Le scandale qui ne veut pas disparaître

J’avais écrit il y a presqu’un an un billet concernant un scandale tournant autour de la construction sur un terrain acquis dans des conditions louches d’un jardin d’enfant aux idéaux tout aussi douteux, scandale touchant de près le Premier Ministre Shinzo Abe. Si M. Abe espérait s’en être tiré sans trop de dommages, il doit aujourd’hui déchanter. En effet, le scandale de « l’école Moritomo » est revenu en force chambouler la politique du pays.

 

Documents falsifiés

Brève récapitulation des faits : l’école Moritomo s’est trouvée au centre de la tourmente pour avoir obtenu du gouvernement un terrain à prix excessivement bas. Le Premier Ministre s’est trouvé impliqué par les sympathies nationalistes qu’il partage avec le fondateur de l’établissement et à travers sa femme, nommée directrice honoraire. Le retour de l’affaire sur le devant de la scène est dû à un reportage du journal Asahi Shimbun, confirmé par le Ministre des Finances, révélant que des documents présentés au Parlement l’année dernière avaient été falsifiés pour éliminer toute référence au couple Abe et à leurs liens avec l’organisation Moritomo. L’ouragan qui a suivi et qui a bloqué toute autre activité au Parlement ne fait pas mine de retomber de sitôt, et un bureaucrate haut placé a été appelé à témoigner.

La question du degré d’implication de l’office du Premier Ministre et du Cabinet est maintenant au centre des spéculations. Il se peut que certains bureaucrates aient agi de leur propre initiative pour protéger le Cabinet, mais les rivaux politiques de M. Abe, certains au sein de son propre parti, se demandent à voix haute à quel point il est vraisemblable que les aides du Premier Ministre n’aient rien fait pour étouffer l’affaire.

 

Quoi qu’il en soit, le scandale pèse déjà lourdement sur plusieurs personnes sacrifiées pour protéger M. Abe. Le fondateur de l’école Moritomo et sa femme sont maintenant en prison pour « fraude aux subventions »; le chef de l’administration fiscale, appelé à témoigner prochainement, a vu sa carrière détruite ; et, plus tragiquement, un employé du Ministère des Finances qui avait effectué certaines des falsifications s’est suicidé, laissant derrière lui une note exprimant son désespoir de se retrouver désigné comme bouc émissaire, alors qu’il ne faisait que suivre les ordres de ses supérieurs.

 

Le futur du Cabinet peu clair

On peut donc comprendre le mécontentement du public, conduisant à une chute de popularité importante dans les sondages et à plusieurs manifestations contre le gouvernement (un fait relativement rare au Japon). Une grande majorité des personnes interrogées réclame déjà la démission du Ministre des Finances. Celui-ci, Taro Aso (en photo ci-dessus avec M. Abe), est cependant un ancien premier ministre, le descendant d’une des plus grandes dynasties politiques du pays, chef de la seconde plus grande faction du Parti libéral-démocrate (PLD), le parti au pouvoir. Son soutien est donc vital pour M. Abe, et sa position au sein du parti solide. Il affirme pour le moment sa détermination à rester à son poste, mais la pression continue de monter.

 

Quant à M. Abe lui-même, il a jusqu’à maintenant fait preuve d’une impressionnante résilience, donnant tort, au fil des dernières années, aux analystes qui ont à plusieurs reprises prédit la fin de sa vie politique. Dans un système politique caractérisé par la brévité des mandats de la plupart des Premiers Ministres (32 se sont succédé depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale), il a en effet réussi à s’imposer en tant qu’homme incontournable, aidé par ses succès électoraux, sa bonne lecture des vents politiques, et sa forte conviction d’avoir été investi de la mission quasi-divine de revitaliser le Japon. Il semble aujourd’hui encore peu probable que M. Abe soit poussé à la démission (même si des nouvelles révélations l’impliquant directement pourraient changer la donne). L’impact du scandale sur son agenda est cependant très important. Le budget pour l’année 2018 est bloqué au Parlement, et la révision de la Constitution japonaise, l’ambition la plus importante du Premier Ministre, paraît à nouveau hors de portée malgré plusieurs mois d’intense activité.

M. Abe doit également obtenir sa réélection à la tête du PLD au plus tard en septembre de cette année, sans quoi il sera forcé de quitter son poste. Cette réélection paraissait acquise d’avance – le parti avait même changé ses statuts pour abolir la limitation à deux mandats qui faisait obstacle au Premier Ministre. Tant que le scandale Moritomo continue de dominer l’actualité, cependant, il est facile d’imaginer que le PLD se fatigue des controverses de plus en plus fréquentes suscitées par l’administration de M. Abe et cherche un remplaçant plus sobre et moins compromis. Toute rumeur en ce sens serait mortelle pour son autorité. Les talents de survivant du Premier Ministre vont être mis à rude épreuve.

