Article rédigé en co-écriture avec Romain Chevalot, Directeur des Ressources Humaines, membre du Comité de Direction Exécutif d’une Société technologique et industrielle.
Le paradoxe des DRH
La plupart des Directions RH considèrent avoir comme mission principale la préservation absolue – voire dogmatique – de l’intégrité physique et morale de leurs collaborateurs et font de la diversité en entreprise le Graal à atteindre, en le justifiant à travers le prisme de la responsabilité sociale de l’entreprise. De fait, ils finissent par se convaincre qu’endosser le rôle de médiateur social est la meilleure façon de créer de la valeur et de trouver sa place au sein de l’entreprise.
Il en résulte que le DRH et son équipe passent leur quotidien à gérer leur frustration de devoir justifier et défendre chaque action, chaque fait, chaque investissement, face à un Comex qu’il ne comprend pas et qui ne le comprend pas. Finalement, six DRH sur dix s’avouent au bord de la dépression et huit DRH sur dix ne s’affichent dans aucun organigramme de Comité Exécutif.
Paradoxalement, plusieurs études sérieuses ont prouvé que les sociétés affichant la présence d’une Direction RH dans les Comités Exécutif étaient plus performantes que la moyenne des autres sociétés.
Pourquoi une telle injustice ?
Comment expliquer que les CEO hésitent autant à nommer leur DRH au sein de ces Comex ? Eh bien probablement parce que le monde qui nous entoure est économique. La crise Covid est devenue majoritairement une crise économique. La course contre la montre engagée dans la campagne de vaccination est majoritairement économique. La moralité du monde politique et économique qui nous entoure s’arrête bien souvent là où le profit et le pouvoir débutent : “Ou un gouvernement est fort ou il est moral” (Machiavel).
C’est probablement ici que le rôle du DRH débute et non se termine. S’il veut influencer le monde économique dans lequel il évolue, le DRH doit le comprendre et identifier les leviers RH à sa disposition afin de se positionner enfin comme un acteur majeur de la stratégie financière, commerciale, voire technologique de sa société.
Prenons le cas d’une brigade au sein d’un restaurant : chacun à un rôle clair et précis et chacun doit exceller dans ce rôle. Tous sont interfacés, connectés. L’efficacité des uns dépend de l’efficacité des autres. Parfaitement à leurs places, ils sont capables de gérer le fameux « coup de feu » du midi ou du soir, en faisant preuve de flexibilité lorsque cela est nécessaire, afin de toujours mieux satisfaire leur client et répondre à ses moindres besoins. Dès lors que cela est visible dans la restauration, pourquoi cela ne le serait-il pas dans le monde plus traditionnel de l’industrie ou du service ? Le principe est pourtant le même : la parfaite maîtrise du développement d’un nouveau produit ou d’un nouveau service passe par la capacité de chacun à exceller dans son métier à travers un système organisationnel parfaitement huilé. Le DRH doit être en mesure de comprendre précisément les métiers de son entreprise, être capable de dessiner une organisation efficiente qui va générer une profitabilité substantielle pour son organisation.
Des pistes pour agir
Cela nécessite de la part du DRH de sortir de ses lectures traditionnelles pour aller vers des lectures plus scientifiques, plus stratégiques, plus économiques. Le DRH doit comprendre les marchés sur lesquels son entreprise évolue (position sur le marché, position des concurrents, positionnement technologique, compréhension des enjeux politiques, économiques, organisationnels…) afin de pouvoir identifier les moyens de l’influencer réellement et concrètement !
Quid des combats idéologiques ? De nombreux acteurs du monde RH souhaitent se lancer dans la défense de causes idéologiques. Nos recommandations sont toujours de s’assurer que les dimensions historiques, sociales et stratégiques sont parfaitement maîtrisées. Dès lors que la fonction RH et son DRH bénéficient du rayonnement adéquat, le combat idéologique devient vertueux et source de plaisir pour celui qui le pilote.