Les Docks, salle de concert lausannoise bénéficiant d’une importante subvention publique communale (mais dont la gestion est indépendante du pouvoir politique), a programmé pour le 27 octobre prochain un concert du rappeur français Médine. Un obscur groupement d’extrême droite a lancé une pétition demandant l’interdiction de ce concert par la Municipalité, qui est également relayée par l’association Vigilance islam. Le motif invoqué est double: la proximité alléguée du chanteur avec des milieux prônant un islam fondamentaliste, et les propos haineux contre les blancs ou les « laïcards » que contiennent certaines de ces chansons (lire, notamment, ce résumé du journal Marianne).
Cette interdiction n’a pas de sens.
Médine ne mérite aucune sympathie particulière, bien au contraire, de la part de quiconque est attachée aux valeurs de l’égalité démocratique, du progrès social, de l’universalisme humaniste. Défenseur d’une vision rigoriste de l’islam, travaillant avec des associations affiliées aux Frères musulmans, flirtant parfois avec l’homophobie, il se situe dans une ambiguïté permanente en tenant des paroles très dures, tout en affirmant qu’elles ne visent qu’à susciter le débat et lutter contre toute forme de radicalisation. A ceux, ensuite, qui l’interpellent et le critiquent dans le cadre, justement, du débat public, il est par contre prompt à assigner l’étiquette de fascistes ou de racistes… Médine est-il un simple provocateur du rap français, ou poursuit-il en réalité aussi un agenda politique? Il est inutile et impossible de trancher ici.
Il faut évidemment combattre sur le terrain politique les thèses racialistes et identitaires de Médine dans ses chansons, qui font de l’appartenance religieuse, de la couleur de peau ou de l’origine des marqueurs fondamentaux des êtres humains justifiant le regroupement en communautés naturelles ayant chacune son mode de vie, ses règles, son fonctionnement. Ses attaques, dans le contexte français, ne se dirigent pas uniquement contre le dévoiement supposé de la République ou de la laïcité, mais bien contre ces idées elles-mêmes. La démocratie, l’égalité et la solidarité ne peuvent au contraire se nourrir que de l’idée que nous pouvons tous, adhérer des mêmes lois, à des mêmes institutions pour mettre en œuvre un même projet commun, au-delà de nos différences (ce qui n’implique évidemment pas d’y renoncer). De ce point de vue-ci, il est incompréhensible et même dramatique que Médine soit invité dans un événement tel que la Fête de l’Huma, rassemblement traditionnel festif des communistes français. Mais les errances de la gauche radicale sont une autre question.
La différence entre le fonctionnement d’un Etat démocratique et l’obscurantisme d’inspiration religieuse, en l’occurrence islamique, qui semble intéresser le rappeur Médine, réside par contre justement dans le fait que ce dernier puisse se produire à Lausanne en n’ayant à craindre ni une interdiction motivée politiquement, ni des menaces à son intégrité personnelle – et en tous cas pas de la part de supposés « laïcards ». Il n’y a pas de raison non plus de craindre un déversement criminel de haine à l’issue du concert – sachant par ailleurs, hélas, que les discours islamistes les plus dangereux ne se distillent pas sur les scènes publiques, mais bien dans l’intimité numérique de sites web et réseaux de messagerie de propagande. Les seules représailles auxquelles s’expose Médine, selon la teneur de ses propos sur scène, sont judiciaires: la liberté d’expression n’est pas absolue (contrairement à ce qui est le cas justement dans ces pays, notamment anglo-saxons, structurés sur le mode communautaire et, en partie, racialiste), et l’article 261 bis du Code pénal suisse réprime, sous certaines conditions, les appels à la haine.
La liberté d’expression n’est pas une affaire de convenance personnelle. Quiconque signe une pétition demandant d’interdire le concert, dans un lieu dédié (et pas sur l’espace public), d’un artiste en raison de propos qui peuvent, certes, légitimement choquer, mais qui n’ont par ailleurs fait l’objet d’aucune condamnation ni ici ni en France, ne pourra ensuite pas s’offusquer qu’une conférence de personnalité laïques ou anti-religieuses, de celles qu’honnit Médine, ne fasse ensuite à son tour l’objet d’une pétition demandant son annulation. Il faut être en désaccord profond et total avec Médine. La banalisation du discours radical à laquelle il contribue est un fléau. Mais lui défendre de se produire en concert n’a aucun sens – et, évidemment, ne provoquerait rien d’autre, concrètement, qu’un effet de victimisation très contre-productif.