Le permis de conduire et l’amour du Japon pour les procédures

Passer son permis de conduire n’est pas forcément l’expérience la plus plaisante qui soit. Le processus est long et onéreux et passer un examen est toujours stressant. Les jeunes Suisses, cependant, sont libres de pratiquer avec leurs parents ou amis autant qu’ils le désirent avant de passer ledit examen. Au Japon il n’en est rien, et la façon dont le pays gère l’apprentissage de la conduite révèle beaucoup sur la culture nippone.

 

Sécurité et politesse avant tout

Tout d’abord, pas question ici de lâcher tout de suite les jeunes conducteurs dans la circulation urbaine. Avant cela, ils devront passer de nombreuses heures avec un instructeur accrédité à s’entraîner dans un modèle de mini-quartier construit par les différentes écoles de conduite. Il est vrai que les rues japonaises sont très étroites, et le quartier urbain typique très compact. Apprendre à effectuer ne serait-ce que de simples virages peut donc se révéler plus difficile qu’en Europe. Ces règles strictes reflètent cependant également le grand souci de sécurité des Japonais. Pas question de laisser des parents non qualifiés superviser seuls des novices et risquer un accident – et pour garantir la sécurité des autres usagers de la route, et pour éviter les problèmes d’assurance.

 

Les questions de l’examen théorique japonais sont également un peu différentes de celles posées en Suisse. En effet, elles ne se limitent pas au code de la route, mais incluent également des règles de politesse ou de simple bon sens. Un exemple : « Puisque je suis en voiture, qui est plus grande qu’un vélo ou un piéton, je peux m’imposer et sortir d’un garage ou autre sans prendre garde aux autres usagers, qui n’ont qu’à s’écarter. Vrai ou faux ? » Ou encore : « Puisque tout véhicule est muni d’une assurance accident, je peux conduire de façon insouciante et brusque. Vrai ou faux ? »

Ces questions peuvent sembler bizarres, les réponses évidentes. Le but n’est cependant pas vraiment de tester les jeunes Japonais, mais plutôt de leur inculquer à force de rappels constants – les réponses à ces questions dans les logiciels et manuels d’apprentissage sont l’occasion d’une mini leçon de morale – à quel point il est important de bien se comporter sur la route et d’être prévenant envers autrui. Cela symbolise bien le fait que, si la société japonaise est la plus policée du monde, c’est aussi parce que les autorités sont déterminées à transformer les habitants de l’archipel en bons citoyens.

 

Une marche à suivre détaillée

Tout aussi révélateur est le processus d’obtention de permis lui-même. Comme dit plus haut, les règles sont strictes. Les jeunes Japonais doivent s’inscrire à un cours complet dans une école de conduite accréditée. Ils doivent ensuite suivre un programme très détaillé, comme on peut voir sur la fiche en photo ci-dessus, divisé en deux curriculums de leçons précises (par exemple une portant sur les virages, elle-même divisée en deux étapes, et une concernant les intersections, divisée en trois) entrecoupées de plusieurs tests pratiques et théoriques. Ce n’est qu’après avoir achevé le cours complet et passé un examen final que les « diplômés » pourront se présenter au bureau des autos pour obtenir leur permis.

L’obtention du permis à la japonaise a ses défauts et ses qualités. D’un côté, la procédure à suivre est claire et détaillée (la fiche en photo précise également toutes les règles de passage d’examen, ou quoi faire en cas d’échec ou d’annulation, tout cela en un seul document très bien fait), et les élèves sont assurés d’obtenir leur permis s’ils la suivent correctement. D’un autre côté, le processus est coûteux (l’inscription aux écoles de conduite coûte en général plus de 3000 francs), et vu les barrières d’entrée – ouvrir une école demande énormément de ressources et d’organisation – les écoles en place bénéficient souvent d’un quasi-monopole local, et le service qu’elles fournissent laisse beaucoup à désirer si l’on en croit la plupart des commentaires très négatifs des usagers sur le web.

 

Société bureaucratique

Dans ses qualités – excellente organisation – et ses défauts – rigidité, trop de pouvoir accordés aux personnes en position d’autorité – le processus d’apprentissage de la conduite dans l’archipel reflète donc son organisation sociale. Le Japon est très bureaucratique, et garantir l’ordre public auquel ses habitants tiennent tant signifie établir des procédures claires pour toutes les interactions entre citoyens, et entre citoyens et autorités. Basées sur une longue tradition d’administration étatique de grande qualité, ces procédures sont souvent minutieuses et bien pensées, et donc faciles à suivre.

Gare à celui qui tentera de les contourner, cependant, ou qui demandera que l’on prenne en considération une situation spéciale ou imprévue. Il lui sera alors très difficile d’obtenir ce qu’il désire. La gouvernance à la japonaise est une machine extrêmement bien rodée, mais qui laisse peu de place à l’improvisation. Pour les habitants de l’archipel, elle est un cocon confortable et rassurant. Elle pousse également à un conformisme que nombre de Japonais trouvent étouffant. Le classique dilemme entre sécurité et liberté à la sauce nippone, en somme.

