tour en ville. Entrons au hasard dans un grand magasin. Au premier coup d’œil, les vendeurs de plus de 45 ans ne sont pas légion et encore moins au rez-de-chaussée. Où donc passent les vendeuses en cosmétique une fois qu’elles ont des rides? Juste au moment où elles seraient encore plus crédibles en matière de produits anti-âge, où l’on pourrait enfin apprécier (en vrai) les bienfaits de leurs produits, voilà qu’on ne les voit plus, nous obligeant à nous contenter d’acheter des promesses…

Certes, l’apparence compte dans ce secteur où une ride ternit le rêve. Entrons donc chez les marchands de téléphonie. La première impression suggère que la diversité d’âge s’arrête au seuil des 35 ans. Au-delà, les conseillers de vente sont-ils promus dans les bureaux, tous à la direction, dans les « call centers »… loin du public?

Je peux me tromper mais, comme pour les appareils électriques, y a-t-il une obsolescence programmée des collaborateurs ? Quid de la diversité générationnelle pour représenter la société telle qu’elle est, et non telle que le marketing voudrait qu’elle soit ?

Placer un vendeur dans la devanture, ou l’en éloigner, n’est-ce pas (qu’il soit junior ou senior) le confondre avec la décoration ? N’est-ce pas son savoir-faire, sa connaissance des produits, sa qualité de conseil qui comptent, aux yeux du client, et non son âge? A moins, bien sûr, qu’il y ait un lien établi démontrant que la diversité d’âge nuit gravement au chiffre d’affaires.

En cherchant bien, j’ai trouvé de la diversité générationnelle dans l’administration publique, chez Swiss et dans les CFF, aux caisses de supermarchés, dans les professions libérales, chez les indépendants et les entrepreneurs… Et bien sûr, à la tête des gouvernements.

Crédit photo: Pixabay/Creative Commons/Geralt

Le prénom est-il une marque?

Les célébrités semblent refuser d’appeler leurs enfants Pierre, Paul ou Jacques. Comme si, malgré leur notoriété, elles craignaient que leurs enfants ne passent inaperçus ou se noient dans la masse. Comme inspirées par un GPS, elles choisissent des prénoms tels que: Paris (Jackson), North (West), Brooklyn (Beckham), Dakota (Johnson)… Quand elles ne créent pas des prénoms comme sortis d’un Scrabble, elles baptisent leurs enfants au moyen de mots (Ivy Blue, Mercy, Saint).

Anne Laure Sellier, professeur à HEC Paris et chercheuse en psychologie sociale, explique dans « Le pouvoir des prénoms » qu’en tant que première étiquette sociale, notre prénom façonne la manière dont nous sommes perçus par les autres. Comme une marque, Jean-Eudes, Marcello, Huguette ou Loana ont le pouvoir d’évoquer des univers, générations, élocutions, stéréotypes. Ainsi aidés ou entravés par un prénom que nous…portons, à nous ensuite d’exercer notre libre arbitre.

Si autrefois les prénoms se transmettaient, ils sont aujourd’hui la prérogative des parents qui souvent gardent le secret avant de le dévoiler. Cette annonce déclarative s’apparenterait presque au lancement d’un produit, l’étude de marché en moins. Annoncer un prénom tarabiscoté pour découvrir qu’il a une signification contrariante dans une autre langue, est un risque contre lequel les futurs parents peuvent cependant se prémunir. L’agence de “branding” MyNameForLife propose, en effet, des prestations de « naming » incluant la compatibilité culturelle, bien avisée dans un monde mondialisé. La création de logo ne devrait pas être un souci.

Je peux me tromper, mais le grand public étant parfois inspiré par les célébrités, à quand une génération de bébés prénommé(e)s «Onex» Schmidt ou «Mercy-CEVA» Genoud ?

 

Photo: Pixabay/CCO/Wokandapix

Se recycler? A mort!