Quant à la teneur des propos, l’emphase et l’excès sont tout de même des modes d’expression fréquents dans l’art en général et notamment dans la musique. Il y a quelques années, le Conseil communal de Lausanne avait débattu de la programmation d’un festival de musique sataniste aux Docks, sous le doux intitulé de « European bloodshed rituals » (rituels européens de carnage), avec des morceaux dont les paroles sont des plus fleuries. Plus récemment, d’aucuns ont vu dans la présence même de M. Bertrand Cantat sur la scène des Docks une justification de la violence faite aux femmes, voire un appel à cette violence. Quelques années plus tôt, cela avait déjà été le cas avec le rappeur français Orelsan, dont l’un des premiers tubes s’intitulait « Sale pute ». S’agissant de hip-hop de très nombreux artistes appelant dans leurs chansons, de manière très explicite, à tuer ou à violer des policiers, notamment, se sont déjà produits à Lausanne, sans qu’il soit utile de les énumérer. On retrouve là une antienne du rap, dont on peut faire remonter l’une des premières occurrences au titre « Cop Killer » de Ice-T (avec le groupe Body Count) en 1992, mais qui a connu son heure de gloire avec des groupes français comme La Rumeur ou NTM. Ice-T et son groupe se sont, du reste, produits pas plus tard qu’en juin 2018 à Lausanne. Fort heureusement, personne n’a pensé à demander l’interdiction de ceux qui se rêvent encore, lors de leurs lives, en « tueurs de flics ». Face à tout ceci, une seule attitude doit prévaloir: la licence artistique autorise beaucoup de provocations, et c’est cette liberté particulière qui distingue justement nos sociétés occidentales ouvertes des Etats autoritaires, notamment islamistes!
Le concert de Médine s’est, finalement, bien déroulé, et tant mieux. Un compte rendu a été publié dans Le Temps.
Tu racontes que dla merde mon grand.
C’est censé être une punchline? Il manque un truc, je sais pas quoi.
Vous cherchez à réaliser la solidarité aujourd’hui, à chercher ce qui nous réunis dans ce monde individualiste, vous défendez le collectif? Je vous propose Médine.
Voyez si le public samedi viens à un rassemblement obscurantiste islamiste. Voyez par vous même s’il n’y a que des noirs et arabes ou des musulmans barbus. Voyez s’il y a plus de violence et moins de morale qu’au Flon à la même heure, c’est ça le progrès social? Pourquoi faire surveiller le concert? Médine est venu à Lausanne l’année passée sans qu’il n’y ait eu aucun problème! Pourquoi une surveillance pénale? Personne est venu contrôler si Cantat frappait ses fans femmes, et pourtant il a été condamné lui, c’est ça l’égalité démocratique? Vous donnez raison à l’extrême droite suisse qui ne cesse de nous diviser, c’est ça l’universalisme humaniste? Ne vous laissez pas avoir par trois articles sur internet, vous valez mieux que ça. Un esprit critique est vital dans cette époque, faites vos recherches, tout ce que Médine a produit est sur internet librement! Je ne vote pas pour avoir des élus qui ne sont pas capable de chercher la définition de Laïcard sur internet ou d’écouter le deuxième couplet d’une chansons polémique!
Merci de ne pas être toutefois tombé dans le panneau jusqu’au bout et de n’avoir pas annulé ce concert, qui permettra, assurément, de rassembler des gens de tous horizons géographiques, sociaux et culturels. En vous demandant de faire tout votre possible pour que ce public soit protégé d’une quelconque attaque d’un groupe racialiste et identitaire d’extrême droite (ou un fan de musique satanique).
En espérant que ce commentaire permettra de faire germer chez vous un regard un peu plus critique et objectif sur ce sujet.
Salutations
Bonjour, et merci pour votre intérêt. La réponse au commentaire suivant (rédigée avant) vous renseignera, je pense, sur mon interprétation des textes de Médine. Faire de Médine un dangereux porte-parole du terrorisme ou je ne sais quoi est stupide. Par contre, de grâce, n’essayez pas de le repeindre en gentil chanteur sans opinions tranchées, c’est ridicule. Médine pratique une forme de rap politique (on ne dit plus trop conscient, il me semble, mais c’est l’idée), il y a des messages politiques dans ses chansons comme dans ses prises de parole publiques. On a donc le droit d’avoir un avis politique sur son positionnement, sur sa vision d’inspiration communautariste, de le faire savoir, et on a même le droit de trouver que certains de ses propos sont susceptibles d’enfreindre la loi suisse et méritent donc une attention particulière! M. Cantat, vous le savez bien, n’a pas été condamné pour ses propos. Quant à donner raison à l’extrême droite suisse… je ne vois pas exactement à quel moment j’ai fait ça, et ce n’est pas mon intention. J’avais, à l’époque, défendu l’idée que Dieudonné pouvait se produire en Suisse, et je n’ai jamais compris qu’on interdise ou déprogramme Orelsan (en France, pas ici).