La recette Abe pour traiter avec Donald Trump (une fiction réaliste)

Shinzo Abe est plus ou moins le seul dirigeant d’un pays développé qui soit parvenu à établir une bonne relation avec Donald Trump. J’ai pu obtenir un mémo écrit à l’intention de ses homologues européens pour leur donner quelques conseils en vue de séduire le président américain. Voici donc la recette Abe, cynique et amorale mais efficace, pour faire face à l’homme qui menace de détruire l’ordre international.

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Chères et chers collègues,

 

J’ai remarqué que vous aviez quelques difficultés à traiter avec le nouvel occupant de la Maison Blanche. Cela n’a rien d’étonnant, bien sûr, vu sa personnalité difficile et son mépris pour l’engagement avec les partenaires et alliés traditionnels de son pays. Et pourtant, je crois pouvoir me vanter d’avoir évité des retombées trop négatives pour le Japon. Je suis donc prêt à vous offrir quelques conseils pour gérer le « risque Trump ». Gardez en tête les points suivants, et vous aussi pourrez obtenir la confiance d’un homme capricieux (même s’il vous faudra pour cela avaler quelques couleuvres).

 

  1. Etablissez une relation personnelle

Il est de notoriété publique que Donald trouve la présidence américaine moins facile et plaisante qu’il le pensait. Vous avez donc tout intérêt à le sortir du cadre officiel et des contraintes protocolaires qui l’embêtent tant. Rendez-lui visite dans l’une de ses nombreuses propriétés, où il se sent tellement mieux qu’à la Maison Blanche. Allez faire quelques parties de golf – cela lui plait visiblement plus que ses fonctions publiques. Donald veut des gens avec qui il se sent à l’aise, pas des interlocuteurs exigeants. Plus il vous considérera comme un ami, plus vous limiterez les dégâts qu’il infligera aux intérêts de votre pays (Donald ne parle par exemple plus beaucoup du déficit commercial de son pays face au mien).

 

  1. Démontrez votre solidarité

Donald se sent persécuté par ses ennemis au sein de l’establishment. Dans vos conversations personnelles, plaignez-vous également de la façon dont la presse vous traite. Vous trouverez une oreille très réceptive. Mais ce n’est pas tout. Votre objectif est de le convaincre que vous partagez sa volonté de « rendre sa grandeur à l’Amérique ». Lors de la visite récente de Donald au Japon, je l’ai emmené manger des hamburgers de viande américaine et vanté ses mérites (le bœuf japonais est en réalité infiniment supérieur, mais nous n’en faisons pas souvent de la viande hachée). J’ai même fait préparer des casquettes reprenant son slogan de campagne au profit de l’alliance entre nos deux pays (voir l’image ci-dessus).

 

  1. Mettez en avant votre contribution à la prospérité américaine

Dans le même ordre d’idée, toute promesse d’investissements aux Etats-Unis sera très bien reçue. Soulignez que vos compagnies produisent sur territoire américain. Renseignez-vous auprès de vos chefs d’entreprise pour tout projet en cours, que vous pourrez rassembler en un programme d’investissement à gros chiffre. Le but est de lui fournir la matière d’un tweet d’auto-congratulation. Donald vous sera reconnaissant de toute « victoire » que vous lui offrirez.

 

  1. Soyez généreux dans vos louanges

L’égo de Donald est surdimensionné, comme chacun le sait. Louer ses aptitudes de businessman et ses victoires politiques est donc la façon la plus directe et facile de gagner son affection. Certes, offrir des compliments à un homme dont vos citoyens ont probablement une très piètre opinion peut être délicat. Il est cependant facile de faire savoir à la presse de votre pays que vous ne faites qu’agir tactiquement. Cette information ne lui parviendra probablement pas, et, même si c’est le cas, il vous sera facile de le convaincre que ce ne sont que des fake news.

 

  1. Evitez de le critiquer publiquement

Quelles que soient les doutes que vous exprimez face à ses politiques en privé, essayez de ne pas faire de même en public. Donald est notoirement sensible à la critique et ne peut s’empêcher de contre-attaquer. Bien qu’il offre une cible facile et presque constante, il vous faut donc mettre à l’épreuve vos talents de politicien et abuser de la langue de bois. Exprimez regrets et espoir d’un changement de cours, certes, mais n’utilisez pas des mots trop négatifs. Evitez de commenter les développements intérieurs aux Etats-Unis, même s’ils vous horrifient. Soulignez plutôt les terrains d’entente et là ou vous approuvez ses actions. Si vous pouvez exprimer votre soutien dans un journal américain, encore mieux. Cela atteindra bien plus facilement ses oreilles.

