Plaidoyer en faveur du congé paternité de deux semaines, un minimum !

Le 27 septembre 2020, le peuple aura à voter la question de savoir s’il accepte ou non que les pères puissent bénéficier d’un congé paternité payé de deux semaines à prendre dans les six mois suivant la naissance de leur enfant.

En tant que maman de trois enfants de 6 ans, 3 ans et 2 mois, il m’est important aujourd’hui de trouver le temps de rédiger cet article pour vous dire de voter un grand OUI en faveur du congé paternité.

Bien-sûr, il n’est pas simple pour l’employeur de s’organiser afin de permettre une absence de deux semaines de la part d’un père; évidemment, cela coûte de l’argent à la société. Cela étant, il s’agit d’un minimum pour, d’une part, favoriser le bien-être d’une famille, d’un bébé qui vient de naître, d’une maman qui a déjà dû faire preuve d’une grande adaptation entre la grossesse et la naissance de cet enfant et, d’autre part, rétablir un semblant d’égalité entre hommes et femmes.

La redéfinition de l’équilibre professionnel/familial par le couple 

L’instauration du congé paternité est un premier pas vers l’égalité hommes-femmes dans le monde du travail.

Aujourd’hui, la plupart des femmes actives réduisent leur taux d’activité à la suite de la naissance de leur enfant, ce qui a un impact négatif sur leur carrière professionnelle et les prétérite déjà à l’embauche, avant même qu’elles ne soient maman pour la première fois. En effet, l’employeur doit faire face au risque d’une absence durant la grossesse et le congé maternité, de même que d’une réduction ultérieure du taux de travail, pire d’une cessation des rapports de travail faute d’accord trouvé suite à la reprise du travail par la mère (taux d’activité/modalités d’exercice).

Or, la majorité des femmes en Suisse travaillent à temps partiel.

Pourquoi? Car ce choix s’impose naturellement/biologiquement et légalement à elles.

Pour l’heure, entre la grossesse et le congé maternité, les femmes sont les seules à prodiguer les premiers soins et à s’occuper quotidiennement du bébé, alors que les hommes sont contraints de se rendre au travail. C’est alors la maman qui apprend à connaître le quotidien de l’enfant et c’est ainsi naturellement que le couple parental décide que c’est elle qui réduira son taux d’activité pour l’avenir.

Ce modèle de famille est à mon sens imposé aux femmes, biologiquement et légalement, et trouve sa source en raison de l’absence de partage du temps entre les deux parents suite à la naissance d’un enfant.

Permettre à un père de s’impliquer davantage dès la naissance aboutira peut-être à une redéfinition des rôles au sein de la famille lors de la reprise du travail.

Est-ce que deux semaines de congé paternité suffiront pour rétablir cette inégalité? Si la réponse semble évidemment non, là n’est pas la question soumise à votation et il est préférable (au minimum! déjà!) d’accepter deux semaines de congé paternité plutôt que de rester dans ce statu quo archaïque.

Le (r)établissement d’une cohérence entre le système judiciaire et la réalité : la garde alternée 

En droit suisse, la loi impose au Juge, en cas de divorce ou de séparation, d’examiner la possibilité d’instaurer une garde alternée sur les enfants. Quant à la pratique des Tribunaux, la garde partagée est un mode de garde régulièrement décidé lorsque l’un des parents ou l’enfant le demandent, pour autant que cela soit conforme à l’intérêt de ce dernier.

Or, aujourd’hui, je me retrouve régulièrement face à des femmes qui ne comprennent pas pour quelles raisons la garde alternée leur est imposée, alors qu’elles ont donné naissance à cet enfant, qu’elles ont cessé toute activité durant le congé maternité et ont décidé de baisser leur taux d’activité à sa naissance faisant fi de leur carrière professionnelle.

Je me retrouve également régulièrement face à des hommes qui, au moment de la séparation, souhaitent continuer de s’impliquer dans la vie de leur enfant malgré celle-ci et ne comprennent pas pour quelles raisons la garde de leur enfant est attribué à la mère, avec un seul droit de visite .

Ce chaos pourrait à mon sens être évité si les deux parents avaient la chance de pouvoir s’impliquer à parts égales dans la vie de l’enfant dès sa naissance. Deux semaines sont insuffisantes pour rétablir cette égalité. Il s’agit toutefois d’un premier pas, d’une occasion à ne pas manquer, raison pour laquelle un Oui doit être voté le 27 septembre.

Un petit pas pour l’homme, un grand pas pour le futur de notre société 

Deux semaines sont clairement insuffisantes à mon sens.

Seul un véritable congé parental à se répartir entre les deux parents permettrait selon moi de redéfinir les rôles des pères et mères tant dans le cadre familial que professionnel et de respecter ainsi l’égalité hommes-femmes.

La votation du 27 septembre est toutefois un premier petit pas permettant de garder espoir pour le futur.

Et vous, qu’en pensez-vous?

 

Anaïs Brodard, maman de trois enfants, avocate associée

https://mediation-avocate-lausanne.ch

 

 

Anais Brodard

Anaïs Brodard est avocate de droit de la famille (divorce/séparation) à Lausanne. Elle est également médiatrice FSA et formée au droit collaboratif. Associée au sein de l'étude Brodard Avocats SA, elle est principalement active dans le droit de la famille, domaine dans lequel elle exerce tant comme avocate, que comme médiatrice reconnue par la Fédération Suisse des Avocats et assermentée par le Tribunal cantonal. A ce titre, elle est régulièrement appelée par les Tribunaux.

Une réponse à “Plaidoyer en faveur du congé paternité de deux semaines, un minimum !

  1. Dimanche dernier, je venais de déposer mon fils dans sa résidence principale, soit le lieu qu’il occupera en semaine pour suivre son cursus universitaire. En écoutant la radio, j’entendais un scientifique parler d’une nouvelle découverte: les 1000 premiers jours après la conception sont déterminants pour le développement affectif et intellectuel de l’enfant. Ce pourrait-il que mon intelligence émotionnelle ait dépassé de beaucoup la recherche scientifique? J’ai en mémoire nos premiers jeux lorsqu’il était encore dans le ventre de sa mère. J’appuyais un doigt puis le déplaçait. De son côté, le bébé appuyait aussi en suivant mon mouvement. Puis est venu la naissance et quelques minutes après nous nous sommes regardés. Jamais je n’avais imaginé que le regard d’un si jeune enfant puisse être aussi fort et expressif. J’y lisais la même émotion que dans le mien. Ce fût notre pacte émotionnel. Il était mon fils, j’étais son père, rien ne pourrait affaiblir ce lien. Toute histoire d’amour implique un tel pacte.
    La mère s’est révélée déficiente. Je suis donc devenu un père célibataire… mon bonheur et ma seule fierté.
    Bien sûr qu’il est nécessaire que les pères puissent établir une relation solide avec l’enfant le plus tôt possible. Quel genre de pères pour prétendre l’inverse?..

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