A mon tour de formuler un petit conseil pour vous, comme pour Gregory, auteur du commentaire précédent: arrêtez de croire que tout le monde sauf vous ne lit que “trois articles” sur Internet ou n’entend parler du rap que “dans la presse”. Franchement, pour le coup, c’est vraiment caricatural et ça ne sert pas votre propos.
Deux tous derniers détails:
1. la décision d’interdire ou pas n’était pas de mon ressort
2. quand a eu lieu le concert de Médine en 2017 auquel vous vous référez?
Monsieur Gaillard,
J’ai deux hypothèses concernant votre billet: soit vous êtes honnête et pensez sincèrement que les textes de Médine sont rigoristes, homophobes et racistes et vous démontrez donc que votre connaissance des dits textes se limite à ce que vous en avez lu dans la presse. Auquel cas je vous conseille de prendre ne serait-ce que 15 minutes pour en lire quelques-uns qui vous démontrerons le contraire.
Soit vous les avez lu, les connaissez, savez pertinemment que loin d’appeler à la haine de qui que ce soit, les textes prônent un message de paix et de dialogue entre les communautés et vous faites donc preuve de malhonnêteté intellectuelle. Auquel cas je vous suggère d’arrêter de prétendre défendre des valeurs socialistes que vous trahissez par vos propos diffamatoires et ciblés sur une communauté déjà largement victime d’amalgames.
En vous souhaitant un bon week-end.
Bonjour, et merci pour votre commentaire.
Pas de chance pour vous, c’est un peu des deux.
Tous les reproches que j’adresse à Médine – sur le plan des idées, de la politique, car il se place lui-même sur ce plan – ne se fondent pas strictement sur des paroles de ses chansons. Mais lorsqu’on est un personnage public et qu’on dit qu’un “musulman light” (ce qui veut dire, je suppose, très modéré) est “un peu tarlouze”, alors oui on est au moins “un peu” homophobe. Ce n’est pas rare dans le rap, mais c’est vrai quand même – et Médine, contrairement à beaucoup d’autres, se pique, justement, de donner des leçons de tolérance, d’ouverture, d’exemplarité. Quant on s’affiche en compagnie des Indigènes de la République, qui sont des défenseurs d’une approche racialiste (je voue renvoie aux propos de sa présidente), on s’expose à être jugé raciste par certains. Lorsqu’on joue les porte-parole pour l’association Havre de savoir (il avait essayé de nier en être proche, mais pas de bol, une vidéo le montre s’affirmant ambassadeur de l’organisation) proche des Frères musulmans, lorsqu’on met des références islamiques dans énormément de chansons (et pas seulement les titres toujours cités), on ne peut pas s’étonner d’être taxé de rigoriste, me semble-t-il (il y a bien d’autres rappeurs dont la foi est connue, mais qui ne la mettent pas en avant au point de l’afficher sur la couverture des albums). N’est-ce pas Médine qui chante “je pense tout ce que je rappe” (et si je me souviens bien il ajoute ou dit juste avant “je ne rappe pas tout ce que je pense”)? Cela me semble bien une invitation à prendre au sérieux ses textes, que je connais et que j’écoute – quoique je n’apprécie pas spécialement sa musique, en général.
Que Médine ait aussi des chansons intéressantes, favorables à la cause des femmes du moins dans un certain sens, qu’il ne soit pas le pire des incendiaires, j’en suis parfaitement d’accord. Mais ne sombrez pas, vous, dans la caricature, et n’en faites pas non plus exclusivement l’apôtre de la paix et d’une pratique religieuse modérée. Car ça ça ne serait pas malhonnête, mais simplement ridicule!
Merci de votre réponse, c’est appréciable que l’auteur d’un billet de blog soit ouvert à la discussion dans les commentaires.