 

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Ces recommandations vous sembleront peut-être cyniques et même avilissantes. Je comprends parfaitement votre réticence à chercher l’amitié avec un homme qui ne partage pas nos valeurs et qui méprise tout ce que ses prédécesseurs ont réalisé avec nos pays. Pourquoi, me direz-vous, rester stoïque et souriant face à un mépris affiché pour tout ce qui n’est pas américain ? La réponse est simple : tant que Donald occupera la maison blanche, nous devons viser le contrôle des dommages qu’il inflige aux intérêts de nos pays et à la stabilité internationale.

Cela implique de passer sous silence des moments douloureux, comme lorsque Donald s’est permis, sur sol japonais, de faire allusion triomphalement au bombardement atomique qui a mis fin à la guerre du Pacifique. Cela implique également de s’adapter à des décisions terriblement dommageables comme le retrait américain de l’accord de partenariat transpacifique, conclu après de longues et rudes négociations et vital pour l’avenir économique de l’Asie-pacifique. Nous sommes cependant en situation de crise, et cela nous demande à tous des sacrifices.

Le Japon tiré du lit par la Corée du Nord

Le test d’arme atomique effectué par la Corée du Nord le 3 septembre a (littéralement) secoué la région et suscité l’inquiétude du monde entier. Pour les Japonais cependant, le plus grand choc de ces dernières semaines fut plutôt le missile que le régime nord-coréen a envoyé au-dessus du nord de l’archipel quelques jours auparavant.

Un réveil peu plaisant

Il était 6h du matin, un jour de semaine comme les autres, lorsque les habitants de tout le nord du Japon (soit une population de près de 15 millions de personnes), pour la plupart encore en train de dormir ou de se préparer pour la journée, sont tirés du sommeil ou de leur routine par une alarme retentissante venant de leur téléphone et des haut-parleurs publics.

Le premier réflexe de beaucoup est de craindre un grand tremblement de terre et peut-être un tsunami, mais il n’en est rien, car le message d’urgence affiché sur tous les téléphones est celui qui figure en tête de ce billet. Il mérite d’être traduit intégralement : « Lancement de missile. Lancement de missile. Un missile a été lancé de la Corée du Nord. Veuillez vous réfugier dans un bâtiment solide ou en sous-sol. » A ce moment, le missile est dans les airs, et se dirige vers le Japon. Jusque dans la capitale plus de 300 kilomètres au sud, des annonces retentissent dans les gares.

Vite passer outre

On sait ce qu’il est advenu du missile : après avoir survolé une partie de l’Hokkaido, l’île septentrionale de l’archipel nippon, il s’est écrasé à plus de 1000 kilomètres des côtes. Les Japonais sont vite retournés à leur quotidien et le test nucléaire qui a suivi de près n’a pas réellement réussi à les détourner de leur vraie préoccupation du moment : le fait que la princesse Mako se marie avec un roturier, et quitte par cet acte même la maison impériale (la loi impériale japonaise n’étant pas très clémente pour les droits de la femme).

En d’autres termes, malgré une frayeur réelle et fort compréhensible sur le moment, la population nippone fait preuve d’un flegmatisme certain face au survol du missile comme à la menace nord-coréenne en général. Il faut savoir que ce n’est pas la première fois qu’un missile survole l’archipel. Cela s’est déjà produit en 1998, et encore trois fois depuis (avec un avertissement préalable de la Corée du Nord dans ces trois cas). En bref, même si la capacité de créer des incidents internationaux du régime nord-coréen s’est rapidement développée ces dernières années, sa volonté d’agir comme fauteur de trouble ne date pas d’hier, et les Japonais s’y sont habitués.

Les réactions des citoyens au micro des médias ou sur les réseaux sociaux sont révélatrices. Certes, la Corée du Nord fait peur, mais la vie continue. Il faut calmer la situation (cela s’applique aussi à M. Trump). Et avant tout une touche d’humour noir : C’est bien beau de nous demander de fuir les missiles, mais fuir où ?!

Préparer la population

Au vu de cette réaction désabusée des citoyens, la question se pose donc : était-il vraiment judicieux pour le gouvernement d’activer le système d’alerte générale développé pour la prévention des séismes et d’effrayer profondément une partie non négligeable de la population alors que, malgré les errements de Kim Jong Un, rien ne pouvait laisser penser que le lancement du missile par Pyongyang était une attaque contre le Japon ? Il ne faut bien entendu pas nier le sérieux de la situation. Les actions de la Corée du Nord sont hostiles, et représentent une menace claire pour le Japon. Mais pourquoi, dans cette situation précise, le gouvernement a-t-il choisi une réponse si radicale ? La réponse est un mélange d’objectifs de sécurité nationale et de bénéfices politiques pour le gouvernement conservateur de Shinzo Abe.