Le secteur des soins aux personnes âgées peine à recruter. Des milliers de postes seraient à pourvoir et le temps presse, face au rapide vieillissement de la population. Face à cette information, Laure s’interroge.

Spécialiste en communication, elle cherche du travail et son bilan de compétences a débouché sur une indication de « recyclage ». Puisqu’à 50 ans, on la considère trop âgée (par rapport à quoi ?) pour travailler dans sa profession, ce même âge pourrait-il être un atout dans les services aux personnes âgées ? Or, le temps de se recycler dans ce domaine, ne sera-t-elle pas prête à bénéficier elle-même desdits soins ?!

Qu’à cela ne tienne : à force de réfléchir et de chercher sur internet, elle découvre Funexpo 2018 . Non, il ne s’agit pas du salon du « fun » mais bien du salon international des arts, techniques et équipements funéraires qui se tiendra juste après la Toussaint (ça ne s’invente pas !) à Lyon.

Quoi de mieux pour se former une idée du métier que de rencontrer des professionnels ? Annoncé comme le rendez-vous incontournable de la profession, il réunit tous les deux ans 200 exposants dans trois secteurs : espace cimetière, hygiène et soins, et enfin… aménagement et architecture !? Le monde de la fin de vie ne concernerait donc pas que les soins ? Et pourquoi la communication n’en ferait-elle pas partie se demande Laure ?

Je peux me tromper mais puisque nous sommes tous amenés, tôt ou tard, à être clients de ce domaine, voilà un secteur… plein d’avenir !

Photo: Pixabay, Creative Commons

« Mémé va au travail » : le hub créatif où les seniors marquent la tendance

Elles créent des objets de mode et de décoration, font des défilés, prennent la pose et postent des photos sur Instagram. Agées de 60 ans… et pour certaines de plus de 90 ans, elles rayonnent et s’activent dans la bonne humeur. Voilà ce que je découvre en franchissant le seuil de l’atelier de création et espace coworking « Mémé va au travail »* créé à Lisbonne en 2014, sur fond de crise économique.

Les fondateurs, une designer et un psychologue, avaient observé l’isolement croissant des “seniors”, accentué par la réduction de leurs retraites. Autre constat, la tradition portugaise de travaux d’aiguille et de créations manuelles reculait silencieusement face à la culture des créations « low cost », des enseignes mondialisées… sans oublier l’absence de transmission des traditions entre générations.

« Mémé va au travail » est également un incubateur de talents et une boutique, animés par un essaim de dames aux doigts de fées. Grâce au savoir-faire des unes et à la médiation des fondateurs, le crochet traditionnel se réinvente en couleurs audacieuses, pour apporter la touche « mode » à de magnifiques plaids et coussins. Quant à la sage broderie, elle ose les couleurs fluo pour personnaliser des sacs et coussins créés à partir de photos anciennes imprimées sur tissu.

La transmission de ce savoir se fait sous la forme d’ateliers pour élèves créatifs de 9 à 99 ans, épris comme moi d’artisanat en péril. Au sein de cette ruche, s’activent des «seniors» pleinement insérées, épanouies, qui grâce aux échanges quotidiens avec d’autres générations, par aiguilles interposées,  sont devenues des utilisatrices averties des réseaux sociaux.

Vers 16h30, certaines jettent un œil inquiet sur leur montre : il est temps d’aller s’occuper d’un mari atteint d’Alzheimer, des devoirs des petits-enfants, etc.

Dans un avenir proche, les fondateurs espèrent convaincre quelques messieurs de décliner ce format au masculin, à travers des traditions liées au bois, au cuir, etc.

Cette initiative dément bien des stéréotypes associés à l’âge. Elle illustre ce que nous avons à gagner à veiller activement à la diversité générationnelle dans tous les secteurs de la vie et de l’économie. Elle démontre que si l’âge est une donnée, il ne définit pas une personne ni ses capacités.

* “A avó veio trabalhar”

Photo Pixabay KRiemer