Je vous rassure, je me sens pas obligé d’être en accord avec l’entier des propos et accointances des artistes que j’écoute, Médine, Brassens, Brel et Ferré compris. Cependant, le fait que Médine place des références islamiques dans ses textes ne démontre en rien une approche rigoriste de sa religion, c’est tout simplement l’expression de sa foi. Dans les milieux rigoristes, faire de la musique populaire venue des U.S.A n’est pas franchement une coutume notoire…
Par ailleurs, lui prêter un agenda politique, c’est lui donner une importance qu’il n’a pas. D’ailleurs, bien loin de se poser en donneur de leçons, il se moque de sa propre prétention à faire de la politique dans plusieurs textes. Soyez en sûr, Je ne prétends pas être le seul à avoir lu plus que trois articles, je crois seulement qu’il faut lire les textes et les mettre en perspective avec les codes du genre musical auquel ils appartiennent avant d’en tirer des conclusions, en l’occurence : « entre hardcore et conscient, j’ai fait le choix de ne pas choisir ». Oui, conscient ça se dit encore même si c’est pas le genre dominant…
Pour ce qui est des propos de la présidente des indigènes de la république et l’homophobie, malheureusement bien présente dans les milieux du rap, ce sont deux questions qui mériteraient un développement bien plus long qu’un simple commentaire, déjà bien assez long, ici.
Ce qui m’étonne, et m’a poussé à formuler une réponse ici, c’est que lors de la venue d’autres artistes, qui tiennent des propos misogynes ou homophobes dans leurs texte, des propos contraire à la loi Suisse me semble-t-il, je n’ai pas lu de votre part un quelconque appel à combattre leurs thèses sur le terrain politique… Je me trompe peut-être, mais ça a plutôt l’air d’être l’expression de sa foi qui pose un problème.
Pour un président d’un parti dit de gauche, le choix de ne parler que des thématiques religieuses, au milieu d’une polémique déclenchée par des associations d’extrême-droite ne me semble pas être le bon, car de nature à ajouter une pierre à l’édifice déjà bien bâti des stigmatisations quotidiennes que subissent nos concitoyens musulmans.
Les thématiques sociales abordées par Médine et bien d’autres dans leurs textes, ainsi que la dénonciation d’une laïcité dénaturée et instrumentalisée dans le but de discriminer un groupe de personnes sur la base de leurs croyances religieuses devraient, me semble-t-il intéresser d’avantage un homme de gauche que les tentatives de censure d’obscurs associations d’extrême-droite. En particulier la dénonciation, présente dans des textes du rappeur en question, des violences policières sur des personnes de couleur me semble être un thèmes dont il est important qu’un homme de gauche se saisisse, tant il fait écho à la triste actualité Lausannoise.
En vous souhaitant un bon week-end et en espérant que l’argent du contribuable Lausannois ne sera pas gâché dans un inutile dispositif de sécurité et de contrôle des propos du rappeur qui seront je l’espère, et comme ils l’ont toujours été, en totale conformité avec la loi Suisse.
PS : je vous laisse le soin de répondre si vous jugez bon de le faire. Pour ma part, je n’ai rien à ajouter.
Cher Monsieur,
Je ne vais pas répondre à tout, car vous ouvrez de très larges fronts… Juste quelques éléments:
1. Je n’ai pas dit que le problème était d’être d’accord ou pas. Si vous reprenez le billet, il est une défense du droit de Médine de se produire, il ne faudrait quand même pas trop déformer les propos.
2. Oui, Médine va davantage sur le terrain politique que d’autres rappeurs. Si on se prête à ce jeu-là, eh bien on s’expose à quelque chose que personnellement je trouve formidable: le débat public. Il trouve que ses textes sont mal compris, il trouve que ses engagements (hors musique) sont mal interprétés? Il fait comme tout le monde, il s’explique. Je vous fais remarquer que sur le fameux “Don’t Laïk”, il l’a fait, il a justement admis que, en tant que chanson à message politique, elle n’avait pas atteint son but comme il le souhaitait.