Premièrement, une partie des élites japonaises s’est longtemps souciée du manque de préparation de la population du pays en cas de vraie crise internationale dans une région volatile et remplie d’incertitudes (Corée du Nord, montée de la Chine, Taiwan, …). Elle craint que l’engourdissement des Japonais dans leur vie paisible ne devienne un problème en cas de crise. Il serait facile de rétorquer que le fait de vivre dans un pays hautement vulnérable aux catastrophes naturelles a suffisamment préparé les Japonais à l’adversité, comme le montre la réponse populaire admirable au séisme et tsunami de mars 2011, mais, dans tous les cas, déclencher le système d’alerte générale pouvait être vu comme une occasion utile de le tester, tout simplement, et de pousser (violemment) les habitants de l’archipel à se souvenir que leur voisinage est turbulent et dangereux.

Bénéfices politiques

Le narratif d’un Japon sous la menace convient également très bien à M. Abe et à son gouvernement. Celui-ci a récemment été chahuté par une succession de scandales et par une défaite électorale cinglante à Tokyo, donnant lieu à une chute sévère dans les sondages, suivie d’un remaniement de cabinet (qui semble avoir été bien reçu par le public). Dans ces moments délicats, tout politicien le sait, rien de mieux qu’une crise de politique étrangère permettant au gouvernement d’apparaître fort et déterminé pour rallier la population.

Il faut dire que le régime nord-coréen présente en ce sens la menace parfaite. Voilà une situation d’urgence indubitable permettant à M. Abe de justifier le renforcement des capacités et des pouvoirs légaux des Forces japonaises d’autodéfense, un projet de longue date. De plus, à l’heure où le président des Etats-Unis se dispute avec son homologue sud-coréen plutôt que de promettre son soutien comme on l’attendrait de lui et critique la Chine pour son inaction face aux méfaits du Nord, la relation cordiale que le Premier Ministre japonais a réussi seul à maintenir avec M. Trump lui permet de se poser en homme indispensable de la situation. Le gouvernement japonais avait donc toutes les raisons d’encore dramatiser un test de missile déjà bien préoccupant.

La politique japonaise chamboulée ?

Jusqu’à récemment, Shinzo Abe, le Premier Ministre japonais, semblait invulnérable. Il domine la politique du pays depuis le début de sa seconde administration en 2012 (la première, en 2007, c’était terminée dans l’ignominie) et ni le scandale occasionnel ni les controverses politiques autour des mesures impopulaires comme l’introduction du droit à l’auto-défense collective n’avaient réussi à endommager sérieusement et durablement son soutien populaire. Il semble cependant que sa bonne fortune l’ait finalement abandonné.

 

Le scandale de trop ?

La première profonde blessure est le dernier scandale en date, concernant la création par un ami du Premier Ministre d’une nouvelle école de vétérinaires. Faisant face à un surplus de pratiquants dans la profession, le gouvernement avait en effet interdit l’ouverture de tout nouveau programme d’enseignement. L’ami de M. Abe avait donc visiblement bénéficié d’appuis en haut lieu pour échapper à ce moratoire et le Premier Ministre lui-même a été pointé du doigt par un ex-bureaucrate.

Le gouvernement a tenté de répondre de sa façon habituelle – « circulez, il n’y a rien à voir » – mais les journaux et les partis d’opposition n’ont pas lâché l’affaire et M. Abe n’a pas réussi à éviter les accusations de favoritisme et de copinage. Le scandale, ainsi que le passage récent d’une loi de prévention anti-terrorisme jugée par beaucoup comme trop draconienne et floue dans les nouveaux pouvoirs qu’elle accorde au gouvernement, ont entraîné une chute dans le soutien au cabinet du Premier Ministre de 10% ou plus dans les derniers sondages.

 

La révolution à Tokyo

Ces problèmes ne sont cependant rien face au plus grand défi auquel M. Abe et son parti, le Parti Libéral-démocrate (PLD), font face, à savoir le mouvement lancé par la gouverneure de Tokyo Yuriko Koike (en photo ci-dessus célébrant la récente victoire électorale de son parti). Celle-ci était en réalité un membre du PLD avant qu’elle ne décide de se porter candidate à la mairie de la capitale sans le consentement de sa section locale. Sa plateforme : mettre fin à l’immobilisme et au manque de transparence de l’administration municipale, combattre le copinage entre politiciens et chefs d’entreprises, ainsi que le manque de transparence dans l’assemblée municipale (dominée par le PLD), et créer un gouvernement plus proche des citoyens.

 

Si ce programme semble familier, c’est qu’il évoque en partie celui des mouvements populistes occidentaux et en partie celui de « la République en marche » d’Emmanuel Macron. Mme Koike promet en effet de balayer une classe politique qu’elle décrit comme ossifiée et égoïste et de se battre pour les citoyens ordinaires, mais est plutôt libérale économiquement et n’adopte pas de rhétorique anti-immigrants, se disant représentante de tous les Tokyoïtes sans distinction. Elle est également, tout comme les figures de proue de ces mouvements, charismatique, capable de sentir dans quel sens va l’opinion publique et très habile dans son utilisation des médias.

A l’opposé des déconvenues récentes des populistes européens, cependant, elle a connu un succès impressionnant après sa victoire dans la course à la mairie, gardant le soutien de la grande majorité des Tokyoïtes grâce à des mesures populaires tels que ses efforts pour réduire les coûts des Jeux Olympiques de 2020, le délai du déplacement du marché au poisson de Tsukiji pour des raisons sanitaires, ou une initiative visant à améliorer l’équilibre entre travail et vie privée des employés de l’administration.

 

Après le triomphe électoral ?

Ces succès ont culminé ce week-end en une éclatante victoire aux élections législatives de la ville. Le nouveau parti politique de Mme Koike, « les habitants de Tokyo d’abord », formé il y a un mois seulement et composé principalement de novices et de transfuges, est devenu le plus le plus grand parti dans l’assemblée métropolitaine. Il a délogé le PLD, qui a perdu plus de la moitié de ses sièges, et formé une alliance avec le Komeito – allié de longue date du PLD au niveau national – offrant à Mme Koike une confortable majorité. Qui plus est, cette majorité se repose sur un taux de participation qui a augmenté de presque dix points par rapport aux dernières élections, en atteignant 51%.

 

Tous s’interrogent maintenant sur les conséquences de ce grand chamboulement pour la politique nationale. Dans l’immédiat, ces conséquences seront probablement négligeables. La défaite cinglante du PLD suscite bien entendu beaucoup d’introspection et de récriminations mutuelles au sein du parti, mais le cabinet de M. Abe ne changera probablement pas son agenda pour si peu. C’est cependant un nouveau cou dur pour lui, surtout que le scandale mentionné plus haut est l’objet d’une attention renouvelée maintenant que son parti montre des signes de faiblesse. A plus long terme, l’émergence d’une nouvelle force politique à Tokyo aura un impact non négligeable.

Mme Koike a probablement des ambitions nationales pour son nouveau parti, même si elle se concentrera elle-même sur l’administration de Tokyo au moins jusqu’à la tenue des Jeux Olympiques. Malgré ce répit temporaire, les calculs des autres partis sont devenus plus compliqués. Tokyo est désormais comme Osaka, la seconde plus grande ville du Japon, entre les mains d’un mouvement local, ce qui diminue considérablement les chances de ces partis d’obtenir des sièges au Parlement nationale comme aux assemblées locales dans les deux régions les plus peuplées du pays. Il est trop tôt pour prédire à quel point la carte électorale sera transformée lors des prochaines élections nationales (avant la fin de l’année prochaine), mais une chose est sûre : le pouvoir du gouvernement central, traditionnellement très fort dans l’archipel, se retrouve diminué au profit des autorités régionales.

« Heureusement que c’était le Tohoku ! »

Tout a commencé, fin avril, avec une allocution maladroite de Masahiro Namamura, alors Ministre de la Reconstruction. S’adressant à des membres de son parti, celui-ci avait affirmé au sujet du grand tremblement de terre de mars 2011 que le Japon avait encore été chanceux que la catastrophe aie touché la région du Tohoku (le nord-est du pays) et non les environs de la capitale, où les dégâts auraient été beaucoup plus importants.

On peut comprendre son raisonnement, mais ces paroles montraient très peu d’égards aux habitants du Tohoku, que M. Namamura semblait prêt à sacrifier simplement parce que leur région est moins peuplée et moins développée économiquement. La réaction ne s’est pas fait attendre. Le Premier Ministre, Shinzo Abe, qui s’exprimait directement après M. Namamura, a immédiatement condamné les remarques inappropriées de ce dernier et a offert ses excuses. M. Namamura a présenté sa démission le jour suivant.

 

Le pouvoir de Twitter

Ce n’était cependant pas la fin de l’affaire. Des utilisateurs de Twitter ont vite récupéré la formule « heureusement que c’était le Tohoku » dans un but plus positif, l’apposant à des images célébrant la région, ses sites culturels, sa beauté naturelle et sa nourriture délicieuse (l’image ci-dessus est un exemple utilisant une statue de Date Masamune, personnage historique célèbre, dans la ville de Sendai capitale du Tohoku). Le hashtag a vite pris et reste très populaire, apposé à toute sorte de tweets évoquant des bonnes expériences liées à la région.

Une bourde d’un politicien a donc été transformée en célébration du Tohoku par le pouvoir de l’internet. Ses habitants ne pouvaient que s’en réjouir, d’autant plus qu’ils se sont souvent sentis négligés suite à la catastrophe de mars 2011.

 

Sentiment d’abandon

Après le grand mouvement initial de solidarité nationale, le reste du pays est en effet vite retourné à ses propres affaires. C’est particulièrement vrai pour l’ouest de l’archipel (d’où vient M. Namamura), pour lequel le Tohoku est bien lointain et qui s’est plusieurs fois retrouvé opposé à l’est dans les luttes politiques du passé. Quoi qu’il en soit, les communautés affectées par le tsunami et par la catastrophe nucléaire de Fukushima ont du s’atteler seules à la tâche de reconstruire leur vie tant bien que mal.