3. Quand on en appelle à Dieu, quand on se rapproche d’organisation musulmanes plutôt fondamentalistes, quand on appelle un album “Jihad” avec une épée en couverture (oui oui je sais, c’est le jihad intérieur, le seul vrai jihad, c’est la paix, j’ai écouté le disque… n’empêche, il sait très bien avec quels codes il joue et ce qu’il thématise), on s’affiche avec une identité très fortement religieuse, et une compréhension de l’islam qui n’est pas des plus progressistes. Je ne suis pas stupide, je ne dis pas que Médine est l’équivalent d’un prédicateur salafiste appelant à la violence ou d’un terroriste, loin de là. Mais oui, il défend une vision identitaire de la religion, et une forme de communautarisme dans les rapports sociaux, et on a le droit de dire qu’on n’est pas d’accord. Et il faut être, je crois, un peu naïf, et ne pas connaître les tactiques de beaucoup de fondamentalistes (musulmans ou néo-évangélistes, par exemple) qui ne voient aucun problèmes à utiliser tactiquement des moyens qu’ils réprouvent sur le fond (regardez les contenus produits par la plate-forme qatarie AJ+). Ce n’est pas Médine qui choisit la manière dont on prend ses propos, une fois c’est sérieux, une fois non…
4. Il y a peut-être d’autres artistes à Lausanne qui méritent une attention. Je ne prétends pas avoir la science infuse. Par contre, par exemple, aujourd’hui l’homophobie n’est pas illégale en Suisse, par exemple – j’ai un excellent camarade, Mathias Reynard, qui se bat d’ailleurs pour changer ça! Donc on ne peut pas demander la même chose pour l’homophobie que pour l’appel à la haine raciale, par exemple. Mais quand c’était Dieudonné, personnellement, j’ai défendu la même chose: le laisser s’exprimer.
5. Il y a des personnes musulmanes qui sont discriminées en raison de leur foi, c’est l’évidence. Mais Médine n’en fait pas partie, il me semble qu’il n’est pas plus à plaindre que ça.
6. Enfin, je m’étonne que vous passiez comme chat sur braise sur le PIR qui est tout de même un phénomène très inquiétant, mais qu’en revanche vous nous parliez volontiers de la supposée “laïcité dénaturée” orientée sur la discrimination… Mais nous en reparlerons sans doute. Si cela vous intéresse: https://www.letemps.ch/opinions/contre-divisions-identitaires-retrouver-sens-commun
Bonsoir Monsieur Gaillard.
Pourriez-vous me citer svp où Médine “tient parfois des propos homophobes”?
Je connais toute sa discographie depuis son premier album 11 septembre sorti en 2004, j’ai écouté maintes et maintes tous ces albums et je n’arrive pas à identifier dans quel chanson il aurait eu des propos homophobes.
Merci d’avance de votre réponse.
Cher Monsieur,
Merci pour votre commentaire. Quoique moins fin connaisseur de sa discographie que vous, de toute évidence, je ne crois en effet pas qu’il fasse partie des rappeurs ouvertement homophobes dans leurs chansons. En passant, comme signalé dans une autre réponse, ce ne serait pas motif à quoi que ce soit sur le plan judiciaire, car la tenue de propos homophobes n’est pas punissable en Suisse.
En revanche, il y a, malheureusement pour lui, cette vidéo où il décrit le musulman supposément souhaité par les Européens comme “un musulman light” “qui fasse un peu tarlouze”. Entendons-nous bien: je suis conscient, en tant qu’amateur de rap, de la présence de relents plus ou moins prononcés d’homophobie chez de nombreux artistes. Je suis aussi conscient du fait que, en l’espèce, Médine a peut-être fait une erreur de langage… Mais le problème est que le contexte ne plaide pas pour lui, qui a démontré sa proximité de milieux qui sont, eux, ouvertement homophobes comme le Parti des indigènes de la République ou la fameuse association Havre de Savoir qui nous explique bien volontiers que “Le Prophète a maudit” quiconque se livre à des actes homosexuels. Est-il possible que tout ceci soit une adhésion “soft” à un discours latent d’homophobie? Pas exclu, mais je ne sais pas si c’est mieux ou moins bien.
Comme je l’ai expliqué en réponse à d’autres commentaires, les interventions de Médine sur le terrain politique font qu’il me semble tout à fait normal de tenir compte à la fois de ce qu’il dit dans ses chansons et de ce qu’il dit en-dehors.
En conclusion je vous donne raison sur un point: ma formulation est un peu excessive, et on peut laisser à Médine une forme de bénéfice du doute. Il flirte avec l’homophobie, dirons-nous.
Bonjour Monsieur,
Merci pour votre réponse à ma question.
Je suis heureux de constater que malgré le fait que, comme vous l’avez dit, vous n’ayez pas la même connaissance discographique que moi de Médine, vous soyez d’accord avec moi sur le fait qu’il n’y a pas un seul propos homophobe dans aucune de ses chansons.