 Le gouvernement national a investi beaucoup d’argent dans la reconstruction mais ses efforts ont été entravés par une direction instable (M. Namamura était le sixième Ministre de la Reconstruction en six ans), un manque de consultation avec les communautés locales et un excès de projets d’infrastructures grandioses mais peu utiles (comme une nouvelle « route de la renaissance » aujourd’hui peu fréquentée). Le traitement des personnes évacuées suite à l’accident de Fukushima a aussi beaucoup laissé à désirer.

 

Campagne publicitaire bienvenue

Un autre problème est que le Tohoku, déjà moins populaire parmi les touristes que les régions plus connues autour de Tokyo, de Kyoto ou d’Hiroshima, a eu de la peine à attirer les visiteurs après mars 2011. Pour les touristes étrangers, cela est en partie dû à l’association fausse de tout le nord-est du Japon avec la catastrophe nucléaire de Fukushima, alors qu’en réalité seule une partie de la province en question a été affectée.

Le mouvement spontané de célébration des attraits du Tohoku sur internet ne peut qu’être bénéfique de ce point de vue en rappelant aux Japonais (et espérons-le aux touristes étrangers) que la région est magnifique et accueillante. Pour ma part, je m’y rends souvent et peut attester de tous ses charmes.

Le Japon à nouveau face à la menace nord-coréenne

La Corée du Nord fait une fois de plus la une des journaux ces dernières semaines suite aux multiples essais de lancement de missiles balistiques que le régime de Kim Jong Un a récemment effectués avec plus ou moins de succès et à la guerre des mots de plus en plus intense entre Pyongyang et Washington. Le Japon, sous la menace directe des missiles nord coréens est bien entendu concerné au premier chef.

J’avais déjà publié en septembre dernier, lors d’un précédent épisode de tensions suite à un test nucléaire, un billet sur la réaction des citoyens de l’archipel face à cette menace ; les sentiments de la population nippone ont peu changé depuis : il règne aujourd’hui encore un sentiment de résignation face à un voisin capricieux et déraisonnable, et la menace nord-coréenne justifie les efforts du gouvernement japonais pour renforcer ses capacités de défense.

 

L’allié modèle

Le grand changement, depuis septembre dernier, est bien sûr la transition de la présidence de Barack Obama à celle de Donald Trump. Ce dernier a été critiqué pour sa rhétorique belliqueuse qui contribue à la montée des tensions, et pour s’être ensuite couvert de ridicule en annonçant de façon prématurée le déploiement d’un groupe naval de combat au large de la péninsule coréenne, alors que les vaisseaux en question étaient encore en mission à l’autre bout du continent.

Le Japon officiel ne s’est cependant pas joint aux critiques. Au contraire, Tokyo continue de suivre la politique choisie après le choc de l’élection de Donald Trump, à savoir se comporter en allié modèle et redoubler son engagement avec la nouvelle administration dans l’espoir d’éviter les potentielles retombées négatives du protectionnisme et du nationalisme affichés du président américain. Le bon contact lié par Shinzo Abe, le premier ministre japonais, avec ce dernier a semble-t-il contribué à éviter toute tension entre Tokyo et Washington (aidé en cela par les pragmatiques choisis par M. Trump pour s’occuper de la sécurité nationale) et l’alliance entre les deux pays est aujourd’hui plus solide que jamais.

 

Dans la crise coréenne actuelle, donc, le gouvernement japonais est pour le moment resté plutôt silencieux, déclarant simplement qu’il était en coordination étroite avec son allié et qu’il avait demandé à être consulté avant que le Pentagone ne lance une quelconque opération. Le Japon a également profité de l’arrivée du groupe naval de combat mentionné plus haut pour invoquer pour la première fois le droit à l’auto-défense collective, établi après une grande controverse il y a bientôt deux ans, et envoyer quelques vaisseaux assister les Américains.

 

Un sentiment de menace réelle

La politique agressive de la nouvelle administration américaine reçoit également le soutien d’une (relativement faible) majorité de la population japonaise selon des sondages récents. Cela n’est pas surprenant puisque les mêmes sondages montrent que plus de 90% des habitants de l’archipel se sentent menacés par les actions du régime de Pyongyang. La menace est telle qu’une partie du public est même prête à envisager l’acquisition, par le Japon, de moyens permettant de lancer une attaque préventive contre les installations militaires nord-coréennes – ce qui aurait été impensable il y a dix ans encore. L’inquiétude à l’égard de la belligérance du royaume ermite est donc bien réelle.

La plupart des Japonais préfèrent cependant encore la voie diplomatique pour tenter de résoudre la question nord-coréenne, et seulement 21% sont favorables à plus de pression militaire. Tout comme leurs voisins sud-coréens, encore plus exposés à la menace du nord, les habitants de l’archipel seraient donc certainement opposés à une attaque initiée par les Etats-Unis. Les risques de représailles que pourraient lancer Pyongyang contre les alliés de Washington font en effet froid dans le dos.

 

Cela n’empêche pourtant pas la vie de continuer de suivre son cours comme si de rien n’était dans l’archipel. La Corée du Nord fait certes souvent la une des nouvelles, et toute mention du sujet suscite une expression mélangeant inquiétude, exaspération, résignation et lassitude. Cependant, après plus de vingt ans d’un problème nucléaire nord-coréen que personne ne semble savoir résoudre mais qui ne s’est encore jamais transformé en crise aigüe, les habitants de la région ont appris à “vivre avec” et à ne pas laisser la question les déranger outre mesure. Pour les paisibles Japonais, les déclarations guerrières grand-guignolesques de Pyongyang pourraient tout autant venir d’une autre planète.

Boires et déboires des nationalistes japonais

Les tendances nationalistes d’une partie de la classe politique japonaise – surtout au sein du parti dominant, le Parti libéral-démocrate (PLD) – sont bien connues. Un scandale qui fascine le Japon depuis plusieurs semaines met en lumière ces tendances, mais également les obstacles auxquels font face les politiciens qui tentent de transformer leurs idées en politiques publiques.

 

Le jardin d’enfant militariste

Le scandale en question tourne autour d’une organisation privée dédiée à l’éducation, Moritomo Gakuen, aux idées extrêmement traditionalistes et révisionnistes. Le Asahi Shimbun, le grand journal de centre-gauche japonais, avait révélé début février que Moritomo avait obtenu à prix extrêmement bas un terrain dans la ville d’Osaka pour y construire une école primaire.

L’organisation compte y propager une idéologie rétrograde déjà en évidence dans un jardin d’enfants sous sa direction. Des vidéos ont révélé des jeunes enfants entraînés à se comporter comme des petits soldats, à réciter des textes d’avant-guerre et à jurer allégeance à l’empereur, tandis que l’administration de l’établissement est accusée d’utiliser des termes dénigrants envers les Chinois et les Coréens dans sa correspondance avec les parents.

 

Jusqu’au sommet du gouvernement

On peut déjà se demander comment de telles pratiques ont été jusqu’à présent possibles sans réaction de l’administration publique – ce qui n’est peut-être pas étonnant lorsque l’on sait que le Ministère de l’éducation lui-même compte en son sein nombre d’idéologues révisionnistes. Plus grave encore, Moritomo s’est révélé être directement relié au Premier Ministre, Shinzo Abe, et à ses proches.

La femme du Premier Ministre a en effet été nommée « directrice honoraire » du jardin d’enfants (elle dit que sa main avait été forcée) et y a donné un discours en septembre 2015. La ministre de la défense, Tomomi Inada, a également été en correspondance avec l’organisation et a même servi d’avocate pour elle il y a plus de dix ans – un fait qu’elle avait initialement omis (oublié dit-elle) de divulguer lors d’une déposition au Parlement. Quant au Premier Ministre lui-même, il se trouve impliqué personnellement par le fait que Moritomo comptait nommer la nouvelle école primaire en son honneur et par les accusations du directeur de l’organisation, Yasunori Kagoike, qui prétend que M. Abe lui a fait un don, ce que conteste vivement l’intéressé.

 

Ambitions frustrées

Rien ne prouve à ce jour que le Premier Ministre ait été directement impliqué dans la vente douteuse du terrain pour l’école primaire, et il a promis de démissionner si une telle preuve était découverte. Les liens existants entre Moritomo et les hauts échelons du pouvoir n’en restent pas moins frappants. Cela n’a en réalité rien de surprenant : M. Abe, Mme Inada et M. Kagoike (ainsi qu’une bonne partie de la délégation parlementaire du PLD) sont tous membres de Nippon Kaigi, une association nationaliste qui fait de plus en plus parler d’elle.

Ces liens n’ont cependant pas empêché MM. Abe et Kagoike de se disputer publiquement et on doute qu’ils renouent désormais leur partenariat quel qu’il fut. Toutes les personnes impliquées dans le scandale ont déjà payé un prix fort : la supervision des activités de Moritomo est en cours de révision, de même que la vente du terrain, et les inscriptions pour la nouvelle école primaire sont en chute libre. Quant au Premier Ministre, il a vu son taux d’approbation chuter fortement, une rare blessure pour un homme qui domine totalement le paysage politique japonais.

 

L’affaire a donc également révélé les résistances auxquelles font face ceux qui désireraient réhabiliter les idées néfastes d’une époque révolue. Le public japonais proteste dès que leurs activités sont mises à jour, et leur base de soutien est certes politiquement puissante, mais finalement très étroite. Malgré les controverses qu’ils causent régulièrement, on peut donc fortement douter que les révisionnistes japonais parviennent de sitôt à refaçonner le pays à leur goût.