Sur l’utilisation du mot “tarlouze”, je vous concède volontiers que son utilisation est un peu maladroite. Connaissant Médine, je pencherais beaucoup plus pour une erreur de langage comme vous le dites que pour une homophobie latente. Il suffit de suivre quotidiennement la story Instagram de Médine pour cerner son langage cru, même avec ses propres enfants. On est bien loin de l’image de salafiste arriéré que certains ont voulu lui donner.
Concernant ses proximités avec certains mouvements, je ne pourrai pas me prononcer sur les Indigènes de la République car je ne connais quasiment rien de ce parti.
Concernant le Havre de Savoir, ce n’est pas parce qu’on fréquente une association que l’on adhère forcément à la totalité du discours qui est formulé. Ce principe s’applique d’ailleurs également aux Indigènes de la République. Havre de Savoir est une association musulmane, comme dans la plupart des religions (christianisme, judaïsme, bouddhisme etc.), l’homosexualité y est bannie. De ce fait, il ne faut pas attendre d’une association musulmane comme Havre de Savoir la promotion de l’homosexualité. Médine est intervenu, si ma mémoire est bonne, 2 fois sur la chaîne YouTube de Havre de Savoir, la première fois concernant le thème de la musique en islam, et la deuxième fois sur un thème historique: la bataille de Poitiers, soit 2 thèmes que Médine affectionne particulièrement, la musique car il en a fait son métier et l’histoire car il traite souvent de faits historiques dans ses albums, d’où son album Story Teller. D’ailleurs il y a plus de vidéos sur YouTube venant de salafistes dénonçant la vidéo de Médine avec Havre de Savoir sur le caractère licite de la musique en islam que de vidéos de Médine avec Havre de Savoir, tout sujet confondu. Si l’on veut savoir que pense Médine de l’homosexualité ou savoir s’il est homophobe, je ne pense pas que regarder ce que disent les milieux qu’ils fréquentent sur ce sujet soit la bonne méthode pour en déduire son opinion sur le sujet. Il vaut mieux regarder ce que Médine dit sur le sujet en lui-même. D’ailleurs je me souviens d’une interview de lui il y a cinq ans sur YouTube où il était interrogé sur le fait de savoir s’il était pour ou contre le mariage pour tous en Algérie. Médine avait répondu que d’un point de vue spirituel, il n’était pas pour le mariage pour tous vu que sa spiritualité condamnait cette forme de sexualité mais il ajoute, et c’est là où ça devient intéressant et que ça permet de cerner la complexité du personnage, que selon lui l’état n’a pas à s’immiscer dans le mariage des gens et que par conséquent l’état n’avait pas à se mêler du fait de savoir si un homme se marie avec un homme ou avec une femme. Malgré sa religiosité, Médine est quand même beaucoup plus laïc que ceux qui ont voulu interdire ses concerts en Suisse ou en France peuvent l’être. Médine a beaucoup évolué entre son premier album et son dernier album. Il dit d’ailleurs dans son morceau “besoin d’évolution” sorti en 2013, “on gâchera 30 ans de nos vies, si on voit le monde à 50 ans, comme on le voyait à 20 ans” (phrase qu’il a je crois piqué à Mohammed Ali). J’ai évoqué le thème de l’homophobie avec vous car j’étais un peu surpris de voir que Médine tenait selon vous parfois des propos homophobes. Je suis heureux de voir que vous êtes plus ou moins revenu sur ces propos. Je n’ai pas abordé les autres sujets de votre article car ça prendrait trop de temps mais je pense que vous vous trompez totalement quand vous pensez que Médine ne mérite aucune sympathie. Bien au contraire. Médine nous fait découvrir des sujets historiques par ses chansons “enfant du destin” que beaucoup ne connaitraient jamais sans ses chansons. Médine dénonce le racisme (quel qu’il soit), l’islamophobie et l’antisémitisme dans beaucoup de ses chansons comme Blokkk identitaire, Joe le taxi et énormément d’autres. Médine est un grand féministe, exemple: Combat de femme et A l’ombre du mâle. Médine dénonce le terrorisme, exemple: Démineur, Porteur Saint, Don’t Panik etc. Médine encourage les jeunes à persévérer dans les études ou au travail et à rendre fier leur famille: L’école de la vie, Viser la victoire. Bref, je pense que Médine mérite au contraire beaucoup plus de sympathie que celle qu’il reçoit.
J’aurais plaisir à en discuter avec vous une fois si j’ai la chance de vous croiser. Je vous souhaite une agréable journée.